Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen K 74/2003
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K 74/03

Arrêt du 2 septembre 2004
Ire Chambre

MM. et Mme les Juges Borella, Président, Leuzinger, Ferrari, Rüedi et Meyer.
Greffier : M. Wagner

ASSURA, Assurance maladie et accident,
avenue C.-F. Ramuz 70, 1009 Pully, recourante, représentée par Me Pascal
Marti, avocat, place des Philosophes 8, 1205 Genève,

contre

Etat de Vaud, Département de la santé et de l'action sociale, c/o Service de
la Santé publique, avenue des Casernes 2, 1014 Lausanne, intimé

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 3 avril 2003)

Faits:

A.
Par lettre du 12 avril 2002, Assura a demandé à l'Etat de Vaud paiement de la
somme de 5'572'954 fr. au titre de remboursement partiel des prestations
allouées pour des séjours effectués par ses assurés dans des établissements
privés non subventionnés mais figurant dans la planification hospitalière
cantonale.
L'Etat de Vaud a rejeté la demande par décision du 13 août 2002.

B.
Assura a recouru contre cette décision devant le Tribunal des assurances du
canton de Vaud, concluant à l'annulation de cette décision et à la
condamnation de l'Etat de Vaud au paiement de la somme requise, sous suite de
frais et dépens.
Par jugement du 3 avril 2003, la juridiction cantonale a rejeté le recours et
mis un émolument de procédure de 500 fr. à la charge de la recourante.

C.
Assura interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont elle
demande sous suite de frais et dépens l'annulation. Elle conclut en substance
et à titre principal à ce que l'Etat de Vaud soit tenu de participer
financièrement, à hauteur de 50% du coût imputable à la division commune,
pour les séjours hospitaliers dans les cliniques privées vaudoises au cours
de la période allant de 1996 à 2001 et à la condamnation de l'Etat de Vaud au
paiement de 5'572'954 fr.
L'Etat de Vaud conclut au rejet du recours, en se référant pour l'essentiel à
ses écritures précédentes. De son côté, l'Office fédéral des assurances
sociales, Domaine maladie et accident (intégré, depuis le 1er janvier 2004, à
l'Office fédéral de la santé publique), propose le rejet du recours aux
termes de ses observations.

Considérant en droit:

1.
Le litige porte sur le point de savoir si une personne hospitalisée en
division commune d'une clinique privée du canton où elle habite, clinique
figurant dans la planification hospitalière cantonale, - ou pour elle son
assureur-maladie - peut prétendre de ce canton la part des coûts imputables
dans un hôpital public ou subventionné à la charge du canton. La question qui
divise les parties est celle de l'interprétation de l'art. 49 al. 1 deuxième
phrase LAMal. Il faut donc admettre, pour les mêmes motifs que dans l'arrêt
ATF 127 V 422 consid. 1, que la recevabilité du recours et la compétence du
Tribunal fédéral des assurances pour connaître de celui-ci sont données.

2.
Le litige n'ayant pas pour objet l'octroi ou le refus de prestations
d'assurance (ATF 127 V 424 consid. 2), le Tribunal fédéral des assurances
doit se borner à examiner si les premiers juges ont violé le droit fédéral, y
compris par l'excès ou par l'abus de leur pouvoir d'appréciation, ou si les
faits pertinents ont été constatés d'une manière manifestement inexacte ou
incomplète, ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de
procédure (art. 132 en corrélation avec les art. 104 let. a et b et 105 al. 2
OJ).

3.
Ratione temporis, les dispositions de la loi fédérale sur la partie générale
du droit des assurances sociales (LPGA), entrée en vigueur le 1er janvier
2003, ne sont pas applicables.

3.1  L'art. 49 al. 1 LAMal prescrit que pour rémunérer le traitement
hospitalier, y compris le séjour à l'hôpital (art. 39, al. 1), les parties à
une convention conviennent de forfaits. Pour les habitants du canton, ces
forfaits couvrent au maximum, par patient ou par groupe d'assurés, 50% des
coûts imputables dans la division commune d'hôpitaux publics ou subventionnés
par les pouvoirs publics. Les coûts imputables sont établis lors de la
conclusion de la convention. La part des frais d'exploitation résultant d'une
surcapacité, les frais d'investissement et les frais de formation et de
recherche ne sont pas pris en compte.

3.2  Dans deux arrêts du 16 décembre 1997 publié aux ATF 123 V 290 et du 19
décembre 1997 publié aux ATF 123 V 310, le Tribunal fédéral des assurances a
admis que le canton de résidence avait l'obligation de prendre en charge la
différence de coûts lorsque des raisons médicales obligent des habitants du
canton à suivre un traitement hospitalier ou semi-hospitalier dans un hôpital
situé dans un autre canton (art. 41 al. 3 LAMal). Celle-ci n'existe que pour
les traitements appliqués dans un hôpital public ou subventionné par les
pouvoirs publics. Une telle obligation n'existe pas lorsque l'assuré se rend
dans un hôpital privé, non public ou non subventionné par les pouvoirs
publics (ATF 123 V 310).
Ainsi que l'a exposé la Cour de céans dans un arrêt du 30 novembre 2001,
publié aux ATF 127 V 422, l'art. 49 al. 1 LAMal s'inscrit dans le dispositif
de protection tarifaire des assurés instauré par la législation entrée en
vigueur le 1er janvier 1996 (art. 44 al. 1 LAMal) qui a pour effet que le
fournisseur de prestations ne peut pas facturer à l'assuré davantage que le
montant dû par la caisse-maladie selon le tarif (ATF 127 V 426 consid. 4b et
la référence). Il délimite l'étendue du droit qu'un assuré peut faire valoir
à l'égard de l'assurance obligatoire des soins lorsqu'il séjourne dans un
hôpital public ou subventionné, indépendamment de la division qu'il choisit
(ATF 127 V 428 consid. 4c, 125 V 105 consid. 3e). Une personne hospitalisée
en division privée ou semi-privée d'un hôpital public du canton où elle
habite - ou, pour elle, son assureur-maladie - peut toutefois prétendre de ce
canton la part des coûts imputables dans la division commune de cet hôpital à
la charge du canton (ATF 127 V 429 s. consid. 5 et 6).

4.
Dans son message du 26 mai 2004 concernant la révision de la loi fédérale sur
l'assurance-maladie (Stratégie et thèmes urgents, FF 2004 IV 4019), le
Conseil fédéral a exposé la stratégie de réforme future après l'échec de la
deuxième révision de la LAMal au cours de la session d'hiver 2003. Dans
l'optique d'une consolidation et d'une optimisation du système existant, il y
a lieu d'introduire des réformes légales, notamment dans le financement
hospitalier (FF 2004 IV 4029):
Pratiquement dès l'entrée en vigueur de la LAMal, l'obligation de
participation des cantons au traitement hospitalier de patients bénéficiant
d'une assurance complémentaire avait fait l'objet de discussions politiques,
malgré le fait que le texte de loi et sa logique étaient clairs. Par un arrêt
rendu le 30 novembre 2001, le Tribunal fédéral des assurances (TFA; ATF 127 V
422 s.) a fixé que les cantons devaient apporter leur contribution aux frais
d'hospitalisation d'une personne au bénéfice d'une assurance complémentaire
non seulement en cas de séjour hospitalier hors du canton, mais également en
cas de séjour hospitalier dans les hôpitaux publics ou subventionnés par les
pouvoirs publics sur le territoire du canton. Cette précision de l'instance
judiciaire suprême d'une volonté au fond claire du législateur a entraîné
deux mesures au niveau législatif, l'une à court terme, l'autre à moyen
terme:
une application immédiate et totale de la décision du TFA aurait posé
d'importants problèmes financiers aux cantons. Aussi le Parlement a-t-il
atténué ce problème avec une loi fédérale déclarée urgente (loi fédérale du
21 juin 2002 sur l'adaptation des participations cantonales aux coûts des
traitements hospitaliers dispensés dans le canton selon la loi fédérale sur
l'assurance-maladie; RS 832.14) et décidé que la décision du TFA serait
appliquée par étapes entre 2002 et 2004. Cette loi fédérale urgente constitue
une solution transitoire jusqu'à l'entrée en vigueur de la 2e révision de la
LAMal.
à moyen terme, la 2e révision de la LAMal, que le Conseil fédéral avait déjà
entamée avant la décision du TFA de 2001, proposait un passage du système
actuel de financement des établissements à un système de financement des
prestations, les coûts des prestations - ainsi que des investissements - des
hôpitaux publics et privés pris en compte dans la planification cantonale
devant être assumés pour moitié par les cantons et pour moitié par les
assureurs-maladie (financement dual fixe). Ce changement en faveur d'un
système de financement dual des prestations, qui établit une plus grande
égalité de traitement entre les différents fournisseurs de prestations
hospitalières, favorisant donc la concurrence, a rallié une majorité dans le
débat politique. Il s'agit d'un modèle concurrentiel - si l'on excepte les
financements différents des prestations ambulatoires et hospitalières - qui
repose sur le rapport prix-prestation et sur la transparence nécessaire du
marché.
Cette démarche en deux temps devrait être reprise pour les prochaines étapes
de la révision: à court terme, il s'agit pour des raisons de sécurité
juridique de prolonger la loi fédérale sur les participations cantonales
jusqu'à l'entrée en vigueur de la révision de la loi relative au financement
des hôpitaux. En effet, la détermination de la participation du canton aux
frais du traitement hospitalier d'une personne au bénéfice d'une assurance
complémentaire dispensé dans le canton est à nouveau susceptible d'être
contestée. Cette révision de la loi doit à nouveau proposer le modèle de
financement dual fixe, car le financement moniste des hôpitaux, considéré
dans le rapport d'experts relatif à la 3e LAMal comme une solution pour
l'avenir, soulève encore de nombreuses questions et ne peut pas être mis en
oeuvre à partir de la situation actuelle sans une étape intermédiaire.

5.
5.1 L'interprétation de l'art. 49 al. 1 LAMal divise les parties. Selon la
recourante, cette disposition légale concerne également les cliniques
privées, vu le renvoi que l'art. 49 al. 1 première phrase LAMal fait
expressément à l'art. 39 al. 1 LAMal à propos de la notion d'hôpital. L'objet
de la rémunération porte ainsi sur tout traitement hospitalier dispensé dans
un établissement hospitalier public, subventionné ou privé reconnu dans la
planification hospitalière. La recourante fait valoir que l'art. 49 al. 1
deuxième phrase LAMal ne signifie nullement que seuls les patients
hospitalisés dans un hôpital public ou subventionné ont droit à la
participation financière de l'Etat, puisque cette disposition légale pose
seulement une base de calcul pour déterminer la rémunération de prestations
découlant de l'assurance obligatoire des soins, laquelle supporte au maximum
50% des coûts imputables calculés sur la base de la division commune
d'hôpitaux publics ou subventionnés, quel que soit le type d'établissement
hospitalier dans lequel le patient a séjourné (public, subventionné, privé).
L'autre partie, soit au minimum 50% des coûts imputables calculés sur la base
de la division commune d'hôpitaux publics ou subventionnés, est quant à elle
supportée par le canton. De l'avis de la recourante, cette interprétation de
l'art. 49 al. 1 LAMal est conforme à la logique du système, car elle ne crée
aucune distorsion entre le patient séjournant en division privée d'un hôpital
public et le patient séjournant en division privée d'un hôpital privé,
respectivement entre le patient séjournant en division commune d'un
établissement public et le patient séjournant en division commune d'un
établissement privé. D'autre part, elle respecte la dichotomie entre
l'assurance de base et l'assurance complémentaire.

5.2  La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre. Selon la
jurisprudence, il n'y a lieu de déroger au sens littéral d'un texte clair par
voie d'interprétation que lorsque des raisons objectives permettent de penser
que ce texte ne restitue pas le sens véritable de la disposition en cause. De
tels motifs peuvent découler des travaux préparatoires, du but et du sens de
la disposition, ainsi que de la systématique de la loi. Si le texte n'est pas
absolument clair, si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, il
convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la
dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux
préparatoires, du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur
lesquelles elle repose ou encore de sa relation avec d'autres dispositions
légales (ATF 130 II 71 consid. 4.2, 130 V 50 consid. 3.2.1, 129 II 356
consid. 3.3, 129 V 165 consid. 3.5, 284 consid. 4.2 et les références).

5.3  L'art. 49 al. 1 LAMal est issu de l'art. 42 du projet du Conseil
fédéral,
du 6 novembre 1991 (FF 1992 I 257), lui-même repris de l'art. 33 du projet de
la commission d'experts, du 2 novembre 1990.

5.3.1  Les textes allemand et italien de l'art. 49 al. 1 première et deuxième
phrases LAMal sont ainsi libellés: « Für die Vergütung der stationären
Behandlung einschliesslich Aufenthalt in einem Spital (Art. 39 Abs. 1)
vereinbaren die Vertragsparteien Pauschalen. Diese decken für
Kantonseinwohner und -einwohnerinnen bei öffentlichen oder öffentlich
subventionierten Spitälern höchstens 50 Prozent der anrechenbaren Kosten je
Patient oder Patientin oder je Versichertengruppe in der allgemeinen
Abteilung ». « Per la rimunerazione della cura ospedaliera, compresa la
degenza ospedaliera (art. 39 cpv. 1), le parti alla convenzione stabiliscono
importi forfettari. Questi coprono, per gli abitanti del Cantone, al massimo
il 50 per cento dei costi fatturabili per paziente o gruppo d'assicurati nel
reparto comune d'ospedali pubblici o sussidiati dall'ente pubblico ».
Le sens littéral de l'art. 49 al. 1 deuxième phrase LAMal est clair. Aussi
bien les textes français, allemand ou italien ne parlent que d'hôpitaux
publics ou subventionnés par les pouvoirs publics. L'OFAS relève avec raison
dans son préavis que comme cela ressort davantage du texte allemand, qui met
l'accent sur les hôpitaux publics ou subventionnés par les pouvoirs publics -
« bei öffentlichen oder öffentlich subventionierten Spitälern » -, la
réglementation instituée à l'art. 49 al. 1 deuxième phrase LAMal se limite
aux hôpitaux publics ou subventionnés par les pouvoirs publics.

5.3.2  Ce sens littéral est conforme à la volonté du législateur. Ainsi que
cela résulte du message du Conseil fédéral du 6 novembre 1991 concernant la
révision de l'assurance-maladie (FF 1992 I 110), l'art. 42 du projet de loi
prévoyait que l'assurance obligatoire des soins médico-pharmaceutiques
couvrira au plus et par patient 50 pour cent des coûts imputables dans la
division commune d'hôpitaux publics ou subventionnés par les pouvoirs
publics, le reste devant être couvert par des recettes fiscales. L'art. 42
faisait partie des dispositions revêtant dans le projet une importance
particulière. Le 1er alinéa prévoyait comme règle de base que les frais de
traitement et de pension à l'hôpital doivent être couverts par des forfaits.
Ces forfaits, valables pour les habitants d'un canton, peuvent couvrir au
plus, par patient ou groupe d'assurés, 50 pour cent des coûts imputables dans
la division commune d'hôpitaux publics ou subventionnés par les pouvoirs
publics (taux de couverture). Telles sont les règles de base qui s'appliquent
aux forfaits dans les hôpitaux publics ou subventionnés par les pouvoirs
publics (message précité, FF 1992 I 166). Le taux de couverture qui, dans
l'assurance-maladie, est fixé au maximum à 50 pour cent des coûts imputables
doit également mettre un terme à la pratique suivie ces dernières années par
les pouvoirs publics; ceux-ci faisaient en effet supporter de plus en plus à
l'assurance-maladie sociale les frais hospitaliers élevés qui, dans une
certaine mesure, résultaient d'erreurs dans la planification et dans
l'appréciation du taux d'occupation des hôpitaux. En ce qui concerne les
hôpitaux privés, les partenaires tarifaires peuvent convenir de taux de
couverture plus élevés. Cela paraît équitable, car ces hôpitaux ne sont pas
financés avec des fonds provenant en partie des recettes fiscales (message
précité, FF 1992 I 167).
Les travaux parlementaires indiquent également que le législateur est parti
de l'idée que la règle de base du taux de couverture de 50% ne concerne que
la division commune d'hôpitaux publics ou subventionnés par les moyens
publics (M. le Conseiller fédéral Cotti, BO 1992 CE 1316; Huber, BO 1992 CE
1314). Lors de la séance du Conseil des Etats du 17 décembre 1992, le
Conseiller aux Etats Gemperli, qui avait fait la proposition d'introduire à
l'alinéa 1 la disposition qui stipule « dans la règle », était du reste de
l'avis que l'art. 42 al. 1 du projet viole le principe de l'égalité de
traitement dans la mesure où les hôpitaux privés en sont exclus (BO 1992 CE
1315). Cela n'a eu aucune incidence sur le texte adopté par les Chambres (BO
1992 CE 1316; BO 1993 CN 1861), l'art. 49 al. 1 première et deuxième phrases
LAMal reprenant l'art. 42 al. 1 première phrase du projet de loi.

5.3.3  Sous l'angle de la systématique de la loi, il existe en ce qui
concerne
l'obligation pour les cantons de contribuer aux frais du traitement
hospitalier un lien matériel étroit entre l'art. 49 al. 1 deuxième phrase
LAMal et l'art. 41 al. 3 première phrase LAMal, cette disposition légale
instituant une obligation du canton de résidence de prendre en charge la
différence de coûts lorsque, pour des raisons médicales, l'assuré recourt aux
services d'un hôpital public ou subventionné par les pouvoirs publics situé
hors de son canton de résidence (voir ATF 123 V 305 consid. 6c/bb et 318 s.
consid. 4b et c; à propos des art. 35 al. 3 et 42 al. 1 et 2 du projet de
loi, cf. FF 1992 I 151 et 166). Dans son message du 18 septembre 2000 relatif
à la révision partielle de la loi fédérale sur l'assurance-maladie, le
Conseil fédéral a proposé d'harmoniser les art. 49 et 41 par un renvoi de
l'art. 41 al. 3 à l'art. 49 LAMal (FF 2001 I 740).
Selon la jurisprudence rendue à propos de l'art. 41 al. 3 LAMal, l'obligation
du canton de résidence de prendre en charge la différence de coûts n'existe
que pour les traitements appliqués dans un hôpital public ou subventionné par
les pouvoirs publics. Une telle obligation n'existe pas lorsque l'assuré se
rend dans un hôpital privé, non public ou non subventionné par les pouvoirs
publics (ATF 123 V 310).
Au regard de la systématique de la loi, il se justifie également
d'interpréter l'art. 49 al. 1 deuxième phrase LAMal de la même manière que
l'art. 41 al. 3 première phrase LAMal et de nier toute obligation du canton
de contribuer aux frais du traitement hospitalier intracantonal lorsque
l'assuré se rend dans un hôpital privé, non subventionné par les pouvoirs
publics.

5.3.4  L'interprétation littérale de l'art. 49 al. 1 deuxième phrase LAMal,
dans le sens des travaux préparatoires et de la systématique de la loi,
apparaît conforme au but et à l'esprit de cette règle, compte tenu des
valeurs sur lesquelles elle repose, singulièrement de l'intérêt protégé
(interprétation téléologique; ATF 130 II 71 consid. 4.2).
En effet, l'art. 49 al. 1 LAMal a pour but d'instaurer un financement dual
des coûts imputables dans la division commune des hôpitaux publics ou
subventionnés par les pouvoirs publics. Dès lors, si tout assuré qui séjourne
en division privée d'un tel établissement est en droit de recevoir de son
assureur-maladie l'équivalent du forfait que celui-ci aurait dû acquitter
s'il avait été hospitalisé en division commune, ce forfait doit être calculé
selon la règle prévue à l'art. 49 al. 1 LAMal. Or, le texte légal spécifie
que, pour les habitants du canton, un tel forfait couvre au maximum, par
patient ou par groupe d'assurés, 50% des coûts imputables dans la division
commune. C'est pourquoi, logiquement, le canton doit supporter dans tous les
cas l'autre partie de ces coûts imputables, soit 50% au minimum, sans égard à
la division de l'hôpital public ou subventionné par les pouvoirs publics où
séjourne l'assuré (ATF 127 V 429 consid. 5).
Il serait dès lors contraire à la ratio legis que le canton où la personne
habite, si celle-ci a été hospitalisée en division commune d'un hôpital privé
(ni public ni subventionné par les pouvoirs publics), doive contribuer
également à la prise en charge des coûts imputables. Mais l'hôpital privé ne
tombant pas sous le coup de la règle instituée à l'art. 49 al. 1 deuxième
phrase LAMal, le taux de couverture à la charge des assureurs-maladie s'élève
ainsi à 50% au maximum (décision du Conseil fédéral du 23 juin 1999, RAMA
1999 n° KV 83 p. 354 consid. 4.4 et la référence). L'interprétation de cette
disposition légale ne permet donc pas que l'assurance obligatoire des soins
subventionne indirectement une clinique privée qui ne bénéficie d'aucune
subvention de la part des pouvoirs publics. C'est d'ailleurs ce que propose
de changer le projet 2A du Conseil fédéral de révision partielle de la loi
fédérale du 18 mars 1994 sur l'assurance-maladie, qui envisage le passage au
financement lié aux prestations, de sorte qu'on ne pourra plus faire
référence aux coûts imputables (voir le rapport explicatif concernant la
partie relative au financement hospitalier). Ainsi que le relève avec raison
l'OFAS dans son préavis, il n'y a pas lieu, à l'avance, de choisir une
solution de lege ferenda.

5.4  Il ne se justifie donc pas de déroger au sens littéral du texte clair de
l'art. 49 al. 1 deuxième phrase LAMal, dont l'interprétation exclut toute
prise en charge par le canton où habite la personne hospitalisée en division
commune d'une clinique privée, de la part des coûts imputables dans un
hôpital public ou subventionné par les pouvoirs publics, même si la clinique
figure sur la planification cantonale.

6.
Les autres arguments invoqués par la recourante ne sont guère plus
convaincants, à mesure qu'ils excèdent largement le cadre du problème soumis
au juge dans le présent cas. En particulier, il n'appartient pas au Tribunal
fédéral des assurances de se prononcer sur la constitutionnalité de l'art. 49
al. 1 LAMal, au regard notamment des art. 8 et 117 Cst. (ATF 127 V 430
consid. 6, 126 V 60 consid. 5 et les références). Le tribunal est en effet
tenu d'appliquer la loi (art. 191 Cst.).

7.
La procédure n'est pas gratuite (art. 134 OJ a contrario). La recourante, qui
succombe, supportera les frais judiciaires (art. 156 al. 1 en corrélation
avec l'art. 135 OJ). Elle ne saurait prétendre une indemnité de dépens pour
l'instance fédérale (art. 159 al. 1 en liaison avec l'art. 135 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais de justice, d'un montant de 34'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante et sont compensés avec l'avance de frais qu'elle a versée.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du
canton de Vaud et à l'Office fédéral de la santé publique.

Lucerne, le 2 septembre 2004
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la Ire Chambre:   Le Greffier: