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Kassationshof in Strafsachen 6S.10/2003
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6S.10/2003 /rod

Arrêt du 5 février 2003
Cour de cassation pénale

Les juges fédéraux Schneider, président,
Wiprächtiger, Kolly,
greffière Angéloz.

X. ________,
représenté par Me Jean-Pierre Bloch, avocat,
case postale 246, 1001 Lausanne,
recourant,

contre

Ministère public du canton de Vaud, rue de l'Université 24, case postale,
1014 Lausanne.

refus du sursis (lésions corporelles simples, etc.),

pourvoi en nullité contre l'arrêt du Tribunal cantonal vaudois, Cour de
cassation pénale, du 15 août 2002.

Faits:

A.
Né en 1976 en Tunisie, X.________ est arrivé en Suisse en 1995. Le 4 juin
1996, il a épousé Y.________, dont il a eu une fille, née en mai 1996. Son
mariage lui a permis d'obtenir un permis B. Depuis lors, il n'a pratiquement
plus eu d'activité rémunérée et il est aidé par les services sociaux.
Actuellement, le couple vit séparé depuis plusieurs années, X.________
s'opposant au divorce demandé par son épouse et réclamant notamment la garde
de sa fille.

Le 5 novembre 1997, X.________ a déposé plainte contre son épouse, alléguant
qu'elle s'adonnait à la prostitution au domicile conjugal et en présence de
leur enfant. Ces accusations se sont révélées infondées et l'enquête a abouti
à un non-lieu après que X.________ eut retiré ses fausses accusations.

En automne 1997, alors qu'une première procédure en divorce était en cours,
X.________ a menacé son épouse en lui disant notamment que lui et ses amis
lui feraient du mal, qu'ils la défigureraient et qu'elle allait "pleurer du
sang". Effrayée par ces propos, l'épouse s'est réfugiée au Foyer Malley
Prairie. Elle a déposé plainte.

A la fin novembre 1997, X.________ a dérobé des affaires personnelles à son
épouse, notamment des bijoux, un téléphone et un magnétoscope. Y.________ a
déposé plainte.

En septembre 1998, une nouvelle dispute a opposé les époux. X.________ a
violenté son épouse, en la frappant et en lui tirant les cheveux. Il a
également renversé la poussette dans laquelle se trouvait sa fille, qui a
chuté sur le sol. En outre, bien que l'enfant était légalement sous la garde
de sa mère, il l'a emmenée jusqu'à son domicile, n'acceptant de la remettre à
la mère que sur intervention de la police.

En septembre 2000, X.________ s'est rendu au domicile de son épouse, qu'il a
menacée avec un couteau dont il s'était muni, lui déclarant qu'elle allait
"pleurer du sang", et qu'il a également violentée.

Le 28 février 2001, X.________ a rencontré son épouse en ville de Lausanne.
Celle-ci ayant refusé de reprendre la vie commune, comme il le lui demandait,
il lui a tiré les cheveux et lui a craché au visage.

Entre novembre 2000 et février 2002, X.________ s'est rendu à trois reprises
dans le canton de Berne afin d'acquérir de la marijuana, pour un montant
total de 100 francs, qu'il destinait à sa consommation personnelle. En
novembre 2001, il a été interpellé alors qu'il était en possession de sept
sachets contenant au total 13,2 grammes de marijuana.

B.
Par jugement du 22 mai 2002, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de
Lausanne a condamné X.________, pour lésions corporelles simples, voies de
fait, vol, menaces, violation de domicile, enlèvement de mineur, dénonciation
calomnieuse et contravention à la LStup, à la peine de 6 mois
d'emprisonnement, sans sursis, et à l'expulsion du territoire suisse pour une
durée de 3 ans, avec sursis pendant 5 ans.

Saisie d'un recours du condamné, la Cour de cassation pénale du Tribunal
cantonal vaudois, par arrêt du 15 août 2002, a réformé d'office le jugement
qui lui était déféré en ce sens qu'elle a supprimé l'infraction de voies de
fait pour cause de prescription, rejetant le recours et confirmant le
jugement attaqué pour le surplus.

C.
X.________ se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Se plaignant du refus
du sursis à l'exécution de la peine privative de liberté, il conclut à
l'annulation de l'arrêt attaqué. Il sollicite par ailleurs l'assistance
judiciaire.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le recourant soutient que le refus d'assortir du sursis la peine privative de
liberté qui lui a été infligée procède d'un abus du pouvoir d'appréciation.

1.1 Selon l'art. 41 ch. 1 al. 1 CP, le sursis à l'exécution d'une peine
privative de liberté peut être octroyé si la durée de la peine n'excède pas
18 mois et si les antécédents et le caractère du condamné font prévoir que
cette mesure le détournera de commettre d'autres crimes ou délits.

Il est évident qu'une peine de 6 mois d'emprisonnement, par sa nature et sa
durée, peut objectivement être assortie du sursis. La seule question est donc
de savoir si l'on peut prévoir, en fonction des antécédents et du caractère
du recourant, que cette mesure sera de nature à le détourner de commettre
d'autres crimes ou délits, c'est-à-dire si un pronostic favorable peut être
posé quant à son comportement futur.

Pour poser ce pronostic, le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation,
de sorte que sa décision sur ce point ne sera annulée que si elle repose sur
des considérations étrangères à la disposition applicable, si elle ne prend
pas en compte les critères découlant de celle-ci ou si elle se révèle à ce
point sévère ou clémente que l'on doive conclure à un abus du pouvoir
d'appréciation. Pour déterminer si le sursis serait de nature à détourner
l'accusé de commettre de nouvelles infractions, le juge doit se livrer à une
appréciation d'ensemble de tous les éléments pertinents. Il doit être tenu
compte, d'une part, des circonstances de l'acte et, d'autre part, de la
situation personnelle de l'auteur. Il n'est pas admissible d'accorder une
importance prépondérante à certains des éléments à prendre en considération
dans l'application de l'art. 41 ch. 1 al. 1 CP et d'en négliger d'autres,
voire de ne pas en tenir compte (ATF 128 IV 193 consid. 3b p. 198 et les
références citées).

1.2 Il résulte des constatations de fait cantonales que, depuis qu'il a
obtenu un permis B à la suite de son mariage, conclu quelques mois après son
arrivée en Suisse, le recourant n'a pratiquement plus eu d'activité rémunérée
et vit de l'aide des services sociaux. Durant près de cinq ans, il n'a eu de
cesse de harceler son épouse. Après qu'une enquête ait été ouverte à son
encontre, il a persisté à commettre de nouvelles infractions, similaires à
celles pour lesquelles il était déjà renvoyé en jugement. Il n'a nullement
pris conscience de la gravité de ses actes et du mal qu'il a fait à son
épouse, ne manifestant aucun regret. Il existe dès lors un risque de
récidive.

Sur la base des faits ainsi retenus, qui lient la Cour de cassation saisie
d'un pourvoi en nullité (art. 277bis al. 1 PPF), l'arrêt attaqué ne viole en
rien le droit fédéral en tant qu'il nie qu'un pronostic favorable puisse être
posé quant au comportement futur du recourant et, partant, refuse d'assortir
du sursis la peine privative de liberté qui lui a été infligée. Les juges
cantonaux se sont fondés sur des critères pertinents et on ne peut certes
dire que le refus de la mesure litigieuse est à ce point sévère qu'ils
doivent se voir reprocher un abus du pouvoir d'appréciation.

1.3 Le recourant objecte vainement qu'il a commis les actes qui lui sont
reprochés dans le cadre de ses mauvaises relations avec son épouse. Rien
n'indique que le conflit l'opposant à cette dernière se serait apaisé,
d'autant moins qu'il s'oppose toujours au divorce. Dès lors et compte tenu du
fait que le recourant n'a toujours pas pris conscience de la gravité de ses
actes et du tort qu'il a causé à son épouse ni n'a jamais manifesté le
moindre regret, on est fondé à redouter qu'il n'en vienne à s'en prendre de
nouveau à celle-ci.

Le recourant semble soutenir qu'il serait contradictoire d'admettre qu'il n'a
pas pris conscience de ses méfaits alors qu'il a été retenu qu'il est
entièrement responsable de ses actes. Dans la mesure où cette argumentation
revient à contester les faits retenus, elle est irrecevable dans un pourvoi
en nullité. Au demeurant, la contradiction alléguée est inexistante, dès lors
qu'il n'est aucunement établi que l'absence de conscience de la gravité de
ses actes par le recourant serait la conséquence de l'un des troubles
mentionnés à l'art. 11 CP.

La circonstance que même l'exécution de la peine pourrait laisser subsister
le risque de récidive, comme le laisse entendre le recourant, n'est certes
pas un motif justifiant l'octroi du sursis. Au cas où, nonobstant l'exécution
de la peine, ce risque devait se réaliser, le recourant serait exposé à une
nouvelle condamnation.

Enfin, le fait que le recourant a obtenu le sursis pour la peine accessoire
d'expulsion n'impliquait pas nécessairement qu'il soit mis au bénéfice de
cette mesure pour la peine privative de liberté. L'art. 41 ch. 1 al. 4 CP
prévoit expressément que le juge, en cas de concours de peines, pourra
limiter le sursis à certaines d'entre elles. Selon les cas, en effet, le
sursis peut se justifier pour la peine principale, mais non pour la peine
accessoire, ou inversement; ainsi, lorsque le pronostic est favorable pour
l'une d'elles, alors qu'il est défavorable pour l'autre (cf. ATF 114 IV 95
consid. b p. 97; 104 IV 222 consid. 2b p. 225; 95 IV 11 consid. 3 p. 15). En
l'espèce, les juges cantonaux ont estimé que la seule menace d'une peine
privative de liberté ne suffirait pas à détourner le recourant de commettre
de nouvelles infractions, dès lors que, nonobstant l'enquête ouverte à son
encontre, il a continué à commettre des infractions similaires et n'a au
demeurant pas pris conscience de la gravité de ses actes; ils ont en revanche
admis que, compte tenu des relations de l'accusé avec sa fille, qu'il voit
régulièrement, la perspective d'une expulsion était de nature à le détourner
de la récidive. Ils se sont donc demandés, dans chacun des cas, si un
pronostic favorable pouvait être posé et ont répondu par la négative en ce
qui concerne la peine privative de liberté et par l'affirmative pour ce qui
est de la peine accessoire d'expulsion. Fondé sur ces considérations, un
traitement différencié était justifié.

2.
Au vu de ce qui précède, le pourvoi est infondé et doit être rejeté.

Comme il était d'emblée dépourvu de chances de succès, l'assistance
judiciaire doit être refusée (art. 152 al. 1 OJ) et le recourant, qui
succombe, supportera les frais (art. 278 al. 1 PPF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le pourvoi est rejeté.

2.
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Un émolument judiciaire de 800 francs est mis à la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au
Ministère public du canton de Vaud et au Tribunal cantonal vaudois, Cour de
cassation pénale.

Lausanne, le 5 février 2003

Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière: