Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 127/2003
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I 127/03

Arrêt du 12 mai 2003
IIe Chambre

MM. et Mme les Juges Schön, Président, Widmer et Frésard. Greffier : M.
Métral

P.________, recourant, représenté par Me François Roullet, avocat, rue
Ferdinand-Hodler 11, 1207 Genève,

contre

Office AI pour les assurés résidant à l'étranger, avenue Edmond-Vaucher 18,
1203 Genève, intimé

Commission cantonale de recours en matière d'AVS/AI, Genève

(Jugement du 24 octobre 2002)

Faits :

A.
A.a P.________ titulaire d'un certificat fédéral de capacité de vendeur, a
travaillé pour la Société X.________ jusqu'au 3 juin 1991. Dès cette date, il
a cessé son activité professionnelle en raison d'une hernie discale L4-L5
droite. Le 30 août 1991, il a subi une discotomie L4-L5, pratiquée par le
docteur A.________, chef de clinique à l'Hôpital Y.________. Il a par la
suite été réopéré, le 3 février 1992, en raison d'une fibrose résultant de la
première intervention.

Le 4 mars 1992, P.________ a déposé une demande de prestations de
l'assurance-invalidité. Il était alors suivi par le docteur B.________,
spécialiste en chirurgie orthopédique, lequel décrivait une incapacité de
travail totale dans la profession exercée précédemment par l'assuré, mais
tenait pour adapté à son état de santé l'exercice d'une activité lucrative ne
comportant pas le port de lourdes charges (rapport du 11 mars 1992 du docteur
B.________). Toujours selon ce praticien, une troisième intervention
chirurgicale était envisagée, compte tenu de la persistance de douleurs et
d'une probable déstabilisation de la colonne (rapport du 28 octobre 1992 de
l'Office régional AI de Genève).

Par décision du 25 mars 1993, la Caisse de compensation Z.________ alloua à
P.________ une rente entière d'invalidité, assortie d'une rente
complémentaire pour l'épouse et d'une rente pour enfant, avec effet dès le
1er juin 1992.

A.b Dans le courant de l'année 1993, vu la persistance d'une instabilité de
la colonne, une immobilisation-test par corset plâtré fut réalisée. On
renonça par la suite à pratiquer une spondylodèse lombaire, mais le port d'un
lombostat fut prescrit à l'assuré. Selon un rapport du 6 décembre 1993 du
docteur B.________, il n'y avait plus d'autre mesure médicale à entreprendre
en vue d'améliorer la capacité de travail de l'assuré. Celle-ci était nulle
dans la profession exercée avant la survenance des douleurs dorsales, mais
une activité sans port de charges, permettant d'éviter les positions assises
prolongées et les mouvements de flexion du tronc était adaptée à l'état de
santé de l'assuré.

Dans le cadre d'une procédure de révision du droit à la rente, le Secrétariat
de la Commission AI du canton de Genève a, par une communication du 15 août
1994, informé l'assuré que les prestations allouées jusqu'alors seraient
maintenues.

A.c En août 1995, P.________ a quitté Genève et s'est établi aux Philippines
avec sa famille. Dans le cadre d'une nouvelle procédure de révision du droit
à la rente, l'Office AI pour les assurés résidant à l'étranger (ci-après :
l'office AI) confia au docteur A.________ le soin de réaliser une expertise.
Après avoir examiné l'assuré le 3 avril 1998, ce praticien décrivit une
mobilité cervicale dans la normale; le rachis lombaire était mobilisé avec
une certaine raideur, le Schober étant de 10/13 pour une distance doigt-sol
égale à 20 cm; les flexions latérales n'étaient pas spécialement limitées et
le lasègue direct ou inversé était négatif; l'assuré pouvait sauter et
retomber sur ses talons sans douleur et l'examen neurologique des membres
inférieurs était strictement normal. Selon l'expert, la capacité de travail
de l'assuré était nulle dans l'activité de vendeur ou de manutentionnaire
dans une grande surface. Il lui semblait par ailleurs impossible d'entrevoir
une quelconque réadaptation dans une nouvelle profession, dès lors que
P.________ ne travaillait plus depuis environ 8 ans.

Le médecin-conseil de l'office AI, le docteur C.________, considéra que cette
expertise permettait de retenir une série d'améliorations de l'état de santé
de l'assuré depuis la décision d'allocation de rente du 25 mars 1993. La
reprise d'une activité professionnelle légère, telle que caissier,
téléphoniste, réceptionniste ou gardien d'immeuble était par conséquent
exigible, à raison d'un taux d'activité de 80 %. Sur cette base, l'Office AI
pour les assurés résidant à l'étranger fixa le taux d'invalidité de l'assuré
à 36 % dès le mois d'avril 1998 et supprima avec effet dès le 1er mars 2000
les prestations allouées précédemment (décision du 17 janvier 2000).

B. P.________, qui était entre-temps revenu s'établir à Genève, a déféré
cette décision à la Commission fédérale de recours en matière d'AVS/AI pour
les personnes résidant à l'étranger, qui a transmis d'office la cause à la
Commission cantonale genevoise de recours en matière d'AVS/AI, comme objet de
sa compétence. Celle-ci rejeta le recours de l'assuré, par jugement du 24
octobre 2002.

C.
P.________ interjette un recours de droit administratif contre ce jugement.
Il conclut, sous suite de dépens, à l'annulation du jugement entrepris et de
la décision du 17 janvier 2000 de l'office AI. Subsidiairement, il demande le
renvoi de la cause à la juridiction cantonale pour instruction complémentaire
et nouveau jugement. A titre préalable, le recourant demande au Tribunal
fédéral des assurances d'«accorder l'effet suspensif au recours».

L'intimé conclut au rejet du recours, alors que l'Office fédéral des
assurances a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit :

1.
Le jugement entrepris expose les dispositions légales relatives à la notion
d'invalidité, à l'échelonnement des rentes selon le taux de l'invalidité et à
la manière de déterminer ce taux, de sorte qu'on peut y renvoyer sur ces
différents points. On précisera cependant que la Loi fédérale sur la partie
générale du droit des assurances sociales (LPGA), du 6 octobre 2000, entrée
en vigueur le 1er janvier 2003, n'est pas applicable en l'espèce, le juge des
assurances sociales n'ayant pas à tenir compte des modifications du droit ou
de l'état de fait survenues après que la décision administrative litigieuse a
été rendue (ATF 127 V 467 consid. 1, 121 V 366 consid. 1b).

2.
Selon l'art. 41 LAI (tel qu'en vigueur avant son abrogation par la LPGA), si
l'invalidité d'un bénéficiaire de rente se modifie de manière à influencer le
droit à la rente, celle-ci est, pour l'avenir, augmentée, réduite ou
supprimée. Tout changement important des circonstances, propre à influencer
le degré d'invalidité, donc le droit à la rente, peut donner lieu à une
révision de celle-ci. Le point de savoir si un tel changement s'est produit
doit être tranché en comparant les faits tels qu'ils se présentaient au
moment de la décision initiale de rente et les circonstances régnant à
l'époque de la décision litigieuse (ATF 125 V 369 consid. 2 et la référence;
voir également ATF 112 V 372 consid. 2b et 390 consid. 1b). Il en va
également ainsi lorsque la décision initiale de rente a été confirmée
entre-temps par une nouvelle décision (ATF 109 V 265 consid. 4a, 105 V 30
consid. 1; Meyer-Blaser, Rechtsprechung des Bundesgerichts zum
Sozialversicherungsrecht, ad art. 41 p. 258; cf. également Kieser, Kommentar
zum Bundesgesetz über den allgemeinen Teil des Sozialversicherungsrechts vom
6. Oktober 2000, ad art. 17, no 14).

3.
3.1 La décision du 25 mars 1993 par laquelle une rente fut allouée à l'assuré
était fondée pour l'essentiel sur le rapport du 28 octobre 1992 de l'Office
régional AI de Genève, dont il ressort qu'une troisième intervention
chirurgicale était envisagée à brève échéance, en raison d'une probable
déstabilisation de la colonne. Toujours selon ce rapport, le docteur
B.________ déclarait alors l'assuré totalement incapable de travailler et
proposait de reprendre une année plus tard l'examen de son droit à une rente
d'invalidité. C'est sur cette base que l'office régional AI de Genève a
proposé l'allocation d'une rente entière d'invalidité à P.________ - qui
présentait une incapacité de travail de 40 % en moyenne depuis plus d'une
année (cf. art. 29 al. 1 let. b LAI) - et la révision du droit à la rente à
une date ultérieure.

3.2 Ces circonstances se sont modifiées par la suite, comme l'ont admis à
juste titre les premiers juges. D'abord, l'assuré s'est vu remettre un corset
par l'assurance-invalidité, à titre de mesure médicale de réadaptation, en
lieu et place de l'intervention chirurgicale projetée initialement. Mis à
part le port de ce corset et la prise d'antalgiques, le docteur B.________
n'envisageait plus d'autre mesure médicale, en décembre 1993; il jugeait
adapté l'exercice d'une activité sans port de charge, position assise
prolongée ni flexion du tronc (rapport du 3 décembre 1993).

Cinq ans plus tard, le docteur A.________ posait le diagnostic de «status
après cure de hernie discale L4-L5 droite en 1991, status après reprise pour
fibrose deux mois après, lombalgies et vagues douleurs dans le membre
inférieur droit, suspicion d'instabilité post-opératoire actuellement plutôt
calme» et décrivait un examen clinique proche de la norme, hormis une
certaine raideur lors de la mobilisation de son rachis lombaire par l'assuré;
vu ces résultats rassurants, le docteur A.________ indiquait avoir renoncé à
de plus amples examens. Le docteur C.________ s'est appuyé de manière
convaincante sur ces constatations pour admettre une amélioration de l'état
de santé de l'assuré et relativiser l'influence de ses douleurs résiduelles
sur sa capacité de travail dans une activité légère. Contrairement à ce que
soutient le recourant, que le docteur C.________ se soit prononcé en qualité
de médecin-conseil de l'office AI ne constitue pas un motif suffisant de
mettre en doute son appréciation, en l'absence de circonstances particulières
(cf. dans le domaine de l'assurance-accidents : ATF 122 V 161 consid. 1c;
dans le domaine de l'assurance-maladie : SVR 1999 KV no 22 p. 51 sv. consid.
3b).

3.3 Il est vrai que selon le docteur A.________, il serait illusoire
d'envisager une réadaptation dans une nouvelle profession. Cette affirmation
n'est toutefois pas fondée sur des considérations d'ordre médical, mais
uniquement sur le fait que l'assuré n'a plus exercé d'activité
professionnelle pendant près de huit ans. Or, on ne saurait, sur la base de
cette seule circonstance, exclure d'emblée toute perspective de reprise d'une
activité lucrative pour le recourant et, partant, toute amélioration de sa
capacité de gain depuis la décision initiale d'allocation de rente. L'opinion
de l'expert sur ce point, qui ne relève pas de son domaine de spécialisation,
ne revêt pas le caractère déterminant que lui attribue le recourant. En
réalité, c'est aux organes de l'assurance-invalidité et à leurs conseillers
en réadaptation qu'il appartient, plutôt qu'à un médecin, de se prononcer sur
les perspectives de réadaptation de l'assuré dans de telles circonstances, eu
égard aux limites physiques et psychiques attestées médicalement (sur les
rôles respectifs du médecin et du conseiller en réadaptation : cf. ATF 107 V
20 consid. 2b).

En l'espèce, le taux d'activité de 80 % tenu pour raisonnablement exigible
par l'office AI, dans une profession adaptée sur le plan physique, prend
suffisamment en considération les difficultés que pourrait éprouver un assuré
confronté, après une longue période d'inactivité, aux obligations que
comporte la reprise d'une activité salariée. Les rapports médicaux figurant
au dossier ne font pas état de troubles psychiques invalidants et l'on peut
raisonnablement attendre du recourant, encore jeune, d'autant plus d'efforts
en vue d'une réadaptation que la réduction du dommage escomptée est
importante.

3.4 Le taux d'invalidité de 36 % retenu par l'office intimé et les premiers
juges eu égard à la capacité de travail résiduelle décrite ci-dessus n'est
pas critiquable, sans qu'il y ait lieu de revenir sur la comparaison de
revenus effectuée par l'intimé, en l'absence de tout grief sur ce point dans
le mémoire de recours.

4.
Vu ce qui précède, les conclusions du recourant sur le fond du litige sont
mal fondées. Par ailleurs, le présent arrêt rend sans objet ses conclusions
relatives à l'effet suspensif du recours. Enfin, le recourant ne peut
prétendre de dépens, puisqu'il n'obtient pas gain de cause (art. 159 al. 1
OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Commission cantonale de
recours en matière d'AVS/AI et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 12 mai 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIe Chambre:   Le Greffier: