Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen K 14/2003
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K 14/03

Arrêt du 2 février 2004
IVe Chambre

MM. les Juges Ferrari, Président, Ursprung et Geiser, suppléant. Greffière :
Mme von Zwehl

Y.________, recourante, représentée par Me Laurent Damond, avocat, avenue du
Tribunal-Fédéral 3, 1005 Lausanne,

contre

INTRAS Caisse Maladie, rue Blavignac 10, 1227 Carouge, intimée

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 19 novembre 2002)

Faits:

A.
Y. ________ était affiliée à la caisse-maladie Intras (ci-après : la caisse)
pour l'assurance obligatoire des soins jusqu'au 31 décembre 2000.

Enceinte, elle a été suivie par le docteur A.________ à l'Hôpital X.________
du 16 février au 22 juillet 1999. Jusqu'à cette date, la grossesse de
l'assurée suivait un cours normal; le terme de l'accouchement était prévu au
1er octobre 1999. Le 26 juillet 1999, Y.________ s'est rendue aux Etats-Unis
pour rendre visite à sa soeur. Le 23 août suivant, elle a consulté un médecin
sur place; à partir du 31 août, interdiction lui a été faite de prendre
l'avion ou de travailler; dix jours plus tard, alors qu'elle se trouvait à la
36e semaine de sa grossesse, Y.________ a mis au monde une fille, B.________,
à l'Hôpital Z.________. Cette dernière a nécessité des soins intensifs durant
trois jours en raison de sa naissance prématurée. De retour en Suisse,
l'assurée a transmis à la caisse les factures relatives à son accouchement
qui se sont élevées à plus de seize mille dollars. Après avoir réuni tous les
renseignements et documents médicaux utiles, la caisse a informé l'assurée
qu'elle limitait sa prise en charge aux trois consultations médicales ayant
précédé son accouchement selon le tarif applicable aux soins dispensés à
l'Hôpital X.________ (décision du 31 janvier 2001). Elle a considéré que le
cas d'urgence n'était pas réalisé dès lors que Y.________ avait omis de
prendre toutes les précautions nécessaires pour rentrer Suisse à temps.
Saisie d'une opposition, elle l'a écartée par une nouvelle décision du 22
juin 2001.

B.
Par jugement du 19 novembre 2002, le Tribunal des assurances du canton de
Vaud a rejeté le recours formé par l'assurée contre cette dernière décision.

C.
Y.________ interjette recours de droit administratif. Elle conclut,
principalement, à la réforme du jugement cantonal en ce sens qu'elle a droit
aux prestations prévues par la LAMal en cas d'accouchement et,
subsidiairement, au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle
instruction et nouveau jugement. Elle sollicite également le bénéfice de
l'assistance judiciaire.

La caisse conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6
octobre 2000 (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003, entraînant la
modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de
l'assurance-maladie. Cependant, le cas d'espèce reste régi par les
dispositions de la LAMal en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002, eu égard au
principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur au moment
où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 127 V 467
consid. 1).

2.
2.1 Aux termes de l'art. 34 al. 2 LAMal, le Conseil fédéral peut décider de la
prise en charge, par l'assurance obligatoire des soins, des coûts des
prestations prévues aux art. 25 al. 2 ou 29 LAMal fournies à l'étranger pour
des raisons médicales. Il peut désigner les cas où l'assurance obligatoire
des soins prend en charge les coûts d'accouchements à l'étranger pour des
raisons autres que médicales. Il peut limiter la prise en charge des coûts
des prestations fournies à l'étranger.

2.2 Sur la base de l'art. 34 al. 2 LAMal, l'autorité exécutive a édicté
l'art. 36 OAMal qui définit l'étendue de la prise en charge des prestations à
l'étranger. Selon l'art. 36 al. 2 OAMal, l'assurance obligatoire des soins
prend en charge le coût des traitements effectués en cas d'urgence à
l'étranger. Il y a urgence selon la même disposition, lorsque l'assuré, qui
séjourne temporairement à l'étranger, a besoin d'un traitement médical et
qu'un retour en Suisse n'est pas approprié; il n'y a pas urgence lorsque
l'assuré se rend à l'étranger dans le but de suivre ce traitement. Par
ailleurs, l'art. 36 al. 3 OAMal dispose que l'assurance obligatoire prend en
charge, dans le cadre de l'art. 29 de la loi, les coûts d'un accouchement
ayant lieu à l'étranger lorsqu'il constitue le seul moyen de procurer à
l'enfant la nationalité de la mère ou du père, ou lorsque l'enfant serait
apatride s'il était né en Suisse.

3.
3.1
Des dispositions réglementaires précitées, il est faux de déduire, comme
l'ont fait les premiers juges, que l'alinéa 3 de l'art. 36 OAMal représente
une lex specialis par rapport à l'alinéa 2 en ce sens que le critère de
l'urgence serait par principe exclu en cas d'accouchement à l'étranger. Une
telle interprétation restrictive ne se justifie nullement par le texte de
l'ordonnance (voir également le contenu du message du 6 novembre 1991
concernant la révision de l'assurance-maladie; FF 1992 I 144). Cela étant, le
critère de l'urgence doit certes être relativisé en cas de grossesse normale
puisque la mère sait que son état requiert à terme des soins médicaux, et
qu'elle connaît en règle générale la date présumée de son accouchement. Dans
cette situation, il lui appartient, sauf à admettre son intention d'accoucher
à l'étranger, de prendre toutes les dispositions utiles, plus le terme
supposé de l'accouchement s'approche, pour éviter un déplacement à
l'étranger, respectivement, pour assurer son retour en Suisse. Il arrive en
effet un moment à partir duquel un voyage s'avère médicalement
contre-indiqué, si bien qu'un accouchement sur place est nécessaire et que
les soins à prodiguer deviennent en tout état de cause urgents. En irait-il
autrement que le principe de la territorialité à la base de
l'assurance-maladie obligatoire se verrait largement vidé de son sens.

3.2 L'hypothèse visée à l'art. 36 al. 3 OAMal n'entrant pas en ligne de
compte dans le cas particulier, seul doit être examiné si les conditions de
l'art. 36 al. 2 OAMal sont réunies. En l'espèce, la recourante s'est rendue
le 26 juillet 1999 aux Etats-Unis où elle comptait, selon ses dires, rester
une semaine à dix jours. On ignore pourquoi elle a continué à séjourner sur
sol américain au-delà de la durée qu'elle avait initialement prévue. En tout
cas, il ne ressort pas des pièces médicales qu'elle a fournies qu'il existait
une quelconque raison médicale faisant obstacle à son retour en Suisse avant
le 31 août 1999, date à partir de laquelle les médecins lui ont formellement
interdit de prendre l'avion. Or, à ce moment-là elle se trouvait déjà
pratiquement à la fin du huitième mois de sa grossesse (35 semaines), soit à
une période où l'éventualité d'un accouchement, même avant terme, est
notoirement plus élevé qu'au cours des mois précédents. Nonobstant son état,
la recourante a toutefois prolongé son séjour aux Etats-Unis sans raison
médicale. Par ailleurs, après avoir consulté un médecin le 23 août 1999, elle
a encore laissé passer une semaine alors qu'il lui était possible, durant ce
laps de temps, de voyager. On doit dès lors admettre qu'il n'y avait pas pour
la recourante urgence au sens de l'art. 36 al. 2 OAMal à séjourner comme elle
l'a fait le plus longtemps possible à l'étranger avec pour conséquence que
son retour ne fût plus approprié.

Le recours se révèle ainsi mal fondé.

4.
Vu la nature du litige, la procédure est gratuite (art. 134 OJ). La
recourante, qui succombe, ne peut prétendre une indemnité de dépens pour
l'instance fédérale (art. 159 OJ). En outre, sa demande d'assistance
judiciaire doit être rejetée, car la condition de l'indigence fait défaut
(art. 152 OJ). Y.________ dispose en effet, mensuellement, de 3'335 fr. (en
tenant compte des impôts à la source), auquel s'ajoute le revenu de son époux
de 3'099 fr. net, ce qui représente des ressources s'élevant à 6'434 fr. au
total; or, les besoins mensuels du couple et de leurs deux enfants
comprennent un minimum vital de 2'150 fr. (cf. BlSchkg 2001/2002 p. 19), un
loyer de 485 fr., des primes d'assurance-maladie de 765 fr., des frais de
garde pour leur fille de 336 fr., soit 3'736 fr. Il lui reste ainsi un revenu
mensuel disponible d'environ 2'698 fr. (6'434 fr. - 3'736 fr.), ce qui est
suffisant pour s'assurer les services d'un avocat.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
La demande d'assistance judiciaire présentée par Y.________ pour la procédure
fédérale est rejetée.

3.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du
canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 2 février 2004
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IVe Chambre:   La Greffière: