Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen U 60/2003
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U 60/03

Arrêt du 28 juin 2004
IIIe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Kernen. Greffier : M.
Berthoud

D.________, recourante, représentée par Me Aba Neeman, avocat, place de
l'Eglise 2, 1870 Monthey,

contre

CSS Assurance SA, rue Haldimand 17, 1000 Lausanne 9, intimé

Tribunal cantonal des assurances, Sion

(Jugement du 29 janvier 2003)

Faits:

A.
D. ________, née en 1964, a travaillé en qualité d'aide-hospitalière et était
assurée, à ce titre, contre les accidents professionnels et
non-professionnels par CSS Assurances SA.

Le 30 juillet 1997, elle a éprouvé des douleurs dorsales subites au moment où
la motocyclette, dont elle était passagère, a franchi un «nid-de-poule». A
l'Hôpital de M.________, le docteur S.________ a constaté un tassement du dos
ainsi qu'une élongation musculaire (rapport du 22 août 1997). Quant au
docteur P.________, il a diagnostiqué un syndrome hyperalgique dorsal
post-traumatique (rapport du 28 décembre 1997). Par ailleurs, l'assurée s'est
entaillé le poignet droit le 14 février 1998, en chutant sur un verre brisé
(rapport du docteur I.________ du 3 mars 1998). CSS Assurances SA a pris les
suites de ces deux événements à sa charge.

Alors qu'elle était au chômage, l'assurée a été victime d'un accident de la
circulation le 4 juillet 1999, lequel a entraîné, notamment, une fracture de
la main gauche et des douleurs dorsales (rapports des docteurs R.________ et
T.________, du 13 juillet 1999, et K.________, médecin d'arrondissement de la
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, des 4 janvier et 17
août 2000). La CNA a assumé les suites de cet accident. Par décision du 11
avril 2001, confirmée sur opposition le 29 juin 2001, elle a alloué à son
assurée une rente d'invalidité de 20 % ainsi qu'une indemnité pour atteinte à
l'intégrité de 7,5 %.

Le 28 août 2000, l'assurée a annoncé une rechute des accidents des 30 juillet
1997 et 14 février 1998; elle a invité CSS Assurances SA à lui allouer ses
prestations de ce chef. Cet assureur a opposé un refus, par une décision du
13 novembre 2001, qu'il a confirmée sur opposition le 16 janvier 2002.

B.
D.________ a déféré la décision sur opposition du 16 janvier 2002 au Tribunal
des assurances du canton du Valais.

Par jugement du 29 janvier 2003, la juridiction cantonale a admis
partiellement le recours et annulé la décision litigieuse dans la mesure où
elle portait sur le refus, par CSS Assurances SA, de prendre en charge les
suites de l'accident du 14 février 1998.

C.
D.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont
elle demande l'annulation, avec suite de dépens, en concluant à ce que
l'intimée soit également condamnée à lui allouer ses prestations pour les
suites de l'événement du 30 juillet 1997. Elle sollicite le bénéfice de
l'assistance judiciaire.

L'intimée conclut au rejet du recours. L'Office fédéral des assurances
sociales, Domaine Maladie et accident (intégré, depuis le 1er janvier 2004, à
l'Office fédéral de la santé publique), a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
En procédure fédérale, le litige porte uniquement sur la responsabilité de
l'intimée pour la rechute alléguée de l'événement du 30 juillet 1997.

A teneur du jugement du 29 janvier 2003, l'intimée est invitée à fixer
l'étendue de ses prestations pour les suites de l'accident du 14 février
1998. Ce point du dispositif n'a pas été attaqué et est donc entré en force.

2.
La loi fédérale sur la partie générale des assurances sociales (LPGA) du 6
octobre 2000, entrée en vigueur le 1er janvier 2003, n'est pas applicable au
présent litige, dès lors que le juge des assurances sociales n'a pas à
prendre en considération les modifications du droit ou de l'état de fait
postérieures à la date déterminante de la décision litigieuse du 16 janvier
2002 (ATF 127 V 467 consid. 1, 121 V 366 consid. 1b).

Aussi, les dispositions pertinentes à la solution du cas d'espèce, sont-elles
citées dans leur teneur jusqu'au 31 décembre 2002 dans les considérants qui
suivent.

3.
3.1 L'assurance-accidents est en principe tenue d'allouer ses prestations en
cas d'accident professionnel ou non professionnel (art. 6 al. 1 LAA). Par
accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire,
portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet
la santé physique ou mentale (art. 2 al. 2 LAMal; art. 9 al. 1 OLAA; ATF 122
V 232 consid. 1 et les références).

Il résulte de la définition même de l'accident que le caractère
extraordinaire de l'atteinte ne concerne pas les effets du facteur extérieur,
mais seulement ce facteur lui-même. Dès lors il importe peu que le facteur
extérieur ait entraîné, le cas échéant, des conséquences graves ou
inattendues. Le facteur extérieur est considéré comme extraordinaire
lorsqu'il excède, dans le cas particulier, le cadre des événements et des
situations que l'on peut, objectivement, qualifier de quotidiens ou
d'habituels (ATF 122 V 233 consid. 1, 121 V 38 consid. 1a ainsi que les
références).

3.2 Aux termes de l'art. 6 al. 2 LAA, le Conseil fédéral peut inclure dans
l'assurance des lésions corporelles qui sont semblables aux conséquences d'un
accident. En vertu de cette délégation de compétence, le Conseil fédéral a
édicté l'art. 9 al. 2 OLAA, qui - dans sa teneur en vigueur depuis le 1er
janvier 1998 (RO 1998 p. 153) - prévoit que pour autant qu'elles ne soient
pas manifestement imputables à une maladie ou à des phénomènes dégénératifs,
les lésions corporelles suivantes, dont la liste est exhaustive, sont
assimilées à un accident, même si elles ne sont pas causées par un facteur
extérieur de caractère extraordinaire:

a. Les fractures;
b. Les déboîtements d'articulations;
c. Les déchirures du ménisque;
d. Les déchirures de muscles;
e. Les élongations de muscles;
f.  Les déchirures de tendons;
g. Les lésions de ligaments;
h. Les lésions du tympan.

A cet égard, il convient de rappeler que dans sa version française en vigueur
jusqu'au 31 décembre 1997, la let. e faisait mention des cas de froissements
de muscles. Or les textes allemand (Muskelzerrungen) et italien (stiramenti
muscolari) n'ayant pas été modifiés par l'ordonnance du 15 décembre 1997, il
faut en déduire que la version française a été adaptée afin de mieux
correspondre aux notions des deux autres textes réglementaires (dans ce sens
cf. RAMA 1998 p. 105 ss). Désormais la version française correspond plus
parfaitement aux notions des textes allemand et italien. En conséquence,
l'ancien art. 9 al. 2 let. e OLAA, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31
décembre 1997, doit être interprété en ce sens que les cas d'élongations de
muscles survenus avant 1998 relevaient également des affections corporelles
assimilées à un accident (à propos de l'interprétation de textes légaux, voir
ATF 129 II 118 consid. 3.1, 356 consid. 3.3, 129 V 103 consid. 3.2, 263
consid. 5.1, 284 consid. 4.2 et les références).

La notion de lésion assimilée à un accident a pour but d'éviter, au profit de
l'assuré, la distinction souvent difficile entre maladie et accident. Aussi
les assureurs-accidents LAA doivent-ils assumer un risque qui, en raison de
la distinction précitée, devrait en principe être couvert par
l'assurance-maladie (ATF 123 V 44 sv. consid. 2b; 116 V 147 sv. consid. 6c,
114 V 301 consid. 3c; RAMA 2001 no U 435 p. 332, 1988 no U 57 p. 373 consid.
4b; Bühler, Die unfallähnliche Körperschädigung, in SZS 1996 p. 84). Dans ce
cadre, les lésions mentionnées à l'art. 9 al. 2 OLAA sont assimilées à un
accident même si elles ont, pour l'essentiel, une origine vraisemblablement
maladive ou dégénérative, pour autant qu'une cause extérieure ait, au moins,
déclenché les symptômes dont souffre l'assuré. En l'absence d'un tel facteur
déclenchant, ces lésions seront, en revanche, manifestement imputables à une
maladie ou à des phénomènes dégénératifs, de sorte qu'il appartiendra à
l'assurance-maladie d'en prendre en charge les suites (ATF 123 V 44 sv.
consid. 2b; 116 V 147 consid. 2c, 114 V 301 consid. 3c; RAMA 2001 U no 435 p.
332, 1988 U no 57 p. 373 consid. 4b; Bühler, loc. cit., p. 87).

3.3 Si l'on peut admettre qu'un accident n'a fait que déclencher un processus
qui serait de toute façon survenu sans cet événement, le lien de causalité
naturelle entre les symptômes présentés par l'assuré et l'accident doit être
nié lorsque l'état maladif antérieur est revenu au stade où il se trouvait
avant l'accident (statu quo ante) ou s'il est parvenu au stade d'évolution
qu'il aurait atteint sans l'accident (statu quo sine; RAMA 1992 no U 142 p.
75, consid. 4b; Frésard, L'assurance-accidents obligatoire, in
Schweizerisches Bundesverwal-tungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, no 141).
En principe, on examinera si l'atteinte à la santé est encore imputable à
l'accident ou ne l'est plus (statu quo ante ou statu quo sine) sur le critère
de la vraisemblance prépondérante, usuel en matière de preuve dans le domaine
des assurances sociales (ATF 126 V 360 consid. 5b, 125 V 195 consid. 2; RAMA
2000 no U 363 p. 46). Toutefois, les lésions énumérées à l'art. 9 al. 2 OLAA
seront assimilées à un accident aussi longtemps que leur origine maladive ou
dégénérative, à l'exclusion d'une origine accidentelle, ne peut être tenue
pour manifeste. Admettre, dans ce cadre, le retour à un statu quo ante ou
l'évolution vers un statu quo sine en se fondant sur la vraisemblance
prépondérante reviendrait à éluder cette disposition de l'OLAA; on se
trouverait du reste à nouveau confronté, immédiatement après avoir admis
l'existence de lésions assimilées à un accident, à la difficulté de
distinguer entre l'origine dégénérative ou accidentelle de ces lésions.

Enfin, d'après l'art. 11 OLAA, les prestations d'assurance sont également
versées en cas de rechutes ou de séquelles tardives; les bénéficiaires de
rentes d'invalidité doivent toutefois remplir les conditions posées à l'art.
21 de la loi.

4.
Dans son appréciation du 4 janvier 2000, le docteur K.________ a relevé un
ancien accident de moto en 1997 avec probablement une fracture-tassement D6.
A son avis, il était probable que l'accident du 4 juillet 1999 avait provoqué
une nouvelle aggravation des douleurs dorsales; une nouvelle lésion
post-traumatique n'avait toutefois pas été décrite. Le 17 août 2000, le
docteur K.________ a précisé que l'ancien tassement discret de D6 était
étranger à l'accident survenu en 1999. Il a ajouté que l'événement de 1999 ne
jouait très probablement plus de rôle dans les troubles dorso-lombaires et
que ce traumatisme n'avait pas créé de lésion morphologique. La CNA n'a ainsi
pas tenu compte des problèmes dorsaux de son assurée lorsqu'elle a fixé ses
prestations (cf. consid. 4c de la décision sur opposition du 29 juin 2001).

Quant au docteur S.________, il a attesté que les constatations radiologiques
mettaient en évidence une origine post-traumatique du tassement vertébral du
plateau supérieur et du mur antérieur de D6, imputable à une fracture
(rapports des 12 septembre et 12 décembre 2001).

5.
Plutôt que d'instruire la question de savoir si les douleurs dorsales
persistantes apparues après l'accident du 4 juillet 1999 constituaient une
rechute de l'événement du 30 juillet 1997, l'intimée, dans sa décision du 13
novembre 2001, a nié à l'événement qu'elle avait pris en charge à l'origine
la qualité d'accident au sens de l'art. 9 al. 1 OLAA, au motif de l'absence
de cause extérieure extraordinaire. De plus, l'affection diagnostiquée ne
figurait pas au nombre de celles qui sont énumérées à l'art. 9 al. 2 OLAA.
L'intimée a confirmé ce point de vue, le 16 janvier 2002, en relevant que les
médecins qui avaient examiné la recourante, en 1997, n'avaient pas constaté
de lésion osseuse. Elle a précisé que le lien de connexité entre le premier
événement (survenu en 1997) et les douleurs dorsales faisait défaut, compte
tenu du temps qui s'était écoulé jusqu'à l'accident de 1999. L'intimée a
suggéré à la recourante de faire valoir ses droits à l'encontre du conducteur
de la motocyclette, à son avis civilement responsable.

De leur côté, les premiers juges ont nié à juste titre un caractère
accidentel, au sens de l'art. 9 al. 1 OLAA, à l'événement du 30 juillet 1997.
Toutefois ils ont omis d'examiner cet événement et ses suites sous l'angle de
l'art. 9 al. 2 OLAA. Or le docteur S.________ avait fait part d'une
élongation musculaire dans le cadre d'un tassement du dos (rapport du 22 août
1997), tandis que son confrère P.________ avait attesté un syndrome
hyperalgique dorsal post-traumatique, en ajoutant que l'assurée présentait
des douleurs à la palpation paradorsale droite en D7-D8-D9 ainsi qu'en regard
des articulations costo-vertébrales aux mêmes niveaux avec inspiration
profonde douloureuse ainsi que flexion antérieure du thorax et latéralisation
à droite (rapport du 28 décembre 1997). Dès lors, il convient d'admettre que
lors du franchissement du «nid-de-poule», la recourante a subi une élongation
musculaire en raison d'un facteur extérieur survenu de façon soudaine et
involontaire. La recourante a donc été victime d'une lésion assimilée à un
accident au sens de l'art. 9 al. 2 let. e OLAA, (cf. consid. 3.2), dont
l'intimée devait assumer les conséquences.

L'état du dossier ne permet pas de savoir si les douleurs dorsales apparues
après l'accident du 4 juillet 1999 et qui persistaient après la prise en
charge de cet accident par la CNA, constituaient une rechute de l'accident du
30 juillet 1997. De plus, n'a pas été suffisamment élucidé le point de savoir
si l'ancienne fracture-tassement de la vertèbre D6, mise en évidence en 1999,
pouvait être rapportée à l'épisode du 30 juillet 1997, si bien qu'il n'est
pas possible en l'état, à défaut d'investigations idoines, d'en imputer les
suites éventuelles à l'intimée.

6.
Il s'ensuit que la décision litigieuse doit également être annulée dans la
mesure où elle porte sur le refus de l'intimée de prendre en charge la
rechute de l'accident du 30 juillet 1997. Le jugement attaqué sera donc
réformé en ce sens que la cause sera renvoyée à l'intimée pour qu'elle
reprenne l'instruction de la demande du 28 août 2000. A cette occasion,
l'intimée invitera un expert à s'exprimer sur le lien de causalité naturelle
entre l'accident du 30 juillet 1997 et les troubles dorsaux annoncés le 28
août 2000, ainsi que sur l'origine de la fracture-tassement de D6. Ce n'est
qu'ensuite qu'elle pourra fixer l'étendue de ses prestations.

7.
L'intimée, qui succombe, est redevable d'une indemnité de dépens à la
recourante (art. 159 al. 1 OJ).

Vu l'issue du litige, la demande d'assistance judiciaire n'a plus d'objet.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est admis. Le jugement du Tribunal des assurances du canton du
Valais du 29 janvier 2003 est réformé en ce sens que la décision de CSS
Assurances SA du 16 janvier 2002 est également annulée dans la mesure où elle
porte sur le refus de l'intimée de prendre en charge la rechute de l'accident
du 30 juillet 1997. La cause est renvoyée à l'intimée pour instruction
complémentaire au sens des considérants et nouvelle décision.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
L'intimée versera à la recourante la somme de 2'500 fr. (y compris la taxe à
la valeur ajoutée) à titre de dépens pour la procédure fédérale.

4.
Le Tribunal des assurances du canton du Valais statuera sur les dépens pour
la procédure de première instance, au regard de l'issue du procès de dernière
instance.

5.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du
canton du Valais et à l'Office fédéral de la santé publique.

Lucerne, le 28 juin 2004
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la IIIe Chambre:   Le Greffier: