Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2P.281/2003
Zurück zum Index II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2003
Retour à l'indice II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2003


2P.281/2003/DAC/elo
Arrêt du 19 mars 2004
IIe Cour de droit public

MM. et Mme les Juges Wurzburger, Président,
Betschart, Hungerbühler, Yersin et Merkli.
Greffière: Mme Dupraz.

X. ________, recourant,
représenté par Me Philippe Zoelly, avocat.

contre

Conseil d'Etat du canton de Genève, rue de l'Hôtel-de-Ville 2, case postale
3964, 1211 Genève 3,
Tribunal administratif du canton de Genève, rue du Mont-Blanc 18, case
postale 1956, 1211 Genève 1.

Art. 9, 27 et 36 Cst. (sanction),

recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de
Genève du 23 septembre 2003.

Faits:

A.
X. ________ est spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie. Y.________
a été soignée par lui de 1988 ou 1989 à la fin de l'année 1997 et par un de
ses confrères à partir de l'automne 1998. D'entente avec ce confrère,
X.________ a encore établi, le 10 novembre 1998, un rapport concernant
Y.________ à l'intention de l'Office cantonal AI du canton de Genève
(ci-après: l'Office cantonal).

Y. ________ est tombée amoureuse de X.________ alors qu'elle était en
traitement chez lui, mais ce n'est qu'en juin 1998 qu'ils ont commencé à
entretenir des relations intimes qui ont duré jusqu'en été 1999.

Le 3 février 2000, Y.________ a saisi la Commission de surveillance des
professions de la santé du canton du Genève (ci-après: la Commission) d'une
plainte à l'encontre de X.________. Elle prétendait que ce médecin avait
commis une faute professionnelle grave qui lui avait causé beaucoup de tort:
un mémoire annexé à sa plainte décrivait les relations qu'elle avait eues
avec X.________, en particulier la liaison qu'ils avaient entretenue à partir
du mois de juin 1998.

Se fondant en particulier sur le préavis émis par la Commission le 15 février
2001, le Conseil d'Etat du canton de Genève (ci-après: le Conseil d'Etat) a
prononcé, le 27 juin 2001, la radiation de l'inscription de X.________ dans
le registre des médecins pour une durée de six mois, pendant lesquels il
était interdit à l'intéressé d'exercer la profession de médecin dans le
canton de Genève.

B.
Par arrêt du 23 septembre 2003, le Tribunal administratif du canton de Genève
(ci-après: le Tribunal administratif) a rejeté le recours formé par
X.________ contre l'arrêté du Conseil d'Etat du 27 juin 2001. Il a considéré
en particulier que X.________ avait eu un comportement fautif en nouant des
relations intimes avec une ancienne patiente alors qu'elle souffrait de
graves troubles de la personnalité ou était dans une situation de grande
dépendance. Le fait que Y.________ se trouvait dans un tel état ressortait
notamment du rapport rédigé le 10 novembre 1998 par X.________, de sorte
qu'il aurait dû au moins cesser toute liaison avec elle à cette date. Il
convenait donc de sanctionner l'intéressé en respectant le principe de la
proportionnalité. Le Tribunal administratif a estimé que la mesure prise par
le Conseil d'Etat était adéquate.

C.
Agissant par la voie du recours de droit public, X.________ demande au
Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt du
Tribunal administratif du 23 septembre 2003. Il se plaint que le Tribunal
administratif ait enfreint le principe de l'interdiction de l'arbitraire
consacré par l'art. 9 Cst. Il reproche aussi à l'autorité intimée d'avoir
porté atteinte à sa liberté économique garantie à l'art. 27 Cst. en ne
respectant pas l'art. 36 Cst., en particulier en violant le principe de la
proportionnalité, qui figure aussi à l'art. 5 al. 2 Cst.

Le Tribunal administratif a renoncé à formuler des observations sur le
recours, tout en se référant à l'arrêt attaqué. Le Conseil d'Etat demande au
Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, de rejeter le recours dans
la mesure où il est recevable et de confirmer l'arrêt attaqué.

D.
Par ordonnance du 27 novembre 2003, le Président de la IIe Cour de droit
public a admis la requête d'effet suspensif présentée par X.________.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours
qui lui sont soumis (ATF 129 I 185 consid. 1 p. 188).

Déposé en temps utile et dans les formes prescrites par la loi, le présent
recours remplit les conditions de recevabilité des art. 84 ss OJ, de sorte
que le Tribunal fédéral peut entrer en matière.

2.
Le recourant se plaint que le Tribunal administratif ait violé de différentes
façons le principe de l'interdiction de l'arbitraire consacré par l'art. 9
Cst.

2.1 Une décision est arbitraire lorsqu'elle contredit clairement la situation
de fait, qu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et
indiscuté, ou qu'elle heurte d'une manière choquante le sentiment de la
justice et de l'équité. A cet égard, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la
solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si elle
apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation
effective, adoptée sans motifs objectifs ou en violation d'un droit certain.
De plus, pour qu'une décision soit annulée, il ne suffit pas que sa
motivation soit insoutenable; encore faut-il que cette décision soit
arbitraire dans son résultat. En outre, il n'y a pas arbitraire du seul fait
qu'une autre solution que celle de l'autorité intimée paraît concevable,
voire préférable, (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9, 173 consid. 3.1 p. 178 et la
jurisprudence citée).

2.2 La loi genevoise du 16 septembre 1983 sur l'exercice des professions de
la santé, les établissements médicaux et diverses entreprises du domaine
médical (ci-après: la loi genevoise de 1983 ou LPS 1) a été abrogée par une
loi du 11 mai 2001 ayant le même titre (ci-après: LPS 2), entrée en vigueur
le 1er septembre 2001. Les faits reprochés au recourant s'étant produits
avant le mois de septembre 2001, le Tribunal administratif a appliqué la loi
genevoise de 1983, ce qui est soutenable (cf. Pierre Moor, Droit
administratif, vol. I, 2e éd., Berne 1994, n. 2.5.2.3, p. 170). De toute
façon, les deux lois précitées traitent de la même manière les problèmes
soulevés dans le cas présent. Elles réglementent en particulier l'exercice, à
titre privé, des professions de la santé (art. 1 lettre a LPS 1 et 2a LPS 2).
Elles prévoient des sanctions administratives à l'encontre notamment des
infractions à leurs dispositions ou à celles de leurs règlements ainsi que
d'agissement professionnel incorrect dûment constaté et qualifié comme tel
par la Commission (art. 139 al. 2 lettres a et b LPS 1 et 108 al. 2 lettres a
et b LPS 2). Le Département de l'action sociale et de la santé du canton de
Genève est compétent pour infliger un avertissement, un blâme ou une amende
jusqu'à 50'000 fr. (art. 141 LPS 1 et 110 LPS 2) et le Conseil d'Etat peut
notamment ordonner, dans les cas graves dûment constatés et qualifiés comme
tels par la Commission, la radiation temporaire ou définitive des
professionnels de la santé inscrits dans le registre de leur profession (art.
142 al. 1 lettre a LPS 1 et 111 al. 1 lettre a LPS 2).

2.3 Dans le consid. 1c de l'arrêt attaqué (p. 11/12), le Tribunal
administratif a défini l'agissement professionnel incorrect comme
l'inobservation d'obligations faites à tout praticien d'une profession de la
santé, formé et autorisé à pratiquer conformément au droit en vigueur,
d'adopter un comportement professionnel consciencieux, en l'état du
développement actuel de la science. Il a précisé que cet agissement
professionnel incorrect pouvait notamment résulter d'une infraction aux
règles de l'art, de nature exclusivement technique, par commission, par
omission ou par une violation de l'obligation générale d'entretenir des
relations adéquates avec les patients. Le recourant ne critique pas le
Tribunal administratif à cet égard.

2.4 D'après le recourant, l'autorité intimée serait tombée dans l'arbitraire
en posant de manière absolue la règle selon laquelle un thérapeute ne peut
nouer de relations intimes avec une ancienne patiente lorsque celle-ci
souffre de graves troubles de la personnalité ou dans des situations de
grande dépendance et en considérant que lui-même aurait commis un agissement
professionnel incorrect grave en ayant eu une liaison avec une ancienne
patiente dans cet état, ce qu'il estime contraire à la réalité.

En fait, le Tribunal administratif n'a pas "posé" la "règle" susmentionnée.
Il a repris les indications données par le recourant lui-même le 26 septembre
2000, lorsqu'il a été entendu dans le cadre de la procédure devant la
Commission (procès-verbal de la séance précitée, p. 3), et auxquelles cette
dernière s'est référée dans son préavis du 15 février 2001 (p. 6). Il s'agit
en fait de considérations émises dans un cas précis et non pas d'une règle.

Reste à examiner si le Tribunal administratif est tombé dans l'arbitraire en
estimant que le recourant avait commis un agissement professionnel incorrect
grave en entretenant des relations intimes avec Y.________.

L'autorité intimée paraît avoir interprété les faits de manière sommaire
lorsqu'elle a jugé que Y.________ souffrait de graves troubles de la
personnalité ou se trouvait dans une situation de grande dépendance au moment
de sa liaison avec le recourant, soit de la fin du mois de juin 1998 à l'été
1999. Le recourant a établi pour l'Office cantonal deux rapports concernant
l'état de Y.________ qui couvrent partiellement cette période. Dans le
premier rapport, du 20 juin 1997, il a posé le diagnostic d'une dépression
majeure récurrente chez une personnalité histrionique ainsi que d'une
hypothyroïdie substituée. Dans le second rapport, du 10 novembre 1998, le
recourant a repris ce diagnostic sans toutefois mentionner l'hypothyroïdie
substituée; il a constaté que l'état de Y.________ s'était aggravé et précisé
que la patiente présentait "un trouble de la personnalité rigide, chronique,
entraînant des troubles relationnels graves" dont on ne pouvait pas espérer
la disparition même si les circonstances se modifiaient. Quoique le
diagnostic posé soit lourd, on ne saurait en déduire sans autre que
Y.________ présentait alors un grave trouble de la personnalité. De plus, au
vu du dossier, il n'est pas certain que cette patiente se trouvait dans une
situation de grande dépendance par rapport au recourant: elle avait
d'ailleurs un autre amant et a pris la décision de consulter un nouveau
psychiatre sans en parler au recourant.

Le comportement du recourant n'en est pas pour autant admissible. Ce dernier,
suivi sur ce point par le Tribunal administratif, prétend avoir eu Y.________
en traitement jusqu'au 30 décembre 1997. D'après la patiente, ce traitement
aurait duré jusqu'au 27 avril 1998. Il n'est pas contesté que le recourant et
Y.________ ont eu des relations intimes de la fin du mois de juin 1998 à
l'été 1999, soit après la fin dudit traitement. Cependant, il ressort des
deux rapports que le recourant a établis les 20 juin 1997 et 10 novembre 1998
que Y.________ n'était pas guérie. D'ailleurs, le recourant, qui l'avait
déclarée antérieurement en incapacité totale de travail, ne l'avait pas
considérée apte au travail le 30 décembre 1997, à la fin du traitement. Or,
s'il l'avait estimée guérie, il aurait dû revenir sur son incapacité de
travail. De plus, lorsque le recourant a établi le second rapport, il savait
que Y.________ avait à nouveau entrepris un traitement auprès d'un
psychiatre. Lorsqu'il a été entendu par le Tribunal administratif, le 9
janvier 2003, le recourant a affirmé que Y.________ souffrait d'un trouble
permanent qui justifiait une demande de rente AI. Il ressort donc du dossier,
en particulier de documents rédigés par le recourant, que Y.________ était
encore malade à l'époque de leur liaison. Dès lors, le recourant a eu un
comportement fautif, en entretenant une liaison avec une ancienne patiente
dont l'état continuait d'exiger des précautions si ce n'est des soins. Il ne
saurait se prévaloir de ce que Y.________ n'était plus sa patiente pour
échapper à toute sanction. Le Tribunal administratif n'a donc pas commis
d'arbitraire en considérant que le recourant avait eu une attitude
correspondant à la définition d'agissement professionnel incorrect grave (cf.
le consid. 2.3 ci-dessus).

2.5 Le recourant fait valoir que l'autorité intimée serait par ailleurs
tombée dans l'arbitraire en estimant que lui-même n'aurait pas maîtrisé la
situation lorsque Y.________ était en traitement chez lui. Il prétend que le
reproche qui lui est ainsi fait serait en contradiction avec le dossier.

Il n'est pas contesté que Y.________ est tombée amoureuse du recourant quand
il la soignait et qu'elle lui faisait des avances, comme l'attestent
différentes pièces du dossier. Il s'agissait d'un phénomène de transfert que
les médecins connaissent. Or, dans son préavis du 15 février 2001 (p. 7), la
Commission, qui comprend un grand nombre de professionnels de la santé (art.
11 LPS 1 et 103 LPS 2) - dont en tout cas un psychiatre, selon l'écriture du
Conseil d'Etat du 22 janvier 2004 (p. 11) -, a considéré que, dans cette
situation, le recourant, en sa qualité de psychiatre, "se devait, par
définition, soit d'interrompre la thérapie, soit de demander une supervision
à un confrère, dans la mesure où le thérapeute est responsable de la gestion
de l'idéalisation dont il fait l'objet". C'est une règle de déontologie
médicale que la Commission a rappelée dans le cas particulier du traitement
de Y.________ par le recourant et que le Tribunal administratif a reprise
dans l'arrêt attaqué. On ne voit pas que l'autorité intimée soit tombée dans
l'arbitraire en tenant compte des considérations déontologiques évoquées par
la Commission. En réalité, la perte de maîtrise reprochée au recourant s'est
précisément manifestée dans la façon inappropriée dont il a géré le phénomène
de transfert auquel il était confronté lors du traitement de Y.________. Le
recourant a du reste fait une déclaration significative lorsqu'il a été
entendu, le 26 septembre 2000, dans la procédure devant la Commission: "A la
question de savoir s'il est normal de considérer la patiente comme étant en
rémission, de janvier à octobre 1998, tout en bénéficiant d'une incapacité de
travail à 100%, je réponds que lorsqu'on est amoureux, on ne raisonne pas en
ces termes-là" (procès-verbal de la séance précitée, p. 2). D'ailleurs, en
négligeant de régler à la fin du traitement, le 30 décembre 1997, la question
de l'incapacité de travail de sa patiente, il a montré concrètement qu'il
n'était pas maître de la situation. Ainsi, l'arrêt du Tribunal administratif
n'est pas arbitraire dans la mesure où il considère que le recourant a mal
géré le phénomène de transfert dans le cas Y.________.

3.
Le recourant reproche à l'autorité intimée d'avoir porté atteinte à sa
liberté économique garantie par l'art. 27 Cst. en violation des art. 5 al. 2
et 36 Cst., en particulier du principe de la proportionnalité, en lui
interdisant d'exercer sa profession pendant six mois. Il étaie son
argumentation sur la jurisprudence du Tribunal administratif.

3.1 Selon l'art. 27 al. 1 Cst., la liberté économique est garantie. Elle
comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à une
activité économique lucrative privée et son libre exercice (art. 27 al. 2
Cst.). Cette liberté protège toute activité économique privée, exercée à
titre professionnel et tendant à la production d'un gain ou d'un revenu (cf.
le message du Conseil fédéral du 20 novembre 1996 relatif à une nouvelle
Constitution fédérale, in FF 1997 I 1 ss, p. 176), telle celle de médecin
(cf. dans ce sens l'ATF 118 Ia 175 consid. 1 p. 176).

Aux termes de l'art. 36 al. 1 Cst., toute restriction d'un droit fondamental
doit être fondée sur une base légale; les restrictions graves doivent être
prévues par une loi; les cas de danger sérieux, direct et imminent sont
réservés. Toute restriction d'un droit fondamental doit être justifiée par un
intérêt public ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui (art. 36
al. 2 Cst.) et proportionnée au but visé (art. 36 al. 3 Cst.). L'essence des
droits fondamentaux est inviolable (art. 36 al. 4 Cst.).

Le recourant invoque aussi l'art. 5 al. 2 Cst. dans la mesure où il consacre
le principe de la proportionnalité. Le droit qu'il peut déduire de cette
disposition se confond en l'espèce avec celui qui découle de l'art. 36 al. 3
Cst. Le principe de la proportionnalité exige qu'une mesure restrictive soit
apte à produire les résultats escomptés et que ceux-ci ne puissent être
atteints par une mesure moins incisive; en outre, il interdit toute
limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre
celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (ATF 126 I 219 consid.
2c p. 222).

La sanction litigieuse, qui empêche le recourant d'exercer sa profession
pendant six mois, constitue une restriction grave à sa liberté économique
(cf. dans ce sens Walter Kälin, Das Verfahren der staatsrechtlichen
Beschwerde, 2e éd., Berne 1994, p. 182) et doit reposer sur une loi au sens
formel (cf. l'art. 36 al. 1 Cst.). Le Tribunal fédéral examine librement si
tel est le cas et revoit de même avec plein pouvoir d'examen si les exigences
de l'intérêt public (cf. l'art. 36 al. 2 Cst.) et de la proportionnalité (cf.
l'art. 36 al. 3 Cst.) sont respectées (ATF 123 I 212 consid. 3a p. 217; 120
Ia 67 consid. 3b p. 72, 74 consid. 5 p. 79; cf. aussi Walter Kälin, op. cit.,
p. 176 ss). Le recourant ne conteste pas, à juste titre, la base légale sur
laquelle la mesure critiquée repose. Il nie en revanche que cette sanction
respecte le principe de la proportionnalité, en particulier qu'elle soit
justifiée par un intérêt public suffisant.

3.2 Selon le recourant, la sanction litigieuse pourrait compromettre
définitivement les quelque cinquante thérapies qu'il mène actuelle- ment,
puisqu'il exerce sa profession seul et ne pourrait pas se faire remplacer par
un autre psychiatre dans son cabinet. De plus, elle pourrait entraîner la
perte de sa clientèle et aboutir à la fermeture de son cabinet, dont il ne
pourrait plus assumer les charges (loyer mensuel de 2'800 ). Le recourant
prétend en effet qu'il ne dispose d'aucune fortune et que son revenu de
médecin s'élève à environ 85'000 fr. par année. Il avait déjà développé cette
argumentation devant l'autorité intimée. Le recourant invoque aussi la
jurisprudence du Tribunal administratif, en particulier un arrêt du 15 avril
2003. Dans cette affaire, un médecin généraliste s'était vu infliger une
suspension de l'autorisation de pratiquer d'une durée d'un mois pour avoir
entretenu des relations intimes avec une patiente qu'il traitait pour une
dépression chronique.

Dans l'arrêt attaqué, l'autorité intimée n'a pas pris en compte la situation
personnelle du recourant, contrairement à la procédure qu'elle avait adoptée
dans la cause susmentionnée, jugée le 15 avril 2003, où elle a examiné les
possibilités de remplacement du médecin sanctionné ainsi que la perte
financière qu'il subirait en raison de la mesure infligée.

On s'étonne que, dans la présente espèce, le Tribunal administratif ne se
soit nullement soucié de savoir comment le recourant était remplacé durant
ses absences ou quelles étaient sa situation de famille et ses possibilités
financières exactes, d'autant plus que les informations que celui-ci a
données sur ce dernier point contredisent apparemment des éléments du
dossier. Le recourant prétend ainsi être sans fortune, alors que la lecture
de certaines pièces du dossier permet de penser qu'il était propriétaire
d'une résidence secondaire en France en 1990 et d'une maison en Grèce en
1998. Le Tribunal administratif aurait donc dû vérifier l'état précis des
finances du recourant pour s'assurer que la mesure prononcée soit
proportionnée au but poursuivi. Comme les conséquences de la sanction
infligée sur la clientèle et sur la situation financière du recourant n'ont
fait l'objet d'aucune mesure d'instruction et qu'elles n'ont pas été prises
en considération dans l'arrêt attaqué, il n'est pas possible de savoir si le
principe de la proportionnalité a été respecté en l'espèce. Lacunaire,
l'arrêt attaqué est arbitraire sur ce point. C'est uniquement dans ce sens
qu'il y a lieu d'admettre le moyen du recourant, lorsqu'il s'en prend au
respect du principe de la proportionnalité par l'autorité intimée.

4.
Vu ce qui précède, le recours doit être partiellement admis et l'arrêt
attaqué doit être annulé.
Obtenant partiellement gain de cause, le recourant doit supporter un
émolument judiciaire réduit (art. 156 al. 3 OJ). Le canton de Genève dont
l'intérêt pécuniaire n'est pas en cause n'a pas à supporter d'émolument
judiciaire (art. 156 al. 2 OJ).

Le recourant a droit à des dépens réduits (art. 159 al. 1 et 3 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est partiellement admis et l'arrêt du Tribunal administratif du
canton de Genève du 23 septembre 2003 est annulé.

2.
Un émolument judiciaire de 1'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le canton de Genève versera au recourant une indemnité de 1'000 fr. à titre
de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au
Conseil d'Etat et au Tribunal administratif du canton de Genève.

Lausanne, le 19 mars 2004

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: