Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 225/2003
Zurück zum Index Sozialrechtliche Abteilungen 2003
Retour à l'indice Sozialrechtliche Abteilungen 2003


I 225/03

Arrêt du 18 juillet 2003
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari. Greffière : Mme
Boschung

M.________, recourant, représenté par Me Philippe Nordmann, avocat, place
Pépinet 4, 1003 Lausanne,

contre

Office AI pour les assurés résidant à l'étranger, avenue Edmond-Vaucher 18,
1203 Genève, intimé

Commission fédérale de recours en matière d'AVS/AI pour les personnes
résidant à l'étranger, Lausanne

(Jugement du 24 février 2003)

Faits:

A.
M.________, ressortissant portugais, né en 1952, a travaillé en Suisse dès le
mois de mars 1993 en tant qu'aide-jardinier saisonnier. Victime d'un accident
le 22 décembre 1994, il a subi une lésion de la coiffe des rotateurs de
l'épaule droite et a été incapable de travailler jusqu'au 25 juin 1995. Il a
ensuite repris son activité à 50 % jusqu'au 30 novembre 1995, date à laquelle
il a été licencié.

Le 17 octobre 1995, M.________ a déposé une demande de prestations auprès de
l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après : l'OAI)
afin d'obtenir des mesures de reclassement dans une nouvelle profession.
Ensuite d'une chute survenue le 14 juillet 1996, il a été opéré au mois de
mars 1997 pour une lésion du ligament croisé du genou droit.

L'OAI a recueilli des renseignements médicaux et versé au dossier deux
expertises mises en oeuvre par l'assureur-accidents de l'intéressé. Dans la
première expertise (rapport du 15 janvier 1998), le docteur A.________,
spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie, a conclu à une
capacité résiduelle de travail de 75 % dans une occupation lourde (maçon) et
à une capacité de travail de 100 % dans un métier adapté (chauffeur de taxi,
surveillant, magasinier ou encore aide-jardinier, mais seulement dans des
occupations légères). Dans une expertise du 1er juillet 1999, les médecins de
l'unité d'orthopédie et de chirurgie de l'appareil moteur de l'hôpital
H.________ ont constaté une incapacité de travail entière dans l'activité
d'aide-jardinier, et une capacité de travail de 100 % dans une profession
sédentaire ne nécessitant pas l'utilisation de l'épaule droite en élévation.

En outre, M.________ a effectué un stage d'évaluation du 7 au 25 juillet 1997
au centre d'observation professionnelle de l'assurance-invalidité X.________.
Il ressort notamment du rapport final que l'intéressé était peu limité dans
ses mouvements, mais que le port de charges devait être évité.

De son côté, l'assuré a produit un rapport d'expertise du docteur B.________,
spécialiste en chirurgie orthopédique, du 2 juillet 1998, qui  faisait état
d'une capacité résiduelle de travail de 0 à 25 % dans la profession de maçon.

Par décision du 1er mars 2000, l'OAI a rejeté la demande de prestations,
motif pris que le taux d'invalidité de M.________ était de 9,1 %.

M.________ a recouru contre cette décision devant le Tribunal des assurances
du canton de Vaud. Il a conclu à son annulation et à l'octroi d'une rente
entière d'invalidité et, subsidiairement, à la mise en oeuvre d'une nouvelle
expertise médicale. En cours de procédure, M.________ a produit une expertise
du 8 janvier 2001 du docteur C.________, (Portugal), spécialiste en chirurgie
orthopédique. Celui-ci a repris le diagnostic établi précédemment, mais a
conclu à une "incapacité permanente partielle" (IPP) de 61,2 %.

Par jugement du 17 décembre 2001, le Tribunal des assurances du canton de
Vaud a décliné sa compétence en raison du domicile au Portugal de M.________
et a renvoyé la cause à la Commission fédérale de recours en matière
d'assurance-vieillesse, survivants et invalidité pour les personnes résidant
à l'étranger (ci-après: la commission de recours) comme objet de sa
compétence.

Par jugement du 19 février 2002, la commission de recours a annulé la
décision de l'OAI et transmis le dossier pour nouvelle décision à l'autorité
compétente, à savoir l'Office de l'assurance-invalidité pour les assurés
résidant à l'étranger (ci-après: l'OAIE).

B.
Le 14 mai 2002, l'OAIE a rendu une décision par laquelle il a rejeté la
demande de prestations de M.________. Il a conclu que sa capacité de travail
était entière dans une activité adaptée et, compte tenu de la comparaison des
revenus déterminants, qu'il ne subissait qu'une diminution de sa capacité de
gain de 9,1 %, comme l'avait établi l'OAI.

C.
Saisie d'un recours de M.________, la commission de recours l'a rejeté par
jugement du 24 février 2003.

D.
M.________ interjette un recours de droit administratif en concluant, sous
suite de dépens, principalement à la réforme du jugement attaqué en ce sens
qu'une rente entière d'invalidité lui soit allouée dès le mois de novembre
1996, et subsidiairement à l'annulation de la décision attaquée et au renvoi
de la cause pour complément d'instruction.

L'OAIE conclut au rejet du recours en se référant à un préavis de l'OAI.

L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
1.1 Le litige porte sur le droit éventuel du recourant à une rente de
l'assurance-invalidité.

1.2 La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales
(LPGA) du 6 octobre 2000, entrée en vigueur le 1er janvier 2003, n'est pas
applicable en l'espèce, dès lors que le juge des assurances sociales n'a pas
à prendre en considération les modifications du droit ou de l'état de fait
postérieures à la date déterminante de la décision litigieuse, à savoir le 14
mai 2002 (ATF 127 V 467 consid. 1, 121 V 366 consid. 1b).

2.
2.1 Selon l'art. 28 al. 1 LAI, l'assuré a droit à une rente entière s'il est
invalide à 66 2/3 % au moins, à une demi-rente s'il est invalide à 50 % au
moins, ou à un quart de rente s'il est invalide à 40 % au moins; dans les cas
pénibles, l'assuré peut, d'après l'art. 28 al. 1bis LAI, prétendre une
demi-rente s'il est invalide à 40 % au moins.

D'après l'art. 4 al. 1 LAI, l'invalidité est la diminution de la capacité de
gain, présumée permanente ou de longue durée, qui résulte d'une atteinte à la
santé physique ou mentale provenant d'une infirmité congénitale, d'une
maladie ou d'un accident.
Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être déterminé sur la
base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu du travail que
l'invalide pourrait obtenir en exerçant l'activité qu'on peut raisonnablement
attendre de lui, après exécution éventuelle de mesures de réadaptation et
compte tenu d'une situation équilibrée du marché du travail, est comparé au
revenu qu'il aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide (art. 28 al. 2 LAI).
La comparaison des revenus s'effectue, en règle ordinaire, en chiffrant aussi
exactement que possible les montants de ces deux revenus et en les
confrontant l'un avec l'autre, la différence permettant de calculer le taux
d'invalidité (méthode générale de comparaison des revenus; ATF 128 V 30
consid. 1, 104 V 136 consid. 2a et 2b).

2.2 Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, l'administration (ou le
juge, s'il y a eu un recours) a besoin de documents que le médecin,
éventuellement aussi d'autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du
médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans
quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler.
En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer
quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l'assuré (ATF 125 V
261 consid. 4, 115 V 134 consid. 2, 114 V 314 consid. 3c, 105 V 158 consid.
1).

3.
3.1 Selon les premiers juges, M.________ n'est plus en mesure de travailler à
nouveau en tant que maçon ou aide-jardinier, au vu de l'ensemble des avis
médicaux versés au dossier. Il n'y a pas lieu de revenir sur ce point de vue,
lequel, au demeurant, n'est pas remis en cause par les parties en procédure
fédérale.

En revanche, la juridiction cantonale est d'avis que ces séquelles ne
l'empêchent pas de reprendre une activité à plein temps dans une profession
adaptée. Elle s'est fondée pour cela sur l'avis du docteur A.________
(rapport du 15 janvier 1998), ainsi que sur l'avis des médecins de l'hôpital
H.________ (rapport du 1er juillet 1999).
De son côté, le recourant reproche aux premiers juges d'avoir écarté les
expertises des docteurs B.________ (rapport du 2 juillet 1998) et C.________
(rapport du 8 janvier 2001) qui constatent, tous deux, une importante
diminution de sa capacité de travail. Il leur reproche également de n'avoir
pas tenu compte des éléments contenus dans le rapport établi par l'hôpital
H.________, spécialement en ce qui concerne les douleurs dont il souffre.

3.2 En l'espèce, tous les médecins consultés sont parvenus au même
diagnostic, soit des lésions au niveau de l'épaule droite (tendinopathie
modérée de la coiffe des rotateurs), ainsi qu'au niveau du genou droit
(instabilité résiduelle après lésion du ligament croisé).
Bien qu'ayant relevé la présence d'un facteur étranger aggravant sous la
forme d'une sinistrose probable, le docteur A.________ a considéré que la
capacité de travail du recourant dans une activité adaptée était entière,
sans qu'il fut besoin d'entreprendre un traitement médical spécifique. Pour
leur part, les médecins de l'hôpital H.________ ont été d'avis que le
recourant peut effectuer toute activité ne nécessitant pas l'utilisation de
l'épaule droite en élévation, même si quelques facteurs aggravants ont été
relevés, tels qu'une probable composante de sinistrose et un âge relativement
avancé.

Donnés aux termes d'examens complets et en connaissance de l'ensemble du
dossier, notamment de l'expertise B.________ dans le cas des médecins de
l'hôpital H.________, les avis de ces experts sont pleinement convaincants
pour apprécier la capacité de travail du recourant dans une activité adaptée.

3.3 Pour mettre en doute le caractère probant de ces expertises, le recourant
invoque l'avis des docteurs B.________ et C.________.

Dans son rapport du 8 janvier 2001, ce dernier ne fait état d'aucun élément
objectif permettant d'infirmer les avis du docteur A.________ et des médecins
de l'hôpital H.________. Quant à son évaluation d'une "incapacité permanente
partielle" de 61,2 %, celle-ci n'est pas déterminante dès lors que, d'une
part, elle porte sur la capacité de travail dans la profession exercée avant
la survenance de l'accident et qu'elle se fonde sur des critères différents
de ceux applicables selon la législation suisse, ce que le recourant
reconnaît d'ailleurs.
Quant au docteur B.________, il s'est seulement prononcé sur la capacité de
travail dans la profession exercée jusqu'alors, insistant sur la nécessité
d'un traitement médical sous forme d'interventions chirurgicales. Or, les
médecins de l'hôpital H.________ ont précisément exposé les raisons pour
lesquelles il ne se justifiait pas, dans le cadre du recourant, de procéder à
de nouvelles opérations. Dans ces conditions et en l'absence d'autres
éléments, il n'y a pas lieu de s'écarter des conclusions du docteur
A.________ et des médecins de l'hôpital H.________.
On doit dès lors admettre que le recourant conserve une capacité résiduelle
de travail entière dans une activité adaptée (chauffeur de taxi, surveillant,
magasinier ou aide-jardinier, pour autant qu'il évite les travaux pénibles).

4.
4.1 Cela étant, il convient d'examiner dans quelle mesure le recourant subit
une diminution de sa capacité de gain en exerçant une activité adaptée à
l'atteinte à sa santé.

A cet égard, sont déterminants les rapports existants au moment de
l'ouverture du droit à une éventuelle rente, ainsi que les modifications
éventuelles survenues jusqu'au moment de la décision qui ont des conséquences
sur le droit à la rente (ATF 128 V 174; arrêts L. du 18 octobre 2002, I
761/01, et G. du 22 août 2002, I 440/01).

En l'espèce, la comparaison des revenus doit être effectuée compte tenu des
circonstances de fait telles qu'elles se présentaient en 1995.

4.2 Le revenu que le recourant a réalisé en 1994, selon l'attestation de son
ancien employeur faisant état des gains mensuels, correspond à 33'167 fr.
pour 9 mois de travail (y compris la part au 13ème salaire), soit 44'220 fr.
pour 12 mois de travail (y compris la part au 13ème salaire). Ce montant doit
être adapté à l'évolution des salaires dans la construction en 1995 (La Vie
économique 5/1996 p. 13, tableau B4.4).  En tenant compte d'une augmentation
de 1,8 %, le revenu sans invalidité à prendre en compte est donc de 45'015
fr.

Quant au revenu d'invalide, il a été évalué à l'origine par l'OAI sur des
bases qui ne figurent pas au dossier avant d'être repris sans modification
par l'OAIE. Par conséquent, en l'absence de toute indication contrôlable, il
convient de se référer aux données statistiques, telles qu'elles résultent
des enquêtes sur la structure des salaires (ESS) de l'Office fédéral de la
statistique (ATF 126 V 76 consid. 3b/aa et bb). On se réfère alors à la
statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant toujours sur la
médiane ou valeur centrale (ATF 124 V 323 consid. 3b/bb; VSI 1999 p. 82). La
mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être
réduits, dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et
professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge,
années de service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux
d'occupation) et résulte d'une évaluation dans les limites du pouvoir
d'appréciation. Une déduction globale maximum de 25 % sur le salaire
statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent
influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 126 V 79 s. consid.
5b/aa-cc; VSI 2002 p. 70 s. consid. 4b).

Ainsi, le salaire annuel auquel peuvent prétendre les hommes effectuant des
activités simples et répétitives dans le secteur privé en 1994 est de 4'127
fr. par mois compte tenu d'un horaire de travail de 40 heures par semaine
(ESS 1994 p.53, TA1.1.1, niveau de qualification 4). Ce salaire mensuel
hypothétique doit être augmenté de 1,3 % (La Vie économique 6/1996 p. 13,
tableau B4.4) pour obtenir le niveau du même salaire en 1995, soit 4'180 fr.
Il doit ensuite être porté à 4'378 fr. (soit 4'180 fr. : 40 x 41,9), ou
52'536 fr. par an, dès lors que la moyenne usuelle de travail dans les
entreprises en 1995 était de 41,9 heures (La Vie économique 12/2001 p. 80,
tableau B 9.2).

Dans le cas d'espèce, même en procédant à un abattement de 15 % pour tenir
compte de la persistance d'un handicap et de l'âge relativement élevé du
recourant, on n'arrive pas à un taux d'invalidité lui ouvrant le droit à des
prestations, en particulier à une rente d'invalidité.

Par conséquent, l'OAIE était fondé, par sa décision du 14 mai 2002, à dénier
au recourant tout droit à une rente. Le jugement entrepris n'est dès lors pas
critiquable et le recours se révèle mal fondé.

5.
Vu la nature du litige, la procédure est gratuite (art. 134 OJ). Par
ailleurs, le recourant, qui succombe, ne peut prétendre une indemnité de
dépens (art. 159 al. 1 OJ en liaison avec art. 135 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice ni alloué de dépens.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Commission fédérale de
recours en matière d'assurance-vieillesse, survivants et invalidité pour les
personnes résidant à l'étranger et à l'Office fédéral des assurances
sociales.

Lucerne, le 18 juillet 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

p. la Présidente de la IVe Chambre:   La Greffière: