Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen U 196/2003
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U 196/03

Arrêt du 11 mars 2004
IIIe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Ferrari et Boinay, suppléant.
Greffière : Mme von Zwehl

R.________, recourant, représenté par Me Louis-Marc Perroud, avocat, rue du
Progrès 1, 1701 Fribourg,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Service juridique,
Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne, intimée

Tribunal administratif du canton de Fribourg, Cour des assurances sociales,
Givisiez

(Jugement du 4 juillet 2003)

Faits:

A.
R. ________, né en 1953, travaillait en qualité d'électronicien dans le
service de production de l'entreprise V.________ SA; son activité consistait
essentiellement à contrôler, à étalonner et à monter des pièces (d'un poids
de 30 à 40 kilos) sur un établi. A ce titre, il était assuré contre le risque
d'accidents auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas
d'accidents (CNA).

Le 25 août 1998, occupé à des travaux de bétonnage à son domicile, il a
ressenti des douleurs au dos en retenant des plaques en treillis, d'un poids
total de 600 kg environ, qui allaient se renverser sur lui. Consulté trois
jours plus tard, le docteur G.________, médecin traitant, a diagnostiqué une
fracture-tassement des vertèbres D7 et D8 et attesté d'une incapacité totale
de travail dès le jour de l'incident (rapport médical LAA du 16 septembre
1998). La CNA a pris en charge le cas.

L'assuré a porté un corset durant trois mois et bénéficié de séances de
physiothérapie, ce qui lui a permis de reprendre le travail à 50 % dès le 18
janvier 1999. Après avoir été examiné par le docteur B.________, médecin
d'arrondissement de la CNA, l'assuré a augmenté son taux d'activité à 75 % le
4 octobre 1999. En dépit d'un aménagement de son poste de travail, il a dû
réduire son activité à 50 % dès le 14 octobre suivant, en raison d'une
recrudescence de ses douleurs. L'assuré a alors été adressé pour une
rééducation fonctionnelle intensive à la Clinique X.________ (ci-après : la
clinique de réhabilitation), où il a séjourné du 3 au 28 avril 2000. Dans
leur rapport de sortie du 12 mai 2000, les médecins de cette clinique ont
décrit une diminution des douleurs et un net progrès de la force et de
l'endurance; ils ont fixé la capacité de travail de R.________ à 75 % à
partir du 1er mai 2000. Le docteur G.________ a toutefois annoncé à la CNA
une incapacité de travail de 50 % dès le 3 mai 2000. Interpellé par cette
dernière, le médecin précité a répondu dans une lettre du 20 mai 2000 que son
patient souffrait de lombosciatalgies droites qui, selon les dires de
celui-ci, seraient apparues au cours des exercices de musculation pratiqués à
la clinique de réhabilitation; il a également mentionné des dorsalgies D7-D8
sans modification notable, ainsi qu'une contracture sévère de la musculature
para-lombaire avec des douleurs à la palpation au niveau L4-L5. Après un
examen par IRM réalisé le 6 juin 2000, le docteur H.________, neurologue, a
posé le diagnostic de canal lombaire étroit à la hauteur de L3-L4 et L4-L5,
protrusion discale L4-L5 prédominante à gauche, et rétrolisthésis lombo-sacré
avec hernie discale médiane L5-S1 (rapport du 23 juin 2000). Dans une
appréciation médicale du 19 juillet 2000, le docteur B.________ a estimé que
les troubles constatés par le docteur H.________ ne pouvaient pas être
attribués à l'accident du 25 août 1998 vu le temps écoulé depuis lors (1
année et 10 mois) et la région dorsale lésée par cet accident (7ème et 8ème
vertèbres); il a toutefois encore reconnu une incapacité de travail de 25 %
jusqu'au 30 juin 2000, suivant en cela les conclusions des médecins de la
clinique de réhabilitation. L'assuré a contesté ce point de vue et produit
deux rapports (des docteurs O.________ et A.________), à teneur desquels son
état se serait aggravé par le traitement qu'il avait suivi à Sion. La CNA a
soumis les nouveaux documents pour avis à son médecin d'arrondissement, qui a
nié le fait qu'une rééducation musculaire puisse être à l'origine d'une
aggravation des lésions dégénératives observées chez l'assuré.

Se fondant sur cet avis, la CNA a refusé d'allouer des prestations
d'assurance (décision du 5 mars 2001). Saisie d'une opposition, elle l'a
rejetée dans une nouvelle décision du 30 juillet 2001.

B.
R.________ a déféré cette décision au Tribunal administratif du canton de
Fribourg, en concluant, sous suite de dépens, à l'octroi par la CNA d'une
rente d'invalidité fondée sur une incapacité de travail totale dès le 1er
juillet 2000. A l'appui de son recours, il a produit un rapport du docteur
C.________ (du 4 octobre 2001).

Par jugement du 4 juillet 2003, le tribunal a rejeté le recours.

C.
R.________ interjette un recours de droit administratif contre ce jugement,
dont il requiert l'annulation, en reprenant ses conclusions formulées en
première instance.

La CNA conclut au rejet du recours. De son côté, l'Office fédéral des
assurances sociales, division maladie et accidents (depuis le 1er janvier
2004 intégrée à l'Office fédéral de la santé publique), a renoncé à présenter
des déterminations.

Considérant en droit:

1.
La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6
octobre 2000 (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003, entraînant la
modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de
l'assurance-accidents. Cependant, le cas d'espèce reste régi par les
dispositions de la LAA en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002, eu égard au
principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur au moment
où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 127 V 467
consid. 1).

2.
2.1 Aux termes de l'art. 6 al. 1 LAA, si la loi n'en dispose pas autrement,
les prestations d'assurance sont allouées en cas d'accident professionnel,
d'accident non professionnel et de maladie professionnelle. Selon l'al. 3 de
cette disposition, l'assurance alloue en outre ses prestations pour les
lésions causées à l'assuré victime d'un accident lors du traitement médical.

2.2 Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose
d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte
à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette exigence est remplie
lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage
ne se serait pas produit du tout, ou qu'il ne serait pas survenu de la même
manière. Il n'est pas nécessaire, en revanche, que l'accident soit la cause
unique ou immédiate de l'atteinte à la santé; il faut et il suffit que
l'événement dommageable, associé éventuellement à d'autres facteurs, ait
provoqué l'atteinte à la santé physique ou psychique de l'assuré,
c'est-à-dire qu'il se présente comme la condition sine qua non de celle-ci.
Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un
rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l'administration
ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des
renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à
la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à
l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque
l'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le dommage
paraît possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le
cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident assuré
doit être nié (ATF 129 V 181 consid. 3.1, 119 V 337 consid. 1, 118 V 289
consid. 1b et les références).

2.3 On rappellera également que, selon l'expérience médicale, pratiquement
toutes les hernies discales s'insèrent dans un contexte d'altération des
disques intervertébraux d'origine dégénérative, un événement accidentel
n'apparaissant qu'exceptionnellement, et pour autant que certaines conditions
particulières soient réalisées, comme la cause proprement dite d'une telle
atteinte (arrêts non publiés D. du 5 mars 2001, U 278/00, N. du 7 février
2000, U 149/99, O. du 12 décembre 1996, U 144/96, et S. du 26 août 1996, U
159/95). Une hernie discale peut être considérée comme étant due
principalement à un accident, lorsque celui-ci revêt une importance
particulière, qu'il est de nature à entraîner une lésion du disque
intervertébral et que les symptômes de la hernie discale (syndrome vertébral
ou radiculaire) apparaissent immédiatement, entraînant aussitôt une
incapacité de travail.

3.
En l'espèce, le recourant - qui se plaint essentiellement de lombosciatalgies
droites - présente, d'après le dernier examen par IRM versé au dossier (du 9
mai 2001), plusieurs hernies discales étagées (en L2-L3, en L3-L5, en L4-L5
et en L5-S1). Il soutient que ses troubles dorsaux sont imputables, sinon à
l'accident dont il a été victime le 25 août 1998, à tout le moins au
traitement qu'il a suivi à la Clinique romande de réadaptation, de sorte que
la responsabilité de la CNA serait toujours engagée.

4.
La présence de lombosciatalgies droites a été signalée pour la première fois
par le docteur G.________ dans une lettre du 20 mai 2000, sans que celui-ci
ne se prononce toutefois sur leur cause. Le docteur H.________, auquel
l'assuré a ensuite été adressé, a déclaré pour sa part ne pas comprendre la
symptomatologie douloureuse de la région lombaire droite, les altérations
discales observables sur l'imagerie médicale du 6 juin 2000 étant plutôt
situées vers la gauche (rapport du 23 juin 2000). Consulté pour un deuxième
avis, le docteur O.________, a évoqué «des lombalgies avec pseudo-sciatalgies
avec probablement une composante discrète de périarthrite de hanche à droite»
en ajoutant que «ceci a pu apparaître et se décompenser à la suite des
traitements de physiothérapie axés sur la région dorsale moyenne» (rapport du
3 novembre 2000). Aux yeux du docteur A.________, les lombalgies sont la
conséquence d'une discopathie qui a probablement déjà été lésée au moment de
l'accident de 1998 et qui a été «notoirement aggravée par le traitement de
rééducation musculaire intensive de la clinique X.________» (rapport du 10
janvier 2001). Pour le docteur C.________, «ce sont bien les lésions discales
étagées visualisées par l'IRM [du 9 mai 2001] qui sont à l'origine de la
lombosciatalgie du patient»; ces lésions rachidiennes, dit-il, ne peuvent que
difficilement être attribuées à l'accident du 25 août 1998 car R.________ n'a
manifesté aucune plainte «de type lombosciatalgique» consécutivement à cet
événement et que les radiographies effectuées à l'époque n'ont révélé aucun
signe de lésion discale de la région lombaire; en revanche, ce médecin
retient sur la base des déclarations de l'assuré que le soulèvement d'un
poids de 25 kg lors de séances de physiothérapie constitue «avec une
vraisemblance raisonnable» la cause naturelle du déclenchement de la
lombosciatalgie (rapport du 4 octobre 2001).

5.
5.1 Eu égard à ces considérations médicales, l'existence d'un lien de
causalité entre les lombosciatalgies ou lombalgies dont souffre le recourant
et l'accident du 25 août 1998 ne peut qu'être nié. La plupart des médecins
qui se sont prononcés sur l'étiologie de ces troubles partagent en effet
l'appréciation du médecin d'arrondissement de l'intimée sur ce point. Seul le
docteur A.________ laisse entendre le contraire. Devant les conclusions
claires et motivées de ses confrères, son avis, qui repose au demeurant sur
une simple affirmation, n'emporte toutefois pas la conviction.

5.2 Les éléments contenus au dossier ne permettent pas non plus de tenir pour
établi, au degré de la vraisemblance prépondérante, que la symptomatologie
présentée par le recourant s'inscrit dans un rapport causal avec les
exercices de musculation qu'il a effectués à la clinique de réhabilitation.
Les docteurs O.________, A.________ et C.________ étayent leur opinion sur
les seules affirmations de R.________ au sujet de la date d'apparition de ses
premiers symptômes. Or, d'une consultation médicale à l'autre, ce dernier a
passablement varié dans ses déclarations. Ainsi, les docteurs G.________ et
C.________ ont mentionné que les lombosciatalgies de l'assuré étaient
survenues «au cours» de son séjour à la clinique de réhabilitation, tandis
que le docteur O.________ a noté qu'elles avaient commencé à se manifester
«après sa sortie de la clinique». Par ailleurs, les déclarations du recourant
sont infirmées par le rapport du docteur Y.________ de la clinique de
réhabilitation (du 12 mai 2000) dont il ressort que l'intéressé s'était
déclaré satisfait de son séjour et qu'il ressentait une diminution de ses
douleurs; interrogé par la CNA en cours de procédure d'opposition, ce médecin
a encore confirmé dans une lettre du 19 juillet 2001 que les notes des
médecins, infirmières et physiothérapeutes ayant soigné le recourant ne
faisaient nulle part mention de plaintes pour des lombalgies ou des
lombosciatalgies. A n'en pas douter, si le recourant avait ressenti une
douleur telle qu'il a décrite au docteur C.________, il aurait été empêché de
poursuivre les exercices de musculation et le personnel soignant se serait
inévitablement aperçu du problème. Que ces exercices représentent le facteur
causal de la symptomatologie apparaît d'autant moins vraisemblable que les
mêmes médecins qui soutiennent cette conclusion sont également unanimes pour
dire que les lombosciatalgies de R.________ sont liées aux lésions discales
dont le prénommé est atteint, lésions dont le caractère dégénératif ne prête
pas à discussion. Une éventuelle responsabilité de l'intimée en vertu de
l'art. 6 al. 3 LAA doit donc également être écartée.

5.3 Cette conclusion s'impose sans qu'il soit nécessaire, comme le demande le
recourant, de mettre en oeuvre une expertise médicale et d'auditionner des
témoins. D'une part, le dossier médical est très fourni et contient tous les
éléments nécessaires à la Cour de céans pour trancher le présent litige en
connaissance de cause. D'autre part, on ne voit pas que l'audition des
témoins pourrait apporter davantage que ce qui est déjà établi par pièces.

6.
Il s'ensuit que le recours est mal fondé.

Vu la nature du litige, la procédure est gratuite (art. 134 OJ). Le
recourant, qui succombe, ne peut prétendre de dépens (art. 159 OJ a
contrario).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal administratif du
canton de Fribourg, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral de la
santé publique.

Lucerne, le 11 mars 2004
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la IIIe Chambre:   La Greffière: