Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1A.62/2004
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1A.62/2004/fzc

Arrêt du 2 février 2005
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Féraud, Président, Aemisegger et Fonjallaz.
Greffier: M. Parmelin.

A. ________ et B.________,
C.________ et D.________,
recourants, tous représentés par Me Thierry Thonney, avocat,

contre

X.________,
intimé, représenté par la Société rurale d'assurance
de protection juridique FRV,
Municipalité de Corcelles-sur-Chavornay,
1374 Corcelles-sur-Chavornay, représentée par
Me Benoît Bovay, avocat,
Département des infrastructures du canton de Vaud, Service de l'aménagement
du territoire,
1014 Lausanne, représenté par Me Edmond C.M. de Braun, avocat,
Tribunal administratif du canton de Vaud,
avenue Eugène-Rambert 15, 1014 Lausanne.

autorisation d'aménager une halle pour l'engraissement de 12'000 poulets en
zone agricole,

recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal administratif du
canton de Vaud du 11 février 2004.

Faits:

A.
X. ________, né en 1944, est marié et père de quatre enfants, âgés de cinq à
treize ans. Il dirige un domaine agricole d'un peu plus de 32 hectares, dont
le centre d'exploitation se trouve sur la parcelle n° 61 de la commune de
Corcelles-sur-Chavornay, en zone agricole. L'exploitation était
principalement axée sur les grandes cultures et la production laitière. La
poursuite de cette dernière activité nécessitant l'engagement de
main-d'oeuvre supplémentaire et de lourds investissements, X.________ a
décidé d'abandonner le bétail laitier au profit de l'engraissement de
poulets, après s'être assuré de la viabilité économique de l'entreprise
auprès de l'office de conseil agricole de l'Association vaudoise de promotion
des métiers de la terre (ci-après: Prométerre).
Le 14 janvier 2002, X.________ a requis l'autorisation de construire sur la
parcelle n° 61 une halle d'engraissement pour 12'000 poulets de chair, de 825
mètres carrés, flanquée d'un jardin d'hiver de 167 mètres carrés, ainsi que
trois silos pour le stockage des aliments et une citerne à gaz de 7'500
litres.
Soumis à l'enquête publique du 1er au 21 mars 2002, avec le rapport d'impact
sur l'environnement établi en décembre 2001 par Prométerre,  ce projet a
suscité de nombreuses oppositions, dont celles de A.________ et B.________
ainsi que de C.________ et D.________, propriétaires voisins de la parcelle
n° 61 (ci-après: A.________ et consorts).
En date du 14 mai 2002, le Département des infrastructures du canton de Vaud,
par l'intermédiaire du Service de l'aménagement du territoire, a rendu une
décision finale au sens des art. 17 à 21 de l'ordonnance relative à l'étude
de l'impact sur l'environnement (OEIE; RS 814.011). Dans ce cadre, ledit
service a délivré l'autorisation spéciale requise pour les constructions hors
zone à bâtir sous diverses conditions non litigieuses en l'espèce. Il a
considéré que la halle d'engraissement de poulets projetée constituait un
développement interne de l'exploitation au sens des art. 16a al. 2 de la loi
fédérale sur l'aménagement du territoire (LAT; RS 700) et 36 al. 1 de
l'ordonnance fédérale sur l'aménagement du territoire (OAT; RS 700.1) et
qu'elle était conforme à la zone agricole. Le 3 juin 2002, la Municipalité de
Corcelles-sur-Chavornay a informé les opposants qu'elle avait décidé, dans sa
séance du 25 mars 2002, de lever leurs oppositions et d'accorder le permis de
construire à X.________.

A. _______ et consorts ont recouru contre ces décisions auprès du Tribunal
administratif du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal administratif ou la
cour cantonale). Ils contestaient la conformité de la construction litigieuse
à la vocation agricole de la zone, estimant que le revenu complémentaire
obtenu grâce à l'élevage de poulets n'était pas nécessaire pour assurer la
viabilité à long terme de l'exploitation. Ils prétendaient également que le
projet aurait dû faire l'objet d'une planification spéciale en raison de son
importance et de son impact sur l'environnement.
Statuant par arrêt du 11 février 2004, le Tribunal administratif a rejeté le
recours et confirmé les décisions attaquées. Se fondant sur les budgets
d'exploitation et le plan de financement établis par Prométerre, il a admis
que la halle d'engraissement projetée servait au développement interne de
l'exploitation au sens des art. 16a al. 2 LAT et 36 OAT et qu'elle était
ainsi conforme à la zone agricole. Il a écarté les autres arguments opposés à
la réalisation de cette installation.

B.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, A.________ et
B.________, C.________ et D.________, auxquels se sont joints E.________,
F.________, G.________ et H.________ avant de se désister, demandent au
Tribunal fédéral d'annuler les décisions rendues le 3 juin 2002 par la
Municipalité de Corcelles-sur-Chavornay, la décision finale prise le 14 mai
2002 par le Département des infrastructures du canton de Vaud et
l'autorisation spéciale délivrée le même jour par le Service de l'aménagement
du territoire. Subsidiairement, ils concluent à l'annulation de l'arrêt du
Tribunal administratif du 11 février 2004 et au renvoi de la cause à cette
autorité pour nouvelle décision au sens des considérants. Ils soutiennent que
la halle d'engraissement de poulets projetée n'est pas indispensable à la
survie de l'exploitation de l'intimé, de sorte qu'elle ne pourrait être
admise en zone agricole.
Le Tribunal administratif, le Service de l'aménagement du territoire et
X.________ concluent au rejet du recours. La Municipalité de
Corcelles-sur-Chavornay s'en remet à justice. Invité à se déterminer,
l'Office fédéral du développement territorial a déclaré ne pas être en mesure
de se prononcer sur l'admissibilité de la construction litigieuse au regard
des art. 16a al. 2 LAT et 36 al. 1 OAT.
Les recourants ont répliqué.

C.
Par ordonnance du 21 avril 2004, le Président de la Ire Cour de droit public
a admis la demande d'effet suspensif présentée par les recourants.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Aux termes de l'art. 34 al. 1 LAT, le recours de droit administratif au
Tribunal fédéral est recevable contre les décisions prises par l'autorité
cantonale de dernière instance sur la reconnaissance de la conformité à
l'affectation de la zone de constructions et d'installations sises hors de la
zone à bâtir. Tel est bien l'objet de la présente contestation, les
recourants mettant en doute le fait que la halle d'engraissement de poulets
litigieuse soit nécessaire à la survie de l'exploitation agricole de
l'intimé; c'est précisément une condition du droit fédéral pour
l'autorisation de construire une telle installation en zone agricole (cf.
art. 36 al. 1 OAT en relation avec l'art. 16a al. 2 LAT).
Les recourants, en tant que propriétaires voisins de la parcelle n° 61, sont
manifestement touchés plus que quiconque par les nuisances induites par
l'installation litigieuse; ils ont qualité pour recourir selon l'art. 103
let. a OJ, sans égard au fait que les distances minimales à respecter par
rapport à la zone habitée, selon les recommandations de la Station fédérale
de recherches d'économie d'entreprise et de génie rural de Tänikon, sont
respectées (arrêt 1A.108/2004 du 17 novembre 2004 consid. 2.4). Les autres
conditions de recevabilité du recours de droit administratif sont par
ailleurs réunies, de sorte qu'il convient d'entrer en matière sur le fond.

2.
Le Tribunal fédéral applique d'office le droit fédéral sans être lié par les
motifs invoqués, mais il ne peut aller au-delà des conclusions des parties
(art. 114 al. 1 OJ). Il peut ainsi admettre le recours pour d'autres raisons
que celles invoquées par les recourants ou, au contraire, confirmer la
décision attaquée pour d'autres motifs que ceux retenus par l'autorité
cantonale de recours (ATF 130 I 312 consid. 1.2 p. 318; 130 III 707 consid.
3.1 p. 709/710). Le Tribunal fédéral est cependant lié par les faits tels
qu'ils ont été constatés par le Tribunal administratif, à moins qu'ils ne
soient manifestement inexacts ou incomplets (art. 105 al. 2 OJ).

3.
Il est constant que la halle d'engraissement de poulets litigieuse ne peut
être admise sur la base de l'art. 16a al. 1 LAT dans la mesure où il ne
s'agit pas d'une installation tributaire du sol. La conformité à
l'affectation de la zone agricole est admise non seulement pour les
constructions et installations répondant à la définition de l'art. 16a al. 1
LAT, mais également, aux termes de l'art. 16a al. 2 LAT, pour celles qui
servent au développement interne d'une exploitation agricole. Le Tribunal
administratif a admis que les conditions posées pour admettre la conformité
de la halle litigieuse à la vocation de la zone agricole au titre de
développement interne étaient réunies, ce que contestent les recourants.
Selon eux, il ne serait nullement établi que le revenu complémentaire obtenu
par l'engraissement de poulets de chair serait nécessaire pour que
l'exploitation de X.________ subsiste à long terme.

3.1 Sous l'empire de l'ancien droit, le Tribunal fédéral admettait que
l'adjonction ou l'accroissement d'une production animale indépendante du sol
puisse éventuellement être nécessaire aux besoins du développement interne de
l'exploitation agricole concernée, et que l'implantation hors de la zone à
bâtir des constructions ou installations servant à cette production soit
alors imposée par la destination de celles-ci. Chaque cas devait être examiné
d'après la nature et l'importance de la production agricole traditionnelle de
l'exploitation, de la production indépendante du sol que l'on veut
entreprendre ou développer, et des circonstances locales. Le revenu
supplémentaire à attendre de la production indépendante du sol devait
apparaître nécessaire pour assurer à long terme la survie de l'exploitation.
Afin que le sol demeure le facteur de production globalement prépondérant, ce
revenu supplémentaire ne devait pas excéder le quart ou, tout au plus, le
tiers du revenu total de l'exploitation, cette proportion plus élevée étant
admissible pour les plus petites exploitations (ATF 117 Ib 270 consid. 4b p.
281, 279 consid. 3 p. 383, 502 consid. 5a p. 505 et les références citées;
cf., arrêts du Tribunal fédéral 1A.147/1988 du 14 mars 1990, consid. 4b/bb,
paru à la ZBl 92/1991 p. 174, et 1A.67/1999 du 30 novembre 1999, consid. 4b).
Le Tribunal fédéral a ainsi admis la création en zone agricole d'une halle
d'engraissement pour 5'500 poulets de chair qui permettait de porter de
52'000 fr. à 71'250 fr. le revenu annuel d'un domaine agricole de 10,5
hectares, comportant 18 bovins et une quarantaine de porcs (ATF 117 Ib 502).
Il a également autorisé la réalisation d'une installation pour l'élevage et
l'engraissement de 60 porcs, 10 truies et 8 verrats, qui impliquait une
augmentation du revenu provenant de l'exploitation du lait de 60'000 fr. à
85'000 fr. (ATF 117 Ib 379). En revanche, il a refusé de délivrer
l'autorisation nécessaire à l'implantation d'un élevage de volaille, car le
revenu complémentaire résultant de cette activité, même limité à 30 % du
revenu total de l'exploitation, n'était pas nécessaire à la survie à long
terme de celle-ci, le requérant réalisant un revenu annuel provenant
d'activités dépendantes du sol d'environ 160'000 fr. (arrêt 1A.67/1999 du 30
novembre 1999, consid. 4). Enfin, il a laissé ouverte la question de savoir
si un revenu annuel de 122'600 fr., provenant déjà en partie d'une activité
non tributaire du sol, était suffisant pour assurer à long terme la survie de
l'exploitation (arrêt 1A.403/1996 du 6 août 1997, consid. 2).

3.2 La question est réglée aujourd'hui à l'art. 36 al. 1 OAT. En vertu de
cette disposition, une construction ou installation destinée à l'élevage ou à
la garde d'animaux de rente non tributaire du sol et qui n'est pas située
dans une zone spécialement désignée à cet effet par le canton au sens de
l'art. 16a al. 3 LAT ne peut être autorisée au titre de développement interne
que s'il est prévisible que l'exploitation ne pourra subsister à long terme
que grâce au revenu complémentaire ainsi obtenu. En d'autres termes, le
développement interne doit être indispensable au maintien de l'exploitation;
il doit également être apte à atteindre ce but. Cette aptitude ne pourra être
reconnue s'il est prévisible que l'entreprise ne pourra subsister à long
terme, même après avoir tiré parti de tout son potentiel de développement
interne. Ces questions doivent être examinées en fonction de l'évolution des
conditions-cadres de la politique agricole (Message du Conseil fédéral du 22
mai 1996 relatif à une révision partielle de la loi fédérale sur
l'aménagement du territoire, FF 1996 III 490, chiffre 112). Par ailleurs,
l'art. 36 al. 1 OAT suppose que la marge brute du secteur de production
indépendante du sol soit inférieure à celle de la production dépendante du
sol (let. a) ou que le potentiel en matières sèches de la culture végétale
représente au moins 70% des besoins en matières sèches des animaux de rente
(let. b). Dans les cas où le critère des marges brutes aboutit à un potentiel
de développement interne plus élevé que le critère des matières sèches, il
faut veiller à ce que les besoins en matières sèches soient couverts à raison
de 50% (art. 36 al. 3 OAT).

3.3 En l'occurrence, il n'est pas contesté que le critère des marges brutes
serait rempli; seule est litigieuse la question de savoir si le revenu
complémentaire retiré de l'élevage de poulets est nécessaire pour assurer la
viabilité à long terme de l'exploitation agricole de X.________. Le Tribunal
administratif a répondu par l'affirmative en se fondant sur les budgets
d'exploitation et le plan de financement établis par les offices de crédit et
de conseil agricoles de Prométerre qu'il a tenus pour probants.
Selon le budget prévisionnel établi en août 2002 par l'office de conseil
agricole de Prométerre, l'excédent brut d'exploitation pour l'année 2004 se
monterait à 68'727 fr. dans les conditions actuelles, à savoir sans la halle
d'engraissement de poulets et sans le bétail laitier, dont X.________ a
abandonné l'exploitation; à ce chiffre s'ajoutent les revenus annexes de
l'intimé et de son épouse, qui ascendent à 64'056 fr., de sorte que le revenu
annuel total s'élèverait à 132'783 fr. De cette somme, l'expert a retranché
un montant de 19'100 fr. à titre de provision pour le renouvellement du parc
des machines et un montant de 68'700 fr., destiné à couvrir les besoins de la
famille X.________, les impôts et les charges sociales, le solde disponible
devant servir à payer les annuités des dettes existantes, à hauteur de 50'793
fr. Il en résulterait ainsi une perte annuelle de 5'810 fr.
D'après l'Office fédéral du développement territorial, des explications
supplémentaires auraient dû être requises de l'expert à propos du montant
estimé pour la consommation familiale dans la mesure où il est inférieur de
13'400 fr. à celui retenu dans la situation qui prévalait en 2001 et dans
celle prévisible en cas de construction de la halle d'engraissement. Or,
cette différence n'est pas la conséquence d'une estimation moins importante
des besoins de la famille, mais s'explique par le revenu inférieur qui
prévaut dans la situation actuelle et qui sert de base au calcul des charges
sociales et des impôts, de sorte que le renvoi de la cause pour un examen
détaillé de ce chiffre ne s'impose pas.
L'office de conseil agricole de Prométerre a estimé les besoins de la famille
X.________, composée de deux adultes et quatre enfants en âge de scolarité, à
60'000 fr. auxquels il a ajouté les impôts et les charges sociales estimés à
8'700 fr. dans l'hypothèse d'une exploitation sans bétail laitier et sans
poulailler. Ce montant (68'700 fr.) correspond, en chiffre rond, à une
consommation moyenne de 15'600 fr. par unité de consommation, étant précisé
d'une part qu'une telle unité correspond à toute personne de 16 ans et plus
participant l'année entière à la consommation familiale, les enfants plus
jeunes faisant l'objet de facteurs de réduction, et d'autre part que la
famille X.________ représente 4,4 unités de consommation. Suivant les
résultats des données comptables des exploitations-témoins en région de
plaine publiés par la Station fédérale de recherches en économie d'entreprise
et en génie rural de Tänikon pour l'année 2002, la consommation moyenne d'une
famille paysanne composée de 2,5 à 5 unités de consommation pour une
exploitation de plaine était de 16'895 fr. par unité pour un revenu situé
entre 40'000 et 60'000 fr. et de 17'747 fr. par unité pour un revenu total
supérieur à 60'000 fr.; l'estimation retenue entre dans ce cadre et ne prête
pas flanc à la critique, si l'on se fonde sur la consommation d'une famille
du même type. Pour le surplus, les montants retenus par l'expert ne sont pas
remis en cause et lient le Tribunal fédéral dans la mesure où ils ont été
repris tels quels par l'autorité cantonale de recours et ne sont pas
manifestement inexacts (art. 105 al. 2 OJ).
Le revenu actuel permettrait ainsi de couvrir les besoins de la famille
X.________; en revanche, il ne suffirait pas à payer les annuités des dettes
existantes qui s'élèvent à 50'793 fr. selon le plan d'investissement établi
par l'office de crédit agricole de Prométerre. Il est vrai, comme le relèvent
les recourants, que l'intimé aura remboursé, à fin 2006, trois prêts sans
intérêts, qui représentent des annuités de 10'604 fr., puis un prêt sans
intérêts du Fonds d'investissement agricole une année plus tard, qui implique
une annuité de 4'000 fr., dégageant ainsi un solde positif disponible de près
de 8'800 fr.
Le Tribunal administratif a tenu compte de cet élément en considérant que les
liquidités supplémentaires ainsi obtenues devront être utilisées pour
augmenter l'amortissement de la dette hypothécaire et permettre ainsi à
l'exploitant d'aborder sa retraite dans de bonnes conditions. Pour l'Office
fédéral du développement territorial, cette argumentation ne serait
pertinente, pour admettre la conformité de l'installation litigieuse à la
zone agricole au titre de développement interne, que s'il était établi que la
survie de l'exploitation était menacée même en tenant compte de
l'amélioration de la situation financière après le remboursement des prêts.
Tel est le cas en l'espèce. Dans trois ans, l'aîné des enfants aura seize ans
et comptera pour une unité de consommation à part entière; les autres enfants
émargeront de manière plus importante au budget de la famille. Le solde
disponible sera ainsi compensé par l'augmentation des besoins de la famille.
Par ailleurs, l'on ne saurait exclure que l'un des quatre enfants reprenne
par la suite le domaine familial. Cet élément doit également être pris en
considération dans l'appréciation de la viabilité à long terme de
l'exploitation dirigée par X.________ et de la nécessité du revenu
complémentaire procuré par l'engraissement de poulets (Marcel Bolz,
Zonenkonforme Bauten in der Landwirtschaftszone - neue Aspekte, ZBl 102/2001
p. 283, note 10). Enfin, le niveau des revenus d'une exploitation agricole
dépend de nombreux paramètres aléatoires, de nature conjoncturelle et
politique, qui échappent en grande partie à la maîtrise de l'exploitant, et
peut varier d'une année à l'autre, à la hausse comme à la baisse. L'autorité
chargée d'examiner la viabilité d'une entreprise agricole à long terme doit
par conséquent faire preuve de prudence en particulier lorsque, comme en
l'espèce, le revenu actuel, y compris le revenu accessoire de l'épouse,
permet tout juste de subvenir aux besoins de la famille. Vu ce qui précède,
il convient d'admettre que l'entreprise agricole de l'intimé ne serait pas
viable à long terme sans le revenu complémentaire procuré par l'exploitation
de la halle d'engraissement litigieuse, sans qu'il soit nécessaire de fixer
un revenu maximum au-delà duquel un développement interne serait exclu.

4.
Le recours doit par conséquent être rejeté aux frais des recourants qui
succombent (art. 156 al. 1 OJ). Les intimés, représentés par une assurance de
protection juridique, n'ont pas établi s'être acquittés de frais sortant de
l'ordinaire dans la présente procédure; il n'y a dès lors pas lieu de leur
allouer des dépens. Il en va de même de la Commune de
Corcelles-sur-Chavornay, qui s'en est remise à justice, et des autres
autorités concernées (art. 159 al. 1 et 2 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge des recourants.

3.
Il n'est pas alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des recourants, de
l'intimé, de la Municipalité de Corcelles-sur-Chavornay et du Département des
infrastructures du canton de Vaud, au Tribunal administratif du canton de
Vaud, ainsi qu'à l'Office fédéral du développement territorial.

Lausanne, le 2 février 2005

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: