Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Kassationshof in Strafsachen 6S.417/2003
Zurück zum Index Kassationshof in Strafsachen 2003
Retour à l'indice Kassationshof in Strafsachen 2003


6S.417/2003 /pai

Arrêt du 27 janvier 2004
Cour de cassation pénale

MM. les Juges Schneider, Président,
Kolly et Karlen.
Greffière: Mme Kistler.

X. ________,
recourant, représenté par Me Pierre-Dominique Schupp, avocat,

contre

Ministère public du canton de Vaud,
rue de l'Université 24, case postale, 1014 Lausanne.

Instigation à tentative d'incendie intentionnel qualifié; fixation de la
peine,

pourvoi en nullité contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud,
Cour de cassation pénale, du 17 mars 2003.

Faits:

A.
Par jugement rendu le 21 décembre 2001, le Tribunal correctionnel de
l'arrondissement de l'Est vaudois a condamné X.________ pour instigation à
incendie intentionnel qualifié, crime impossible d'escroquerie, escroquerie
qualifiée, blanchiment d'argent, abus de confiance, faux dans les titres,
banqueroute frauduleuse et fraude dans la saisie, ainsi que diminution
effective de l'actif au détriment des créanciers à la peine de huit ans de
réclusion, sous déduction de la  détention préventive. Par arrêt du 11 juin
2002, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois a confirmé ce
jugement. Mais, le 19 décembre 2002, la Cour de cassation pénale du Tribunal
fédéral a admis partiellement le pourvoi en nullité, annulé l'arrêt attaqué
et renvoyé la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision, au motif
que plusieurs des escroqueries retenues par l'autorité cantonale n'étaient
pas réalisées et que la qualification d'incendie volontaire qualifié au sens
de l'art. 221 al. 2 CP ne pouvait pas être retenue.
Par arrêt du 17 mars 2003, la Cour de cassation pénale vaudoise a réformé le
jugement de première instance en ce sens qu'elle a condamné X.________ pour
instigation à tentative d'incendie intentionnel qualifié et instigation à
incendie intentionnel et l'a libéré de de deux escroqueries. Elle a diminué
la peine à six ans et demi de réclusion et a confirmé le jugement pour le
surplus.

B.
La condamnation de X.________ pour instigation à tentative d'incendie
intentionnel qualifié repose sur les faits suivants:

Sur instigation de X.________, A.________ a mis le feu à un immeuble à
Monthey. Il s'agissait d'une maison urbaine, flanquée de part et d'autre
d'immeubles contigus. L'immeuble comptait trois étages sur rez, surmontés de
combles. Un couple âgé louait un appartement au 1er étage et y demeurait. Le
18 septembre 1996, vers 3h30, les pompiers de Monthey ont été appelés à
lutter contre l'incendie allumé par A.________ dans les combles. Les forces
de police ont évacué les locataires de l'immeuble en feu ainsi que deux
familles résidant dans les bâtiments mitoyens. Les pompiers ont oeuvré avec
efficacité et ont évité que l'incendie ne se propage aux étages inférieurs et
aux bâtiments contigus. A 5h30, le sinistre était maîtrisé. Les combles et le
3ème étage ont été complètement calcinés; les parties inférieures ont été
endommagées par l'eau.

C.
X.________ se pourvoit en nullité auprès du Tribunal fédéral. Invoquant une
violation des art. 221 al. 2 et 63 CP, il conclut à l'annulation de l'arrêt
attaqué. En outre, il sollicite l'assistance judiciaire et l'effet suspensif.

Le Ministère public vaudois conclut au rejet du pourvoi.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Saisi d'un pourvoi en nullité, le Tribunal fédéral contrôle l'application du
droit fédéral (art. 269 PPF) sur la base exclusive de l'état de fait
définitivement arrêté par l'autorité cantonale (cf. art. 277bis et 273 al. 1
let. b PPF). Le raisonnement juridique doit se fonder sur les faits retenus
dans la décision attaquée, dont le recourant ne peut s'écarter.

Le Tribunal fédéral n'est pas lié par les motifs invoqués, mais il ne peut
aller au-delà des conclusions du recourant (art. 277bis PPF). Celles-ci, qui
doivent être interprétées à la lumière de leur motivation, circonscrivent les
points litigieux (ATF 126 IV 65 consid. 1 p. 66).

2.
La Cour de cassation cantonale a condamné le recourant pour instigation à
tentative d'incendie volontaire qualifié au sens de l'art. 221 al. 2 CP.

2.1 Aux termes de l'art. 24 al. 1er CP, celui qui aura intentionnellement
décidé autrui à commettre un crime ou un délit encourra, si l'infraction a
été commise, la peine applicable à l'auteur de cette infraction. Celui qui
aura tenté de décider une personne à commettre un crime encourra la peine
prévue pour la tentative de cette infraction (art. 24 al. 2 CP).

Sous réserve de l'art. 24 al. 2 CP, l'instigateur ne sera punissable que si
l'infraction suggérée a été commise ou, à tout le moins, tentée, à savoir si
l'auteur principal a commencé l'exécution et atteint ainsi un degré de
réalisation punissable selon les art. 21 à 23 CP. Selon la thèse de
l'accessoriété dite limitée, l'auteur principal doit avoir eu un comportement
conforme à l'état de fait légal (tatbestandsmässig) et illicite
(rechtswidrig), mais non nécessairement fautif (schuldhaft; Stratenwerth,
Schweizerisches Strafrecht, Allgemeiner Teil I, 2e éd., Berne 1996, n. 82 ss
ad § 13; Noll/Trechsel, Schweizerisches Strafrecht, Allgemeiner Teil I, 5e
éd., Zurich 1998, p. 220; Trechsel, Schweizerisches Strafgesetzbuch,
Kurzkommentar, 2e éd., Zurich 1997, n. 24 avant art. 24; José Hurtado Pozo,
Droit pénal, Partie générale II, Zurich 2002, n. 784, p. 246). Selon la
conception actuelle, l'élément typiquement illégal (Tatbestand) inclut
l'élément objectif (objektiver Tatbestand) et subjectif (subjektiver
Tatbestand; message du conseil fédéral du 21 septembre 1998 sur la
modification du code pénal suisse (dispositions générales), FF 1998 p. 20 ch.
212). Il en résulte que l'instigation à un délit intentionnel n'est pas
possible en l'absence d'intention chez l'auteur principal (ATF 85 IV 130
consid. 5 p. 135; Stratenwerth, op. cit., n. 83 ad § 13; Trechsel, op. cit.,
n. 24 avant art 24); dans ce dernier cas, il faudra recourir à la figure de
l'auteur médiat.

2.2 En cas d'instigation, il convient donc, en premier lieu, de qualifier
l'infraction qui a été commise par l'instigué. La Cour de cassation cantonale
a admis en l'espèce que l'instigué, A.________, avait commis une tentative
d'incendie intentionnel qualifié au sens de l'art. 221 al. 2 CP. Pour le
recourant, en revanche, seul un incendie intentionnel simple selon l'art. 221
al. 1 CP peut être retenu. Selon lui, la possibilité d'atteinte à la santé
des occupants de l'immeuble n'a pas été démontrée, à tout le moins pas dans
la mesure exigée par la  jurisprudence. En outre, la conscience et la volonté
de cette atteinte ne seraient pas non plus établies s'agissant de l'auteur de
l'infraction principale, l'instigué.

2.2.1 L'art. 221 al. 1 CP punit de la réclusion celui qui cause
intentionnellement un incendie et porte ainsi préjudice à autrui ou fait
naître un danger collectif. La peine sera la réclusion pour trois ans au
moins si le délinquant a sciemment mis en danger la vie ou l'intégrité
corporelle des personnes (art. 221 al. 2 CP).

Le délit qualifié de l'alinéa 2 suppose que la vie ou l'intégrité corporelle
de personnes ont été effectivement et concrètement mises en danger; une
simple mise en danger abstraite ne suffit pas. Constitue un danger concret
l'état de fait dans lequel existe, selon le cours ordinaire des choses, la
probabilité ou un degré certain de possibilité de léser un bien juridique
protégé. Compte tenu de l'importance de la peine prévue à l'art. 221 al. 2 CP
- de trois à vingt ans de réclusion -, la jurisprudence a précisé que la
réalisation de ce crime suppose une grande probabilité de lésion et, partant,
un danger imminent (ATF 123 IV 128 consid. 2a p. 130). Ce qui est
déterminant, ce n'est pas tout ce qui aurait pu se produire, mais ce qui est
réellement arrivé. Lorsqu'une intervention rapide a empêché que des personnes
soient effectivement mises en danger, il est admis que l'incendiaire pourra
être reconnu coupable de tentative d'incendie qualifié dans la mesure où les
éléments subjectifs d'un incendie qualifié le permettent (ATF 123 IV 128
consid. 2a p. 131; voir aussi ATF 124 IV 97 consid. 2b p. 100).

Sur le plan de l'intention, l'art. 221 al. 2 CP exige que l'auteur mette
"sciemment" en danger la vie ou l'intégrité corporelle des personnes.
L'adverbe "sciemment" exclut le dol éventuel (ATF 123 IV 128 consid. 2a p.
130). L'auteur doit savoir qu'il expose autrui à un danger concret et vouloir
cette conséquence de son comportement. S'il a causé intentionnellement un
incendie et qu'il a ainsi créé, avec conscience et volonté, une situation
dont il savait qu'il découlait un danger pour la vie ou l'intégrité
corporelle de personnes déterminées, il faut en déduire qu'il a voulu cette
mise en danger et qu'il a ainsi "sciemment mis en danger la vie ou
l'intégrité corporelle des personnes" (ATF 117 IV 285 consid. 2a p. 286).

2.2.2 Selon l'état de fait cantonal, l'immeuble incendié comptait trois
étages surmontés de combles. L'incendie a été bouté aux combles de
l'immeuble, et au premier étage vivait un couple âgé. L'intervention efficace
des pompiers a cependant permis de circonscrire le feu aux combles et au 3e
étage, qui seuls ont été calcinés. L'incendie n'a donc pas touché les étages
inférieurs de l'immeuble et le couple, qui logeait au 1er étage, a pu être
évacué rapidement par les forces de police. En conséquence, il n'y a pas eu
une mise en danger effective pour la vie ou l'intégrité corporelle de
personnes au sens de l'art. 221 al. 2 CP.

L'immeuble avait cependant une charpente, des poutraisons et des planchers en
bois de sorte que le feu aurait pu se propager rapidement et que le risque
d'effondrement était bien réel. Les risques que le couple soit blessé, voire
tué, étaient donc très élevés, et ce d'autant plus que les événements se sont
produits de nuit, à une heure où les habitants des immeubles sont plongés
dans le sommeil. En définitive, il faut admettre, avec la Cour de cassation
cantonale, que, sans l'intervention rapide des pompiers, l'incendie aurait pu
mettre en danger le couple qui logeait au premier étage. Une tentative
d'incendie intentionnel qualifié pourra dès lors être retenue, dans la mesure
où  l'instigué a eu la volonté de créer un danger pour la vie ou l'intégrité
corporelle. Si une telle volonté ne peut être établie, l'instigué ne pourra
se voir reprocher qu'un incendie simple. En l'espèce, comme le relève à juste
titre le recourant, la Cour de cassation cantonale n'a pas examiné le contenu
de la volonté de l'instigué; elle n'en parle nulle part. Cette question
pourra cependant rester ouverte, dès lors que le pourvoi devra être rejeté,
que l'instigué ait eu ou non la volonté de créer un danger pour la vie ou
l'intégrité corporelle de personnes (cf. consid. 2.4).
2.3 Selon la Cour de cassation cantonale, le recourant, qui a instigué
A.________, savait qu'un couple logeait au 1er étage (arrêt du 19 décembre
2002, 6P.122/2002). Elle en a déduit qu'il avait voulu créer un danger pour
la vie ou l'intégrité corporelle de personnes et qu'il avait donc agi
"sciemment". Cette déduction est conforme à la jurisprudence, qui admet que
celui qui, avec conscience et volonté, crée une situation dont il savait
qu'il en découlait un danger pour la vie de personnes déterminées a forcément
voulu ce danger (ATF 117 IV 285 consid. 2a p. 286). Le recourant conteste
avoir su que la maison était habitée et, partant, avoir eu la volonté de
mettre en danger la vie ou l'intégrité corporelle de personnes déterminées.
Ce que l'auteur savait, voulait ou ce dont il acceptait l'avènement fait
partie du contenu de la pensée et la constatation de celui-ci relève de
l'établissement des faits (ATF 125 IV 242 consid. 3c p. 252; 123 IV 155
consid. 1a p. 156). Par son argumentation, le recourant s'écarte donc de
l'état de fait cantonal, ce qu'il n'est pas habilité à faire dans un pourvoi.
Son grief est dès lors irrecevable (ATF 125 IV 49 consid. 2d p. 56).
Connaissant et voulant créer un danger pour la vie et l'intégrité corporelle
de personnes, le recourant a incité le dénommé A.________ à commettre un
incendie qualifié, lequel n'a en définitive commis qu'un incendie simple ou
une tentative d'incendie qualifié (cf. ci-dessus consid. 2.2 in fine).
L'infraction suggérée est donc plus grave que celle qui a été réellement
commise. Dans un tel cas, il est admis que l'instigateur est punissable pour
instigation à l'infraction effectivement commise ainsi que, le cas échéant,
pour tentative d'instigation à l'infraction suggérée (ATF 85 IV 130 consid. 5
p. 135; Marc Forster, Strafgesetzbuch I, Basler Kommentar, 2003, n. 44 et 45
ad art. 24; Trechsel, Schweizerisches Strafgesetzbuch, Kurzkommentar, Zurich
1997, n. 27 avant art. 24).

En l'espèce, deux hypothèses peuvent être distinguées selon la volonté de
l'instigué:

a) Si l'on admet que l'instigué ne voulait pas créer un danger pour la vie ou
l'intégrité corporelle de personnes et qu'il doive être puni pour incendie
volontaire simple (art. 221 al. 1 CP), il conviendrait d'imputer au recourant
une instigation à un incendie intentionnel simple, en concours idéal avec une
tentative d'instigation à un incendie volontaire qualifié  au sens de l'art.
24 al. 2 CP, puisque cette infraction est passible de réclusion et constitue
dès lors un crime aux termes de l'art. 9 al. 1er CP.

b) S'il est établi que l'instigué a voulu créer un danger pour la vie et
l'intégrité corporelle de personnes et qu'il est retenu à la charge de
l'instigué une tentative d'incendie intentionnel qualifié, le recourant
serait alors coupable d'instigation à une tentative d'incendie qualifié en
concours idéal avec une tentative d'instigation à un incendie qualifié.

2.4 En l'espèce, la Cour de cassation cantonale a omis d'examiner le contenu
de la volonté de l'instigué (cf. consid. 2.2). Cette question peut cependant
rester indécise pour deux motifs:

Que, s'agissant de l'infraction en cause, le dispositif de l'arrêt attaqué
condamne le recourant pour tentative d'instigation à incendie qualifié
(consid. 2.3 let. a) ou pour instigation à une tentative d'incendie qualifié
(consid. 2.3 let. b; solution retenue par la Cour de cassation cantonale),
demeure sans importance pratique, dès lors que le recourant sera puni en
vertu des art. 221 al. 2 et 22 CP (en vertu de l'art. 24 al. 1 ou 2 CP) et
encourra la même peine, à savoir la réclusion. Le recourant n'a dès lors pas
d'intérêt juridique à l'annulation de l'arrêt attaqué sur ce point (cf. ATF
127 IV 97 consid. 1b p. 100).

Dans les deux cas, la Cour de cassation cantonale aurait dû tenir compte du
concours d'infraction et aggraver la peine en vertu de l'art. 68 CP. Dans le
cas a), elle aurait dû retenir, outre la tentative d'instigation à un
incendie volontaire qualifié, une instigation à un incendie intentionnel
simple et, dans le cas b), outre une instigation à une tentative d'incendie
qualifié, une tentative d'instigation à incendie qualifié. L'arrêt attaqué ne
peut toutefois être annulé sur ce point vu la prohibition de la reformatio in
peius ( art. 227bis al. 1er PPF; ATF III IV 51 consid. 2 p. 55).

En conclusion, bien que la solution retenue par l'arrêt attaqué soit
inexacte, le grief du recourant doit être rejeté, et cela sans qu'il y ait
lieu d'examiner si l'instigué avait ou non la volonté de créer un danger pour
la vie ou l'intégrité corporelle de personnes.

3.
Le recourant critique enfin la réduction, trop faible à ses yeux, de sa
peine, qui est passée de huit ans à six ans et demi de réclusion. Il estime
que sa peine aurait dû être réduite de 40 %.

3.1 Aux termes de l'art. 63 CP, le juge fixera la peine d'après la
culpabilité du délinquant, en tenant compte des mobiles, des antécédents et
de la situation personnelle de ce dernier. Le critère essentiel est celui de
la gravité de la faute. Le juge doit prendre en considération, en premier
lieu, les éléments qui portent sur l'acte lui-même, à savoir sur le résultat
de l'activité illicite, le mode et l'exécution de l'acte et, du point de vue
subjectif, sur l'intensité de la volonté délictueuse ainsi que sur les
mobiles. L'importance de la faute dépend aussi de la liberté de décision dont
disposait l'auteur; plus il lui aurait été facile de respecter la norme qu'il
a enfreinte, plus lourdement pèse sa décision de l'avoir transgressée et,
partant, sa faute (ATF 127 IV 101 consid. 2a p. 103). Les autres éléments
concernent la personne de l'auteur, soit ses antécédents, sa situation
personnelle, familiale et professionnelle, sa formation et sa réputation (ATF
118 IV 21 consid. 2b p. 25).

Le Tribunal fédéral, qui n'interroge pas lui-même les accusés ou les témoins
et qui n'établit pas les faits, est mal placé pour apprécier l'ensemble des
paramètres pertinents pour individualiser la peine. Son rôle est au contraire
d'interpréter le droit fédéral et de dégager des critères et des notions qui
ont une valeur générale. Il n'a donc pas à substituer sa propre appréciation
à celle du juge de répression ni à ramener à une sorte de moyenne toute peine
qui s'en écarterait. Il ne peut intervenir, en considérant le droit fédéral
comme violé, que si la sanction a été fixée en dehors du cadre légal, si elle
est fondée sur des critères étrangers à l'art. 63 CP, si les éléments
d'appréciation prévus par cette disposition n'ont pas été pris en compte ou
enfin si la peine apparaît exagérément sévère ou clémente au point que l'on
doive parler d'un abus du pouvoir d'appréciation (ATF 127 IV 101 consid. 2c
p. 104).

Cela étant, le juge doit exposer, dans sa décision, les éléments essentiels
relatifs à l'acte ou à l'auteur qu'il prend en compte, de manière à ce que
l'on puisse constater que tous les aspects pertinents ont été pris en
considération et comment ils ont été appréciés, que ce soit dans un sens
atténuant ou aggravant. La motivation doit justifier la peine prononcée, en
permettant de suivre le raisonnement adopté. Mais le juge n'est nullement
tenu d'exprimer en chiffres ou en pourcentages l'importance qu'il accorde à
chacun des éléments qu'il cite (ATF 127 IV 101 consid. 2c p. 104 s.).
3.2 Dans son arrêt du 11 juin 2002, la Cour de cassation cantonale avait
maintenu la peine de huit ans de réclusion prononcée à l'encontre du
recourant par le juge de première instance. Le recourant était alors reconnu
coupable d'instigation à incendie qualifié, de crime impossible
d'escroquerie, d'escroquerie qualifiée, de blanchiment d'argent, d'abus de
confiance, de faux dans les titres, de banqueroute frauduleuse et de fraude
dans la saisie, ainsi que de diminution effective de l'actif au détriment des
créanciers. A la suite de l'arrêt du Tribunal fédéral, le recourant a été
libéré de deux cas d'escroquerie (sur dix cas au total), et les
qualifications d'incendies qualifiés ont été substituées par celles
d'instigation à incendie simple et d'instigation à tentative d'incendie
intentionnel qualifié. La Cour de cassation cantonale a en conséquence réduit
la peine d'un an et demi.

3.3 Suivant la Cour de cassation cantonale, il faut admettre que la
libération du recourant de deux escroqueries sur dix n'exerce qu'une légère
influence sur la faute du recourant et, partant, sur la peine. La
qualification par métier reste en effet maintenue. En outre, les escroqueries
qui ont été abandonnées ne portaient que sur 35'000 francs, alors que le
produit total des huit escroqueries restantes approche des 4'650'000 francs
et le préjudice global avoisine les 7'650'000 francs, ce qui constituent des
montants considérables. La substitution de l'infraction d'instigation à
tentative d'incendie intentionnel qualifié à celle d'instigation à incendie
intentionnel qualifié a pour effet que le recourant n'encourt que la peine
prévue pour la tentative (art. 24 al. 2 CP), à savoir la réclusion au lieu de
la réclusion pour trois ans au moins. Le remplacement de l'infraction
d'instigation à incendie intentionnel "simple" à celle d'instigation à
incendie intentionnel qualifié a pour conséquence que la peine est la
réclusion sans minimum déterminé. Si le minimum de la peine est abaissé dans
ces deux cas, la peine maximale reste néanmoins inchangée, et les infractions
demeurent d'une grande gravité.

En définitive, la culpabilité du recourant est - et reste - très lourde. Il
convient notamment de retenir à sa charge le concours d'infraction, sa
dangerosité et le risque de récidive. En outre, le recourant est resté
"suprêmement indifférent" au sort de ses victimes, il a consacré pendant plus
de trois ans son énergie et son intelligence à gérer une entreprise
criminelle avec l'aide de délinquants d'habitude et était prêt, au moins dans
l'incendie de Monthey, à mettre en danger la vie de personnes pour assurer la
survie d'entreprises exsangues ainsi que la pérennité de son personnage
d'entrepreneur. Comme motifs d'atténuation, on peut seulement mentionner ceux
tirés des art. 22 ss et 65 ss CP, la nature complémentaire de la peine et le
bon comportement du recourant en détention.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, il faut admettre que  la peine de six
ans et demi de réclusion n'est pas sévère à un point tel qu'il faille
conclure à un abus du large pouvoir d'appréciation accordé à la Cour de
cassation cantonale. Cette dernière a motivé de manière suffisante la peine,
et le recourant n'invoque aucun élément, propre à la modifier, qu'elle aurait
omis ou pris en considération à tort. Le grief de violation de l'art. 63 CP
est dès lors infondé.

4.
Au vu de ce qui précède, le pourvoi doit être rejeté dans la mesure où il est
recevable.

Le recourant a sollicité l'assistance judiciaire. Sa requête doit être admise
car il a suffisamment montré qu'il était dans le besoin et que ses critiques
portant sur l'infraction d'instigation à tentative d'incendie intentionnel
qualifié ne sont pas totalement dénuées de fondement (art. 152 OJ).

Vu le sort de la cause, la requête d'effet suspensif est devenue sans objet.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le pourvoi est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
La requête d'assistance judiciaire est admise.

3.
Il n'est pas perçu de frais.

4.
La Caisse du Tribunal fédéral versera au mandataire du recourant, Me
Pierre-Dominique Schupp, une indemnité de 3'000 francs à titre de dépens.

5.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au
Ministère public du canton de Vaud et au Tribunal cantonal vaudois, Cour de
cassation pénale.

Lausanne, le 27 janvier 2004

Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: