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Kassationshof in Strafsachen 6S.44/2003
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6S.44/2003 /dxc

Arrêt du 11 mars 2003
Cour de cassation pénale

MM. les Juges Schneider, Président,
Wiprächtiger et Kolly.
Greffière: Mme Angéloz.

A. ________,
recourant, représenté par Me Michel De Palma,
avocat, case postale 387, 1951 Sion,

contre

Ministère public du canton du Valais,
Palais de Justice, case postale 2050, 1950 Sion 2.

violation grave de la loi fédérale sur les stupéfiants (art. 19 ch. 2 LStup);
fixation de la peine (art. 63 CP),

pourvoi en nullité contre le jugement du Tribunal cantonal du Valais, Cour
pénale II, du 18 novembre 2002.

Faits:

A.
Par jugement du 16 mars 2001, le Tribunal du IIIe arrondissement pour le
district de Monthey a condamné A.________, ressortissant suisse d'origine
marocaine, né en 1972, pour violation grave de la loi fédérale sur les
stupéfiants (art. 19 ch. 2 LStup), à la peine de 3 ½ ans de réclusion, sous
déduction de 445 jours de détention préventive subie, et au versement d'une
créance compensatrice de 10.000 francs, déduction faite d'un montant de 400
francs séquestré le 27 mai 1999 et dévolu à l'Etat.

Tant le condamné que le Ministère public ont appelé de ce jugement, le
premier concluant à son acquittement et le second à une aggravation de la
peine.

Statuant le 18 novembre 2002, la Cour pénale II du Tribunal cantonal valaisan
a partiellement modifié le jugement qui lui était déféré, en ce sens qu'elle
a porté à 20.000 francs le montant de la créance compensatrice. Pour le
surplus, le jugement attaqué a été confirmé.

B.
Cette condamnation repose, en résumé, sur les faits suivants.

B.a En 1998 et au début 1999, A.________ a remis en plusieurs fois au
garagiste B.________ une quantité totale de 244,7 grammes de cocaïne,
correspondant à 119,2 grammes de cocaïne pure. Sur cette quantité, 44,7
grammes de cocaïne, d'un degré de pureté de 85 %, ont été remis à B.________
en vue de l'achat d'une voiture BMW, dont le prix était de 28.000 francs, et
100 grammes, d'un taux de pureté moyen de 40,6 % comme les 100 autres grammes
restant, lui ont été remis en échange d'une voiture de marque Golf.

B.b Dès le début de l'année 1998 et en cinq transactions, A.________ a remis
au dénommé C.________, dont il était devenu le fournisseur, une quantité
totale de 260 grammes de cocaïne, correspondant à 105,6 grammes de cocaïne
pure. C.________ a remis 150 à 200 grammes de cette marchandise à un certain
G.________, sur commande de ce dernier, qui en a toutefois emporté 50 grammes
sans les payer. De ce fait, C.________ s'est trouvé dans l'impossibilité de
payer une somme de 10.000 francs qu'il devait à A.________, qui a alors
accepté de solder cette dette en reprenant la voiture Lancia de C.________.

B.c Au cours de l'année 1998, A.________ a remis à G.________, par
l'intermédiaire du dénommé D.________, une quantité totale de 550 grammes de
cocaïne, correspondant à 223,3 grammes de cocaïne pure. Entendu à plusieurs
reprises, G.________ a reconnu et confirmé ces faits, fournissant des
explications sur le déroulement des transactions, leur nombre et les endroits
où elles avaient eu lieu.

B.d En 1998 et 1999, le dénommé E.________ a effectué divers déplacements en
voiture, notamment en Suisse allemande, seul ou avec A.________, pour ramener
de la cocaïne à l'intention de ce dernier, pour le compte duquel il a
également dit avoir entreposé de la cocaïne à son domicile. En contre-partie,
A.________ lui a remis à titre de commission ou vendu une quantité totale de
39 grammes de cocaïne, correspondant à 16,6 grammes de cocaïne pure.

B.e Pour avoir rendu divers services à A.________, notamment en entreposant
de la cocaïne à son domicile pour le compte de ce dernier, le dénommé
F.________ a reconnu avoir obtenu de lui une quantité totale de 5 grammes de
cocaïne, correspondant à 2,1 grammes de cocaïne pure.

B.f Sur la base d'une appréciation des preuves, les juges cantonaux ont
retenu que l'accusé s'était livré à un trafic portant sur une quantité totale
de 466,8 grammes de cocaïne pure, en remettant 119,2 grammes de cocaïne pure
à B.________, 105,6 grammes à C.________, 223,3 grammes à G.________ par
l'intermédiaire de D.________, 16,6 grammes à E.________ et 2,1 grammes à
F.________. Ils ont considéré que ces faits étaient constitutifs d'infraction
grave à la LStup au sens de l'art. 19 ch. 2 de cette loi.

Au stade de la fixation de la peine, la cour cantonale a jugé que celle de 3
½ ans de réclusion prononcée en première instance était adéquate, écartant
sur ce point aussi bien l'appel de l'accusé que celui du Ministère public.
Elle a en revanche estimé que le montant, de 10.000 francs, de la créance
compensatrice fixé en première instance était manifestement insuffisant et
l'a porté à 20.000 francs.

C.
A.________ se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Invoquant une
violation de l'art. 19 ch. 2 LStup ainsi que des art. 63 et 59 ch. 2 al. 1
CP, il conclut à l'annulation du jugement attaqué, en sollicitant
l'assistance judiciaire et l'effet suspensif.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Saisie d'un pourvoi en nullité, qui ne peut être formé que pour violation du
droit fédéral (art. 269 PPF), la Cour de cassation contrôle l'application de
ce droit sur la base d'un état de fait définitivement arrêté par l'autorité
cantonale (cf. art. 277bis et 273 al. 1 let. b PPF). Elle ne peut donc pas
revoir les faits retenus dans la décision attaquée ni la manière dont ils ont
été établis, de sorte que ces points, sous peine d'irrecevabilité, ne peuvent
être remis en cause dans le pourvoi (ATF 126 IV 65 consid. 1 p. 66/67; 124 IV
53 consid. 1 p. 55, 81 consid. 2a p. 83 et les arrêts cités).

2.
Le recourant prétend que le jugement attaqué a été rendu en violation de
l'art. 19 ch. 2 LStup.

Dans la mesure où il soutient que le jugement entrepris ne permet pas de
discerner pour quel motif le cas a été considéré comme grave au sens de
l'art. 19 ch. 2 LStup, sa critique est dépourvue de tout fondement. Il
résulte clairement du jugement attaqué, en particulier de son chiffre 11 let.
b, que le cas grave a été retenu du fait que le recourant s'est livré à un
trafic portant, comme il le savait, sur une quantité de stupéfiants
susceptible de mettre en danger la santé de nombreuses personnes, donc pour
le motif prévu à l'art. 19 ch. 2 let. a LStup.

Que l'infraction ainsi retenue soit objectivement réalisée n'est à juste
titre pas contesté au vu des constatations de fait cantonales, dont il
résulte que le trafic du recourant a porté sur une quantité totale de 466,8
grammes de cocaïne pure (cf. ATF 122 IV 360 consid. 2a p. 363). Quant à la
condition subjective, soit l'intention, sa réalisation pouvait être admise
sans violation du droit fédéral sur la base des faits retenus; le jugement
attaqué constate en effet que le recourant savait parfaitement qu'il se
livrait à un trafic de stupéfiants, qu'il savait également que la quantité
sur laquelle portait ce trafic était propre à mettre en danger la santé de
nombreuses personnes et qu'il l'a accepté. Dans la mesure où le recourant
laisse entendre que ces faits ne seraient pas établis, sa critique est
irrecevable dans un pourvoi en nullité (cf. supra, consid. 1).

3.
Le recourant se plaint d'une violation de l'art. 63 CP.

La question de savoir si, au moment des faits, la situation financière et
professionnelle du recourant ainsi que son état de santé étaient bons relève
du fait, de sorte qu'il est irrecevable à contester dans son pourvoi les
constatations cantonales y relatives.

Il est évident que l'existence d'un antécédent judiciaire ne constitue pas un
motif d'atténuation de la peine, au contraire.

C'est au reste en vain que le recourant soutient que les divers actes de
trafic qui lui sont reprochés ne peuvent entrer en concours. Certes, si
l'auteur a accompli plusieurs des actes énumérés à l'art. 19 ch. 1 LStup, on
considère, en principe sans appliquer les règles sur le concours, qu'il
s'agit d'une seule infraction, jugée en application du chiffre premier ou
second de l'art. 19 LStup, selon que la quantité globale de drogue en cause
est ou non de nature à mettre en danger la santé de nombreuses personnes (ATF
110 IV 99 consid. 3 p. 100/101). Cela n'empêche toutefois pas le juge de
tenir compte de la pluralité des actes au stade de la fixation de la peine,
en tant qu'elle témoigne de l'intensité de la volonté délictueuse de
l'auteur; il n'est en outre pas exclu de faire application de l'art. 68 CP
lorsque, comme en l'espèce, plusieurs des actes commis n'ont aucun rapport
entre eux (cf. Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. II Berne 2002,
p. 793 ss  n° 134 ss, notamment p. 795 n° 136; également p. 777 s. n° 67). De
toute manière, dans les cas graves d'infraction à la LStup, où le cadre légal
de la peine est extrêmement large, cette question de concours n'a
pratiquement aucune conséquence (cf. Corboz, op. cit., p. 795 n° 136). En
définitive, la question est donc de savoir si la peine qui a été infligée est
excessive au point que l'autorité cantonale doive se voir reprocher un abus
du pouvoir d'appréciation. Cela doit être nié en l'espèce au vu des faits
retenus, qui lient la Cour de céans, et des éléments pris en considération
dans le cadre de la fixation de la peine. Que la peine prononcée serait en
soi excessive n'est d'ailleurs pas allégué.

4.
Invoquant une violation de l'art. 59 ch. 2 al. 1 CP, le recourant conteste le
montant, de 20.000 francs, de la créance compensatrice qu'il a été astreint à
payer.

Les principes régissant la fixation de la créance compensatrice ont été
rappelés dans l'ATF 124 I 6 consid. 4b/bb et bc p. 8 ss, auquel on peut se
référer.

Contrairement à ce qu'affirme le recourant, le montant de la créance
litigieuse n'a pas été arrêté exclusivement en fonction de sa culpabilité. La
cour cantonale s'est aussi, voire surtout, fondée sur l'importance du chiffre
d'affaires que le recourant a réalisé par son trafic ainsi que sur sa
situation financière et familiale. S'agissant du chiffre d'affaires, elle a
précisé qu'il était bien supérieur à 100.000 francs, puisque le recourant
avait vendu plus d'un kilo de cocaïne - correspondant à 466,8 grammes de
cocaïne pure - pour le prix unitaire de 80 à 150 francs le gramme;
l'allégation du recourant selon laquelle le chiffre d'affaires qu'il a
réalisé n'aurait pas été chiffré est donc dépourvue de fondement. Il résulte
par ailleurs du jugement attaqué que le trafic du recourant lui a notamment
permis de faire l'acquisition d'une BMW, d'un prix de 28.000 francs, dont en
tout cas quelque 15.000 francs ont été payés par la remise de cocaïne, d'une
Golf d'un prix de 11.000 francs payé par la remise de cocaïne et d'une
Lancia, dont il a lui-même évalué le prix à 14.000 francs, laquelle a aussi
été payée par la remise de cocaïne. Dans ces conditions, en fixant à 20.000
francs, sous réserve d'un montant de 400 francs séquestré et dévolu à l'Etat,
le montant de la créance compensatrice, la cour cantonale n'a pas violé le
droit fédéral; en particulier, on ne discerne pas de violation du principe de
la proportionnalité et il n'est pas allégué que le montant arrêté
compromettrait la situation sociale du recourant.

5.
Le pourvoi doit ainsi être rejeté dans la mesure où il est recevable.

Comme il était d'emblée dépourvu de chances de succès, l'assistance
judiciaire ne peut être accordée (art. 152 al. 1 OJ) et le recourant, qui
succombe, supportera les frais (art. 278 al. 1 PPF), dont le montant sera
fixé en tenant compte de sa situation financière.

La cause étant tranchée, la requête d'effet suspensif devient sans objet.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le pourvoi est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Un émolument judiciaire de 800 francs est mis à la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au
Ministère public du canton du Valais et au Tribunal cantonal valaisan, Cour
pénale II.

Lausanne, le 11 mars 2003

Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: