Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 758/2003
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I 758/03

Arrêt du 20 juillet 2004
IIIe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Kernen. Greffière : Mme
Gehring

S.________, recourant, représenté par Me Jean-Pierre Bloch, avocat, place de
la Gare 10, 1003 Lausanne,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 21 juillet 2003)

Faits:

A.
A.a  Par décision du 26 juin 1997, l'Office de l'assurance-invalidité pour le
canton de Vaud [ci-après: l'office AI] a alloué à S.________, une rente
entière fondée sur un degré d'invalidité de 100 pour cent à compter du 1er
juin 1996.

A.b  A l'issue d'une procédure de révision du droit à la rente, l'office AI a
constaté qu'à la faveur d'une amélioration de son état de santé, l'assuré
présentait désormais une capacité entière de travail dans une activité
adaptée de sorte qu'il ne subissait plus de perte de gain. Par décision du 8
juillet 2002, il a par conséquent supprimé, avec effet au 1er septembre 2002,
la rente allouée à l'intéressé.

B.
Par jugement du 21 juillet 2003, le Tribunal des assurances du canton de Vaud
a rejeté le recours formé contre cette décision par S.________. En bref, il a
considéré que l'assuré disposait d'une capacité résiduelle de travail de 50
pour cent dans une activité adaptée et que le degré d'invalidité en résultant
(32 pour cent) était insuffisant pour justifier le maintien du droit à la
rente.

C.
S. ________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont
il requiert, sous suite de dépens, l'annulation, en concluant au renvoi de la
cause à l'instance précédente en vue de la mise en oeuvre d'une expertise
pluridisciplinaire.

L'office intimé conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le litige porte sur la suppression par voie de révision, à partir du 1er
septembre 2002, de la rente allouée au recourant.

2.
2.1 Ratione temporis, la loi fédérale sur la partie générale des assurances
sociales (LPGA) du 6 octobre 2000, entrée en vigueur au 1er janvier 2003,
n'est pas applicable au présent litige, dès lors que le juge des assurances
sociales n'a pas à prendre en considération les modifications du droit ou de
l'état de fait postérieures à la date déterminante de la décision litigieuse
du 8 juillet 2002 (ATF 127 V 467 consid. 1, 121 V 366 consid. 1b). Pour les
mêmes motifs, les dispositions de la novelle du 21 mars 2003 modifiant la LAI
(4ème révision), entrée en vigueur le 1er janvier 2004 (RO 2003 3852) ne sont
pas applicables (ATF 127 V 467 consid. 1).

2.2  Selon l'art. 28 al. 1 LAI (dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31
décembre
2003, applicable en l'espèce), l'assuré a droit à une rente entière s'il est
invalide à 66 2/3 pour cent au moins, à une demi-rente s'il est invalide à 50
pour cent au moins, ou à un quart de rente s'il est invalide à 40 pour cent
au moins; dans les cas pénibles, l'assuré peut, d'après l'art. 28 al. 1bis
LAI (en vigueur jusqu'au 31 décembre 2003), prétendre une demi-rente s'il est
invalide à 40 pour cent au moins.
Selon l'art. 41 LAI, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002, si
l'invalidité d'un bénéficiaire de rente se modifie de manière à influencer le
droit à la rente, celle-ci est, pour l'avenir, augmentée, réduite ou
supprimée. Tout changement important des circonstances, propre à influencer
le degré d'invalidité, donc le droit à la rente, peut donner lieu à une
révision de celle-ci. Le point de savoir si un tel changement s'est produit
doit être tranché en comparant les faits tels qu'ils se présentaient au
moment de la décision initiale de rente et les circonstances régnant à
l'époque de la décision litigieuse (ATF 125 V 369 consid. 2 et la référence;
voir également ATF 112 V 372 consid. 2b et 390 consid. 1b).

3.
3.1 A l'époque de la décision initiale d'octroi de rente, le recourant
présentait un status post-hernie discale L4-L5 gauche par hémilaminectomie et
des lombosciatalgies chroniques résiduelles gauches avec déficit
sensitivo-moteur modéré dans le territoire de L5 entraînant une incapacité
entière de travail dans son métier de préparateur en volailles et poissons
(cf. rapport du 6 octobre 1995 du Professeur F.________, spécialiste en
neurochirurgie; rapport du 1er décembre 1995 des docteurs P.________ et
R.________ du Service de rhumatologie, médecine physique et réhabilitation du
Centre hospitalier V.________; rapport du 15 août 1996 du docteur B.________,
médecin traitant de l'assuré).

3.2
3.2.1Selon les premiers juges, une modification notable de ces circonstances
se serait produite en ce sens que l'intéressé aurait recouvré une capacité de
travail de 50 pour cent dans une activité adaptée. A l'appui de leur point de
vue, ils se fondent sur un rapport d'expertise établi en date du 25 juillet
2001 par les docteurs D.________, E.________ et A.________ du Centre
d'observation médicale de l'assurance-invalidité (COMAI).

Selon celui-ci, le recourant souffre, sur le plan psychique, d'un trouble
somatoforme douloureux persistant ainsi que d'agoraphobie. Aucun trouble
spécifique de la personnalité ou de l'humeur n'est mis en évidence.
L'incapacité de travail corrélative est modérée. Au niveau somatique,
l'intéressé présente un status post-cure d'une hernie discale L4-L5. L'examen
des fonctions neurologiques ne laisse apparaître aucune incapacité de
travail. Au niveau rhumatologique, l'assuré présente un état algique relatif
au trouble somatoforme douloureux persistant mais, sous l'angle strictement
rhumatologique, sa capacité de travail demeure entière dans un travail léger,
sans ports répétitifs de charges lourdes ni station verticale prolongée au
delà de deux heures. De manière globale, les experts en concluent que le
recourant dispose d'une capacité résiduelle de travail de 50 pour cent dans
une activité adaptée, c'est-à-dire sans ports répétitifs de charges excédant
15-20 kg et moyennant l'alternance des positions. L'activité que le recourant
exerçait précédemment en qualité de préparateur en volailles et poissons
demeure envisageable moyennant quelques aménagements, de même qu'une activité
dans l'industrie légère.

3.2.2  Se fondant sur l'avis de son médecin traitant, le docteur Y.________
(cf. certificat du 27 mars 2002 et rapport du 7 juin 2002), le recourant
conteste ce point de vue et fait valoir une incapacité entière de travail
dans l'exercice de toute activité lucrative.

3.2.3  Le rapport d'expertise du 25 juillet 2001 se fonde sur des examens
complets et prend en considération les plaintes exprimées par le recourant.
Il a été établi en pleine connaissance de l'anamnèse et du dossier médical.
Les points litigieux ont fait l'objet d'une étude circonstanciée. La
description du contexte médical et l'appréciation de la situation médicale
sont claires et les conclusions des experts sont dûment motivées. Au plan
psychiatrique, ce rapport contient suffisamment d'éléments pour que l'on
puisse se convaincre du fait que l'intéressé n'est pas en mesure de reprendre
pleinement une activité lucrative (voir ATF 102 V 165; VSI 2001 p. 224
consid. 2b et les références; cf. aussi ATF 127 V 298 consid. 4c in fine). En
particulier, les critères retenus par les experts et principalement fondés
sur la situation médicale de l'assuré - trouble somatoforme douloureux
persistant, lombosciatalgies résiduelles chroniques, status post-cure sur
hernie discale - permettent, conformément à la jurisprudence (cf. VSI 2000 p.
154 ss consid. 2c), de poser un pronostic défavorable quant à une éventuelle
reprise du travail à temps complet par l'assuré.

Ledit rapport d'expertise remplit ainsi toutes les conditions auxquelles la
jurisprudence soumet la valeur probante d'un tel document (ATF 125 V 352
consid. 3a, 122 V 160 consid. 1c et les références). Quoiqu'en dise le
recourant, l'avis exprimé par le docteur Y.________ ne saurait prévaloir en
regard du caractère contradictoire qu'il présente. En effet, sur la base des
mêmes affections, ce médecin conclut à une incapacité entière de travail dans
toute profession (cf. certificat du 27 mars 2002 et rapport du 7 juin 2002),
puis à une capacité résiduelle de travail de 50 pour cent dans une activité
exigible (cf. rapport du 5 décembre 2003, recevable dans la présente
procédure, dans la mesure où il se réfère à des constatations médicales qui
sont étroitement liées à l'objet du litige et de nature à en influencer
l'appréciation au moment où la décision attaquée a été rendue [ATF 99 V 102
et les arrêts cités]). En tant que ces rapports émanent du médecin traitant
de l'assuré, il y a lieu en outre de tenir compte du fait que selon
l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à
prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui
l'unit à ce dernier (ATF 125 V 352 consid. 3a, 122 V 160 consid. 1c et les
références).

Sur le vu de ce qui précède, il n'y a pas lieu de s'écarter des conclusions
du rapport d'expertise pluridisciplinaire du 25 juillet 2001 de sorte que la
demande du recourant tendant à la mise en oeuvre une seconde fois d'une telle
expertise n'est pas fondée. C'est ainsi à juste titre que les premiers juges
ont déterminé le degré d'invalidité du recourant en regard d'une capacité
résiduelle de travail de 50 pour cent dans une activité exigible.

4.
4.1 Dans la mesure où la capacité de travail exigible de l'intéressé, nulle à
l'époque de la décision initiale d'octroi de rente, est passée à 50 pour
cent, il s'est produit une modification des circonstances dont il convient
d'examiner le caractère notable en en évaluant l'incidence sur le degré
d'invalidité de celui-ci.

4.2  D'après l'art. 28 al. 2 LAI, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31
décembre 2002, pour l'évaluation de l'invalidité, le revenu du travail que
l'invalide pourrait obtenir en exerçant l'activité qu'on peut raisonnablement
attendre de lui, après exécution éventuelle de mesures de réadaptation et
compte tenu d'une situation équilibrée du marché du travail, est comparé au
revenu qu'il aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide.
Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être déterminé sur la
base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu du travail que
l'invalide pourrait obtenir en exerçant l'activité qu'on peut raisonnablement
attendre de lui, après exécution éventuelle de mesures de réadaptation et
compte tenu d'une situation équilibrée du marché du travail, est comparé au
revenu qu'il aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide. La comparaison des
revenus s'effectue, en règle ordinaire, en chiffrant aussi exactement que
possible les montants de ces deux revenus et en les confrontant l'un avec
l'autre, la différence permettant de calculer le taux d'invalidité (méthode
générale de comparaison des revenus; ATF 128 V 30 consid. 1, 104 V 136
consid. 2a et 2b).

4.3
4.3.1Pour déterminer la perte de gain subie par le recourant, les premiers
juges ont pris en considération au titre du revenu sans invalidité, le
salaire qu'il réalisait en 1996 au service de son ancien employeur, à savoir
36'000 fr. Or, le salaire auquel pouvaient prétendre les hommes qui
effectuaient des activités simples et répétitives dans le secteur de
l'industrie alimentaire et des boissons s'élevait, en 1996, à 52'027 fr. ([12
x 4'139 fr.] x 41.9 heures : 40 heures; cf. Enquête suisse sur la structure
des salaires [ESS] 1996, TA 1, p. 17, niveau de qualification 4; voir
également La Vie économique 12/2002, p. 88, tableau B 9.2). Dans la mesure où
ce revenu dépasse de 45 pour cent le gain effectivement réalisé par l'assuré,
il convient de calculer le degré d'invalidité de celui-ci en se référant aux
données statistiques prévalant à l'époque de la décision litigieuse, soit en
2002, et de prendre en considération un revenu mensuel sans invalidité de
4'388 fr. (cf. ESS 2002, TA 1, p. 43, niveau de qualification 4).

4.3.2  Pour évaluer le gain d'invalide, il y a lieu, conformément à une
jurisprudence bien établie, de se référer aux données statistiques  lorsque,
comme en l'espèce, l'assuré n'a pas repris d'activité lucrative (ATF 126 V 76
consid. 3b/bb, 124 V 322 consid. 3b/aa). Dès lors, compte tenu d'un salaire
mensuel brut de 4'388 fr. (cf. consid. 4.3.1), sous déduction de 15 pour cent
en regard des limitations liées au handicap subi (ATF 126 V 79 ss. consid.
5b/aa), ainsi que d'une incapacité de travail du recourant de 50 pour cent,
le revenu mensuel d'invalide déterminant s'élève à 1'865 fr.

4.3.3  En comparant ce montant avec le revenu sans invalidité, on obtient une
perte de gain de 2'523 fr. correspondant à un taux d'invalidité de 57,50 pour
cent, ouvrant droit à une demi-rente.

5.
5.1 Sur le vu de ce qui précède, le recours se révèle bien fondé. Représenté
par un avocat, le recourant, qui obtient gain de cause, a droit à une
indemnité de dépens pour l'instance fédérale (art. 159 al. 1 en corrélation
avec l'art. 135 OJ).

5.2  Par ailleurs, la décision litigieuse ayant pour objet l'octroi ou le
refus de prestations d'assurance, la procédure est gratuite (art. 134 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est admis. Le jugement du Tribunal des assurances du canton de
Vaud du 21 juillet 2003 ainsi que la décision de l'Office de
l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud du 8 juillet 2002 sont modifiés
en ce sens que le recourant a droit à une demi-rente de
l'assurance-invalidité à partir du 1er septembre 2002.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
L'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud versera au
recourant la somme de 2'000 fr. à titre de dépens (y compris la taxe sur la
valeur ajoutée) pour l'instance fédérale.

4.
Le Tribunal des assurances du canton de Vaud statuera sur les dépens pour la
procédure de première instance, au regard de l'issue du procès de dernière
instance.

5.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du
canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 20 juillet 2004
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

p. la Présidente de la IIIe Chambre:   La Greffière: