Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 131/2003
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I 131/03

Arrêt du 22 mars 2004
IIIe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Lustenberger et Kernen. Greffière
: Mme Berset

B.________, 1947, recourant, représenté par Me Bruno Kaufmann, avocat, rue de
Lausanne 18, 1702 Fribourg,

contre

Office AI du canton de Fribourg, impasse de la Colline 1, 1762 Givisiez,
intimé

Tribunal administratif du canton de Fribourg, Cour des assurances sociales,
Givisiez

(Jugement du 20 décembre 2002)

Faits:

A.
B. ________, né en 1947, a exercé diverses activités depuis son arrivée en
Suisse en mars 1987. De mars à août 1996, il a travaillé, à mi-temps, en
qualité de plâtrier au service de l'entreprise G.________.

Le 9 février 1998, il a déposé auprès du service de l'aide sociale de
Fribourg une demande de prestations de l'assurance-invalidité tendant à un
reclassement dans une nouvelle profession. Il indiquait souffrir, depuis juin
1995, d'une inflammation de l'intestin et, depuis décembre 1995, de douleurs
à la colonne vertébrale consécutives à un accident.

Le 5 juin 1998, le dossier a été transmis à l'Office de
l'assurance-invalidité du canton de Fribourg (ci-après : OAI). Celui-ci a
confié une expertise à la Policlinique médicale universitaire de X.________,
agissant comme centre d'observation médicale de l'assurance-invalidité
(COMAI). Dans leur rapport du 17 février 2000, les experts ont fixé à 50 % la
capacité de travail de B.________ dans une activité adaptée.

Par décision du 29 mars 2001, l'OAI a alloué à l'assuré une demi-rente
d'invalidité dès le 1er juin 1997, fondée sur taux d'invalidité de 60 %.

B.
Par jugement du 20 décembre 2002, le Tribunal administratif du canton de
Fribourg, Cour des assurances sociales, a rejeté le recours formé par le
prénommé contre cette décision.

C.
B.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont
il requiert l'annulation, en concluant, sous suite de dépens, au renvoi de la
cause à la cour cantonale pour qu'elle procède à une instruction
complémentaire sur les plans médical et économique. En outre, il sollicite le
bénéfice de l'assistance judiciaire gratuite.

L'OAI déclare n'avoir pas de remarque particulière à formuler. L'Office
fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le jugement entrepris expose les dispositions légales relatives à la notion
d'invalidité, à l'échelonnement des rentes selon le taux d'invalidité et à la
manière de déterminer ce taux. Il convient donc d'y renvoyer, en précisant
que la Loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales
(LPGA), du 6 octobre 2000, entrée en vigueur le 1er janvier 2003, et les
modifications législatives qu'elle a entraînées dès cette date, ne sont pas
applicables dans le cadre de la présente procédure, le juge des assurances
sociales n'ayant pas à tenir compte des modifications du droit ou de l'état
de fait survenues après que la décision administrative litigieuse a été

rendue (ATF 127 V 467 consid. 1, 121 V 366 consid. 1b). Ratione temporis, les
dispositions de la novelle du 21 mars 2003 modifiant la LAI (4e révision),
entrée en vigueur le 1er janvier 2004 (RO 2003 3852), ne sont pas non plus
applicables.

2.
Selon les conclusions de l'expertise du COMAI, l'assuré présente un trouble
douloureux somatoforme persistant (F.45.4 selon la classification
internationale des maladies [CIM] de l'Organisation mondiale de la santé),
des rachialgies après fracture D3-D4 (S. 22.00 CIM), une ostéoporose sévère
(M. 80.5) et une périarthropathie de l'épaule avec possible lésion de la
coiffe des rotateurs (M. 75.1 CIM). Il dispose d'une capacité de travail de
50 % associée à diverses limitations physiques (station debout, port de
charges supérieures à 15 kilos, travaux lourds, escalade d'échelles).

2.1 Dans un premier moyen, le recourant fait grief à l'autorité cantonale de
recours d'avoir accordé valeur pleine probante à l'expertise et retenu
l'existence d'une capacité résiduelle de travail de 50 % dans une activité
adaptée.

2.2 Si le juge entend s'écarter d'une expertise, il doit motiver sa décision
et il ne saurait, sans motifs déterminants, substituer son appréciation à
celle de l'expert, sous peine de tomber dans l'arbitraire. Autrement dit, le
juge qui ne suit pas les conclusions de l'expert n'enfreint pas l'art. 9 Cst.
lorsque des circonstances bien établies viennent en ébranler sérieusement la
crédibilité (ATF 122 V 160 consid. 1c, 119 Ib 274 consid. 8a). Selon la
jurisprudence, peut constituer une raison de s'écarter d'une expertise le
fait que celle-ci contient des contradictions ou lorsque d'autres
spécialistes émettent des opinions contraires aptes à mettre sérieusement en
doute la pertinence des déductions de l'expert (ATF 125 V 352 consid. 3b/aa).

2.3 Contrairement aux griefs du recourant, on ne saurait voir de
contradictions dans le rapport d'expertise. Le recourant a été soumis à une
expertise pluridisciplinaire ou, comme l'ont précisé les experts dans leur
rapport complémentaire du 16 octobre 2000, une expertise interdisciplinaire.
Il a été examiné par différents spécialistes qui se sont prononcés au regard
de leur spécialité respective. Toutefois, l'appréciation générale du cas et
les conclusions de l'expertise ne procèdent pas de la juxtaposition de
rapports médicaux; les réponses aux questions posées ont fait l'objet d'une
discussion entre les experts qui apportent des réponses communes sur la base
d'un large consensus et en toute transparence scientifique. Le taux de
l'incapacité de travail ne résulte pas de la simple addition de deux taux
d'incapacité de travail (d'origine somatique et psychique) mais procède, bien
plutôt d'une évaluation globale (Jacques Meine, L'expert et l'expertise -
critères de validité de l'expertise médicale, in : L'expertise médicale,
Genève 2002, p. 23 sv.; François Paychère, Le juge et l'expert - plaidoyer
pour une meilleure compréhension, ibidem, p. 147). Selon le rapport
complémentaire, des divergences peuvent surgir lorsque les consultations
spécialisées sont reproduites in extenso, c'est-à-dire avec l'estimation de
la capacité de travail par le consultant. Il n'en reste pas moins que les
conclusions de l'expertise sont fondées sur l'appréciation faite dans le
cadre d'une présentation multidisciplinaire à laquelle participait un
psychiatre consultant, de sorte que les différents éléments constituant la
problématique de l'assuré ont été appréciés. La circonstance qu'un autre
médecin psychiatre ait participé à la discussion finale des experts n'est pas
décisive dans ce contexte.

Ainsi, c'est dans ce cadre que la capacité résiduelle de travail du
recourant, d'un point de vue global, a été arrêtée à 50 %, alors que le
consultant psychiatre ne retenait une telle capacité, du point de vue
psychique, que de 30 %. Les experts, dans leur concilium, ont expliqué les
raisons qui ont milité pour la reconnaissance d'une capacité résiduelle de
travail d'un taux supérieur (présence de problèmes psychosociaux, importance
du maintien d'une activité pour la structure de vie, démarche face à
l'ostéoporose). Convaincantes, les explications données par les médecins du
COMAI s'inscrivent dans le cadre défini par la doctrine médicale, s'agissant,
en effet, comme en l'espèce, d'une expertise pluridisciplinaire (ou
interdisciplinaire).

2.4 Par ailleurs, contrairement à ce que soutient le recourant, les experts
n'ont pas omis de prendre en considération le tassement des vertèbres. Cet
élément est dûment rappelé dans l'anamnèse, l'étude des résultats de
différents examens paracliniques (fracture tassement de D4 et dans un moindre
degré apparemment de D3) et repris dans la discussion du cas avant
l'appréciation de la composante psychique. Les experts n'ont pas non plus
omis d'examiner les répercussions sur la capacité de travail des douleurs à
l'épaule droite qui s'étendent au rachis cervical et dorsal et à la jambe
droite; ils ont parlé à cet égard d'un hémisyndrome douloureux droit, dont
l'étiolologie n'est pas somatique. De surcroît, les experts ont soigneusement
examiné l'incidence de chacune des affections diagnostiquées sur sa capacité
de travail.

2.5 Enfin si les experts du COMAI ne se sont pas spécifiquement prononcés sur
le rendement du recourant, il y a lieu d'admettre que ce dernier est entier
dans le cadre de la capacité de travail résiduelle dans une activité adaptée.

2.6 Par conséquent, en l'absence d'éléments permettant de mettre en doute les
conclusions du COMAI, et dans la mesure où ce rapport répond à toutes les
exigences jurisprudentielles en la matière (ATF 125 V 352 ss. consid. 3), il
y a lieu de lui reconnaître pleine valeur probante. Une instruction
complémentaire s'avère dès lors superflue.

3.
Selon l'art. 28 al. 2 LAI (en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002), pour
l'évaluation de l'invalidité, le revenu du travail que l'invalide pourrait
obtenir en exerçant l'activité qu'on peut raisonnablement attendre de lui,
après exécution éventuelle de mesures de réadaptation et compte tenu d'une
situation équilibrée du marché du travail, est comparé au revenu qu'il aurait
pu obtenir s'il n'était pas invalide.

3.1 Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au
moment de la naissance du droit à la rente; les revenus avec et sans
invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les
modifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rente
survenues jusqu'au moment où la décision est rendue être prises en compte
(ATF 129 V 222 et 128 V 174).

3.2 En l'occurrence, le moment de la naissance du droit éventuel à la rente
remonte en principe au 1er décembre 1996, soit une année après le début de
l'incapacité de travail du recourant de 50 % dans son activité de plâtrier,
tel que fixé par les experts (art. 29 al. 1 let. b LAI, dans sa teneur en
vigueur jusqu'au 31 décembre 2002). Pour procéder à la comparaison des
revenus, il convient donc de se placer en 1996.

3.3 Le recourant remet en question les montants retenus successivement par
les instances précédentes au titre du revenu sans invalidité et du revenu
d'invalide.

3.3.1 Il conteste, à plusieurs égards, le montant du revenu sans invalidité
calculé sur la base d'un salaire horaire de 23 fr. (indice 1995) pour 2200
heures de travail par an et 8,33 % pour le treizième salaire. Le montant de
23 fr. correspond au salaire horaire que réalisait le recourant en 1995,
selon ses propres informations. Il se situe, ainsi que l'ont retenu les
premiers juges entre le salaire horaire minimal d'un plâtrier qualifié de 24
fr. 15 et celui d'un aide-plâtrier de 21 fr. 85 tels qu'ils sont prévus par
la Convention collective de travail de la plâtrerie et peinture du canton de
Fribourg de 1995, applicable en l'espèce, et prend en considération la
situation particulière du recourant (qui ne justifie pas d'une qualification
reconnue, mais bien d'une formation dans le domaine concerné). Le montant de
23 fr. de l'heure doit dès lors être confirmé pour 1995. Ensuite de
l'augmentation de 30 centimes par heure intervenue en 1996 (cf. jugement
cantonal consid. 3c in fine), le salaire annuel doit être porté à 55'530 fr.
Dans la mesure où la durée de 2200 heures est un temps de travail brut,
réparti sur 52 semaines, qui comprend donc les vacances, ainsi que les jours
fériés, on ne saurait pas ajouter un pourcentage supplémentaire pour les
vacances, comme le demande le recourant. Quant aux prétendues heures
supplémentaires que ce dernier aurait effectuées, il appartenait à
l'intéressé d'en prouver l'existence. A défaut, il n'y a pas lieu d'en tenir
compte.

3.3.2 S'écartant du revenu d'invalide fixé par l'office intimé à 21'847 fr.
la cour cantonale a déterminé ce paramètre en fonction des données
statistiques, telles qu'elles résultent des enquêtes sur la structure des
salaires de l'Office fédéral de la statistique (ATF 126 V 76 sv. consid.
3b/aa et bb; VSI 2002 p. 68 consid. 3b).

3.3.3 En l'occurrence, le salaire de référence est celui auquel peuvent
prétendre les hommes effectuant des activités simples et répétitives dans le
secteur privé, à savoir 4294 fr. par mois (Enquête 1996, tabelle 1; niveau de
qualification 4). Ce salaire mensuel hypothétique représente, compte tenu du
fait que les salaires bruts standardisés se          basent sur un horaire de
travail de quarante heures, soit une durée hebdomadaire inférieure à la
moyenne usuelle dans les entreprises en 1996 (41,9 heures; La Vie économique
1999/8 annexe p. 27 Tabelle B 9.2) un revenu d'invalide de 4498 fr. par mois
(4294 x 41,9 : 40). Il convient de réduire ce montant de 50 % pour tenir
compte de l'incapacité de travail du recourant dans une activité adaptée, ce
qui donne 2249 fr. par mois, soit 26'988 fr. par an. Après abattement de 25
%, le maximum admissible selon la jurisprudence (ATF 126 V 79 sv. consid.
5b/aa) pour tenir compte d'un certain nombre de facteurs susceptibles de
diminuer la capacité de travail du recourant, le revenu sans invalidité est
de 20'241 fr. par an.

3.3.4 La comparaison des revenus conduit à une invalidité de 63,54 % ([55'530
fr.- 20'241 fr.] x 100 : 55'530 fr.), qu'il convient d'arrondir à 64 % (arrêt
R. du 19 décembre 2003, destiné à la publication, U 27/02). Ce taux est
insuffisant pour ouvrir le droit à une rente entière (art. 28 al. 1 LAI, dans
sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002).

3.3.5 En ce qui concerne le début du droit à la rente, il a été correctement
fixé par l'office intimé au 1er juin 1997, pour les motifs évoqués au consid.
4b du jugement entrepris, auxquels il n'y a rien à ajouter.

4.
C'est également en vain que le recourant allègue que l'office intimé n'a pas
examiné concrètement quelles activités seraient adaptées à son handicap.
Compte tenu du large éventail d'activités non qualifiées que recouvrent les
secteurs de la production et des services, on doit convenir qu'un certain
nombre d'entre elles sont légères (sans ports de charges, ni travaux lourds)
et sont donc adaptées aux problèmes physiques du recourant, tels qu'ils ont
été décrits par les experts. En outre, est seule déterminante la question de
savoir dans quelle mesure la capacité de gain résiduelle de l'assuré peut
être exploitée économiquement sur le marché du travail équilibré entrant en
considération pour lui (VSI 1998 p. 296 consid. 3b et les arrêts cités;
Omlin, Die Invalidität in der obligatorischen Unfallversicherung, thèse
Fribourg 1995, p. 208). Il n'y a pas lieu d'examiner si le recourant peut
être placé eu égard aux conditions concrètes du marché du travail, mais
uniquement s'il pourrait encore exploiter économiquement sa capacité de
travail résiduelle lorsque les places de travail disponibles correspondent à
l'offre de la main d'oeuvre.

Sur le vu de ce qui précède, le jugement entrepris doit être confirmé. Le
recours est dès lors mal fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté,

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
L'assistance judiciaire est accordée. Les honoraires (y compris la taxe à la
valeur ajoutée) de Me Kaufmann sont fixés à 2500 fr. pour la procédure
fédérale et seront supportés par la caisse du tribunal.

4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal administratif du
canton de Fribourg, Cour des assurances sociales, à l'Office fédéral des
assurances sociales et à la caisse de compensation du canton de Fribourg.

Lucerne, le 22 mars 2004

Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la IIIe Chambre:   La Greffière: