Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen K 147/2003
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K 147/03

Arrêt du 12 mars 2004
Ire Chambre

MM. et Mme les Juges Borella, Président, Leuzinger, Schön, Kernen et Frésard.
Greffière : Mme Boschung

D.________, 1996, recourant,
agissant par S.________, sa mère, représentée par Me Aba Neeman, avocat,
place de l'Eglise 2, 1870 Monthey,

contre

CSS Assurance, droit & compliance, Victoria House, route de la Pierre 22,
1024 Ecublens VD, intimée

Tribunal cantonal des assurances, Sion

(Jugement du 10 octobre 2003)

Faits:

A.
D. ________, né en 1996, est affiliée à la caisse-maladie CSS Assurance
(ci-après : CSS) pour l'assurance obligatoire des soins et pour diverses
assurances complémentaires (assurance complémentaire Standard Zoom, assurance
complémentaire décès et invalidité par accident). La débitrice des primes est
sa mère, S.________.

Le 11 mai 2001, l'assuré a subi une intervention chirurgicale dentaire à
l'hôpital X.________. Cette intervention a été pratiquée par son
médecin-dentiste traitant, le docteur V.________, lequel avait diagnostiqué
une atteinte généralisée de la dentition lactéale avec symptomatologie
infectieuse et douloureuse.

Ensuite de cette intervention, l'hôpital X.________ a adressé à la CSS, le 13
août 2001, une facture de 2'118 fr. 90. Selon un décompte du 1er septembre de
la même année, la CSS a versé à cet hôpital, au titre de l'assurance
obligatoire, la somme facturée et a demandé à S.________ le remboursement de
202 fr. 65 de frais de participation et de 4 fr. 50 de frais de
petit-déjeuner. Constatant toutefois avoir commis une erreur, la CSS a
annoncé à la mère de l'assuré, par courrier du 8 mars 2002, qu'elle n'était
pas en mesure de prendre en charge ladite intervention et qu'elle demanderait
prochainement le remboursement des frais payés à tort. Le 21 août suivant,
S.________ a ainsi été invitée à rembourser, dans les 30 jours, un montant de
1'826 fr. 35, établi selon le calcul suivant:

2'118.90 facture de l'hôpital X.________, dont à déduire :
- 202.65 participation
- 4.50 frais non assurés
- 85.40 prise en charge Standard Zoom
1'826.35 total

Aucun paiement n'étant intervenu dans le délai imparti, la CSS a fait
notifier, le 22 octobre 2002, un commandement de payer à la mère de l'assuré.
Cette dernière y a fait opposition mais, par décision du 8 novembre 2002, la
CSS a levé celle-ci et considéré que S.________ restait débitrice de la somme
de 1'826 fr. 35, frais en sus.

La mère de l'assuré a formé opposition et, par décision sur opposition du 2
mai 2003, la CSS a persisté dans son refus de prise en charge.

B.
Par jugement du 10 octobre 2003, le Tribunal des assurances du canton du
Valais a rejeté le recours formé par l'assuré contre cette décision. Il a
retenu que l'affection dentaire présentée par D.________ était due à une
atteinte carieuse et que, par conséquent, dans la mesure où la carie fait
partie des pathologies évitables par le biais d'une bonne hygiène buccale et
dentaire, son traitement était exclu du cercle des prestations obligatoires
de l'assurance-maladie.

C.
D.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont
il demande l'annulation, en concluant au renvoi du dossier pour complément
d'instruction.

La CSS conclut au rejet du recours, alors que l'Office fédéral des assurances
sociales renonce à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le litige porte sur la restitution de la somme de 1'826 fr. 35, somme versée
au titre de l'assurance obligatoire des soins.

2.
Le recourant soutient que la demande de restitution est mal fondée. Dans la
mesure où l'affection dentaire dont il souffrait représentait une entrave au
développement ordonné de la dentition en développement, son traitement devait
être pris en charge par l'intimée au titre de l'assurance obligatoire des
soins. Insistant sur le caractère pathologique de l'affection - à l'âge de
trente mois, sa dentition s'effritait déjà - il estime que la juridiction
cantonale ne pouvait pas ignorer un problème de cette nature et devait, à
tout le moins, ordonner une instruction complémentaire.

3.
3.1 Selon l'art. 25 LAMal, l'assurance obligatoire des soins prend en charge
les coûts des prestations qui servent à diagnostiquer ou à traiter une
maladie et ses séquelles (al. 1). Ces prestations comprennent notamment les
examens, traitements et soins dispensés sous forme ambulatoire au domicile du
patient, en milieu hospitalier ou semi-hospitalier ou dans un établissement
médico-social par des médecins, des chiropraticiens et des personnes
fournissant des prestations sur prescription ou sur mandat médical (al. 2
let. a).

Les coûts des soins dentaires ne sont pas visés par cette disposition légale.
D'après l'art. 31 al. 1 LAMal, ils sont pris en charge par l'assurance
obligatoire des soins s'ils sont occasionnés par une maladie grave et non
évitable du système de la mastication (let. a), ou s'ils sont occasionnés par
une autre maladie grave ou ses séquelles (let. b) ou encore s'ils sont
nécessaires pour traiter une maladie grave ou ses séquelles (let. c).

3.2 Conformément à l'art. 33 al. 2 et 5 LAMal, en liaison avec l'art. 33 let.
d OAMal, le Département fédéral de l'intérieur a édicté les articles 17, 18
et 19 de l'Ordonnance sur les prestations dans l'assurance obligatoire des
soins en cas de maladie (OPAS), qui se rapportent à chacune des éventualités
prévues à l'art. 31 al. 1 let. a à c LAMal. Selon une jurisprudence
constante, la liste des affections de nature à nécessiter des soins dentaires
à la charge de l'assurance obligatoire des soins en cas de maladie est
exhaustive (ATF 129 V 279 consid. 3.2, 127 V 332 consid. 3a et 343 consid.
3b, 124 V 185).

A l'art. 17 OPAS, sont énumérées les maladies graves et non évitables du
système de la mastication au sens de l'art. 31 al. 1 let. a LAMal, qui
ouvrent droit à la prise en charge des coûts des traitements dentaires par
l'assurance obligatoire des soins.

3.3 Selon la jurisprudence, est "évitable" toute maladie du système de la
mastication qui peut être évitée par une bonne hygiène buccale et dentaire.
Dans ce sens, sont visées la carie et la parodontite (ATF 129 V 279 consid.
3.3, 125 V 19 s. consid. 3a; SVR 1999 KV 11 p. 25 consid. 1b/aa).

4.
Le traitement dentaire litigieux n'entre dans aucune des prévisions
envisagées par les dispositions pertinentes de la LAMal et de l'OPAS. En
particulier, on n'est pas en présence d'un cas de dislocation dentaire au
sens de l'art. 17 let. a ch. 2 OPAS (cf. ATF 127 V 396 consid. 3bb). C'est en
vain dès lors que le recourant se prévaut de la jurisprudence rendue à propos
de cette disposition et qui, notamment, établit une distinction entre
dentition en développement et dentition définitive (voir p. ex. ATF 127 V
391).

5.
Le traitement n'étant pas à la charge de l'assurance-maladie sociale, il
reste à examiner la question de la restitution.

5.1 La décision sur opposition a été rendue après l'entrée en vigueur de la
LPGA, mais elle concerne des prestations allouées avant le 1er janvier 2003.
Au titre des dispositions transitoires de la LPGA, l'art. 82 al. 1 première
phrase LPGA prescrit que les dispositions matérielles de la présente loi ne
sont pas applicables aux prestations en cours et aux créances fixées avant
son entrée en vigueur. Dans les travaux préparatoires de la LPGA, l'art. 25
LPGA (alors art. 32 du projet), relatif à la restitution des prestations
indûment touchées est spécialement mentionné comme exemple d'une disposition
qui ne serait pas applicable à des prestations déjà versées avant l'entrée en
vigueur de la loi (FF 1991 II p. 266 sv). En revanche, selon Ueli Kieser
(ATSG-Kommentar, note 9 ad art. 82), dans la mesure où la question de la
restitution se pose après le 1er janvier 2003, le nouveau droit est
applicable dès lors qu'il est statué sur la restitution après son entrée en
vigueur et quand bien même la restitution porte sur des prestations accordées
antérieurement.

5.2 La question du droit pertinent ratione temporis ne revêt toutefois pas
une importance décisive en l'occurrence, du moment que les principes
applicables à la restitution selon la LPGA sont issus de la réglementation et
de la jurisprudence antérieures (Ueli Kieser, op. cit., note 9 ad art. 82).

Plus précisément, jusqu'au 31 décembre 2002, l'art. 47 LAVS (abrogé avec
l'entrée en vigueur de la LPGA) était applicable par analogie à la
restitution par un assuré de prestations d'assurance-maladie sociale indûment
versées (ATF 126 V 23). L'art. 25 al. 1 LPGA (en vigueur depuis le 1er
janvier 2003) prévoit que les prestations indûment touchées doivent être
restituées; la restitution ne peut être exigée lorsque l'intéressé était de
bonne foi et le mettrait dans une situation difficile. Cette disposition est
désormais directement applicable en matière d'assurance-maladie (art. 1er
LAMal en corrélation avec l'art. 2 LPGA). En ce qui concerne l'obligation de
restituer comme telle, l'art. 25 al. 1 LPGA ne fait que reprendre la
réglementation de l'art. 47 al. 1 LAVS qui était jusque là applicable soit
directement, soit par renvoi ou encore par analogie dans d'autres domaines du
droit des assurances sociales (Patrice Keller, La restitution des prestations
indûment touchées dans la LPGA, in : Partie générale du droit des assurances
sociales, Lausanne, 2003, p. 149 ss, plus spécialement p. 167 ss). Comme par
le passé, l'obligation de restituer suppose aujourd'hui encore, conformément
à la jurisprudence rendue à propos de l'art. 47 al. 1 LAVS ou de l'art. 95a
LACI (ATF 129 V 110 consid. 1.1, 126 V 23 consid. 4b, 122 V 21 consid. 3a,
368 consid. 3, et les arrêts cités) que soient remplies les conditions d'une
reconsidération ou d'une révision procédurale de la décision - formelle ou
non - par laquelle les prestations en cause ont été allouées, (Ueli Kieser,
op. cit., note 2 ss ad art. 25; Thomas Locher, Grundriss des
Sozialversicherungsrechts, Berne 2003 § 42, p. 279; Edgar Imhof/Christian
Zünd, ATSG und Arbeitslosenversicherung, RSAS 2003, p. 304 sv. [à propos de
l'art. 95 LACI]; Jürg Brechbühl, Umsetzung des ATSG auf Verordnungsebene /
Verordnung zum Allgemeinen Teil des Sozialversicherungsrechts, in :
Bundesgesetz über den Allgemeinen Teil des Sozialversicherungsrechts [ATSG],
Saint-Gall 2003, p. 208).

5.3 Selon un principe général du droit des assurances sociales,
l'administration peut reconsidérer une décision formellement passée en force
de chose jugée et sur laquelle une autorité judiciaire ne s'est pas prononcée
quant au fond, à condition qu'elle soit sans nul doute erronée et que sa
rectification revête une importance notable. Par le biais de la
reconsidération, on corrigera une application initiale erronée du droit, de
même qu'une constatation erronée résultant de l'appréciation des faits (ATF
117 V 17 consid. 2c, 115 V 314 consid. 4a/cc). En outre, par analogie avec la
révision des décisions rendues par les autorités judiciaires,
l'administration est tenue de procéder à la révision d'une décision entrée en
force formelle lorsque sont découverts des faits nouveaux ou de nouveaux
moyens de preuve, susceptibles de conduire à une appréciation juridique
différente (ATF 126 V 23 consid. 4b et les références citées). A noter que la
révision et la reconsidération sont désormais explicitement réglées à l'art.
53 LPGA.

6.
6.1 En l'espèce, c'est de toute évidence par erreur que la CSS a remboursé à
l'hôpital X.________ sa facture du 13 août 2001 (sous déduction de la
participation, de frais non assurés et de la prise en charge par l'assurance
«Standard Zoom»), au titre de l'assurance-obligatoire des soins. Ce paiement
ne reposait sur aucune base juridique pertinente. Comme le relèvent les
premiers juges, la symptomatologie infectieuse est en l'espèce la conséquence
de caries, dont le traitement, de par la volonté claire du législateur, ne
saurait être à la charge de l'assurance obligatoire des soins (Gebhard
Eugster, Aspects des soins dentaires selon l'art. 31 al. 1 LAMal à la lumière
du droit de l'assurance-maladie [traduction française de Beat Raemy] in :
Revue mensuelle suisse d'odontostomatologie, vol. 107 [1997], p. 116 ss). La
décision (non formelle) de l'intimée d'accorder ses prestations dans ce cas,
en dehors d'un état de fait visé par les dispositions de l'OPAS, était donc
entachée d'inexactitude manifeste (cf. également SVR 2001 KV no 42 p. 121
consid. 6c). En outre, la condition de l'importance notable est remplie.

6.2 En principe, c'est le destinataire de la prestation versée indûment qui
est débiteur de l'obligation de restituer. En matière d'assurance-maladie, le
débiteur de cette obligation est l'assuré concerné même si le paiement a été
effectué - comme en l'espèce - en mains du prestataire de soins, en
l'occurrence l'établissement hospitalier (cf. SVR 2001 KV no 42 p. 121
consid. 6; arrêt B. du 16 mai 2000 [K 128/99]; Ueli Kieser, op. cit. note 15
ad art. 25).

7.
De ce qui précède, il résulte que la décision de restitution, était
justifiée. Demeure réservée, comme l'ont noté les premiers juges, une remise
de l'obligation de restituer, question qui ne fait pas l'objet de la présente
procédure.

8.
Il s'ensuit que le recours est mal fondé. Vu la nature du litige, il n'y a
pas lieu à perception de frais.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
L'avance de frais versée par le recourant, d'un montant de 600 fr., lui est
restituée.

4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances et à l'Office fédéral de la santé publique.

Lucerne, le 12 mars 2004

Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la Ire Chambre:   La Greffière: