Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 624/2003
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I 624/03

Arrêt du 18 mai 2004
Ire Chambre

MM. et Mme les Juges Borella, Président, Leuzinger, Rüedi, Ursprung et
Frésard. Greffier : M. Berthoud

G.________, recourant,

contre

Office AI pour les assurés résidant à l'étranger, avenue Edmond-Vaucher 18,
1203 Genève, intimé

Commission fédérale de recours en matière d'AVS/AI pour les personnes
résidant à l'étranger, Lausanne

(Jugement du 11 juillet 2003)

Faits:

A.
G. ________, ressortissant espagnol, bénéficiait depuis le 1er février 1988
d'une rente entière de l'assurance-invalidité suisse, calculée en tenant
compte notamment de périodes espagnoles de cotisations (cf. décision de la
Caisse de compensation des industries vaudoises du 11 décembre 1991).
L'assuré a quitté la Suisse pour l'Espagne le 20 décembre 1994. A l'issue
d'une procédure de révision, l'Office AI pour les assurés résidant à
l'étranger (l'office AI) a remplacé la rente entière par une demi-rente avec
effet au 1er janvier 1996, par décision du 21 novembre 1995.

Le 30 janvier 2002, G.________ a présenté une demande de révision de sa
rente, tendant à son augmentation. A l'appui de ses conclusions, il s'est
fondé sur un rapport du docteur B.________, du 8 janvier 2002, qui attestait
une incapacité totale de travail dans un emploi de manutentionnaire. L'office
AI a recueilli l'avis du docteur C.________, de l'Institut espagnol de la
sécurité sociale. Dans son rapport du 10 mai 2002, ce médecin a attesté que
l'invalidité du patient était de 55 % dans l'activité exercée en dernier
lieu, mais qu'il pouvait travailler à 100 % dans un emploi adapté. Par
décision du 17 décembre 2002, l'office AI a rejeté la demande de révision.

B.
G.________ a déféré cette décision à la Commission fédérale de recours en
matière d'AVS/AI pour les personnes résidant à l'étranger en concluant à
l'octroi d'une rente entière.

La juridiction de recours l'a débouté par jugement du 11 juillet 2003.

C.
G.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont
il demande l'annulation, en reprenant ses conclusions formées en première
instance.

L'intimé conclut au rejet du recours. L'Office fédéral des assurances
sociales (OFAS) a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
En l'occurrence, il s'agit de déterminer si l'invalidité du recourant s'est
aggravée entre le 21 novembre 1995 et le 17 décembre 2002, de manière à
influencer son droit à la rente.

2.
La solution du litige ressortit aux art. 4, 28 et 41 LAI, dans leur teneur en
vigueur jusqu'au 31 décembre 2002 et jusqu'au 31 décembre 2003
respectivement.

La loi fédérale sur la partie générale des assurances sociales (LPGA) du 6
octobre 2000, entrée en vigueur le 1er janvier 2003, n'est pas applicable au
présent litige, dès lors que le juge des assurances sociales n'a pas à
prendre en considération les modifications du droit ou de l'état de fait
postérieures à la date déterminante de la décision litigieuse du 17 décembre
2002 (ATF 129 V 4 consid. 1.2 et les références).

3.
La comparaison des revenus, dont il est question à l'art. 28 al. 2 LAI
(abrogé au 1er janvier 2003), commande de tenir compte du revenu du travail
que l'invalide pourrait obtenir en exerçant l'activité qu'on peut
raisonnablement attendre de lui (sous l'empire de la LPGA, voir les art. 7 et
8 de cette loi). Il s'ensuit que le rapport du docteur B.________, du 8
janvier 2002, n'est d'aucun secours au recourant, car ce médecin ne s'est
exprimé que sur la capacité de travail de son patient dans une activité
inadaptée, singulièrement dans un emploi de manutentionnaire. Le rapport
d'expertise du docteur C.________ du 10 mai 2002, qui satisfait aux réquisits
jurisprudentiels relatifs à la valeur probante de tels documents (cf. ATF 125
V 352 consid. 3a, 122 V 160 consid. 1c et les références), comble en revanche
cette lacune dans la mesure où l'expert de l'Institut espagnol de la sécurité
sociale a donné son avis quant à une activité exigible, si bien que l'on peut
statuer en connaissance de cause.

De l'instruction de la demande de révision de la rente, il apparaît que le
recourant peut travailler à 100 % dans un emploi adapté à son état de santé.
Par ailleurs, à la lecture du rapport du docteur C.________, l'aggravation
alléguée de l'atteinte à la santé n'est ni établie ni vraisemblable. Il en
découle que les conclusions du recourant tendant au remplacement de sa
demi-rente d'invalidité par une rente entière sont mal fondées.

4.
Il ressort des pièces du dossier que le calcul de la rente tient compte des
périodes espagnoles de cotisations (cf. décision du 11 décembre 1991),
conformément à la convention de sécurité sociale entre la Suisse et l'Espagne
qui était alors en vigueur. On peut brièvement rappeler le système de cette
convention, dite de «type A», qui se caractérise par le «principe du risque»,
selon lequel l'invalide qui en remplit les conditions reçoit, en lieu et
place de deux rentes partielles versées par les assurances des deux pays
concernés (rentes calculées au prorata des périodes d'assurances accomplies)
une seule rente d'invalidité; celle-ci est versée par l'assurance à laquelle
il était affilié lors de la survenance de l'invalidité, qui prend en compte
la totalité des périodes de cotisations, y compris celles qui ont été
accomplies dans l'autre pays (voir ATF 112 V 149 consid. 2b, 109 V 188
consid. 3b).

A cet égard, l'entrée en vigueur, au 1er juin 2002, de l'Accord du 21 juin
1999 entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne
et ses Etats membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes
(Accord sur la libre circulation des personnes; ALCP; RS 0.142.112.681),
appelle dans le présent contexte, les observations suivantes :
4.1 Selon l'art. 1 al. 1 de l'Annexe II «Coordination des systèmes de sécurité
sociale» de l'ALCP, fondée sur l'art. 8 de l'accord et faisant partie
intégrante de celui-ci (art. 15 de l'accord), en relation avec la section A
de cette annexe, les Parties contractantes appliquent entre elles en
particulier le Règlement (CEE) no 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 relatif
à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés,
aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent
à l'intérieur de la Communauté, ainsi que le Règlement (CEE) no 574/72 du
Conseil du 21 mars 1972 fixant les modalités d'application des régimes de
sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et
aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté,
ou des règles équivalentes.

Le règlement no 1408/71 s'applique en particulier aux travailleurs salariés
ou non salariés qui sont ou ont été soumis à la législation d'un ou de
plusieurs Etats membres et qui sont des ressortissants de l'un des Etats
membres (art. 2 § 1 du Règlement). Cette notion couvre toute personne qui,
exerçant ou non une activité professionnelle, possède la qualité d'assuré au
titre de la législation de sécurité sociale d'un ou de plusieurs Etats
membres. Il s'ensuit que les titulaires d'une pension ou d'une rente dues au
titre de la législation d'un ou de plusieurs Etats membres, même s'ils
n'exercent pas une activité professionnelle, relèvent, du fait de leur
affiliation à un régime de sécurité sociale, des dispositions du règlement
concernant les travailleurs, à moins qu'ils ne fassent l'objet de
dispositions particulières édictées à leur égard (arrêt de la Cour de justice
des Communautés européennes [CJCE] du 31 mai 1979, Pierik, 182/78, Rec. p.
1977, point 4; arrêt du 6 février 1992, Royaume de Belgique, C-253/90, Rec.
p. I-531, point 9; arrêt du 5 mars 1998, Kulzer, C-194/96, Rec. p. I-895,
point 24; arrêt du 10 mai 2001, Rundgren, C-389/99, Rec. p. I-3731, point
26).

Le recourant, qui réside en Espagne et qui est titulaire d'une rente de
l'assurance-invalidité suisse tombe donc, dès le 1er juin 2002, dans le champ
d'application personnel de l'ALCP. Du point de vue temporel, le règlement no
1408/71 n'ouvre cependant aucun droit pour la période antérieure à sa mise en
application dans l'Etat concerné, en l'occurrence le 1er juin 2002 (art. 94 §
1 et 95 § 1 du règlement; voir ATF 128 V 317 consid. 1b/aa).

4.2 De manière générale, lorsqu'une personne a été assurée dans plusieurs
Etats membres, la réglementation communautaire - contrairement à ce qui était
le cas sous le régime des conventions de sécurité sociale de type A
(notamment celle conclue entre la Suisse et l'Espagne) - implique un régime
de rentes partielles de la Suisse, d'une part, et de l'Etat de l'Union
européenne concerné d'autre part; la rente suisse est alors déterminée
uniquement en fonction des périodes d'assurance en Suisse (voir notamment les
art. 44 ss du règlement, auquels renvoie l'art. 40 § 1; cf. Alessandra Prinz,
Les effets de l'Accord sur les prestations AVS et AI, in: Les effets des
Accords bilatéraux avec l'Union européenne sur les assurances sociales
suisses, Sécurité sociale, revue de l'OFAS, CHSS 2/2002, p. 81). En principe,
le recourant - qui a versé des cotisations en Espagne avant la survenance de
l'invalidité - pourrait donc prétendre une rente d'invalidité au titre de la
législation espagnole, en plus d'une rente (partielle) de
l'assurance-invalidité suisse. Dans cette mesure, les droits de l'assuré
peuvent donner lieu à révision à compter du 1er juin 2002, conformément aux
art. 94 § 5 à 7 du règlement no 1408/71 et 118 du règlement no 574/72, étant
précisé qu'un nouveau calcul ne peut, globalement, conduire à une diminution
des prestations en cours (cf. Rose Langer, in: Maximilian Fuchs [éditeur],
Kommentar zum Europäischen Sozialrecht, 3ème éd., Baden-Baden, 2002, p. 551
note 8). Les demandes sont déposées dans le pays de résidence (voir art. 36
de ce dernier règlement; Beatrix De Cupis, Les prestations de l'AVS et de
l'AI, in: Erwin Murer [éditeur], L'accord sur la libre circulation des
personnes avec l'UE et ses effets à l'égard de la sécurité sociale en Suisse,
Berne 2001, p. 146).

Il n'y a pas de révision d'office dans le cadre de l'art. 94 § 5 du règlement
no 1408/71 (Alessandra Prinz, ibidem). Le but de l'art. 94 § 5 du règlement
no 1408/71 est de donner à l'intéressé le droit de demander en sa faveur la
révision de prestations liquidées sous le régime antérieur, lorsqu'il
apparaît que les nouvelles règles lui sont plus favorables et bénéficier des
prestations accordées selon les dispositions non modifiées dans le cas où
elles se révèlent plus avantageuses. Par conséquent, l'institution compétente
d'un Etat membre ne peut pas se substituer à un assuré pour la révision des
droits obtenus avant l'entrée en vigueur du règlement no 1408/71 (arrêt de la
CJCE du 4 mai 1988, Viva, 83/87, Rec. p. 2521; arrêt du 25 septembre 1997,
Baldone, C-307/96, Rec. p. I-5133).

Par ailleurs, une demande de révision motivée par une aggravation du taux
d'invalidité ne vaut pas demande de nouveau calcul en vertu de l'art. 94 du
règlement no 1408/71; la demande de nouveau calcul doit se fonder
explicitement sur la réglementation transitoire (cf. Rose Langer, op. cit.,
p. 551 note 8 ; voir aussi l'arrêt de la CJCE du 28 juin 2001, Larsy,
C-118/00, Rec. p. I-5063).

Dès lors, si le recourant entend demander une révision de son droit,
impliquant éventuellement le versement d'une rente partielle en vertu de la
législation espagnole (en plus d'une rente partielle suisse) à partir du 1er
juin 2002, il lui appartiendra de présenter une demande auprès de
l'institution compétente en Espagne.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Commission fédérale de
recours en matière d'AVS/AI pour les personnes résidant à l'étranger et à
l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 18 mai 2004
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la Ire Chambre:   Le Greffier: