Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen H 68/2003
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H 68/03

Arrêt du 5 février 2004
IIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Lustenberger et Frésard. Greffier : M.
Métral

1. N.________,

2. L.________,
recourants,
tous les 2 représentés par Me Robert Simon, avocat, rue du Vuache 1, 1201
Genève,

contre

Caisse interprofessionnelle d'AVS de la Fédération des Entreprises Romandes
Genève (FER CIAM 106.1), rue de St-Jean 98, 1201 Genève, intimée,

Commission cantonale de recours en matière d'AVS/AI

(Jugement du 13 septembre 2002)

Faits:

A.
La société A.________ SA était affiliée jusqu'en décembre 1996 à la Caisse
interprofessionnelle d'AVS de la Fédération romande des syndicats patronaux
(ci-après : la caisse). X.________ était inscrit au registre du commerce en
qualité d'administrateur de cette société, pour la période de mai 1995 à
janvier 1996, de même que L.________ et N.________, pour la période de juin
1993 à mai 1995.

Dans le courant de l'année 1996, la caisse a entamé des procédures de
poursuite pour dette en vue d'encaisser des cotisations d'assurances sociales
demeurées impayées par A.________ SA. Le 13 décembre 1996, elle s'est vu
délivrer des actes de défaut de biens après saisies. Elle a aussitôt adressé
aux administrateurs de la société à l'époque, D.________ et B.________, une
décision en réparation d'un dommage de 72'120 fr. 85. Par décision du 19
novembre 1997, elle a également exigé de X.________ qu'il lui verse un
montant de 30'825 fr. 25 à titre de réparation du dommage subi en raison du
non-paiement des cotisations dues par A.________ SA pour la période d'octobre
à décembre 1994 et de mars à décembre 1995. Le même jour, elle s'est adressée
à L.________ et N.________ en vue d'obtenir qu'ils lui paient un montant de
11'531 fr. en raison des cotisations restées impayées pour la période
d'octobre à décembre 1994 et de mars à avril 1995.

D. ________ et B.________ ne se sont pas opposés aux décisions les
concernant, alors que X.________, L.________ et N.________ ont fait
opposition aux décisions de réparation du dommage notifiées le 19 novembre
1997.

B.
Le 30 décembre 1997, la caisse a ouvert une action en réparation du dommage
devant la Commission cantonale genevoise de recours en matière d'AVS/AI
(aujourd'hui : Tribunal cantonal des assurances sociales; ci-après : la
commission), en concluant à la levée des oppositions formées par X.________,
à concurrence de 28'541 fr. 75, ainsi que par L.________ et N.________, à
concurrence de 11'531 fr.
En cours de procédure, la caisse a réduit à 26'159 fr. 65 le montant réclamé
à X.________. Elle a également informé la juridiction cantonale avoir conclu
un arrangement avec D.________ en vue du paiement par tranches du montant de
72'120 fr. 85 qui lui était réclamé; le 22 novembre 1999, le solde à verser
encore par D.________ était de 27'652 fr. 75, représentant neuf acomptes de
3'000 fr. et un acompte de 652 fr. 75. Pour leur part, L.________ et
X.________ ont allégué le paiement par A.________ SA de la dette ayant donné
lieu à la délivrance des actes de défaut de bien du 13 décembre 1996. Enfin,
le 16 janvier 2002, la caisse informait la commission du fait que D.________
avait sollicité un nouveau plan de paiement afin de rembourser le solde du
dommage, en versant des acomptes sur neuf mois, de février à octobre 2002.

Par jugement du 13 septembre 2002, la commission a admis l'action ouverte par
la caisse et levé les oppositions formées par X.________, à concurrence de
26'159 fr. 65, ainsi que par L.________ et N.________, à concurrence de
11'531 fr.

C.
L.________ et N.________ interjettent un recours de droit administratif
contre ce jugement, dont ils demandent l'annulation, sous suite de frais et
dépens. A l'appui de leur recours, ils produisent une télécopie que leur a
adressée la caisse le 20 février 2003, dans laquelle elle expose que le
dommage a été réduit à 9'748 fr. 25 ensuite de paiements effectués par
D.________.

L'intimée ne prend pas de conclusions formelles, mais fait valoir dans son
mémoire-réponse que le dommage a été en partie réparé et ne s'élève plus
désormais qu'à 9'854 fr. 15. Le Secrétariat d'Etat à l'économie a renoncé à
se déterminer. Informé du dépôt du recours et invité à se déterminer s'il le
souhaitait, X.________ n'a pas réagi.

Considérant en droit:

1.
X. ________ n'a pas recouru contre le jugement rendu le 13 septembre 2002 par
la commission, qui est donc entré en force à son égard. Le litige porte donc
exclusivement sur la condamnation de L.________ et N.________ à payer 11'531
fr. à l'intimée, solidairement entre eux. Dans ce cadre, les recourants, sans
contester le principe de leur responsabilité, ni le montant du dommage
initialement mis à leur charge, font valoir qu'A.________ SA a depuis lors
payé les cotisations ayant donné lieu à la délivrance d'actes de défaut de
biens à la caisse.

2.
2.1 La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales
(LPGA), du 6 octobre 2000, est entrée en vigueur le 1er janvier 2003. Elle a
entraîné la modification de l'art. 52 LAVS, relatif à la responsabilité de
l'employeur pour le dommage causé à une caisse de compensation en violant des
prescriptions légales, et l'abrogation des art. 81 et 82 RAVS, relatifs à la
procédure à suivre pour faire valoir le droit à la réparation du dommage
ainsi qu'à la prescription de ce droit. La procédure particulière de la
décision administrative, suivie, en cas d'opposition, d'une action de la
caisse en réparation du dommage, fait désormais place à une procédure de
décision, de décision sur opposition et de recours de droit administratif
(art. 52 al. 2 LAVS, dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2003,
art. 52 et art. 56 LPGA).

2.2 En l'espèce, la procédure prévue par l'ancien art. 81 RAVS était
applicable devant les juges cantonaux, dès lors que la LPGA n'était pas
encore en vigueur au moment de l'ouverture par la caisse d'une action en
réparation du dommage contre X.________, L.________ et N.________ (cf. arrêt
M. du 23 octobre 2003 [H 69/03], destiné à la publication); au demeurant, le
jugement entrepris a été rendu avant le 31 décembre 2002, même s'il n'a été
notifié qu'après l'entrée en vigueur de la LPGA.

Sur le plan matériel également, les anciennes dispositions légales demeurent
pertinentes, eu égard au principe selon lequel le juge des assurances
sociales n'a pas à prendre en considération les modifications du droit ou de
l'état de fait postérieures au moment où les faits juridiquement déterminants
se sont produits (ATF 127 V 467 consid. 1).

3.
3.1 Selon la jurisprudence relative à l'action en réparation du dommage au
sens des art. 52 LAVS et 81 al. 3 RAVS, dans leur teneur en vigueur jusqu'au
31 décembre 2002, il appartient en principe au juge saisi d'une telle action
d'inviter à participer à la procédure, à titre de co-intéressées, les
personnes contre lesquelles la caisse a rendu une décision de réparation du
dommage et contre lesquelles elle n'a pas renoncé à ouvrir action ensuite de
leur opposition. A défaut, le Tribunal fédéral des assurances, saisi
ultérieurement d'un recours de droit administratif, lui retournera la cause
pour qu'il procède conformément à ce qui précède, à moins que l'instance
fédérale ne soit en mesure de corriger elle-même le vice de procédure, à
titre exceptionnel (arrêt T. du 23 avril 2002 [H 68/01] consid. 2; M. du 3
novembre 2000 [H 134/00] consid. 3d).

3.2 D.________ et B.________ se sont vu l'un et l'autre notifier une décision
de réparation du dommage. Ils ne s'y sont toutefois pas opposés, de sorte que
la caisse n'a pas eu à ouvrir d'action à leur encontre. Il appartenait donc
aux premiers juges de les inviter à participer à la procédure ouverte contre
N.________, L.________ et X.________, conformément à la jurisprudence exposée
ci-dessus. Cela étant, il n'y a pas lieu d'examiner si ce vice peut être
réparé dans le cadre de l'instance fédérale, dès lors que s'y ajoute un autre
motif de renvoyer la cause à la juridiction cantonale (consid. 4 infra).

4.
4.1 Le juge cantonal des assurances sociales saisi d'une action en réparation
du dommage au sens de l'art. 52 LAVS doit établir d'office les faits
déterminants pour la solution du litige et administrer les preuves
nécessaires, qu'il apprécie librement (art. 85 al. 2 let. c LAVS et art. 81
al. 3 RAVS, tels qu'en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002; cf. consid. 2
supra). Si la cause est par la suite déférée au Tribunal fédéral des
assurances, celui-ci est lié par les faits constatés par les premiers juges,
à moins qu'ils soient manifestement inexacts ou incomplets, ou qu'ils aient
été établis au mépris de règles essentielles de procédure (art. 104 let. b,
105 al. 2 et 132 OJ).

4.2 La caisse de compensation est notamment réputée subir un dommage au sens
de l'art. 52 LAVS lorsqu'elle se voit délivrer un acte de défaut de biens
après saisie et ne peut obtenir, de ce fait, le paiement de cotisations
sociales arriérées (ATF 123 V 15 sv. consid. 5b, 113 V 258). Le cas échéant,
elle peut en demander la réparation aux organes fautifs de la personne morale
poursuivie (arrêts cités), mais cette dernière n'en demeure pas moins
débitrice des cotisations (art. 149 et 149a LP); si, par la suite, elle
s'acquitte totalement ou partiellement de sa dette, le dommage subi par la
caisse en est réduit d'autant.

Par ailleurs, les organes d'une société qui ont causé ensemble un dommage au
sens de l'art. 52 LAVS en répondent solidairement (ATF 119 V 87 consid. 5a).
Le paiement par l'un d'entre eux de tout ou partie du préjudice éteint, dans
la même mesure, la créance de la caisse à l'égard de l'ensemble des débiteurs
solidaires (art. 147 al. 1 CO).

4.3 Selon les premiers juges, N.________, L.________, X.________, D.________
et B.________ ont causé ensemble un dommage de 11'531 fr. à l'intimée, dont
ils répondent solidairement. Un dommage plus important encore a été causé à
la caisse par les trois derniers nommés, dans la survenance duquel les
recourants n'étaient toutefois pas impliqués. Cela étant, les recourants ont
allégué en procédure cantonale le paiement par D.________, pour le compte
d'A.________ SA, du montant dont le jugement entrepris les déclare débiteurs
solidaires. Par ailleurs, la caisse a informé les premiers juges, en cours de
procédure, du fait que D.________ avait sollicité un plan de paiement pour
verser le solde dû, ce qui laissait entendre qu'il s'était effectivement
acquitté d'une partie de sa dette. Dans ces conditions, il appartenait aux
premiers juges de constater quels montants avaient été versés par A.________
SA ou par D.________ avant d'examiner dans quelle mesure ces paiements
avaient pu réduire le dommage subi par la caisse ou éteindre sa créance
envers les recourants. La cause leur sera donc retournée à cet effet, dès
lors que, sur ces points, la constatation des faits dans le jugement
entrepris est manifestement incomplète. Dans ce cadre, ils entendront en
particulier les autres administrateurs mis en cause par la caisse en les
invitant à participer à la procédure (consid. 3 supra).

5.
Les recourants, qui obtiennent gain de cause, peuvent prétendre des dépens à
charge de l'intimée, dans la mesure où ils sont représentés par un avocat
(art. 159 al. 1 OJ). Par ailleurs, la procédure ne porte pas sur l'octroi ou
le refus de prestations d'assurance, de sorte qu'elle est onéreuse (art. 134
OJ a contrario). La caisse, qui succombe, supportera donc les frais de
justice (art. 156 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est admis, en ce sens que le jugement entrepris est annulé et la
cause retournée au Tribunal des assurances sociales du canton de Genève pour
qu'il procède conformément aux considérants.

2.
Les frais de justice, d'un montant de 2'000 fr., sont mis à la charge de
l'intimée.

3.
L'avance de frais versée par les recourants, d'un montant de 2'200 fr.(1'100
fr. chacun), leur est restituée.

4.
L'intimée versera aux recourants la somme de 2'500 fr. (y compris la taxe à
la valeur ajoutée) à titre de dépens pour l'instance fédérale.

5.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à X.________, au Tribunal des
assurances sociales du canton de Genève et à l'Office fédéral des assurances
sociales.

Lucerne, le 5 février 2004
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIe Chambre:   Le Greffier: