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Kassationshof in Strafsachen 6A.17/2003
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6A.17/2003 /pai

Arrêt du 5 mai 2003
Cour de cassation pénale

MM. les Juges Schneider, Président,
Kolly et Karlen.
Greffier: M Denys.

X. ________,
recourant, représenté par Me Alain Berger, avocat, 9, boulevard des
Philosophes, 1205 Genève,

contre

Tribunal administratif du canton de Genève, rue des Chaudronniers 3, 1204
Genève.

Levée d'une mesure (art. 43 CP),

recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal administratif du
canton de Genève du 28 janvier 2003.

Faits:

A.
Le 12 avril 2000, la Cour correctionnelle du canton de Genève a condamné
X.________, né en 1978, pour incendie intentionnel, à deux ans de réclusion,
sous déduction de la détention préventive subie. Elle a suspendu cette peine
et prononcé l'internement de X.________ en application de l'art. 43 ch. 1 al.
2 CP.

Sur proposition du médecin qui suivait X.________ à la prison de
Champ-Dollon, la mesure d'internement a été levée à l'essai le 5 novembre
2001, au profit d'une mesure d'hospitalisation. Dès le 10 décembre 2001,
X.________ a été placé à la Clinique Belle-Idée. Dès janvier 2002, il a
participé à des groupes thérapeutiques dans son unité. Dès février 2002, il a
pu effectuer des sorties quotidiennes dans le jardin clôturé de l'unité en
compagnie d'un soignant.

Le 19 mars 2002, X.________ a giflé un autre patient et donné un coup de
poing à un aide-soignant.

Le 4 septembre 2002, la Dresse A.________ a établi un rapport à l'attention
du Conseil de surveillance psychiatrique (ci-après: CSP) en indiquant que,
malgré l'épisode ci-dessus, X.________ respectait parfaitement le cadre du
programme mis en place et ne présentait pas de trouble du comportement. Elle
proposait un placement en foyer ainsi qu'un suivi à l'hôpital de jour.

X. ________ a formulé une demande dans le même sens lorsqu'il a rencontré le
CSP le 27 septembre 2002. Le 16 octobre 2002, le CSP l'a autorisé à effectuer
seul une sortie par jour de trente minutes sur le domaine de Belle-Idée.

Par courrier du 22 octobre 2002, X.________ a prié le CSP de lui accorder le
bénéfice d'une mesure ambulatoire et de lever l'hospitalisation. Cette
demande était appuyée par le Dr B.________, chef de clinique. Le 4 novembre
2002, le CSP s'est réuni en séance plénière pour statuer sur cette requête.

Par courrier du 7 novembre 2002, le Dr B.________ a informé le CSP qu'en date
du 5 novembre 2002, une lettre non datée de X.________ avait été découverte
chez un patient; X.________ y donnait des instructions relatives à un
cambriolage et à une agression sur son père. Le Dr B.________ précisait qu'en
raison de ces menaces et du risque de passage à l'acte, X.________ avait été
placé en régime pavillonnaire strict.

B.
Par décision du 4 novembre 2002, le CSP a refusé de donner suite à la demande
de levée d'hospitalisation.

Par arrêt du 28 janvier 2003, le Tribunal administratif du canton de Genève a
rejeté le recours de X.________.

C.
Celui-ci forme un recours de droit administratif au Tribunal fédéral contre
cet arrêt. Il conclut principalement à sa réforme en ce sens que la mesure
d'hospitalisation est levée et qu'il pourra résider dans un foyer et devra se
soumettre à un traitement ambulatoire; subsidiairement, il conclut à son
annulation et au renvoi de la cause en instance cantonale.

Le Tribunal administratif du canton de Genève persiste dans les termes et
conclusions de son arrêt.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
La décision de lever ou non une mesure prise en application de l'art. 43 CP
est une décision en matière d'exécution des peines et mesures que le droit
fédéral ne réserve pas au juge (art. 43 ch. 4 CP). Elle est susceptible d'un
recours de droit administratif au Tribunal fédéral (ATF 122 IV 8 consid. 1 p.
11). Le recours peut être formé pour violation du droit fédéral, qui englobe
les droits constitutionnels (ATF 124 II 517 consid. 1 p. 519). Lorsque, comme
en l'espèce, le recours est dirigé contre la décision d'une autorité
judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés dans l'arrêt
attaqué, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont
été établis au mépris de règles essentielles de la procédure (art. 104 let. b
et 105 al. 2 OJ).

2.
La décision du CSP se réfère à la lettre découverte le 5 novembre 2002,
transmise par le Dr B.________ le 7 novembre 2002. Le recourant indique
n'avoir pas pu s'exprimer sur la portée à accorder à cette lettre et y voit
une violation de son droit d'être entendu. Il souligne avoir soulevé un grief
similaire devant le Tribunal administratif genevois, qui n'y a pas répondu.
Il invoque également une violation de son droit d'être entendu à ce propos.

2.1 Le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de caractère
formel, dont la violation doit entraîner l'annulation de la décision
attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond.

Tel qu'il est reconnu par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu
comprend en particulier le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves
pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d'obtenir qu'il soit donné
suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration
des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat
lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 127 I 54
consid. 2b p. 56; 126 I 15 consid. 2a/aa p. 16).

Le droit d'être entendu implique également pour l'autorité l'obligation de
motiver sa décision (ATF 126 I 97 consid. 2b p. 102). La motivation d'une
décision est suffisante lorsque l'intéressé est mis en mesure d'en apprécier
la portée et de la déférer à une instance supérieure en pleine connaissance
de cause (ATF 122 IV 8 consid. 2c p. 14/15). Il suffit que l'autorité
mentionne au moins brièvement les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels
elle a fondé son prononcé, sans qu'elle soit tenue de répondre à tous les
arguments avancés (arrêt 2P.21/1993 du 8 septembre 1993 consid. 1b reproduit
in SJ 1994 p. 161). L'étendue de l'obligation de motiver dépend de la
complexité de la cause à juger (ATF 111 Ia 2 consid. 4b p. 4).

2.2 Selon la jurisprudence, le Tribunal fédéral ne sanctionne pas les
violations du droit d'être entendu commises par une instance inférieure
lorsque l'intéressé a eu l'occasion d'attaquer la décision et de faire valoir
tous ses moyens devant une autorité de recours jouissant d'un plein pouvoir
d'examen en fait et en droit (ATF 124 V 389 consid. 5a p. 392). Le recourant
conteste que le vice de procédure ait été réparé, soulignant que le Tribunal
administratif genevois n'a pas le même pouvoir d'examen que le CSP.

Il ressort de l'arrêt attaqué (p. 4) que le Tribunal administratif s'impose
une certaine retenue s'agissant des questions techniques ou médicales
qu'examine le CSP. Dès lors que le vice de procédure invoqué a pu influer sur
l'exercice du pouvoir d'appréciation du CSP, on ne saurait conclure que le
Tribunal administratif l'a réparé. Il importe ainsi d'examiner si la
violation du droit d'être entendu reprochée au CSP est fondée ou non.

2.3 Le CSP a pris sa décision le 4 novembre 2002. C'est ultérieurement, le 7
novembre 2002, que le Dr B.________ lui a transmis la lettre non datée écrite
par le recourant, trouvée le 5 novembre 2002, où celui-ci donne des
instructions relatives à un cambriolage et à une  agression sur son père. La
motivation de la décision du CSP se fonde malgré tout sur cette lettre.
L'arrêt attaqué (p. 4) mentionne également que le refus du CSP de lever
l'hospitalisation repose en partie sur la lettre découverte. On ne saurait
donc dire que cette lettre n'a eu aucune portée. Le recourant aurait dû être
mis en situation de pouvoir s'exprimer à son sujet dans le cadre de la
procédure devant le CSP. A défaut, son droit d'être entendu a été violé. Le
bien-fondé du recours sur ce point rend superflu l'examen des autres griefs
soulevés.

3.
Le recours doit par conséquent être admis, la décision entreprise annulée et
le dossier renvoyé, au CSP en l'occurrence (art. 114 al. 2 2ème phrase OJ),
pour nouvelle décision.

Il ne sera pas perçu de frais (art 156 al.1 et 2 OJ) et le canton de Genève
versera au recourant une indemnité de dépens pour la procédure devant le
Tribunal fédéral (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis, l'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée au
Conseil de surveillance psychiatrique du canton de Genève pour nouvelle
décision.

2.
Il n'est pas perçu de frais.

3.
Le canton de Genève versera au recourant une indemnité de 2'000 francs à
titre de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au
Conseil de surveillance psychiatrique du canton de Genève et au Tribunal
administratif genevois.

Lausanne, le 5 mai 2003

Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: