Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 49/2003
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I 49/03

Arrêt du 23 avril 2003
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Meyer et Kernen. Greffière : Mme Gehring

B.________, recourant, représenté par Me Romolo Molo, avocat, bd Helvétique
27, 1211 Genève 3,

contre

Office cantonal AI Genève, boulevard du Pont-d'Arve 28, 1205 Genève, intimé

Commission cantonale de recours en matière d'AVS/AI, Genève

(Jugement du 28 août 2002)

Faits :

A.
B. ________ a travaillé en qualité de boiseur-coffreur jusqu'au 20 janvier
1998. Souffrant des séquelles d'une tuberculose contractée en 1995, il a
déposé, le 24 avril 1998, une demande de prestations de
l'assurance-invalidité tendant à l'octroi d'une mesure d'orientation
professionnelle et d'un reclassement dans une nouvelle profession. L'Office
cantonal de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l'office)
l'a mis au bénéfice d'un stage d'observation professionnelle, puis d'un stage
de réentraînement à l'effort, avec suite d'indemnités journalières. Selon les
rapports établis au terme de ces stages, B.________ présente une capacité de
travail résiduelle de 60 % en qualité d'ouvrier dans l'industrie légère.

Par décision du 18 août 2000, l'office a alloué à B.________ une rente
entière fondée sur un degré d'invalidité de 100 %, pour la période du 1er
janvier 1999 au 31 novembre 1999. Par décision du 11 octobre 2000, il a
rejeté la demande tendant à l'octroi de mesures de réadaptation
professionnelle. Par décision du 20 mars 2001 (remplaçant une décision du 6
février 2001), il lui a alloué une demi-rente fondée sur un degré
d'invalidité de 56 %, à partir du 1er mai 2000.

B.
Par jugement du 28 août 2002, la Commission cantonale de recours en matière
d'AVS/AI du canton de Genève a rejeté le recours formé contre cette dernière
décision par B.________.

C.
Celui-ci interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont il
requiert l'annulation, en concluant, sous suite de dépens, à l'octroi d'une
rente entière à compter du 1er mai 2000 et, subsidiairement, au renvoi de la
cause pour complément d'instruction. En outre, il sollicite le bénéfice de
l'assistance judiciaire.

L'office conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des
assurances sociale a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit :

1.
Le litige porte sur le droit du recourant à une rente entière à partir du 1er
mai 2000, plus particulièrement sur le taux d'invalidité présenté dès ce
moment.

2.
La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6
octobre 2000 (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003, entraînant la
modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de
l'assurance-invalidité. Le cas d'espèce demeure toutefois régi par les
dispositions de la LAI en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002, eu égard au
principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur au moment
où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 127 V 467
consid. 1). En outre, le Tribunal fédéral des assurances apprécie la légalité
des décisions attaquées, en règle générale, d'après l'état de fait existant
au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 121 V 366 consid. 1b).

3.
3.1 Selon l'art. 28 al. 1 LAI, l'assuré a droit à une rente entière s'il est
invalide à 66 2/3 % au moins, à une demi-rente s'il est invalide à 50 % au
moins, ou à un quart de rente s'il est invalide à 40 % au moins; dans les cas
pénibles, l'assuré peut, d'après l'art. 28 al. 1bis LAI, prétendre une
demi-rente s'il est invalide à 40 % au moins.
Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être déterminé sur la
base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu du travail que
l'invalide pourrait obtenir en exerçant l'activité qu'on peut raisonnablement
attendre de lui, après exécution éventuelle de mesures de réadaptation et
compte tenu d'une situation équilibrée du marché du travail, est comparé au
revenu qu'il aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide (art. 28 al. 2 LAI).
La comparaison des revenus s'effectue, en règle ordinaire, en chiffrant aussi
exactement que possible les montants de ces deux revenus et en les
confrontant l'un avec l'autre, la différence permettant de calculer le taux
d'invalidité (méthode générale de comparaison des revenus; ATF 128 V 30
consid. 1, 104 V 136 consid. 2a et 2b).

3.2
Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, l'administration (ou le juge,
s'il y a eu un recours) a besoin de documents que le médecin, éventuellement
aussi d'autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin
consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle
mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler. En
outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer
quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l'assuré (ATF 125 V
261 consid. 4, 115 V 134 consid. 2, 114 V 314 consid. 3c, 105 V 158 consid.
1).
En ce qui concerne, la valeur probante d'un rapport médical, ce qui est
déterminant c'est que les points litigieux aient fait l'objet d'une étude
circonstanciée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il
prenne également en considération les plaintes exprimées par la personne
examinée, qu'il ait été établi en pleine connaissance de l'anamnèse, que la
description du contexte médical et l'appréciation de la situation médicale
soient claires et enfin que les conclusions de l'expert soient dûment
motivées. Au demeurant, l'élément déterminant pour la valeur probante n'est
ni l'origine du moyen de preuve ni sa désignation comme rapport ou comme
expertise, mais bel et bien son contenu (ATF 125 V 352 consid. 3a, 122 V 160
consid. 1c et les références).

4.
4.1 Selon l'administration et la juridiction cantonale, le recourant n'a pas
droit à une rente entière, motif pris qu'il ne présente pas un degré
d'invalidité suffisant (56 %). Pour déterminer ce taux, elles ont considéré
que l'intéressé disposait d'une capacité résiduelle de travail de 60 % en
qualité d'ouvrier dans l'industrie légère et que le manque à gagner issu
d'une comparaison entre le revenu tiré de cette activité et celui que
l'intéressé réaliserait sans invalidité, était insuffisant pour ouvrir droit
à une rente entière. A l'appui de leur point de vue, elles se sont fondées
sur les conclusions des rapports du 5 octobre 1999 et du 15 mai 2000 du
Centre d'intégration professionnelle du canton de Genève ainsi que d'un
rapport du 6 juin 1998 établi par les docteurs A.________ et C.________ de la
Division de pneumologie et du Centre antituberculeux de l'Hôpital X.________.
Aux termes de ce dernier rapport, le recourant présente un status après
tuberculose pulmonaire bacillaire traitée en 1995, un status après
pneumothorax gauche récidivant en juin 1996, un status après culminectomie
gauche en 1996 pour pneumothorax récidivant et un status après lobectomie
supérieure droite pour une aspergillose pulmonaire apical droit. La réduction
de la tolérance à l'effort résultant de ces atteintes est incompatible avec
un travail de force tel que le recourant l'effectuait habituellement.

4.2 De son côté, le recourant fait valoir qu'en sus des affections somatiques
précitées, il présente des troubles psychiques invalidants. A l'appui de ses
allégués, il se fonde sur un rapport du 18 janvier 2002 et une annexe
corrélative établie le 11 juillet 2002 par les docteurs D.________,
E.________ et F.________ de la policlinique de médecine de l'Hôpital
X.________.

Dans ce rapport, le docteur F.________ fait état de troubles somatoformes
douloureux dont le recourant serait atteint et propose la mise en oeuvre
d'une expertise psychiatrique afin de réévaluer son incapacité de travail.
L'annexe précise que les examens de rhumatologie, ainsi que ceux pratiqués
par les spécialistes en médecine de la douleur et en pneumologie laissent
présumer l'existence de composantes neurogènes et ostéo-articulaires aux
douleurs du recourant. Ils ne révèlent pas la présence d'une pathologie
organique ou d'un mécanisme physio-pathologique. Les multiples traitements
médicamenteux n'ont apporté aucune amélioration. Les médecins concluent à
l'existence de douleurs thoraciques post-thoracotomie ayant évolué en un
trouble somatoforme douloureux sévère. En outre, le patient présente une
thymie triste associée à des pleurs à l'évocation de sa solitude, de
l'éloignement de sa famille, de ses difficultés financières et
professionnelles ainsi que du handicap somatique ressenti depuis les
pathologies pulmonaires. Il présente des difficultés d'endormissement, ainsi
que des troubles de l'appétit, de la mémoire et de la concentration. Il
manifeste une importante préoccupation, voire même de l'anxiété au sujet de
son état de santé. Les médecins concluent à l'existence d'un état dépressif
majeur, lequel, associé aux troubles somatoformes douloureux précités,
entraîne une incapacité entière de travail du recourant.

4.3 Selon l'office, ces troubles ne doivent pas être pris en considération
pour l'évaluation du degré d'invalidité du recourant, motif pris qu'ils se
sont développés ultérieurement à la décision litigieuse.

Toutefois, il ressort du rapport du 15 mai 2000 du Centre d'intégration
professionnelle du canton de Genève que, déjà à l'époque de son stage de
réentraînement, soit du 3 novembre 1999 au 2 mai 2000, le recourant
présentait une personnalité apathique, était animé d'une énergie plutôt
modérée, persuadé de ne plus disposer de capacité de travail et inquiet en
permanence en raison de sa maladie. Dans un rapport daté du 23 juillet 2001,
les docteurs G.________ et H.________ avaient également observé que le
recourant affichait une attitude passive et revendicatrice, visiblement
mécontent des médecins qui le soignaient qu'il tenait pour responsables de
son mal, ainsi que de la décision rendue à son encontre par l'office. Ils en
avaient conclu que l'obstacle principal à une reprise du travail résultait du
sentiment d'injustice que le recourant éprouvait et proposé la mise en oeuvre
d'une évaluation psychiatrique afin d'apprécier l'influence du psychisme du
recourant sur ses symptômes. Enfin, aux termes de l'annexe du 11 juillet
2002, il existe une relation temporelle claire entre les troubles psychiques
du recourant et l'atteinte corporelle résultant des interventions
chirurgicales qu'il a subies en 1996 et 1998.

4.4 Sur le vu de ce qui précède, l'office et particulièrement les premiers
juges n'étaient pas dispensés d'examiner si le recourant présentait ou non
des troubles psychiques invalidants, au motif que ces derniers ne se seraient
développés qu'ultérieurement à la décision litigieuse (ATF 121 V 366 consid.
1b et les arrêts cités). C'est donc à tort qu'ils ont déterminé le degré
d'invalidité de l'assuré en se fondant sur sa capacité résiduelle de travail
telle qu'elle résulte de ses seules affections physiques, et sans examiner
l'éventualité qu'il présentât, en sus, une atteinte à sa santé psychique.
Dans ces circonstances, un complément d'instruction s'impose afin de
déterminer si la capacité résiduelle de travail du recourant est en outre
diminuée par une telle atteinte et à partir de quand. A défaut d'informations
sur ces points, il n'est pas possible de se prononcer sur le degré
d'invalidité de l'assuré et donc sur son éventuel droit à une rente entière
de l'assurance-invalidité. Il convient dès lors de renvoyer la cause à
l'office afin qu'il rende une nouvelle décision après complément
d'instruction.

5.
Le recourant qui obtient gain de cause a droit à une indemnité de dépens pour
l'instance fédérale à charge de l'intimé (art. 159 al. 1 en corrélation avec
l'art. 135 OJ). Sa demande d'assistance judiciaire est dès lors sans objet.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est admis en ce sens que le jugement de la Commission cantonale de
recours en matière d'AVS/AI du canton de Genève du 28 août 2002, ainsi que la
décision de l'Office cantonal AI de Genève du 20 mars 2001 sont annulés, la
cause étant renvoyée audit office pour instruction complémentaire et nouvelle
décision sur le droit du recourant à des prestations de
l'assurance-invalidité.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
L'Office cantonal AI de Genève versera au recourant la somme de 2'500 fr. à
titre de dépens (y compris la taxe sur la valeur ajoutée) pour l'instance
fédérale.

4.
La Commission cantonale de recours en matière d'AVS/AI du canton de Genève
statuera sur les dépens pour la procédure de première instance, au regard de
l'issue du procès de dernière instance.

5.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Commission cantonale de
recours en matière d'AVS/AI du canton de Genève et à l'Office fédéral des
assurances sociales.

Lucerne, le 23 avril 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIIe Chambre:   La Greffière: