Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 664/2003
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I 664/03

Arrêt du 19 novembre 2004
Ire Chambre

MM. et Mme les Juges Borella, Président, Leuzinger, Ferrari, Meyer et Kernen.
Greffier : M. Métral

Office cantonal AI du Valais, avenue de la Gare 15, 1951 Sion, recourant,

contre

C.________, intimé, représenté par Me S.________,

Tribunal cantonal des assurances, Sion

(Jugement du 8 septembre 2003)

Faits:

A.
C. ________ a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité le
3 mai 2001. Il fait valoir souffrir de douleurs ostéo-musculaires
généralisées qui l'empêchent d'exercer son activité de plâtrier-peintre
indépendant. Par décision du 12 mars 2003, l'Office cantonal AI du Valais
(ci-après : l'office AI) lui a alloué une demi-rente d'invalidité, avec effet
dès le 1er janvier 2003.

Agissant par l'intermédiaire de Me S.________, l'assuré fit opposition à
cette décision, par acte du 10 avril 2003. Il contesta le revenu annuel moyen
déterminant retenu par l'office AI pour calculer le montant de la rente, le
taux d'invalidité pris en considération, et le fait qu'aucune rente
complémentaire n'avait été allouée pour son épouse.

Par décision du 12 mai 2003, l'office AI a rejeté l'opposition de l'assuré,
en tant qu'elle concernait le revenu annuel moyen déterminant et le droit à
une rente complémentaire pour l'épouse; il a déclaré l'opposition irrecevable
en tant qu'elle portait sur le taux d'invalidité, faute de motivation sur ce
point.

B.
C.________ a déféré cette décision au Tribunal des assurances du canton du
Valais. Il concluait, en substance, à ce que la cause soit retournée à
l'office AI pour qu'il entre en matière sur tous les aspects litigieux de la
décision du 10 avril 2003.

Par jugement du 8 septembre 2003, la juridiction cantonale a admis le
recours, annulé la décision sur opposition du 12 mai 2003 et retourné la
cause à l'office AI pour nouvelle décision. Elle a également alloué à
l'assuré une indemnité de dépens de 1'000 fr.

C.
L'office AI interjette un recours de droit administratif contre ce jugement,
dont il demande l'annulation, sous suite de frais. L'intimé conclut au rejet
du recours, sous suite de dépens, alors que l'Office fédéral des assurances
sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le litige porte sur le refus de l'office AI d'entrer en matière sur
l'opposition à la décision du 12 mars 2003. La présente procédure n'a donc
pas pour objet d'examiner le droit à des prestations d'assurance, de sorte
que le Tribunal fédéral des assurance se limitera à examiner si les premiers
juges ont violé le droit fédéral, y compris par l'excès ou par l'abus de leur
pouvoir d'appréciation, ou si les faits pertinents ont été constatés d'une
manière manifestement inexacte ou incomplète, ou encore s'ils ont été établis
au mépris de règles essentielles de procédure (art. 132 en corrélation avec
les art. 104 let. a et b et 105 al. 2 OJ).

2.
2.1 Selon l'art. 52 al. 1 LPGA, les décisions rendues en matière d'assurance
sociale peuvent être attaquées dans les trente jours par voie d'opposition
auprès de l'assureur qui les a rendues, à l'exception des décisions
d'ordonnancement de la procédure. L'art. 10 al. 1 OPGA, édicté sur la base de
la délégation de compétence prévue par l'art. 81 LPGA, prévoit que
l'opposition doit contenir des conclusions et être motivée. Si elle ne
satisfait pas à ces exigences ou si elle n'est pas signée, l'assureur
impartit un délai convenable pour réparer le vice, avec l'avertissement qu'à
défaut, l'opposition ne sera pas recevable (art. 10 al. 5 OPGA).

2.2 L'opposition est un moyen de droit permettant au destinataire d'une
décision d'en obtenir le réexamen par l'autorité, avant qu'un juge ne soit
éventuellement saisi (cf. ATF 125 V 121 consid. 2a et les références). Elle
assure la participation de l'assuré au processus de décision et poursuit
notamment un but d'économie de procédure et de décharge des tribunaux, dans
les domaines du droit administratif où des décisions particulièrement
nombreuses sont rendues (Ueli Kieser, ATSG-Kommentar: Kommentar zum
Bundesgesetz über den Allgemeinen Teil des Sozialversicherungsrechts vom 6.
Oktober 2000, Zurich 2003, n. 2 ss ad art. 52, avec les références; Pierre
Moor, Droit administratif, vol. II: Les actes administratifs et leur
contrôle, 2ème édition, Berne 2002, p. 533 n° 5.3.2.2; Grisel, Traité de
droit administratif, vol. II, p. 939). Dans ce cadre, la procédure
d'opposition ne revêt de véritable intérêt que si l'opposant doit exposer les
motifs de son désaccord avec la décision le concernant (voir cependant
Kieser, op. cit., n. 13 ad art. 52); à défaut, on courrait le risque de faire
de l'opposition une simple formalité avant le dépôt d'un recours en justice,
sans qu'assuré et autorité aient véritablement examiné sur quoi portent leurs
divergences. Les exigences formelles posées par l'art. 10 al. 1 OPGA
concrétisent, par ailleurs, l'obligation de l'assuré de collaborer à
l'exécution des différentes lois d'assurances sociales (art. 28 al. 1 et 43
al. 3 LPGA; Marco Reichmuth, ATSG - [erste] Erfahrungen in der IV, in :
Schaffhauser/Kieser (édit.), Praktische Anwendungsfragen des ATSG, St-Gall
2004, p. 44), et correspondent largement à celles posées par la jurisprudence
antérieure à la LPGA pour la procédure d'opposition prévue dans certaines
branches d'assurance-sociale (ATF 123 V 130 consid. 3 et les références; voir
également, en matière d'assurance-accidents, l'art. 130 al. 1 OLAA, dans sa
teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002).

2.3 La procédure d'opposition porte sur les rapports juridiques qui, d'une
part, font l'objet de la décision initiale de l'autorité et à propos
desquels, d'autre part, l'opposant manifeste son désaccord, implicitement ou
explicitement (cf. ATF 119 V 350 consid. 1b et les références; voir également
l'arrêt D. du 8 octobre 2003 [U 152/01] consid. 3). Si la décision initiale
ne porte que sur un seul rapport juridique - par exemple, le droit de
l'assuré à une rente d'invalidité -, celui-ci constitue également l'objet de
la procédure d'opposition. L'autorité valablement saisie d'une opposition
devra donc se prononcer une seconde fois sur tous les aspects de ce rapport
juridique, quand bien même la motivation de la nouvelle décision portera
principalement sur les points critiqués par l'opposant. En cas de recours
ultérieur à un juge, ce rapport juridique constituera également l'objet du
litige dont il a à connaître (cf. ATF 125 V 415 ss consid. 2; pour la
procédure d'opposition : Meyer-Blaser, Streitgegenstand im Streit -
Erläuterungen zu BGE 125 V 413, in: Schaffhauser/Schlauri (édit.), Aktuelle
Rechtsfragen der Sozialversicherungspraxis, St-Gall 2001, p. 19).

3.
3.1 L'office AI a accepté de réexaminer certains aspects du droit de
C.________ à une rente d'invalidité, en particulier le revenu annuel moyen
déterminant, tout en déclarant l'opposition irrecevable dans la mesure où
elle portait sur un autre aspect (le taux d'invalidité) de ce rapport
juridique. Or, de deux chose l'une : soit l'office AI était valablement saisi
d'une opposition contre la décision initiale fixant le droit à une rente
d'invalidité - il devait alors se prononcer à nouveau sur tous les aspects de
ce droit -; soit il refusait d'entrer en matière sur un réexamen du droit à
la rente, faute d'opposition suffisamment motivée (sous réserve toutefois du
consid. 3.2 ci-après). Il ne pouvait pas, en revanche, se limiter à rendre,
sur opposition, une décision de constatation relative à certains aspects
seulement du droit à la rente. Pour ce motif déjà, il convient de confirmer
l'annulation de la décision sur opposition du 12 mai 2003 par la juridiction
cantonale.

3.2 Indépendamment de ces considérations, l'office AI ne pouvait pas
davantage déclarer irrecevable l'opposition de C.________ sans lui impartir
un bref délai pour réparer le vice, en l'avertissant des conséquences
attachées à l'irrespect de ce nouveau délai, conformément à l'art. 10 al. 5
OPGA. Le recourant soutient que Me S.________ devait savoir d'emblée que son
opposition n'était pas suffisamment motivée, et que lui impartir un délai
pour compléter l'opposition cautionnerait une forme d'abus de droit. Mais on
ne saurait partager ce point de vue : d'abord, l'opposition n'était pas
dénuée de toute motivation, quand bien même elle était insuffisante si
l'assuré entendait sérieusement mettre en cause le taux d'invalidité retenu
par l'office AI. Ensuite, la procédure d'opposition venait d'être introduite
dans le domaine de l'assurance-invalidité, de sorte que le mandataire de
C.________ ignorait quelle serait précisément la pratique des autorités en la
matière. Enfin, l'office AI soutient lui-même que Me S.________ n'avait pas
pour intention de compléter l'opposition, qu'il considérait comme
suffisamment motivée; c'est dire qu'il n'entendait pas obtenir abusivement
une prolongation du délai légal d'opposition.

4.
Vu ce qui précède, les conclusions du recourant sont mal fondées. La
procédure est onéreuse (consid. 1 supra et art. 134 OJ a contrario), de sorte
que les frais de procédure seront mis à sa charge (art. 156 al. 1 OJ). Il
s'acquittera également d'une indemnité de dépens en faveur de l'intimé (art.
159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais de justice, d'un montant de 500 fr., sont mis à la charge du
recourant et sont compensés avec l'avance de frais qu'il a versée.

3.
Le recourant versera à l'intimé la somme de 1'500 fr. (y compris la taxe à la
valeur ajoutée) à titre de dépens pour l'instance fédérale.

4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 19 novembre 2004
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la Ire Chambre:   Le Greffier: