Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 592/2003
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I 592/03

Arrêt du 21 juillet 2004
IVe Chambre

MM. et Mme les Juges Ferrari, Président, Widmer et Ursprung. Greffière : Mme
Berset

M.________, recourant, représenté par Me Marc Butty, avocat, boulevard de
Pérolles 3, 1701 Fribourg,

contre

Office AI du canton de Fribourg, impasse de la Colline 1, 1762 Givisiez,
intimé

Tribunal administratif du canton de Fribourg, Cour des assurances sociales,
Givisiez

(Jugement du 18 juin 2003)

Faits:

A.
Né en 1967, M.________ a travaillé en Suisse en dernier lieu en qualité de
peintre en bâtiment, au service de l'entreprise C.________ SA.

Le 27 avril 1999, il a déposé une demande de prestations de
l'assurance-invalidité. Après avoir recueilli l'avis de nombreux médecins,
l'Office de l'assurance-invalidité du canton de Fribourg (OAI) a confié une
expertise au docteur S.________, spécialiste en psychiatrie. Dans un rapport
du 19 février 2001, ce médecin a posé le diagnostic de trouble douloureux
associé à la fois à des facteurs psychologiques et une affection médicale
générale chronique, cervicalgies et conflit professionnel. Il a fixé la
capacité de travail de l'assuré à 100 % dans une activité adaptée.

Dans l'intervalle, la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
à laquelle l'assuré s'était adressé suite à un accident de la circulation
survenu en août 1998, a mis un terme à l'octroi de ses prestations au 30 juin
1999 (décision du 1er juillet 1999).

Par décision du 18 mars 2002, l'OAI a nié le droit de l'assuré à une rente,
au motif que l'atteinte à la santé qu'il présentait n'entraînait qu'une
invalidité de 15 %, tout en lui octroyant une aide au placement.

B.
Statuant le 18 juin 2003, le Tribunal administratif du canton de Fribourg,
Cour des assurances sociales, a rejeté le recours formé par l'assuré contre
cette décision.

C.
Par écriture du 9 septembre 2003, M.________ interjette recours de droit
administratif contre ce jugement, dont il demande l'annulation, en concluant,
sous suite de dépens, principalement, à l'octroi d'une rente entière
d'invalidité dès le 27 avril 1999. Subsidiairement, il requiert le renvoi de
la cause à la cour cantonale pour instruction complémentaire et nouveau
jugement. Dans les deux cas, il demande une indemnité de partie pour ses
frais de recours devant le Tribunal administratif. Très subsidiairement, il
sollicite le bénéfice de l'assistance judiciaire gratuite. Il a également
produit deux écritures complémentaires les 26 novembre 2003 et 5 juillet 2004
.

L'OAI conclut implicitement au rejet du recours. L'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
1.1  Le litige porte sur le droit de l'assuré à une rente de
l'assurance-invalidité, singulièrement sur le taux d'invalidité.

1.2  La loi fédérale sur la partie générale des assurances sociales (LPGA) du
6 octobre 2000, entrée en vigueur le 1er janvier 2003, n'est pas applicable
au présent litige, tout au moins sous l'angle matériel, le juge des
assurances sociales n'ayant pas à tenir compte des modifications du droit ou
de l'état de fait survenues après que la décision administrative litigieuse a
été rendue (cf. ATF 129 V 4  consid. 1. 2 et les arrêts cités). Ratione
temporis, les dispositions de la novelle du 21 mars 2003 modifiant la LAI (4e
révision), entrée en vigueur le 1er janvier 2004 (RO 2003 3852), ne sont pas
non plus applicables.

2.
Le jugement entrepris expose correctement les dispositions légales
applicables en matière d'évaluation du taux d'invalidité, ainsi que les
principes jurisprudentiels sur la valeur probante d'un rapport médical (ATF
125 V 352 consid. 3), si bien qu'il suffit d'y renvoyer sur ces différents
points.

3.
Le recourant fait grief à l'autorité cantonale de s'être fondée sur des
données médicales qui n'étaient plus d'actualité, les rapports des experts en
psychiatrie et en rhumatologie ayant été rendus respectivement une année et
deux ans avant la décision incriminée. Plus spécifiquement, il reproche aux
premiers juges d'avoir écarté quatre appréciations médicales, dont les deux
premières sont antérieures à la décision en cause, et les deux autres,
postérieures, concernent en réalité l'état de fait déterminant (rapports du
23 janvier 2002 des docteurs B.________ et I.________, médecin-chef-adjoint
et médecin-assistant au Service de rhumatologie de l'Hôpital F.________, du
15 mars 2002 des docteurs E.________ et O.________, médecin-chef et
médecin-assistant au service de médecine psychosomatique et autres
disciplines d'une clinique spécialisée de la Klinik für Allgemeine Innere
Medizin de l'Hôpital L.________, du 22 avril 2002 du docteur I.________ et du
26 juillet 2002 des docteurs H.________ et G.________, médecin-chef et
médecin-assistant à la Klinik für Allgemeine Innere Medizin de l'Hôpital
L.________).

4.
4.1 Se référant, notamment, à l'expertise psychiatrique et aux rapports des
divers rhumatologues de l'Hôpital F.________ (dont le plus récent date du 27
avril 2000), les premiers juges ont retenu en substance que le recourant
souffre de cervicalgies ainsi que de lombalgies chroniques non invalidantes
et qu'il ne présente pas d'affection psychique pouvant exercer une influence
sur sa capacité de travail, de sorte qu'il était apte à exercer une activité
physique légère à 100 %.

Or, il ressort du rapport (de sortie) des docteurs B.________ et I.________
du 23 janvier 2002 - établi à l'issue d'un séjour hospitalier du recourant du
3 au 12 décembre 2001 et donc postérieur aux examens du psychiatre S.________
et du rhumatologue -, que celui-ci présente des douleurs chroniques avec des
lombalgies communes et un syndrome de déconditionnement à l'effort important,
un syndrome douloureux récidivant à la cheville gauche, un status après
entorse ainsi qu'un status après arthroscopie, synovectomie et résection du
ligament de Bassett le 17 janvier 2001. L'incapacité de travail de l'assuré
dépendait ainsi des suites post arthroscopie au niveau de la cheville gauche.

Dans un rapport subséquent du 22 avril 2002, le docteur I.________ a précisé
que l'état de santé de l'assuré s'était aggravé depuis l'intervention
opératoire du 17 janvier 2001 (douleurs à la cheville en station prolongée
debout et boiterie antalgique à la marche). Selon ce médecin, la capacité de
travail dans une profession adaptée était de l'ordre de 50  au maximum. Au vu
de l'évolution plutôt défavorable, il convenait d'envisager d'intégrer
l'assuré dans un foyer protégé pour l'amener à changer de profession ou à
assumer progressivement plus de responsabilités et augmenter son taux de
travail.

4.2  Par ailleurs, les premiers juges ont écarté le rapport du 26 juillet
2002
des docteurs H.________ et G.________ (de la Klinik für Allgemeine Innere
Medizin de l'Hôpital L.________), au motif que, postérieur à la décision
incriminée, il ne serait pertinent que dans le cadre d'une procédure de
révision.

Le rapport en cause qui faisait suite à une consultation ambulatoire du 6
mars 2002 (rapport du 15 mars 2002 par des cliniciens bernois au Service de
rhumatologie de l'Hôpital F.________) a été rédigé à l'issue d'une
hospitalisation de l'intéressé du 22 mai au 12 juillet 2002. Les docteurs
H.________ et G.________, relèvent la présence d'un syndrome douloureux
chronifié (status après coup du lapin en 1998 ayant entraîné un syndrome
cervico-spondylogène chronifié; syndrome lombo-spondylogène douloureux avec
répercussions pseudo-radiculaires dans la jambe gauche; céphalées de tension
intermittentes; syndrome douloureux à la cheville gauche après traumatismes
de supination récidivants et après arthroscopie; chronification,
généralisation et amplification des symptômes dans un contexte de surcharge
psycho-sociale et d'évolution dépressive) et d'une évolution dépressive
chronique (avec attaques de panique intermittentes et réaction toujours plus
accentuée de repli et de conservation). Selon ces médecins, l'assuré
présentait une incapacité de travail totale à la date de leur rapport.

4.3  Selon une jurisprudence constante, le juge des assurances sociales
apprécie la légalité des décisions attaquées, en règle générale, d'après
l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF
121 V 366 consid. 1b et les arrêts cités). Les faits survenus postérieurement
doivent cependant être pris en considération dans la mesure où ils sont
étroitement liés à l'objet du litige et de nature à influencer l'appréciation
au moment où la décision attaquée a été rendue (ATF 99 V 102 et les arrêts
cités).

4.4  En l'espèce c'est à tort que les premiers juges ont écarté dans leur
appréciation des preuves aussi bien les rapports des médecins de l'Hôpital
F.________ que ceux des médecins de la clinique bernoise,  dès lors que les
constatations de ces médecins concernent  pour l'essentiel des faits
antérieurs à la décision administrative et à tout le moins de nature à
influencer l'appréciation.

En effet, les rapports des rhumatologues de l'Hôpital F.________ et des
cliniciens bernois font ressortir que, sur le plan somatique, le recourant
présente un certain nombre d'affections susceptibles de diminuer, au moins
depuis l'intervention orthopédique de janvier 2001, sa capacité de travail de
manière significative. Ils sont également de nature à mettre en doute les
conclusions de l'expertise psychiatrique, notamment en raison de l'écoulement
du temps et du changement apparent de situation. Dans ces conditions, au vu
des opinions sérieusement divergentes des médecins, comme de l'évolution de
la capacité de travail de l'assuré jusqu'à la date de la décision litigieuse,
un complément d'instruction s'avère nécessaire pour statuer en toute
connaissance de cause. Les médecins qui seront appelés à se prononcer devront
poser un diagnostic précis sur la nature des troubles somatiques et
psychiques dont souffre l'assuré. Ils devront déterminer sa capacité de
travail et les activités exigibles de sa part et indiquer, le cas échéant, si
des mesures de réadaptation sont envisageables, dans l'affirmative, sous
quelle forme.

Il incombera dès lors à l'office intimé auquel la cause est renvoyée
d'ordonner les expertises nécessaires et de rendre ensuite une nouvelle
décision.

5.
Vu la nature du litige, la procédure est gratuite (art. 134 OJ). Le
recourant, qui obtient gain de cause s'agissant de sa conclusion subsidiaire,
a droit à une indemnité de dépens pour l'instance fédérale (art. 159 al. 1 en
corrélation avec l'art. 135 OJ). La demande d'assistance judiciaire est ainsi
sans objet.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est partiellement admis en ce sens que le jugement du 18 juin 2003
du Tribunal administratif du canton de Fribourg, Cour des assurances
sociales, ainsi que la décision du 18 mars 2002 de l'Office de
l'assurance-invalidité du canton de Fribourg sont annulés; la cause est
renvoyée à cet office pour complément d'instruction au sens des motifs et
nouvelle décision.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
L'Office de l'assurance-invalidité du canton de Fribourg versera à M.________
la somme de 2'500 fr. (y compris la taxe à la valeur ajoutée) à titre de
dépens pour la procédure fédérale.

4.
Le Tribunal administratif du canton de Fribourg statuera sur les dépens de la
procédure de première instance, au regard de l'issue du procès de dernière
instance.

5.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal administratif du
canton de Fribourg, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral des
assurances sociales.

Lucerne, le 21 juillet 2004
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IVe Chambre:   La Greffière: