Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 476/2003
Zurück zum Index Sozialrechtliche Abteilungen 2003
Retour à l'indice Sozialrechtliche Abteilungen 2003


I 476/03

Arrêt du 12 août 2004
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Kernen et Boinay, suppléant. Greffier : M.
Métral

A.________,, recourant, représenté par Me Jean-Marie Agier, avocat, FSIH,
place du Grand-Saint-Jean 1, 1003 Lausanne,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 28 mars 2003)

Faits:

A.
A.a  A.________, né en 1952, est titulaire d'une rente entière d'invalidité,
allouée par décision du 22 février 1993, prenant effet rétroactivement dès le
1er octobre 1990. Cette décision était motivée notamment par un «état de
stress post-traumatique avec dépression, consécutifs à un traumatisme
cranio-cérébral», attesté par le docteur M.________, médecin chef au Centre
d'observation médicale de l'assurance-invalidité, à Lausanne (rapport du 29
octobre 1992). Selon ce praticien, le pronostic à long terme n'était pas
défavorable et l'on pouvait s'attendre à une évolution lente de la
symptomatologie avec reprise d'une activité lucrative, le cas devant être
réévalué dans un délai de deux à trois ans.

En 1994, l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après
: OAI), a mis en oeuvre une procédure de révision du droit à la rente. Sur la
base de rapports médicaux établis par le docteur R.________, spécialiste en
oto-rhino-laryngologie (rapport du 23 février 1995) et le docteur P.________,
psychiatre (rapport du 11 septembre 1995), qui concluaient l'un et l'autre à
un état de santé inchangé, il a finalement constaté que l'invalidité de
A.________ n'avait pas subi de modification susceptible d'influencer le droit
à la rente.

A.b  Dans le cadre d'une nouvelle procédure de révision du droit à la rente,
le docteur R.________ a fait état d'un syndrome post-commotionnel associé à
une composante subjective anxio-dépressive, d'un status après commotion
labyrinthique bilatérale, d'acouphènes, et d'une sinistrose. Il précisait que
A.________ le consultait trois ou quatre fois par année en vue d'obtenir des
ordonnances pour divers médicaments, en faisant valoir souffrir de céphalées
postérieures, de dorsalgies lombo-sacrales, d'acouphènes sous forme de bruit
de machine, de vertiges intermittents aux changements de position, et de
tendance à la chute en cas d'efforts physiques. Le docteur R.________
ajoutait qu'une reprise du travail sur un chantier n'était pas envisageable
et qu'une tentative de reconversion professionnelle serait vouée à l'échec,
compte tenu notamment de l'intérêt financier de l'assuré au maintien d'une
rente d'invalidité (rapports des 17 février et 30 novembre 2000). L'OAI
demanda un avis au Service médical régional AI du Léman, dont la doctoresse
B.________ attesta une capacité de travail entière dans une activité
n'impliquant pas de fréquents mouvements de la colonne cervicale ou de
changements de position rapidement répétés (rapport du 21 novembre 2001).
Par décision du 6 septembre 2002, l'OAI a supprimé la rente allouée
initialement à A.________, avec effet dès le 1er novembre 2002. Il a retiré
l'effet suspensif à un éventuel recours.

B.
Par jugement du 28 mars 2003, le Tribunal des assurances du canton de Vaud a
admis le recours déposé par A.________ contre cette décision et a renvoyé le
dossier à l'OAI pour qu'il mette en oeuvre une expertise psychiatrique et
rende une nouvelle décision.

C.
A. ________ interjette un recours de droit administratif contre ce jugement,
dont il demande l'annulation en tant qu'il renvoie la cause à l'OAI pour
instruction complémentaire et nouvelle décision. L'intimé conclut au rejet du
recours, alors que l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se
déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le litige porte sur le point de savoir si l'autorité cantonale devait
renvoyer le dossier à l'intimé pour instruction complémentaire et nouvelle
décision ou si elle devait, compte tenu des circonstances, annuler purement
et simplement la décision attaquée, à charge pour l'OAI de mettre en oeuvre,
s'il le souhaitait, une nouvelle procédure de révision. Le recourant fait
valoir qu'un renvoi pour instruction complémentaire et nouvelle décision a
pour effet de le priver, pendant toute la durée de la nouvelle procédure, de
la rente dont il bénéficiait depuis le 1er octobre 1990, alors qu'aucune
pièce au dossier n'atteste une amélioration de son état de santé.

2.
2.1 Si le degré d'invalidité du bénéficiaire d'une rente se modifie de
manière
à influencer le droit à la rente, celle-ci est, pour l'avenir, augmentée,
réduite ou supprimée (art. 41 LAI, dans sa teneur en vigueur au moment de la
décision administrative litigieuse; cf. également l'art. 17 LPGA, en vigueur
depuis le 1er janvier 2003, qui n'a pas modifié les conditions de la révision
du droit à la rente : arrêt A. du 30 avril 2004 [I 626/03], destiné à la
publication, consid. 3.5). En principe, la diminution ou la suppression de la
rente prend effet au plus tôt le premier jour du deuxième mois qui suit la
notification de la décision (art. 88bis al. 2 let. a RAI).

2.2  Selon les art. 81 LAI et 97 al. 2 LAVS, dans leur teneur au moment de la
décision administrative litigieuse, un office de l'assurance-invalidité peut
prévoir dans une décision qu'un éventuel recours n'aura pas d'effet
suspensif, même si cette décision porte sur une prestation pécuniaire. Cette
possibilité a été maintenue par la LPGA, entrée en vigueur le 1er janvier
2003 (art. 66 LAI et 97 LAVS).

Selon la jurisprudence, si l'effet suspensif est retiré à un recours dirigé
contre une décision de révision qui supprime une rente, ce retrait dure, en
cas de renvoi de la cause à l'administration pour complément d'instruction,
jusqu'à la notification d'une nouvelle décision à l'assuré; demeure réservée
la notification abusive d'une décision de révision par l'administration afin
que la diminution ou la suppression de la rente prenne effet prématurément
(ATF 129 V 372 ss consid. 3 et 4). Cette jurisprudence conserve sa pertinence
sous l'empire de la LPGA (ATF 129 V cité, consid. 4.3; arrêt P. du 24 février
2004 [I 46/04] consid. 1.3).

3.
3.1 La juridiction cantonale a considéré à juste titre que le dossier, en
l'état, ne permet pas de se prononcer en connaissance de cause sur une
éventuelle modification de l'état de santé de l'assuré. En l'absence d'une
expertise psychiatrique, l'évolution des troubles d'ordre psychique dont
souffrait A.________ au moment de la décision initiale d'octroi d'une rente
d'invalidité ne peut être évaluée correctement. Un renvoi de la cause à
l'office intimé pour instruction complémentaire et nouvelle décision n'est
donc pas critiquable. On précisera cependant que le complément d'instruction
à mettre en oeuvre devra se dérouler dans un cadre pluridisciplinaire, de
manière à établir, le cas échéant, si une incapacité de travail attestée en
raison d'atteintes à la santé physique se recouvre partiellement ou
totalement avec une incapacité de travail en raison de troubles d'ordre
psychique.

3.2  Il reste à examiner si les premiers juges auraient dû restituer l'effet
suspensif au recours interjeté par A.________ contre la décision de l'office
AI du 6 septembre 2002, conformément à l'art. 55 al. 3 PA (applicable par
renvoi de l'art. 97 LAVS [avant le 1er janvier 2003, art. 97 al. 2 LAVS]).

3.2.1  Selon la jurisprudence, la possibilité laissée à l'autorité
administrative de retirer l'effet suspensif d'un recours n'est pas
subordonnée à la condition qu'il existe, dans le cas particulier, des
circonstances tout à fait exceptionnelles qui justifient cette mesure. Il
incombe bien plutôt à l'autorité d'examiner si les motifs qui parlent en
faveur de l'exécution immédiate de la décision l'emportent sur ceux qui
peuvent être invoqués à l'appui de la solution contraire. L'autorité dispose
sur ce point d'une certaine liberté d'appréciation. En général, elle se
fondera sur l'état de fait tel qu'il résulte du dossier, sans effectuer de
longues investigations supplémentaires. En procédant à la pesée des intérêts
en présence, les prévisions sur l'issue du litige au fond peuvent également
être prises en considération; il faut cependant qu'elles ne fassent aucun
doute (ATF 124 V 88 consid. 6a; 117 V 191 consid. 2b).

3.2.2  En l'occurrence, l'issue de la nouvelle procédure d'instruction à
mettre en oeuvre par l'office AI est incertaine. Le docteur R.________ a
laissé entendre qu'un reclassement professionnel serait voué à l'échec en
raison de l'intérêt financier du recourant au maintien de prestations
d'invalidité, plus que pour des motifs tenant à son état de santé. Quant à la
doctoresse B.________, elle a fait état d'une pleine capacité de travail dans
certaines activités adaptées à l'état de santé de l'assuré. Malgré le
caractère insuffisant de ces pièces pour statuer en connaissance de cause, il
n'y a pas lieu de retenir que l'office AI aurait abusivement statué de
manière prématurée. Par ailleurs, en cas de restitution de l'effet suspensif
et de diminution ou de suppression du droit à la rente au terme de la
procédure d'instruction complémentaire ordonnée par le tribunal, l'office AI
ne pourrait que difficilement obtenir la restitution des prestations versées
à tort; le recourant pourra, en revanche, obtenir aisément le paiement de
prestations arriérées, si finalement son taux d'invalidité s'avérait
inchangé. Dans ces conditions, l'intérêt au maintien du retrait de l'effet
suspensif prononcé par l'office AI revêt un caractère prédominant.

4.
Vu ce qui précède, le recours est mal fondé. La procédure porte sur l'octroi
ou le refus de prestations d'assurance, de sorte qu'elle est gratuite (art.
134 OJ). Le recourant, qui succombe, ne peut prétendre de dépens (art. 159
al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice ni alloué de dépens.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du
canton de Vaud, à la Caisse cantonale vaudoise de compensation AVS et à
l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 12 août 2004
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIIe Chambre:   Le Greffier: