Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1A.67/2004
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1A.67/2004 /col

Arrêt du 2 juin 2004
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du Tribunal
fédéral, Reeb et Fonjallaz.
Greffier: M. Jomini.

Michael B.________,
recourant, représenté par Me Henri-Philippe Sambuc, avocat,

contre

Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement de la République
et canton de Genève, rue David-Dufour 5, case postale 22, 1211 Genève 8,
Tribunal administratif de la République et canton de Genève, case postale
1956, 1211 Genève 1.

constructions et installations en zone agricole, remise en état,

recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal administratif de la
République et canton de Genève du
10 février 2004.

Faits:

A.
Michael B.________ est un membre de la communauté des gens du voyage suisses.
Il est pasteur et exerce diverses activités commerciales. Il est propriétaire
de la parcelle n° 264 du registre foncier, à Céligny, dans la zone agricole.
A plusieurs reprises dès le mois de septembre 1999, le Département de
l'aménagement, de l'équipement et du logement de la République et canton de
Genève (ci-après: le département cantonal) a constaté que Michael B.________
avait procédé à des travaux sur sa parcelle, sans requérir les autorisations
de construire nécessaires. Ce dernier a progressivement aménagé des chemins
en tout-venant ainsi qu'une place pour caravanes, transformé un ancien hangar
et construit la "nouvelle église tsigane de Céligny" (constituée d'une série
de containers sur des plots) de même qu'un chalet en bois. Plusieurs
caravanes et roulottes ont été installées et Michael B.________ vit à cet
endroit avec sa famille. Le département cantonal a ordonné une remise en état
du terrain à cause de violations des normes cantonales sur l'aménagement du
territoire, la protection des cours d'eaux et les forêts. Ces mesures
administratives, fondées sur les art. 129 ss de la loi cantonale sur les
constructions et les installations diverses (LCI), ont été contestées en vain
par Michael B.________ devant le Tribunal administratif cantonal: ses recours
ont été rejetés par un arrêt rendu le 27 août 2002.
Michael B.________ a formé un recours de droit administratif contre cet
arrêt, en tant qu'il confirmait le refus d'une dérogation fondée sur les art.
24 ss LAT (RS 700) ainsi que les mesures administratives ordonnées pour la
remise en état du terrain. Le Tribunal fédéral a rejeté ce recours par un
arrêt rendu le 28 mars 2003 (arrêt 1A.205/2002, publié aux ATF 129 II 321).
Le considérant 4 de cet arrêt a la teneur suivante:
"Les délais pour exécuter les différentes mesures administratives ordonnées
par le département cantonal sont tous échus. Il appartiendra donc à cette
autorité administrative de rendre à nouveau une ou plusieurs décisions
d'exécution, en fixant des délais pour la remise en état des lieux (cf. art.
132 al. 1 LCI) et en prescrivant au besoin l'exécution par substitution (cf.
art. 133 LCI). Il conviendra alors de tenir compte de manière appropriée des
conséquences de chacune de ces mesures pour la vie privée et familiale du
recourant, en faisant le cas échéant la distinction entre les ouvrages
indispensables à cet effet et ceux qui ne sont pas directement liés à
l'habitation (containers, lampadaires, par exemple)."

B.
Le 8 mai 2003, des collaborateurs du département cantonal se sont rendus sur
place. Ils ont notamment constaté que des ouvriers d'une entreprise de
construction posaient un revêtement (goudronnage) sur une portion d'un chemin
aménagé sur la parcelle n° 264 et qu'une surface d'environ 800 m2 avait
récemment été goudronnée. Ils ont également constaté que les installations
visées par les ordres de remise en état n'avaient pas été retirées ni
démolies.
Le 11 juin 2003, le département cantonal a écrit à Michael B.________ pour
ordonner l'arrêt du chantier et la suppression de la surface récemment
goudronnée sans autorisation, dans un délai de soixante jours. Il a infligé à
ce dernier une amende administrative de 8'000 fr., pour violation de
dispositions de la loi sur les constructions et les installations diverses
(LCI) ainsi que de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement
du territoire (LALAT).
Dans le même acte, le département cantonal a constaté que les installations
litigieuses dans la procédure ayant abouti à l'arrêt du Tribunal fédéral du
28 mars 2003 (1A.205/2002) étaient toujours en place. Il a donc écrit à
l'intéressé dans les termes suivants:
"Me référant aux termes de l'arrêt du Tribunal fédéral du 28 mars 2003, il
appartient désormais au propriétaire du terrain de procéder à la suppression
de l'ensemble des constructions et installations qui ne sont pas directement
liées à l'habitation.

Par conséquent, je demande à Monsieur Michael B.________ de démolir et de
supprimer, dans un délai de 90 jours à compter de la réception de la
présente, l'église, les chemins d'accès, les lampadaires et les aménagements
réalisés autour des caravanes.

D'autre part, en ce qui concerne les constructions et installations qui sont
encore nécessaires à l'habitation, à savoir les caravanes et mobil-homes se
trouvant encore sur les lieux, celles-ci devront être évacuées, dans un délai
de 60 jours à compter de la mise à disposition par l'Etat de Genève d'un
emplacement approprié."

C.
Michael B.________ a recouru auprès du Tribunal administratif contre la
décision du département cantonal du 11 juin 2003.
Le Tribunal administratif a rejeté le recours par un arrêt rendu le 10
février 2004. Il a d'abord considéré qu'en tant que la contestation portait
sur l'ordre de démolir et de supprimer l'église, les chemins d'accès, les
lampadaires et les aménagements réalisés autour des caravanes (dans un
premier temps) puis les constructions et installations qui sont encore
nécessaires à l'habitation (dans un second temps), le recours était
irrecevable car il s'agissait de simples mesures d'exécution des décisions
prises dans la procédure administrative à laquelle l'arrêt du Tribunal
fédéral du 28 mars 2003 avait mis fin. Pour le reste, le Tribunal
administratif a considéré en substance que le goudronnage du chemin était
soumis à une autorisation de construire, que l'octroi d'une telle
autorisation était exclu en vertu du droit fédéral (art. 24 ss LAT) et que
l'ordre de démolition était conforme à la loi. En outre, le prononcé de
l'amende administrative ne violait pas le droit cantonal (cf. art. 137 LCI).

D.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, Michael B.________
demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du Tribunal administratif et de
renvoyer l'affaire à cette juridiction pour nouvelle décision. A titre
subsidiaire, il conclut à l'annulation de la décision du 11 juin 2003 du
département cantonal en tant qu'elle ordonne la suppression de la surface
récemment goudronnée ainsi que la démolition de l'église, des chemins
d'accès, des lampadaires et des aménagements réalisés autour des caravanes,
et aussi en tant qu'elle le condamne à une amende de 8'000 fr.
Le département cantonal conclut au rejet du recours, dans la mesure où il est
recevable.
Le Tribunal administratif s'en remet à justice.
L'Office fédéral du développement territorial, invité à répondre au recours,
a renoncé à déposer des observations.

E.
Par ordonnance du 23 avril 2004, le Président de la Ire Cour de droit public
a admis la demande d'effet suspensif présentée par le recourant.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le recourant demande l'annulation d'une amende administrative, fondée
exclusivement sur le droit cantonal. D'après la jurisprudence relative aux
art. 97 ss OJ - connue du recourant puisque rappelée dans l'arrêt 1P.531/2002
du 27 mars 2003, au sujet d'une amende qui lui avait été infligée pour des
travaux illicites sur la parcelle litigieuse - le recours de droit
administratif est manifestement irrecevable à cet égard, seule la voie du
recours de droit public pouvant entrer en considération. Or le recourant a
renoncé à former un tel recours contre l'arrêt du Tribunal administratif.

2.
En vertu de l'art. 101 let. c OJ, le recours de droit administratif est
également irrecevable dans la mesure où la contestation porte sur des mesures
relatives à l'exécution de décisions fondées sur le droit public fédéral. En
ordonnant au recourant, le 11 juin 2003, de "démolir et de supprimer, dans un
délai de 90 jours (...), l'église, les chemins d'accès, les lampadaires et
les aménagements réalisés autour des caravanes", le département cantonal a
manifestement pris de telles mesures d'exécution. Il en va de même, au
demeurant, de l'ordre d'évacuer les constructions et installations encore
nécessaires à l'habitation, qui doit toutefois être exécuté dans un délai
différent.

3.
Seul l'ordre de suppression de la surface récemment goudronnée peut donc être
contesté dans le cadre du recours de droit administratif. Or il est manifeste
qu'à l'instar des autres constructions et installations du "campement gitan"
(selon les termes mêmes du recourant dans la procédure 1A.205/2002), cet
aménagement ne saurait être autorisé. Il suffit de renvoyer, sur ce point,
aux considérants de l'arrêt du 28 mars 2003 (ATF 129 II 321 consid. 3 p. 325
ss). Le délai fixé pour la remise en état n'est pas critiquable, dès lors
qu'on ne saurait, à l'évidence, assimiler un tel chemin aux installations
nécessaires ou indispensables à l'habitation selon le mode de vie des gens du
voyage, pour lesquelles le département cantonal a prévu un régime particulier
en matière d'exécution. Les arguments du recourant à ce propos sont sans
pertinence.

4.
Il s'ensuit que le recours de droit administratif doit être rejeté, dans la
mesure où il est recevable, selon la procédure simplifiée de l'art. 36a al. 1
OJ.
Le recourant, qui succombe, doit supporter l'émolument judiciaire (art. 153,
153a et 156 al. 1 OJ). L'Etat de Genève n'a pas droit à des dépens (art. 159
al. 1 et 2 OJ).

Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours de droit administratif est rejeté, dans la mesure où il est
recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Il n'est pas alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au
Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement et au Tribunal
administratif de la République et canton de Genève ainsi qu'à l'Office
fédéral du développement territorial.

Lausanne, le 2 juin 2004

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: