Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Kassationshof in Strafsachen 6P.3/2003
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6P.3/2003 /dxc

Arrêt du 5 mars 2003
Cour de cassation pénale

MM. les Juges Schneider, président,
Wiprächtiger et Kolly.
Greffier: M. Denys.

X. ________,
recourant, représenté par Me Jacqueline Mottard, avocate,
rue de Candolle 9, 1205 Genève,

contre

Procureur général du canton de Genève,
place du Bourg-de-Four 1, case postale 3565, 1211 Genève 3,
Cour de cassation du canton de Genève,
place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, 1211 Genève 3.

procédure pénale, arbitraire,

recours de droit public contre l'arrêt de la Cour de cassation du canton de
Genève du 13 décembre 2002.

Faits:

A.
Par arrêt du 18 juin 2002, la Cour d'assises du canton de Genève a condamné
X.________, pour meurtre (art. 111 CP), à dix ans de réclusion, sous
déduction de la détention préventive subie, et à quinze ans d'expulsion du
territoire suisse. Il en ressort notamment ce qui suit:

Le 17 décembre 2000 vers 13 h 15, X.________ a tué son épouse en lui plantant
un couteau dans le coeur. Dans un rapport du 18 janvier 2002, l'experte
psychiatre a conclu à une pleine responsabilité pénale. Le rapport faisait en
particulier état d'une alcoolémie de 0,54 g o/oo chez X.________ au moment
des faits. Dans un avis du 28 mai 2002, deux médecins légistes ont considéré
que l'alcoolémie se situait très probablement entre 0,7 et 1,29 g o/oo. Aux
débats, l'experte psychiatre a modifié oralement les conclusions de son
rapport, en particulier compte tenu de la donnée nouvelle quant à
l'alcoolémie. Elle a pris en compte la concentration maximale d'alcool dans
le sang évoquée par les médecins légistes. Elle a relevé que la consommation
par X.________ d'un antidépresseur avait pu augmenter l'effet de l'alcool.
Elle a ajouté que les effets étaient amoindris pour quelqu'un qui avait
l'habitude de consommer les deux substances. Elle a conclu que X.________
avait pleinement la faculté d'apprécier le caractère illicite de son acte
mais que sa capacité de se déterminer d'après cette appréciation était
partiellement altérée, de l'ordre de 30 à 40 %. Se fondant sur cette
appréciation, la Cour d'assises a mis X.________ au bénéfice d'une
responsabilité légèrement diminuée.

B.
Par arrêt du 13 décembre 2002, la Cour de cassation genevoise a rejeté le
recours de X.________.

C.
Celui-ci forme un recours de droit public au Tribunal fédéral contre cet
arrêt. Il conclut à son annulation et sollicite par ailleurs l'assistance
judiciaire.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le recours de droit public au Tribunal fédéral est ouvert contre une décision
cantonale pour violation des droits constitutionnels des citoyens (art. 84
al. 1 let. a OJ). Il n'est en revanche pas ouvert pour se plaindre d'une
violation du droit fédéral, qui peut donner lieu à un pourvoi en nullité
(art. 269 al. 1 PPF); un tel grief ne peut donc pas être invoqué dans le
cadre d'un recours de droit public, qui est subsidiaire (art. 84 al. 2 OJ;
art. 269 al. 2 PPF).

En vertu de l'art. 90 al. 1 let. b OJ, l'acte de recours doit, à peine
d'irrecevabilité, contenir un exposé succinct des droits constitutionnels ou
des principes juridiques violés et préciser en quoi consiste la violation.
Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'a donc pas à
vérifier de lui-même si la décision attaquée est en tous points conforme au
droit ou à l'équité; il est lié par les moyens invoqués dans le recours et
peut se prononcer uniquement sur les griefs de nature constitutionnelle que
le recourant a non seulement invoqués, mais suffisamment motivés (ATF 127 I
38 consid. 3c p. 43; 126 III 534 consid. 1b p. 536; 125 I 71 consid. 1c p.
76). Le Tribunal fédéral n'entre pas non plus en matière sur les critiques de
nature appellatoire (ATF 125 I 492 consid. 1b p. 495).

2.
Le recourant se plaint d'arbitraire dans l'appréciation des preuves.

2.1 Saisi d'un recours de droit public mettant en cause l'appréciation des
preuves, le Tribunal fédéral examine uniquement si le juge cantonal a
outrepassé son pouvoir d'appréciation et établi les faits de manière
arbitraire (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 41; 124 I 208 consid. 4 p. 211; 120 Ia
31 consid. 2d p. 37/38).

Selon la jurisprudence, est arbitraire une décision qui méconnaît gravement
une norme ou un principe juridique clair et indiscuté ou qui heurte de
manière choquante le sentiment de la justice ou de l'équité. En d'autres
termes, il ne se justifie de l'annuler que si elle est insoutenable, en
contradiction manifeste avec la situation effective, si elle a été adoptée
sans motif objectif ou en violation d'un droit certain. Il ne suffit pas que
la motivation de la décision soit insoutenable; encore faut-il qu'elle soit
arbitraire dans son résultat (ATF 128 I 273 consid. 2.1 p. 275; 127 I 54
consid. 2b p. 56; 126 I 168 consid. 3 p. 170).

2.2 Selon le recourant, il serait incompatible de se fonder sur les propos de
l'experte psychiatre aux débats et d'en déduire une responsabilité légèrement
diminuée. Par ailleurs, il se réfère à différents témoignages pour contester
son habitude à boire; en fonction de cet élément, la Cour de cassation
cantonale a relativisé les effets conjugués de l'alcool et des médicaments
sur le recourant.

L'état de l'auteur au moment d'agir, tel qu'il a été déterminé par l'autorité
cantonale, est une constatation de fait, qui peut en conséquence être
attaquée dans un recours de droit public pour appréciation arbitraire des
preuves (cf. ATF 123 IV 49 consid. 2c p. 51). Il ressort de l'appréciation de
l'experte psychiatre lors des débats que la faculté du recourant d'apprécier
le caractère illicite de son acte était entière alors que sa capacité de se
déterminer d'après cette appréciation était diminuée de l'ordre de 30 à 40 %.

Le recourant soutient que l'autorité cantonale s'est arbitrairement écartée
de l'appréciation de l'experte, en retenant une responsabilité légèrement
diminuée; selon lui, elle n'avait pas d'autre choix que de retenir une
diminution moyenne de sa responsabilité. L'argumentation du recourant ne
saurait être suivie. En effet, la responsabilité n'est pas une notion
quantifiable de manière précise. L'appréciation de l'experte le montre bien.
Les termes qu'elle a employés - "de l'ordre de 30 à 40 %" - font clairement
entendre que l'on se trouve dans un domaine d'approximation. La fourchette
ainsi donnée reste sensiblement éloignée d'un seuil de 50 %, par hypothèse
représentatif d'une responsabilité moyennement diminuée. Elle ne correspond
donc pas à un ordre de grandeur qui ferait en soi nécessairement penser à une
diminution moyenne de responsabilité. Cela suffit déjà à exclure tout
arbitraire. En outre, l'experte a exprimé cette fourchette en se fondant sur
l'alcoolémie la plus élevée possible pour le recourant. Comme l'a relevé la
Cour de cassation cantonale, la Cour d'assises a quant à elle pris en
considération une alcoolémie moindre (cf. arrêt attaqué, p. 4 et 9). Il y
avait de ce fait une marge d'interprétation supplémentaire pour apprécier la
diminution de responsabilité du recourant. Le degré de responsabilité retenu
n'est entaché d'aucun arbitraire. Pour le reste, la critique du recourant
relative à la motivation de la Cour de cassation cantonale quant au rôle
d'une accoutumance à l'alcool est sans portée. Au vu de qui précède, même en
supposant qu'il n'était pas accoutumé à l'alcool, la solution retenue
n'apparaîtrait pas arbitraire dans son résultat. Le recours doit être rejeté.

3.
La requête d'assistance judiciaire est rejetée car le recours était d'emblée
voué à l'échec (art. 152 OJ). Le recourant supporte les frais de la procédure
(art. 156 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Un émolument judiciaire de 800 francs est mis à la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie à la mandataire du recourant, au
Procureur général du canton de Genève et à la Cour de cassation genevoise.

Lausanne, le 5 mars 2003

Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier: