Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen P 15/2003
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P 15/03

Arrêt du 26 mars 2004
IIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Lustenberger et Frésard. Greffier : M.
Beauverd

G.________, recourant,

contre

Caisse cantonale vaudoise de compensation AVS, rue du Lac 37, 1815 Clarens,
intimée

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 20 septembre 2002)

Faits:

A.
G. ________, né en 1952, est au bénéfice d'une rente de
l'assurance-invalidité et d'une prestation complémentaire à l'AVS/AI depuis
le 1er juin 1999.

Inscrit depuis le 12 mai 1999 à l'adresse de C.________, à L.________, il
vivait en réalité, depuis le 1er février précédent, dans un camping-car
appartenant à la prénommée et s'acquittait des traites mensuelles de 722 fr.
75 relatives à la dette bancaire contractée pour l'achat du véhicule.
Indiquant avoir une dette de 300'000 fr. environ, il alléguait ne pas pouvoir
trouver un logement en raison de sa mauvaise situation financière.

La Caisse cantonale vaudoise de compensation (ci-après : la caisse) a accepté
de prendre en compte, au titre du loyer et des frais accessoires y relatifs,
le montant des mensualités (décision du 21 septembre 1999), ainsi qu'une
somme de 456 fr. représentant les frais de gaz pour une année (décision du 28
décembre 2000).

L'accord passé avec C.________ a pris fin au mois d'août 2001. Le 20
septembre 2000, S.________ a conclu un contrat de leasing portant sur une
voiture de tourisme Fiat Ducato neuve, d'une valeur de 55'500 fr. Les
redevances mensuelles du leasing étaient fixées à 827 fr. 75. Le contrat
prévoyait en outre un versement initial de 14'000 fr. Le 14 septembre 2001,
la prénommée a indiqué avoir conclu un contrat de leasing portant sur un «
camping-car Challenger » (sic) pour le compte de G.________, à charge pour
celui-ci de s'acquitter des redevances mensuelles de 827 fr. 70.

Par décision du 19 novembre 2001, la caisse a fixé à 243 fr. le montant
mensuel de la prestation complémentaire allouée à l'assuré à partir du 1er
novembre précédent. Dans la fixation des dépenses reconnues, elle n'a pas
opéré de déduction au titre des frais de loyer. A l'appui de cette décision,
elle a indiqué que les redevances mensuelles relatives au contrat de leasing
ne pouvaient pas être prises en compte à ce titre. En ce qui concerne le
camping-car mis à disposition par C.________, le montant mensuel de la
location n'avait été pris en compte qu'à titre provisoire, dans l'attente de
la conclusion d'un contrat de bail à loyer. Quoi qu'il en soit, cette
solution n'était pas conforme à la loi.

B.
G.________ a recouru contre cette décision devant le Tribunal des assurances
du canton de Vaud, en demandant que les redevances mensuelles relatives au
contrat de leasing soient prises en compte au titre du loyer.

Dans sa réponse au recours, la caisse a proposé de modifier la décision
attaquée en ce sens qu'un montant mensuel de 300 fr. - somme représentant le
forfait prévu dans l'AVS pour le logement des personnes employées dans
l'entreprise et du personnel de maison - soit pris en compte dans le calcul
de la prestation complémentaire.

Par jugement du 20 septembre 2002, la juridiction cantonale a admis
partiellement le recours et réformé la décision entreprise dans le sens de la
proposition en procédure faite par la caisse.

C.
G.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement en
reprenant ses conclusions formées devant la juridiction cantonale.

La caisse intimée conclut implicitement au rejet du recours. L'Office fédéral
des assurances sociales a renoncé à présenter des déterminations.

Invité à se déterminer sur l'éventualité d'une réforme à son détriment du
jugement cantonal, le recourant n'a pas répondu.

Considérant en droit:

1.
La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6
octobre 2000 (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003, entraînant la
modification de nombreuses dispositions légales dans le régime des
prestations complémentaires à l'AVS/AI. Cependant, le cas d'espèce reste régi
par les dispositions de la LPC en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002, eu égard
au principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur au
moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 127 V
467 con-sid. 1). En outre, le Tribunal fédéral des assurances apprécie la
légalité des décisions attaquées, en règle générale, d'après l'état de fait
existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 121 V 366
consid. 1b).

2.
Les ressortissants suisses qui ont leur domicile et leur résidence habituelle
en Suisse et qui remplissent une des conditions (personnelles) prévues aux
art. 2a à 2d doivent bénéficier de prestations complémentaires si les
dépenses reconnues par la loi sont supérieures aux revenus déterminants (art.
2 al. 1 LPC).

Pour les personnes qui ne vivent pas en permanence ou pour une longue période
dans un home ou dans un hôpital (personnes vivant à domicile), les dépenses
reconnues comprennent, outre les montants destinés à la couverture des
besoins vitaux (art. 3b al. 1 let. a LPC) et d'autres frais qui n'entrent pas
en ligne de compte en l'occurrence (art. 3b al. 3 LPC), le loyer d'un
appartement et les frais accessoires y relatifs (art. 3b al. 1 let. b, 1ère
phrase LPC, en vigueur depuis le 1er janvier 1998 [3ème révision de la LPC]).

3.
3.1
La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre. Selon la jurisprudence,
il n'y a lieu de déroger au sens littéral d'un texte clair par voie
d'interprétation que lorsque des raisons objectives permettent de penser que
ce texte ne restitue pas le sens véritable de la disposition en cause. De
tels motifs peuvent découler des travaux préparatoires, du but et du sens de
la disposition, ainsi que de la systématique de la loi. Si le texte n'est pas
absolument clair, si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, il
convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la
dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux
préparatoires, du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur
lesquelles elle repose ou encore de sa relation avec d'autres dispositions
légales (ATF 129 II 118 consid. 3.1, 356 consid. 3.3, 129 V 103 consid. 3.2,
263 consid. 5.1, 284 consid. 4.2 et les références).

3.2  Selon le sens commun, un appartement est défini comme une partie de
maison, d'immeuble composée de plusieurs pièces qui servent d'habitation (le
Grand Robert de la langue française).

Il n'y a pas de raisons objectives de penser que le texte de l'art. 3b al. 1
let. b LPC ne restitue pas le sens véritable de la disposition en cause.
Certes, dans sa version antérieure à la troisième révision de la LPC, l'art.
4 let. b LPC (en vigueur jusqu'au 31 décembre 1970) et l'art. 4 al. 1 let. b
LPC (en vigueur jusqu'au 31 décembre 1997), qui ont été remplacés par l'art.
3b al. 1 let. b LPC dans sa version applicable en l'occurrence, autorisaient
les cantons à prévoir simplement une déduction pour loyer, lequel est défini
comme le prix du louage de choses (le Grand Robert de la langue française).
Toutefois, dans son message à l'Assemblée fédérale relatif à un projet de loi
sur les prestations complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et
invalidité du 21 septembre 1964, le Conseil fédéral a indiqué que la
déduction en cause concernait le loyer d'appartements (FF 1964 II 719), de
sorte qu'on ne saurait déduire des travaux préparatoires que ladite déduction
peut se rapporter au loyer d'autres objets que des appartements servant
d'habitation. Quant aux versions allemande et italienne du texte légal, elles
n 'autorisent pas une autre conclusion.

3.3 En l'espèce, le contrat de leasing conclu par S.________ le 20 septembre
2000 porte sur une voiture de tourisme Fiat Ducato 14 2.8 TD neuve, d'une
valeur de 55'500 fr, destinée au transport de marchandise et de personnes. Du
moment que ce véhicule mis à disposition du recourant par la prénommée ne
constitue pas un objet servant à l'habitation, les frais correspondant aux
redevances du contrat de leasing ne sauraient être pris en compte au titre du
loyer d'un appartement au sens de l'art. 3b al. 1 let. b LPC.

Ils ne peuvent pas non plus être pris en considération au titre des autres
dépenses reconnues énumérées à l'art. 3b LPC, dont la liste est exhaustive
(Erwin Carigiet/Uwe Koch, Ergänzungsleistungen zur AHV/AI, Supplément, Zurich
2000, p. 83).

4.
4.1 Selon l'art. 5 al. 2 LAVS, le salaire déterminant soumis à cotisation
comprend toute rémunération pour un travail dépendant, fourni pour un temps
déterminé ou indéterminé; il comprend notamment les prestations en nature
obtenues de l'employeur. A ce titre, l'art. 11 al. 1 RAVS prévoit un forfait
de 30 fr. par jour pour la nourriture et le logement des personnes employées
dans l'entreprise et du personnel de maison. Si l'employeur ne fournit qu'en
partie la nourriture et le logement, un montant de 10 fr. par jour est pris
en compte pour le logement au titre de prestation en nature soumise à
cotisation (art. 11 al. 2 RAVS).

4.2 Se référant à la proposition en procédure faite par la caisse, la
juridiction cantonale a jugé conforme au droit et à l'équité de tenir compte,
au titre du loyer déterminant pour le calcul de la prestation complémentaire,
d'un montant mensuel de 300 fr. correspondant au forfait pour le logement
prévu à l'art. 10 al. 2 RAVS (30 x 10 fr.).

Ce point de vue ne saurait être partagé. Si la réglementation des prestations
complémentaires à l'AVS/AI renvoie parfois aux prescriptions valables pour
l'assurance-vieillesse et survivants en ce qui concerne la fixation de
certains montants déterminants pour le calcul de la prestation complémentaire
(cf. art. 11 al. 1 OPC-AVS/AI relatif à l'évaluation du revenu en nature au
sens de l'art. 3c al. 1 let. a LPC), on ne saurait, à l'aide d'une
application par analogie de la réglementation de l'AVS, procéder au calcul de
la prestation complémentaire en tenant compte de dépenses non reconnues par
la législation en matière de prestations complémentaires à l'AVS/AI.

Cela étant, la juridiction cantonale n'était pas en droit de prendre en
compte, dans le calcul de la prestation complémentaire un montant mensuel de
300 fr. au titre du loyer.

5.
5.1 Le recourant allègue que la caisse intimée a accepté de prendre en compte
le montant total du leasing jusqu'au 1er novembre 2001 et qu'aucun détail de
la décision initiale lui laissait supposer qu'un jour cette décision allait
changer sans que sa situation ne se fût modifiée entre-temps.

Ce faisant, le recourant invoque le droit à la protection de la bonne foi.

5.2 Le droit à la protection de la bonne foi, déduit de l'art. 4 aCst., est
expressément consacré à l'art. 9 Cst. Selon la jurisprudence rendue sous
l'ancien droit, qui est toujours valable (ATF 127 I 36 consid. 3a, 126 II 387
consid. 3a; RAMA 2001 no KV 171 p. 281 consid. 3b, 2000 no KV 126 p. 223, no
KV 133 p. 291 consid. 2a), il permet au citoyen - à certaines conditions (ATF
121 V 66 consid. 2a et les références) - d'exiger que l'autorité respecte ses
promesses et qu'elle évite de se contredire. Il faut notamment que
l'administré se soit fondé sur un renseignement erroné pour prendre des
dispositions qu'il ne saurait modifier sans subir un préjudice.

5.3 En l'espèce, il n'est pas nécessaire d'examiner si la décision du 21
septembre 1999, par laquelle la caisse a accepté de prendre en compte le
montant des mensualités versées à C.________, constituait une promesse de
nature à faire naître le droit à la protection de la bonne foi. En effet, il
n'apparaît pas que le recourant ait subi un préjudice en se fondant sur la
décision susmentionnée. Le contrat de leasing portant sur le véhicule Fiat
Ducato a été conclu par S.________ le 20 septembre 2000, c'est-à-dire bien
avant le mois d'août 2001, époque à laquelle a pris fin l'accord passé avec
C.________. Cela étant, même s'il s'est peut-être acquitté d'un versement
initial, le recourant ne peut valablement soutenir qu'il a incité S.________
à conclure le contrat de leasing en vue de se loger et continuer ainsi, sur
la foi de la décision du 21 septembre 1999, de bénéficier de la prise en
compte de ses frais de logement dans le calcul de la prestation
complémentaire.

6. Vu ce qui précède, la caisse intimée était fondée, par sa décision du 19
novembre 2001 à fixer les dépenses reconnues sans tenir compte des frais de
logement.

Le jugement attaqué devra être annulé et le recours se révèle ainsi mal
fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Le jugement du Tribunal des assurances du canton de Vaud du 20 septembre 2002
est annulé.

3.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du
canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 26 mars 2004
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIe Chambre:   Le Greffier: