Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1A.268/2004
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1A.268/2004 /ajp

Arrêt du 11 février 2005
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Juge présidant,
Nay et Reeb.
Greffier: M. Kurz.

X. ________,
recourant, représenté par Me Beat Zürcher, avocat,

contre

Ministère public de la Confédération,
Antenne Lausanne, avenue des Bergières 42,
case postale 334, 1000 Lausanne 22.

Entraide judiciaire internationale en matière pénale
avec l'Espagne - B 116328,

recours de droit administratif contre la décision du Ministère public de la
Confédération du 13 octobre 2004.

Faits:

A.
Le 17 juillet 2003, un Juge d'instruction de Madrid a adressé à la Suisse une
demande d'entraide judiciaire, pour les besoins d'une procédure pénale
dirigée notamment contre les frères jumeaux A. et B. Z.________, soupçonnés
de blanchiment d'argent provenant du trafic de stupéfiants. La demande fait
état de comptes ouverts auprès de banques genevoises, soit l'UBS, le Crédit
Suisse et la Lloyds TBS, dont le magistrat requérant demandait le blocage
immédiat. La production de la documentation relative à ces comptes, dès leur
ouverture, était aussi requise. Le 12 novembre 2003, le juge d'instruction
madrilène a complété sa demande en produisant un rapport de la Brigade
d'investigation des délits monétaires du 8 juillet 2003. Il en ressort que
les frères Z.________ récoltaient l'argent liquide en Colombie et procédaient
à son importation par avion en Espagne, puis notamment en Suisse; l'argent
était déposé sur des comptes bancaires et viré vers Bogota ou Miami. Les
sommes ainsi recyclées étaient estimées à plus de 30 millions d'Euros.
X.________ est en particulier désigné comme le gestionnaire des comptes
détenus auprès de l'UBS, puis de l'UEB.

Dans le cadre d'une enquête pénale ouverte le 11 juillet 2003 par le
Ministère public de la Confédération (MPC) contre C.________ et X.________,
pour participation à une organisation criminelle, blanchiment d'argent et
défaut de vigilance en matière d'opérations financières, X.________ a été
entendu en tant que prévenu les 11, 12, 13, 17 et 18 juillet 2003, ainsi que
le 10 mars 2004. Les interrogatoires portaient essentiellement sur les
opérations effectuées pour les frères Z.________.

B.
Chargé d'exécuter la demande d'entraide, le MPC est partiellement entré en
matière le 27 novembre 2003. Les banques étaient invitées à procéder aux
blocages sollicités, ainsi qu'à produire la documentation, à partir du 1er
janvier 1997.

Le 8 juillet 2004, le magistrat requérant a demandé à être informé au sujet
des comptes bloqués en Suisse, détenus par les frères Z.________, leurs
parents et les autres personnes concernées par l'enquête, notamment
X.________.

Par lettre du 15 juillet suivant, le MPC releva que lors d'une visite en
Espagne le 12 février 2004, le juge d'instruction madrilène avait fait savoir
au procureur suisse qu'après la saisie en Espagne de documents trouvés en
main des frères Z.________, il considérait la commission rogatoire comme
exécutée. Il s'agissait en réalité d'un malentendu, car les enquêteurs
espagnols avaient fait savoir qu'ils désiraient encore obtenir diverses
pièces de la procédure pénale suisse, soit un tableau des comptes bloqués,
les auditions des prévenus en Suisse ainsi que les rapports de police.

Le 2 septembre 2004, le MPC est entré en matière, envisageant de transmettre
à l'autorité requérante les six procès-verbaux d'interrogatoires de
X.________, ainsi que le rapport de la Police judiciaire fédérale (PJF) du 28
juin 2004. X.________ était invité à faire valoir ses objections dans un
délai de dix jours, et à indiquer s'il acceptait une exécution simplifiée.

Le 9 septembre 2004, X.________ s'est opposé à la transmission des
procès-verbaux et du rapport de la PJF. Les procès-verbaux contenaient des
informations sur des clients de la banque sans rapport avec la procédure
espagnole; le rapport de la PJF contenait une erreur; certains renseignements
le concernant personnellement ne devaient pas être transmis.

Par décision de clôture du 13 octobre 2004, le MPC a ordonné la transmission
des documents précités. Le 20 septembre précédent, l'autorité requérante
avait confirmé par télécopie qu'elle restait dans l'attente de renseignements
au sujet des comptes bloqués appartenant aux frères Z.________ et leurs
comparses, ainsi que des déclarations, notamment, de X.________. Il n'était
pas démontré que les autres clients de la banque étaient sans rapport avec la
procédure. L'erreur prétendue dans le rapport de la PJF concernait un point
de détail; les renseignements concernant les comptes privés de X.________
pouvaient intéresser l'autorité requérante.

C.
X.________ forme un recours de droit administratif contre cette dernière
décision. Il en demande l'annulation, ainsi que le rejet de la demande
d'entraide judiciaire et de ses compléments.

Le MPC conclut au rejet du recours dans la mesure où il est recevable. L'OFJ
conclut au rejet du recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
La décision attaquée étant rédigée en français, il en ira de même du présent
arrêt, quand bien même le recours est formé en allemand (art. 37 al. 3 OJ).

2.
En vertu de l'art. 80g al. 1 de la loi fédérale sur l'entraide internationale
en matière pénale (EIMP; RS 351.1), le recours de droit administratif est
ouvert contre la décision de clôture rendue par l'autorité fédérale
d'exécution, confirmant la transmission de renseignements à l'Etat requérant
(cf. art. 25 al. 1 EIMP).

2.1 Selon l'art. 80h let. b EIMP, a qualité pour agir quiconque est touché
personnellement et directement par une mesure d'entraide et a un intérêt
digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée. La personne visée
par la procédure pénale étrangère peut recourir aux mêmes conditions (art. 21
al. 3 EIMP; ATF 130 II 162 consid. 1.1 p. 163-164 et les exemples de
jurisprudence cités). Outre les personnes mentionnées à l'art. 9a OEIMP, la
personne entendue à titre de témoin a également qualité, au sens de l'art.
80h let. b EIMP, pour s'opposer à la transmission du procès-verbal relatif à
son audition, mais uniquement dans la mesure où les renseignements
communiqués le concernent personnellement ou lorsqu'il se prévaut de son
droit de refuser de témoigner (ATF 126 II 258 consid. 2d/bb p. 261).

2.2 En l'occurrence, le recourant s'est largement exprimé, durant les
interrogatoires, sur sa propre situation (personnelle, familiale et
professionnelle, en particulier sur ses fonctions au sein des établissements
bancaires) et sur ses relations avec certains clients, notamment les
opérations qu'il a lui-même effectuées pour les frères Z.________. Le rapport
intermédiaire de la PJF mentionne les avoirs du recourant, et contient un
résumé de ses différentes déclarations. La qualité pour agir doit donc lui
être reconnue.

3.
Selon le recourant, la demande d'entraide ne mentionnerait pas précisément
l'identité des personnes poursuivies, comme l'exige l'art. 28 al. 2 let. d
EIMP. Outre les frères Z.________ et la mention "Beechcratf/Gemelos", la
demande ferait mention d'autres personnes, notamment des ressortissants
colombiens; il ne serait pas possible de savoir si le recourant lui-même est
aussi poursuivi dans ce cadre, ce que laisserait toutefois supposer le
complément du 8 juillet 2004. Les dispositions pénales applicables
manqueraient également, ainsi que des précisions quant aux faits reprochés
aux autres personnes poursuivies. On ignoreraient ainsi à l'encontre de qui
ses déclarations pourront être utilisées, et dans le cadre de quelle
procédure; une transmission de renseignements aux autorités colombiennes
serait aussi à craindre.

3.1 Selon l'art. 28 al. 2 EIMP, toute demande d'entraide doit indiquer son
auteur, son objet, la qualification juridique des faits et "la désignation
aussi précise et complète que possible de la personne poursuivie" (let. d). A
l'instar de l'exposé des faits exigé par les art. 14 CEEJ et 28 al. 3 EIMP,
ces indications doivent permettre de s'assurer que les faits décrits sont
punissables en droit suisse, qu'il ne s'agit pas de délits (politiques ou
fiscaux) pour lesquels l'entraide est exclue, et que, au regard notamment de
leur importance et de leurs auteurs, le principe de la proportionnalité est
respecté (ATF 118 Ib 122 consid. 5b). Toutefois, selon la jurisprudence, l'on
ne saurait exiger de l'Etat requérant un exposé complet et exempt de toute
lacune. En effet, la procédure d'entraide a précisément pour but d'apporter
aux autorités de l'Etat requérant des renseignements au sujet des points
demeurés obscurs (ATF 117 Ib 88 consid. 5c et les arrêts cités).

3.2 Ces principes valent également pour l'indication des personnes
poursuivies: il n'est pas rare en effet qu'une enquête soit, dans un premier
temps, dirigée contre inconnu, sans que cela ne constitue un motifs de refus
de l'entraide judiciaire. Celle-ci peut aussi être demandée afin de permettre
à l'autorité requérante de juger de l'opportunité d'étendre ou non le cercle
des personnes poursuivies. Par conséquent, la mention des principaux auteurs
des faits décrits, ou de ceux qui sont connus au moment du dépôt de la
demande, constitue en règle générale une indication suffisante. Les
précisions quant aux dispositions pénales applicables peuvent également se
limiter à ces personnes.

3.3 En l'espèce, la demande d'entraide initiale est formée pour les besoins
d'une instruction dirigée contre les frères Z.________ et d'autres personnes,
notamment sept ressortissants colombiens arrêtés en Espagne. Cela constitue
une indication suffisante, dans la mesure où les frères Z.________ sont à
l'évidence les principaux inculpés. Dans son complément du 8 juillet 2004,
l'autorité requérante semble indiquer que le recourant serait "concerné par
l'enquête Beechcraft/ Gemelos", sans préciser s'il doit ou non être considéré
comme poursuivi. Sur le vu des principes rappelés ci-dessus, une telle
imprécision est sans conséquence du point de vue de l'art. 28 al. 2 EIMP. Le
MPC indique d'ailleurs clairement que le recourant ne fait pas partie des
personnes inculpées en Espagne.

3.4 Le recourant ne conteste pas que l'exposé des faits satisfait aux
exigences posées, notamment à l'art. 14 CEEJ, en ce qui concerne les frères
Z.________. Ceux-ci se voient en effet reprocher d'avoir blanchi plusieurs
dizaines de millions d'Euros provenant du trafic de cocaïne. Selon le rapport
du 8 juillet 2003 de la Brigade d'investigation des délits monétaires -
rapport qui fait partie des documents produits à l'appui de la demande
d'entraide, selon communication de l'autorité requérante du 12 novembre 2003
-, les frères Z.________ dirigeaient un groupe qui récoltait en Espagne de
l'argent apporté par des agents colombiens travaillant pour des trafiquants
de stupéfiants. A.________ profitait notamment de son statut d'employé d'une
compagnie aérienne. L'argent était ensuite conditionné et déposé sur des
comptes bancaires, puis viré à destination d'établissements de Bogota et de
Miami. Par la suite, l'achat d'un avion aurait permis de transporter des
quantités plus importantes d'argent, soit au total plus de 30 millions
d'Euros. S'agissant de délits de blanchiment, pour lesquels s'applique la
Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la
confiscation du produit du crime (CBl; RS 0.311.53), l'autorité requérante
n'a pas à expliquer dans le détail en quoi consiste l'infraction principale,
en l'occurrence le trafic de drogue (ATF 129 II 97 consid. 3.3). Comme cela
est relevé ci-dessus, l'autorité requérante n'a pas non plus à expliquer dans
le détail en quoi consisterait l'activité reprochée à chacune des personnes
poursuivies. Le grief doit par conséquent être rejeté.

3.5 Le recourant craint également à tort une transmission d'informations à
d'autres Etats que l'Etat requérant; celle-ci ne pourrait avoir lieu qu'aux
conditions restrictives de l'art. 67 EIMP, conformément au principe de la
spécialité.

4.
Selon l'OFJ, la présente espèce poserait problème au regard du droit au
silence - respectivement du droit de ne pas s'incriminer - découlant des art.
6 CEDH et 14 al. 3 let. g du Pacte ONU II: le recourant, qui a accepté de
s'exprimer dans le cadre de la procédure Suisse, devrait pouvoir refuser de
déposer, totalement ou partiellement, s'il était interrogé par les autorités
espagnoles.

La transmission des procès-verbaux d'interrogatoires empêcherait l'exercice
de ce droit.

4.1 A suivre la thèse de l'OFJ, il serait impossible de remettre des
procès-verbaux d'interrogatoires de témoins ou d'inculpés dans une procédure
nationale, en vue de leur utilisation dans une procédure pénale étrangère.
Dans tous les cas, ces personnes devraient donc être réentendues en vue de
l'exécution de la procédure d'entraide. Cela porterait atteinte à une
utilisation rationnelle des informations recueillies en Suisse, ainsi qu'à la
célérité de la procédure d'entraide (art. 17a EIMP). La personne entendue en
Suisse peut d'ailleurs se prévaloir de son droit de refuser de déposer dans
le cadre de la procédure d'entraide. Il lui est en effet loisible d'expliquer
que certaines déclarations, susceptibles de lui porter préjudice, n'auraient
pas été faites si l'intéressé avait su qu'une autorité étrangère pourrait en
prendre connaissance. Saisie d'une telle objection, l'autorité suisse
d'exécution devrait alors mettre en balance la protection légitime du domaine
privé avec l'intérêt de l'enquête menée à l'étranger, dans le cadre de
l'examen de la proportionnalité; l'intéressé pourrait pour sa part proposer
le caviardage de certaines déclarations particulières, soit qu'elles portent
de manière disproportionnée atteinte à la sphère privée, soit qu'elles sont
sans rapport manifeste avec l'enquête ouverte à l'étranger. De ce point de
vue, la protection des personnes entendues en Suisse apparaît suffisante.

4.2 Le recourant a été entendu en Suisse en tant qu'inculpé; il ne s'est pas
prévalu de son droit de se taire. On ne voit pas, par conséquent - et le
recourant ne l'indique d'ailleurs pas - quels motifs particulier de refus il
aurait pu faire valoir s'agissant d'une procédure étrangère dans laquelle il
n'est, en l'état, que simple témoin. La procédure suivie par le MPC n'est, de
ce point de vue, pas critiquable.

5.
Le recourant relève ensuite que la remise des procès-verbaux des auditions
effectuées en Suisse ne figure pas dans la demande initiale. Cette requête
n'a été formulée qu'en juillet 2004, à l'occasion d'une entrevue avec les
enquêteurs espagnols. Quant à la communication télécopiée du 20 septembre
2004, elle n'est pas traduite. Dans un grief voisin, le recourant estime que
ses déclarations ont été faites dans le cadre d'une enquête pour défaut de
vigilance en matière d'opérations financières, et seraient de peu d'utilité
pour l'enquête menée en Espagne. Certains clients espagnols pourraient être
mis en difficulté, ainsi que le recourant, pour violation du secret bancaire.
Les documents dont le MPC envisage la transmission contiendraient en outre
des informations sur le domaine secret, en particulier s'agissant de sa
situation professionnelle, de ses relations avec certains clients et de la
structure de la banque.

5.1 Le principe de la proportionnalité empêche d'une part l'autorité
requérante de demander des mesures inutiles à son enquête et, d'autre part,
l'autorité d'exécution d'aller au-delà de la mission qui lui est confiée (ATF
121 II 241 consid. 3a). L'autorité suisse requise s'impose une grande retenue
lorsqu'elle examine le respect de ce principe, car elle ne dispose pas des
moyens qui lui permettraient de se prononcer sur l'opportunité de
l'administration des preuves. Saisi d'un recours contre une décision de
transmission, le juge de l'entraide doit lui aussi se borner à examiner si
les renseignements à transmettre présentent, prima facie, un rapport avec les
faits motivant la demande d'entraide. Il ne doit exclure de la transmission
que les documents n'ayant manifestement aucune utilité possible pour les
enquêteurs étrangers (examen limité à l'utilité "potentielle", ATF 122 II 367
consid. 2c p. 371). La jurisprudence admet qu'on peut interpréter une
commission rogatoire de manière extensive, s'il apparaît que cela correspond
à la volonté de son auteur et permet de prévenir une éventuelle demande
complémentaire (ATF 121 II 241 consid. 3a in fine). Il faut toutefois
qu'ainsi comprise, la mission que se reconnaît l'autorité d'exécution
satisfasse aux conditions posées à l'entraide judiciaire (même arrêt).

5.2 La demande d'entraide initiale tendait au blocage et à la production de
toute la documentation relative à des comptes déterminés, qui auraient pu
être utilisés par les frères Z.________. L'autorité requérante a ensuite
précisé, le 8 juillet 2004, qu'elle demandait la production d'un "rapport
complet" sur les comptes bloqués en Suisse dont les titulaires sont les
frères Z.________, leurs parents et les autres personnes visées par
l'enquête, soit notamment X.________, ainsi que "tous les renseignements et
documents pouvant être utiles à l'enquête en Espagne". Le 14 juillet 2004,
des représentants de la police espagnole se sont rendus auprès du MPC et ont
demandé la remise de tableaux des comptes bancaires séquestrés, des auditions
des prévenus et des rapports de police; cette entrevue a fait l'objet d'un
procès-verbal. La remise des procès-verbaux d'auditions a encore été
confirmée par télécopie du 20 décembre 2004. Ce document est rédigé en
espagnol.

Même les dernières démarches de l'autorité requérante ne peuvent être
considérées comme des compléments formels à la demande d'entraide judiciaire,
elles permettent d'interpréter cette dernière de manière large, conformément
à la volonté manifestée par l'autorité requérante. Lorsque celle-ci déclare
expressément être intéressée par des documents particuliers, il n'y a pas
lieu de mettre en doute leur  utilité potentielle. Celle-ci est au demeurant
indéniable.

5.3 Même si les interrogatoires du recourant ont été effectués dans un autre
contexte, les faits à la base des deux enquêtes sont voisins et les
déclarations du recourant ont, de manière générale, une pertinence
potentielle pour l'enquête menée en Espagne, puisqu'elles portent sur la
manière dont les fonds des frères Z.________ ont été gérés en Suisse.

5.4 Le recourant relève, à juste titre, qu'il convient en principe de
s'assurer de la pertinence de chaque renseignement transmis pour l'enquête
espagnole. En effet, après avoir saisi les documents qu'elle juge utiles pour
l'exécution de la demande, l'autorité d'exécution doit trier les pièces à
remettre en vue du prononcé d'une décision de clôture. A défaut d'un accord
portant sur la remise facilitée (art. 80c EIMP), elle fait établir un
inventaire précis des pièces dont la remise est contestée. Elle impartit au
détenteur un délai pour faire valoir, pièce par pièce, les arguments
s'opposant selon lui à la transmission. Elle rend ensuite une décision de
clôture soigneusement motivée. Que le détenteur néglige de se déterminer ou
ne le fait que d'une manière insatisfaisante ne dispense pas l'autorité
d'exécution d'effectuer le tri commandé par le principe de la
proportionnalité (ATF 130 II 14 consid. 4.3-4.4 p. 16-18).

5.5 En l'occurrence, le recourant a été invité, dans la décision d'entrée en
matière, à se déterminer sur la remise des procès-verbaux. Il lui appartenait
dès lors d'indiquer dans le détail les passages de ces procès-verbaux qui
sont selon lui sans rapport avec l'enquête, ou qui porteraient atteinte de
manière disproportionnée au domaine secret.

Pour sa part, le MPC a estimé que l'ensemble des déclarations faites par le
recourant revêtaient une utilité potentielle. A défaut d'une argumentation
circonstanciée du recourant, il ne lui appartenait pas de se livrer à un
examen approfondi de chaque déclaration: compte tenu des similitudes entre
les deux procédures pénales, le MPC pouvait légitimement considérer que les
six procès-verbaux et le rapport de la PJF pouvaient être "d'une grande
utilité et servir de pièce à conviction dans la procédure pénale menée en
Espagne".
Contrairement à ce que soutient le recourant, les informations sur sa
situation personnelle, sa position dans l'établissement bancaire et ses
contacts avec d'autres clients ont pour but de déterminer si les liens entre
les frères Z.________ et le recourant s'inscrivaient dans le cadre d'une
relation habituelle entre gestionnaire et client. Les procès-verbaux
comportent certes l'identité d'autres personnes physiques et morales;
toutefois, outre que rien ne permet d'affirmer que ces personnes seraient
totalement étrangères à l'enquête, les déclarations faites par le recourant à
leur sujet ne comportent rien qui pourrait leur porter préjudice. Faute
d'explications précises quant à la nécessité de supprimer des données
particulières, le grief doit lui aussi être écarté.

6.
Le recourant voit enfin dans la procédure ouverte en Suisse, et étendue aux
frères Z.________, un obstacle à l'octroi de l'entraide en vertu du principe
"ne bis in idem"; il en irait de même dans la mesure où lui-même réside en
Suisse et se trouve inculpé en Espagne. Ce dernier argument tombe à faux, dès
lors que le recourant n'est pas poursuivi dans l'Etat requérant. Invoquant à
ce propos l'art. 66 al. 1 EIMP, le recourant perd également de vue que
l'entraide peut de toute façon être accordée pour les besoins de la poursuite
dirigée contre les frères Z.________ et les autres personnes poursuivies en
Espagne; ceux-ci ne résident pas en Suisse, de sorte que l'entraide peut être
accordée sur la base de l'art. 66 al. 2 EIMP. L'art. 66 EIMP - de même que
l'art. 2 CEEJ et la réserve faite par la Suisse à ce sujet - constitue une
norme potestative, et, dans la mesure où l'enquête suivie en Espagne doit
être considérée comme la procédure pénale principale dirigée contre les
frères Z.________, le MPC n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation en
donnant suite à la demande d'entraide espagnole.

7.
Sur le vu de ce qui précède, le recours de droit administratif doit être
rejeté. Conformément à l'art. 156 al. 1 OJ, un émolument judiciaire est mis à
la charge du recourant qui succombe.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 5000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant et au
Ministère public de la Confédération ainsi qu'à l'Office fédéral de la
justice, Division des affaires internationales, Section de l'entraide
judiciaire internationale.

Lausanne, le 11 février 2005

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le juge présidant:  Le greffier: