Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1A.53/2004
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1A.53/2004 /col

Arrêt du 6 avril 2004
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du Tribunal
fédéral, Nay, Vice-président
du Tribunal fédéral, et Reeb.
Greffier: M. Kurz.

X.________,
recourant,

contre

Office fédéral de la justice, Division des affaires internationales, Section
extraditions, Bundesrain 20, 3003 Berne.

extradition à la Serbie-et-Monténégro,

recours de droit administratif contre la décision de l'Office fédéral de la
justice, du 4 février 2004.

Faits:

A.
Le 11 novembre 2003, l'Ambassade de Serbie-et-Monténégro à Berne a transmis à
l'Office fédéral de la justice (ci-après: l'OFJ) une demande tendant à
l'extradition de X.________, ressortissant de l'Etat requérant né en 1949,
pour les besoins de procédures ouvertes devant les tribunaux de Valjevo et de
Belgrade, pour des délits de fraude. Devant le Tribunal départemental de
Valjevo, il lui est reproché d'être intervenu en tant qu'intermédiaire dans
une vente de framboises, en août 2002, en persuadant l'acheteur, une société
allemande, de verser le prix de vente, soit environ 33'000 euros, sur son
compte personnel, en lui faisant faussement croire que cette somme serait
transférée au vendeur, une société de Valjevo. Devant le Tribunal communal de
Belgrade, il lui est reproché de s'être fait livrer, en septembre et octobre
2002, environ 100 tonnes de sel destinées à une société dont il se serait
fait passer pour le responsable; il aurait ensuite disparu, sans payer la
marchandise.
En détention préventive depuis le 15 mai 2003, puis en exécution de peine dès
le 27 novembre 2003 en raison d'une condamnation prononcée à Genève pour abus
de confiance et faux dans les titres, X.________ s'est vu notifier un mandat
d'arrêt en vue d'extradition le 25 novembre 2003. Un recours contre ce mandat
a été rejeté le 23 décembre 2003 par la Chambre d'accusation du Tribunal
fédéral.
Dans les observations de son avocate d'office, du 19 décembre 2003,
X.________ contestait les accusations formulées à son encontre; il s'agissait
selon lui d'un règlement de comptes à l'instigation du dénommé Y.________,
lequel avait proféré des menaces à son encontre. Les infractions n'étaient
pas suffisamment graves pour justifier l'extradition; l'astuce n'était pas
démontrée; il existait un for en Suisse compte tenu de l'enrichissement
prétendument intervenu dans ce pays. X.________ n'avait pas fui son pays
d'origine, mais résidait régulièrement en Suisse avec sa famille depuis 1986.

B.
Par décision du 4 février 2004, l'OFJ a accordé l'extradition pour les faits
mentionnés dans la demande. Ces faits avaient été commis dans l'Etat
requérant; l'existence d'un for éventuel en Suisse pour la seconde affaire
(en fonction du lieu de livraison du sel) ne permettait pas de refuser
l'extradition. La condition de la double incrimination était réalisée, les
faits décrits pouvant être qualifiés d'escroqueries en droit suisse,
passibles d'un an d'emprisonnement au moins. Les arguments à décharge étaient
irrecevables.

C.
Agissant personnellement, X.________ forme un recours de droit administratif
contre cette dernière décision. Il en demande l'annulation, ainsi que sa mise
en liberté immédiate. Il requiert l'assistance judiciaire dans le sens d'une
dispense de payer les frais de justice.
L'OFJ conclut au rejet du recours, dans la mesure où il est recevable.
Dans sa réplique, le recourant demande un délai pour démontrer son alibi, en
procédant à une visite de son domicile et des auditions de témoins. Il
requiert par ailleurs la nomination d'un avocat d'office.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
La décision par laquelle l'OFJ accorde l'extradition (art. 55 al. 1 et 39 de
la loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale - EIMP, RS
351.1) peut faire l'objet d'un recours de droit administratif (art. 25 al. 1
EIMP). La personne extradée a qualité pour recourir au sens de l'art. 103
let. a OJ (art. 21 al. 3 EIMP).

1.1 Les conclusions qui vont au-delà de l'annulation de la décision attaquée
sont recevables (art. 25 al. 6 EIMP et 114 OJ; ATF 122 II 373 consid. 1c p.
375; 118 Ib 269 consid. 2e p. 275; 117 Ib 51 consid. 1b p. 56, et les arrêts
cités). En revanche, les diverses mesures d'instructions requises par le
recourant, notamment en réplique, n'ont pas à être ordonnées (cf. consid.
4.3.2 ci-dessous).

1.2 Dans son écriture initiale, le recourant demande l'assistance judiciaire,
limitée à la dispense des frais de justice. En réplique, il fait état de la
résiliation du mandat de son avocate d'office, et demande un délai de trois
mois afin de désigner un nouveau mandataire. Le recourant n'a toutefois pas
estimé nécessaire de formuler cette requête au moment du dépôt de son
recours. Celui-ci comporte quarante pages, et soulève de nombreux griefs qui
ne figuraient pas dans le mémoire d'opposition déposé par son avocate
d'office. Son auteur dispose manifestement de connaissances juridiques
suffisantes, et on ne voit pas - le recourant ne l'explique pas non plus - en
quoi l'intervention d'un mandataire professionnel pourrait se révéler utile.
La demande d'assistance judiciaire ne peut dès lors être admise que
partiellement, dans le sens initialement requis.

2.
L'extradition entre la Serbie-et-Monténégro et la Suisse est régie par la
Convention européenne d'extradition (CEExtr., RS 353.1, entrée en vigueur le
29 décembre 2002 pour l'Etat requérant) et ses deux protocoles additionnels
(RS 0.353.11 et 0.353.12, entrés en vigueur le 21 septembre 2003 pour l'Etat
requérant). Le droit interne, soit l'EIMP et son ordonnance d'exécution
(OEIMP, RS 351.11), s'applique aux questions qui ne sont pas réglées par le
droit conventionnel, et lorsqu'il permet la collaboration internationale à
des conditions plus favorables (ATF 122 II 373 consid. 1a p. 375).

3.
Saisi d'un recours contre une décision d'extradition, le Tribunal fédéral
examine librement dans quelle mesure la coopération internationale doit être
prêtée; il statue avec une cognition pleine sur les griefs soulevés sans être
cependant tenu, comme le serait une autorité de surveillance, de vérifier
d'office la conformité de la décision attaquée à l'ensemble des dispositions
applicables en la matière (ATF 123 II 134 consid. 1d p. 136/137; 119 Ib 56
consid. 1d p. 59). C'est en outre au juge du fond, et non au juge de
l'extradition, qu'il appartient de se prononcer sur la culpabilité de la
personne visée par la demande d'extradition (ATF 122 II 373 consid. 1c p.
375; 112 Ib 215 consid. 5b p. 220; 109 Ib 60 consid. 5a p. 63, et les arrêts
cités). Il n'est fait exception à cette règle que lorsque la personne
poursuivie est en mesure de fournir un alibi (art. 53 EIMP), c'est-à-dire la
preuve évidente qu'elle ne se trouvait pas sur les lieux du crime au moment
de sa commission (ATF 122 II 373 consid. 1c p. 376; 113 Ib 276 consid. 3b p.
281-283; 112 Ib 215 consid. 5b p. 220; 109 Ib 317 consid. 11b p. 325); une
version des faits différente de celle décrite dans la demande ou de simples
arguments à décharge ne peuvent être pris en considération à ce titre.

4.
Dans une large mesure, soit dans son exposé des faits et, de manière éparse,
dans ses moyens de droit, le recourant conteste les faits qui lui sont
reprochés, en fournissant une version détaillée du déroulement des deux
opérations mentionnées par les juridictions requérantes, et en se prévalant
par ailleurs de faits justificatifs. Comme cela est relevé ci-dessus, ce
genre d'argumentation est irrecevable: l'admissibilité de l'extradition, et
en particulier le respect des conditions de double incrimination et de
proportionnalité, s'examine au regard des seuls faits mentionnés dans la
demande, abstraction faite des objections présentées à ce sujet par
l'intéressé.

4.1 Le recourant invoque la présomption d'innocence (griefs n° 8 et 9), et
estime que la preuve de sa culpabilité ne serait pas rapportée. Il méconnaît
toutefois que l'autorité saisie d'une demande d'extradition n'a pas à se
prononcer sur une accusation pénale, au sens des art. 6 par. 2 CEDH et 32
Cst., mais sur une requête de nature administrative (ATF 120 Ib 112 consid. 4
p. 119 et les arrêts cités). L'adage in dubio pro reo n'est dès lors d'aucune
application sur le fond.

4.2 La présomption d'innocence interdit aussi à toute autorité ayant à
connaître de l'affaire à un titre quelconque, de désigner une personne
coupable d'un délit, sans réserve et sans nuance, incitant ainsi l'opinion
publique à tenir la culpabilité pour acquise et préjugeant de l'appréciation
des faits par l'autorité appelée à statuer au fond (ATF 124 I 327 consid. 3b
p. 331 et la jurisprudence citée). Cette réserve s'impose toutefois aux
autorités appelées à intervenir dans le cadre de l'affaire pénale proprement
dite, mais non à celles qui se prononcent, dans un autre Etat et dans le
cadre d'une procédure distincte, sur la remise de l'inculpé aux autorités de
poursuite. Au demeurant, l'OFJ rappelle plusieurs fois, dans sa décision,
qu'il n'a pas à examiner les questions de fait et la culpabilité; lorsqu'il
examine la punissabilité selon le droit suisse, il ne fait que relater les
accusations telles qu'elles figurent dans la demande d'entraide et les deux
mandats d'arrêt étrangers, usant même de précautions rédactionnelles tel que
l'usage du conditionnel. Rien ne permet dès lors d'affirmer que l'OFJ - pour
autant que cela lui soit interdit - ait tenu la culpabilité du recourant pour
certaine.

4.3 Le recourant relève qu'il ne se trouvait pas dans l'Etat requérant et que
l'affaire de la livraison de sel avait été traitée par sa succursale de
Belgrade. En réplique, il prétend disposer d'un alibi pour les deux affaires
qui lui sont reprochées, et sollicite des mesures d'instruction (visite de
son propre domicile et audition de témoins), ainsi qu'un délai supplémentaire
pour en apporter la preuve.

4.3.1 Selon l'art. 53 EIMP, si la personne poursuivie affirme qu'elle est en
mesure de fournir un alibi, l'OFJ procède aux vérifications nécessaires (al.
1). Il refuse l'extradition si le fait invoqué est évident. A défaut, il
communique les preuves à décharge à l'Etat requérant et l'invite à se
prononcer à bref délai sur le maintien de la demande.
L'autorité d'extradition est en principe liée aux faits exposés dans la
demande, car c'est au juge étranger qu'il appartient de se prononcer sur la
réalité des charges. L'exception que représente l'art. 53 EIMP tient à la
nécessité d'éviter une poursuite pénale injustifiée à une personne
manifestement innocente (ATF 123 II 279 consid. 2b. p. 281 et les arrêts
cités). Même si elle n'est pas prévue par la CEExtr., et peut ainsi se
trouver en contradiction avec l'obligation d'extrader découlant de l'art. 1er
CEExtr., la faculté de fournir un alibi correspond à un principe général du
droit extraditionnel, et ne viole dès lors pas la Convention (ATF 113 Ia 276
consid. 3c p. 283). Cela étant, la notion d'alibi doit, selon la
jurisprudence constante, être comprise dans son sens littéral, c'est-à-dire
comme la preuve que la personne poursuivie ne se trouvait pas sur les lieux
de l'infraction au moment de sa commission (ATF 113 Ib 282 consid. 3b). De
simples arguments à décharge ne peuvent être pris en considération à ce
titre. En outre, la procédure de vérification de l'alibi ne doit être
entreprise que si la preuve à fournir est propre à conduire à un refus de
l'extradition ou au retrait de la demande; elle est exclue en particulier si
certaines infractions mentionnées dans la demande ne sont pas contestées
(alibi partiel, ATF 123 II 279 consid. 2b p. 281; 109 Ib 317 consid. 11b in
fine p. 325) ou s'il apparaît que les preuves invoquées ne sont pas dignes de
foi. Par ailleurs, il faut que l'alibi puisse être vérifié sans retard et
sans difficulté; l'OFJ ne saurait être amené à procéder dans ce cadre à une
véritable instruction, celle-ci appartenant aux autorités répressives de
l'Etat requérant (ATF 123 II 279 consid. 2b p. 282).

4.3.2 En l'occurrence, le recourant n'est guère explicite sur la nature de
l'alibi qu'il entend invoquer. Il prétend seulement s'être trouvé hors de
l'Etat requérant au moment de la livraison du sel. Compte tenu de la nature
de l'infraction et des moyens de télécommunications actuels, son absence ne
l'empêchait toutefois pas d'agir, de sorte que l'alibi est sans portée. Il
n'est au demeurant pas démontré par pièces, comme l'exige l'art. 53 EIMP (ATF
123 II 279 consid. 2b p. 281), et n'est que partiel (même arrêt), puisque le
recourant ne se prévaut pas d'un alibi pour l'autre affaire, relative à la
livraison de framboises. Dans ces conditions, il ne se justifie pas de
procéder aux vérifications requises.

5.
Les divers autres moyens de droit peuvent être regroupés de la manière
suivante.

5.1 Dans un grief d'ordre formel (moyen n° 10), le recourant se plaint d'une
violation répétée de son droit d'être entendu, en reprochant à l'OFJ de ne
pas avoir tenu compte des pièces qu'il avait produites, et de s'être
exclusivement fondé sur les affirmations des parties civiles. L'autorité
intimée s'est expliquée à ce sujet en relevant que, selon la pratique
constante des autorités d'extradition, les arguments à décharge ne sont pas
pris en compte. Cette motivation suffisait pour écarter les preuves produites
par le recourant, qui se prévaut à nouveau en vain du droit à un procès
équitable.
Le recourant semble aussi se plaindre de n'avoir pas eu accès aux documents
pertinents, en raison de sa détention. On ignore s'il s'agit des pièces à
l'appui de la demande d'extradition, ou du dossier des procédures pénales
étrangères. Dans l'un et l'autre cas, le grief est manifestement mal fondé:
le droit d'être entendu dans la procédure d'extradition (art. 52 EIMP) ne
s'étend qu'aux pièces pertinentes pour la procédure, soit la demande et les
pièces à l'appui. Conformément à l'art. 12 CEExtr. (le droit interne ne pose
pas d'exigences supplémentaires), la requête doit être accompagnée d'un
mandat d'arrêt, d'un exposé des faits et d'une copie du droit applicable.
L'Etat requérant n'ayant à fournir aucune preuve à l'appui de ses
accusations, le dossier de la procédure pénale étrangère n'a pas à être
produit. En l'espèce, l'ensemble des documents à l'appui de la demande
d'extradition a été notifié au recourant lors de son audition devant le Juge
d'instruction genevois, le 25 novembre 2003, ce qui satisfait à son droit
d'être entendu. Le recourant était par ailleurs représenté par une avocate
qui aurait encore pu, en cas de besoin, requérir une nouvelle consultation du
dossier en vue de la présentation de ses observations.

5.2 Dans une deuxième série de griefs, le recourant fait valoir que les
affaires qui sont à l'origine des procédures pénales seraient purement
civiles; les faits ne seraient pas assez graves pour donner lieu à
extradition; le recourant estime - en relation avec l'exportation de
framboises - que la plaignante n'aurait pas la légitimation active et que le
versement aurait eu lieu sur le compte d'une société qui devait être
recherchée en priorité (moyens n° 1, 2, 3 et 5).
Le recourant semble soutenir que le droit interne devrait être appliqué, dans
la mesure où il est plus favorable pour la personne recherchée. C'est le
contraire qui est vrai: la jurisprudence a rappelé à de nombreuses reprises
que l'existence d'un traité d'entraide judiciaire ou d'extradition empêche la
Suisse d'appliquer ses règles qui rendent plus difficile la coopération
internationale; elle lui permet en revanche d'appliquer les règles
éventuellement plus favorable à l'entraide (consid. 1b - non publié - de
l'ATF 126 II 212; consid. 10a - résumé - de l'ATF 125 II 569, p. 582; 123 II
134 consid. 1a p. 136; 122 II 485 consid. 3b p. 487, 140 consid. 2 p. 142;
120 Ib 189 consid. 2b p. 191-192). L'application du droit interne plus
favorable découle notamment de la considération que les traités ont pour but
de favoriser la coopération internationale, et non de la rendre plus
difficile. Il serait manifestement contraire à l'esprit des traités conclus
dans ce domaine, que la Suisse refuse l'extradition à des Etats auxquels elle
est liée par une convention, dans des situations où elle l'accorderait à
d'autres Etats sur la seule base de son droit national (ATF 120 Ib 189
consid. 2b p. 191-192 et les arrêts cités).
Cela étant, les motifs d'opposition invoqués par le recourant ne trouvent
aucun appui dans le texte conventionnel. Les faits donnant lieu à extradition
sont définis à l'art. 2 CEExtr., et comprennent notamment les infractions
passibles, selon le droit des parties requérante et requise, d'une peine
privative de liberté d'au moins un an. Tel est manifestement le cas de la
fraude selon l'art. 171 al. 1 de la loi pénale de la République de Serbie,
respectivement de l'escroquerie selon l'art. 146 al. 1 CP, infractions pour
lesquelles est prévue une peine privative de liberté de cinq ans au maximum.
Pour le surplus, en dehors des infractions politiques, militaires et
fiscales, la CEExtr. ne permet pas d'exciper de la nature - en l'occurrence
économique - de l'infraction. Dans la mesure où il irait au-delà des
dispositions précitées, l'art. 4 EIMP, qui permet de rejeter la demande "si
l'importance des faits ne justifie pas la procédure", est inapplicable.

5.3 En l'absence de défauts graves pouvant justifier une application de
l'art. 2 EIMP, l'Etat requis n'a pas à s'interroger sur le déroulement de la
procédure pénale étrangère. Les arguments relatifs aux qualités de parties
ainsi qu'à l'opportunité du mandat d'arrêt sont dès lors, eux aussi,
irrelevants. L'Etat requis n'a pas, en particulier, à refuser l'extradition
d'une personne au motif qu'une demande d'entraide serait à même de disculper
l'intéressé. En outre, le recourant se dit menacé par les parties civiles,
mais cela ne constitue pas un défaut de la procédure étrangère. Le recourant
précise avoir demandé la protection des autorités, et il ne prétend pas que
celles-ci ne seraient pas à même d'assurer sa sécurité.

5.4 Le recourant invoque ensuite l'art. 35 EIMP (moyen n° 4). Il estime que,
dans l'affaire relative à la livraison de framboises, il y aurait un for en
Suisse, compte tenu de l'intervention d'une société sise à Montreux, et de
l'absence d'enrichissement sur le territoire de l'Etat requérant. Le
recourant argumente à nouveau sur la base de sa propre présentation des
faits. La demande d'entraide du Tribunal de Valjevo ne fait pas état d'une
société sise à Montreux, mais uniquement d'un paiement fait par une société
allemande sur un compte bancaire à Belgrade, destiné à un exportateur de
Valjevo, mais que le recourant aurait détourné à son profit. Tant
l'enrichissement que l'appauvrissement auraient ainsi eu lieu dans l'Etat
requérant, ce qui fonde la compétence de ses autorités répressives. Dans
l'affaire pendante devant le tribunal de Belgrade, l'OFJ a éprouvé des doutes
en raison du fait que le lieu de livraison du sel n'est pas précisé. Ces
simples doutes ne sont pas suffisants pour admettre l'existence d'un for
exclusif en Suisse, d'autant que, selon la demande d'extradition, le
recourant aurait agi à Belgrade. L'OFJ n'a ainsi pas abusé de son pouvoir
d'appréciation en considérant que les infractions décrites avaient été, pour
leur plus grande part, commises dans l'Etat requérant (cf. ATF 117 Ib 210
consid. 3 p. 212).
Le recourant invoque également l'art. 37 EIMP. Cette disposition, qui permet
de refuser l'extradition lorsque la Suisse est en mesure d'assumer la
poursuite pénale, et que le reclassement social de la personne poursuivie le
justifie (al. 1), ne s'applique toutefois pas à l'égard d'un Etat partie à la
CEExtr. (ATF 129 II 100). Au demeurant, sur le vu de ce qui précède, la
première des conditions posées par cette disposition n'est pas réalisée.
Quant à la seconde, le recourant ne fournit aucune indication permettant de
supposer qu'un jugement en Suisse lui assurerait un meilleur reclassement
social.

5.5 Le recourant soutient également que la condition de la double
incrimination ne serait pas satisfaite (moyens n° 6 et 7). Pour l'essentiel,
son argumentation consiste d'une part en un long rappel des principes
jurisprudentiels relatifs à la condition de l'astuce propre à l'escroquerie
et, d'autre part, dans la contestation des faits allégués par les
juridictions requérantes, en particulier sa participation aux agissements
décrits ainsi que l'existence d'un préjudice. Pour le surplus, le recourant
conteste l'existence d'un comportement astucieux, les victimes n'ayant selon
lui pas opéré les vérifications nécessaires.
Selon la demande du Tribunal de Valjevo, le recourant, agissant comme
intermédiaire entre l'exportateur de framboises et l'acheteur allemand,
aurait incité ce dernier à effectuer le paiement sur son compte personnel en
lui faisant croire qu'il s'agissait du compte de sa société et en ayant, dès
le début, l'intention de s'approprier le montant versé. Le recourant aurait
ainsi profité de sa position d'intermédiaire (et du rapport de confiance
particulier qui en découlait), en escomptant vraisemblablement que l'acheteur
ne vérifierait pas la titularité du compte qui lui était indiqué (cf. ATF 126
IV 165 consid. 2a p. 171). La condition de l'astuce est ainsi réalisée.
Elle l'est également à propos des faits décrits par le Tribunal de Belgrade.
Il y a comportement astucieux dès lors que le recourant se serait faussement
fait passer pour un responsable d'un partenaire contractuel, en cachant son
intention de ne pas payer la marchandise livrée, sans que cette intention ne
soit décelable.

5.6 Le recourant invoque enfin l'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.;
moyen n° 8). Ce grief n'est toutefois qu'une reprise de ses arguments
précédents, fondés en particulier sur la présomption d'innocence, et n'a
guère de portée propre.

6.
Sur le vu de ce qui précède, le recours de droit administratif doit être
rejeté, dans la mesure où il est recevable. L'assistance judiciaire, limitée
à la dispense du paiement des frais de justice, peut être accordée.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable.

2.
L'assistance judiciaire est accordée au recourant, en ce sens qu'il est
renoncé à la perception d'un émolument judiciaire. Elle est refusée pour le
surplus.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant et à l'Office fédéral
de la justice (B 108 883/RIA).

Lausanne, le 6 avril 2004

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: