Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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Kassationshof in Strafsachen 6P.53/2003
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6P.53/2003 /pai

Arrêt du 17 juin 2003
Cour de cassation pénale

MM. les Juges Schneider, Président,
Kolly, Karlen.
Greffier: M. Denys.

X. ________,
recourant, représenté par Me Michel Dupuis, avocat, case postale 3860, 1002
Lausanne,

contre

Ministère public du canton de Vaud,
rue de l'Université 24, case postale, 1014 Lausanne,
Tribunal cantonal vaudois, Cour de cassation pénale, 1014 Lausanne.

Procédure pénale, droit d'être entendu,

recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal cantonal vaudois, Cour de
cassation pénale, du 29 août 2002.

Faits:

A.
Par jugement du 13 mars 2002, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement
de Lausanne a condamné X.________, pour viol, à un an de réclusion avec
sursis durant deux ans. Il en ressort notamment ce qui suit :

Né en 1955, X.________, inspecteur de la police de sûreté vaudoise, a
entretenu depuis 1997 une liaison avec A.________, qui exploitait un salon de
massage. Dès 1998, ils ont fait ménage commun. Le 16 septembre 2000, après
que le couple eut connu de brèves séparations, puis des réconciliations,
A.________ a quitté le domicile commun. Ce nonobstant, le couple a continué à
avoir des contacts téléphoniques journaliers.

Le 26 septembre 2000, le couple s'est vu à plusieurs reprises. En soirée,
après un repas en commun, ils ont eu une longue discussion  au salon de
massage à propos de leur relation; X.________ a fait comprendre à A.________
qu'il souhaitait reprendre la vie commune. Vers 21 h 45, il a quitté les
lieux pour revenir trente minutes plus tard. Comme A.________ avait consommé
de l'alcool, elle a décidé de dormir sur place. Elle a accepté que X.________
reste à ses côtés, ce dernier comprenant qu'elle ne voulait pas faire l'amour
avec lui. Il s'est toutefois dévêtu et s'est couché sur elle en lui
maintenant fermement les deux poignets. Elle a réussi à se dégager et il l'a
alors frappée au visage en lui disant d'arrêter son cinéma. Elle s'est mise à
pleurer et à crier. Il l'a giflée sur les deux joues. Il l'a pénétrée en lui
disant qu'il voulait jouir. Elle s'est alors laissé faire en lui disant
"vas-y". Il a ensuite rapidement quitté les lieux.

A 1 h 18, A.________ a appelé la police et a expliqué en pleurs qu'elle était
mal car elle venait d'être violée par son compagnon qui était inspecteur de
police. Elle a refusé de donner son nom et a demandé à parler personnellement
à l'inspecteur B.________, qui était le meilleur ami de X.________. Dans les
semaines qui ont suivi, X.________ et A.________ se sont réconciliés et ont
repris le ménage commun. Leur liaison s'est poursuivie jusqu'à ce jour,
entrecoupée de disputes et de réconciliations.

Le tribunal a fondé sa conviction sur les déclarations téléphoniques
enregistrées de A.________ à la police, ainsi que sur  ses déclarations lors
de l'enquête, confortées par celles faites aux médecins de l'Institut
universitaire de médecine légale. Il a relevé que les déclarations en
question étaient non seulement constantes, A.________ ayant à plusieurs
reprises dit clairement avoir subi un viol et n'avoir pas accepté cette
relation sexuelle, mais également convaincantes, car elle s'était souciée de
X.________ à chaque audition, culpabilisant de lui porter préjudice pour sa
carrière. Le tribunal a également observé que les constats médicaux après les
faits révélaient des marques physiques qui correspondaient aux déclarations
de A.________. Le tribunal a écarté les rétractations de cette dernière aux
débats. Il les a jugées non probantes en elles-mêmes et par le ton avec
lequel elles avaient été prononcées. Il a également exposé que ces
rétractions n'étaient que l'aboutissement d'un processus de culpabilisation
et qu'elles pouvaient se comprendre par le fait que A.________ vivait de
nouveau avec X.________.

B.
Par arrêt du 29 août 2002, dont les considérants écrits ont été envoyés aux
parties le 20 mars 2003, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal
vaudois a rejeté le recours de X.________ et a confirmé le jugement de
première instance.

C.
X.________ forme un recours de droit public au Tribunal fédéral contre cet
arrêt. Il conclut à son annulation.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le recours de droit public au Tribunal fédéral est ouvert contre une décision
cantonale pour violation des droits constitutionnels des citoyens (art. 84
al. 1 let. a OJ). Il n'est en revanche pas ouvert pour se plaindre d'une
violation du droit fédéral, qui peut donner lieu à un pourvoi en nullité
(art. 269 al. 1 PPF); un tel grief ne peut donc pas être invoqué dans le
cadre d'un recours de droit public, qui est subsidiaire (art. 84 al. 2 OJ;
art. 269 al. 2 PPF).

En vertu de l'art. 90 al. 1 let. b OJ, l'acte de recours doit, à peine
d'irrecevabilité, contenir un exposé succinct des droits constitutionnels ou
des principes juridiques violés et préciser en quoi consiste la violation.
Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'a donc pas à
vérifier de lui-même si la décision attaquée est en tous points conforme au
droit ou à l'équité; il est lié par les moyens invoqués dans le recours et
peut se prononcer uniquement sur les griefs de nature constitutionnelle que
le recourant a non seulement invoqués, mais suffisamment motivés (ATF 127 I
38 consid. 3c p. 43; 126 III 534 consid. 1b p. 536; 125 I 71 consid. 1c p.
76). Le Tribunal fédéral n'entre pas non plus en matière sur les critiques de
nature appellatoire (ATF 125 I 492 consid. 1b p. 495).

2.
Le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu, en ce
sens que la Cour de cassation vaudoise n'a pas ordonné une nouvelle audition
de A.________ pendant la procédure cantonale de recours. Il se prévaut à cet
égard d'une violation de l'art. 433a du Code de procédure pénale vaudois
(CPP/VD).

Le contenu du droit d'être entendu est déterminé en premier lieu par les
dispositions cantonales de procédure, dont le Tribunal fédéral ne contrôle
l'application et l'interprétation que sous l'angle de l'arbitraire; dans tous
les cas, l'autorité cantonale doit cependant observer les garanties minimales
déduites directement de l'art. 29 al. 2 Cst., dont le Tribunal fédéral
examine librement le respect (ATF 127 III 193 consid. 3 p. 194; 125 I 257
consid. 3a p. 259).

En l'espèce, le recourant consacre sa motivation à une application arbitraire
de la réglementation cantonale. Sans développement précis, il se réfère
également à l'art. 29 al. 2 Cst. (et à l'art. 6 CEDH qui n'a pas de portée
distincte sur la question du droit d'être entendu). Il convient d'emblée
d'indiquer que le recourant ne saurait tirer  argument des garanties
minimales déduites de l'art. 29 al. 2 Cst. En effet, sous l'angle
constitutionnel, l'accusé ne peut en principe exercer qu'une seule fois le
droit d'interroger ou de faire interroger une personne (ATF 121 I 306 consid.
1b p. 308). A.________ a été entendue lors des débats contradictoires de
première instance. Le respect du droit d'être entendu du recourant tel qu'il
est garanti par la Constitution fédérale n'exigeait pas qu'elle le soit une
fois encore dans la procédure cantonale de recours.

Il s'agit donc d'examiner si le droit cantonal de procédure donnait plus
largement la possibilité au recourant d'exiger une nouvelle audition de
A.________. Le Tribunal fédéral ne revoit l'application de la législation
cantonale que sous l'angle restreint de l'arbitraire. La procédure pénale
vaudoise ne connaît pas la voie de l'appel, qui permettrait à la seconde
instance cantonale de revoir librement les faits. Autrement dit, les faits
sont arrêtés souverainement en première instance (cf. Roland Bersier, Le
recours à la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal en procédure
vaudoise, in JdT 1996 III p. 66 ss, 79). A teneur de l'art. 433a CPP/VD, ce
n'est que lorsque l'état de fait arrêté en première instance est insuffisant,
présente des lacunes ou des contradictions, ou s'il existe des doutes sérieux
sur des faits importants, que la Cour de cassation vaudoise, saisie d'un
recours en nullité, peut revoir librement les faits et ordonner des mesures
d'instruction (pour les moyens de nullité correspondant, cf. l'art. 411 let.
h et i CPP/VD, auquel se réfère notamment l'art. 433a CPP/VD). Les vices
énumérés à l'art. 433a CPP/VD, qui permettent à la Cour de cassation vaudoise
d'ordonner des mesures d'instruction, doivent être manifestes et faire
apparaître l'état de fait retenu par le juge inférieur comme arbitraire. En
particulier, l'existence d'un doute sur un fait important se confond avec la
mise en cause d'une appréciation arbitraire des preuves qui s'y rapportent
(cf. arrêt de la Cour de cassation vaudoise du 13 juillet 1993 publié in JdT
1994 III p. 129/130; Roland Bersier, op.cit., p. 81 ss et 99/100). Aussi,
pour que la Cour de cassation vaudoise ordonnât une nouvelle audition de
A.________, eût-il fallu que l'imputation au recourant d'un acte sexuel
commis avec contrainte procédât d'une appréciation arbitraire des preuves,
plus spécifiquement d'une appréciation arbitraire de l'ensemble des
déclarations de A.________ (cf. arrêt attaqué, p. 15 al. 3). Or, la Cour de
cassation vaudoise a nié que l'appréciation par l'autorité de première
instance des déclarations de cette dernière prêtât le flanc à la critique. Le
recourant n'entreprend pas de démontrer dans son recours de droit public que
l'appréciation des preuves par l'autorité de première instance était
arbitraire et que la Cour de cassation vaudoise aurait elle-même refusé à
tort de qualifier d'arbitraire cette appréciation (cf. ATF 125 I 492 consid.
1a/cc et 1b p. 495). Dans ces conditions, on ne saurait retenir une
application arbitraire de l'art. 433a CPP/VP. Le grief est infondé.

3.
Le recourant, qui succombe, supporte les frais de la procédure (art. 156 al.
1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 francs est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au
Ministère public du canton de Vaud et au Tribunal cantonal vaudois, Cour de
cassation pénale.

Lausanne, le 17 juin 2003

Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: