Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2P.256/2003
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2P.256/2003 /dxc

Arrêt du 25 novembre 2003
IIe Cour de droit public

MM. et Mme les Juges Wurzburger, Président,
Yersin et Merkli.
Greffière: Mme Ieronimo Perroud.

Résid'EMS, Association pour le bien-être des Résidents en établissements
médico-sociaux (EMS), case postale 226, 1000 Lausanne 12,
requérante,

contre

Conseil d'Etat du canton de Vaud, Château cantonal, 1014 Lausanne.

Demande de révision de l'arrêt du Tribunal fédéral du 24.06.2003
(2P.236/2001; 2P.83/2002),

Faits:

A.
Dans le canton de Vaud, le coût des prestations de soins et de l'hébergement
des résidents d'établissements médico-sociaux a d'abord été réglé par voie
conventionnelle entre l'Etat de Vaud et les différents partenaires
intéressés, ce jusqu'à la fin de 1996, puis de 1997 à fin 2000 par divers
arrêtés pris par le Conseil d'Etat. Ces arrêtés ont fait l'objet de plusieurs
recours au Conseil fédéral et au Tribunal fédéral, en particulier de
l'Association pour le bien-être des Résidents en établissements
médico-sociaux (ci-après: Résid'EMS) et consorts. Dès 2001, un régime
conventionnel a pu être rétabli, réglant le coût des prestations de soins et
socio-hôtelières. Ainsi, après avoir conclu le 28 mai 2001, avec divers
partenaires, une "Convention fixant les tarifs des prestations de soins
fournies par les établissements médico-sociaux et les divisions pour malades
chroniques des hôpitaux et des centres de traitement et de réadaptation",
dans le courant de l'été 2001, l'Etat de Vaud, représenté par le Département
de la santé et de l'action sociale, l'Association vaudoise des établissements
médico-sociaux, la Fédération patronale des établissements médico-sociaux
vaudois, la Fédération des hôpitaux vaudois et les Hospices cantonaux ont
conclu une "Convention relative aux tarifs pour 2001 mis à la charge des
résidents et des régimes sociaux, lors d'hébergement dans les établissements
médico-sociaux et les divisions pour malades chroniques des hôpitaux et des
centres de traitement et de réadaptation reconnus d'intérêt public"
(ci-après: convention socio-hôtelière 2001). L'annexe I à cette convention
donne la liste des prix journaliers par établissement, la moyenne (lits C)
s'établissant à 123 fr. 65.

B.
Après avoir déposé, le 17 août 2001, un recours devant le Conseil fédéral
dirigé, entre autres, contre les deux conventions précitées, Résid'EMS et
consorts ont également attaqué devant le Tribunal fédéral, le 4 septembre
2001, la convention socio-hôtelière 2001, en demandant en particulier
d'annuler le tarif contenu à l'annexe I et d'ordonner le remboursement des
sommes perçues dépassant le montant journalier 2000, éventuellement indexé,
sans le report des frais de soins 2000 (2P.236/2001).

C.
Le 9 novembre 2001, une nouvelle "Convention fixant les tarifs des
prestations de soins fournies par les établissements médico-sociaux et les
divisions pour malades chroniques des hôpitaux et des centres de traitement
et de réadaptation" a été conclue pour l'année 2002 entre les mêmes
partenaires. Le 1er mars 2002, l'Etat de Vaud, toujours représenté par le
Département de la santé et de l'action sociale, a conclu, avec les mêmes
partenaires que l'année précédente, une "Convention relative aux tarifs pour
2002 mis à la charge des résidents et des régimes sociaux, lors d'hébergement
dans les établissements médico-sociaux et les divisions pour malades
chroniques des hôpitaux et des centres de traitement et de réadaptation
reconnus d'intérêt public" (ci-après: convention socio-hôtelière 2002).
L'annexe I à cette convention donne la liste des prix journaliers par
établissement, la moyenne (lits C) s'établissant à 127 fr. 70. Son contenu
est sensiblement identique à celui de la convention conclue pour 2001.

D.
Le 8 avril 2002, Résid'EMS et consorts ont déposé un recours devant le
Tribunal fédéral en demandant notamment d'annuler l'annexe I de la convention
socio-hôtelière 2002 et de rembourser les sommes perçues dépassant le montant
du tarif journalier 2000, éventuellement indexé, sans le report des frais de
soins 2000 (2P.83/2002). Le 18 avril 2002, les intéressés ont également
recouru au Conseil fédéral contre, entre autres, ladite convention.

E.
Après avoir procédé à des échanges de vues avec le Conseil fédéral au sujet
de la répartition de leurs compétences, le Tribunal fédéral - statuant le
premier - a, par arrêt du 24 juin 2003 (2P.236/2001 et 2P.83/2002), prononcé
la jonction des deux recours en tant qu'ils portaient sur les conventions
socio-hôtelières 2001 et 2002 et les a rejetés dans la mesure où ils étaient
recevables.

F.
Le 8 octobre 2003, Résid'EMS a demandé la révision de l'arrêt du Tribunal
fédéral du 24 juin 2003 en invoquant les motifs tirés des art. 136 let. d et
137 let. b OJ.
Il n'a pas été requis d'observations de l'autorité intimée.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
La demande de révision est fondée sur les art. 136 let. d et 137 let. b OJ.
Elle a été formée dans les délais fixés à l'art. 141 al. 1 let. a et b OJ et
indique, conformément à l'art. 140 OJ, en quoi consiste la modification de
l'arrêt demandée. Il y a donc lieu d'entrer en matière.

2.
2.1 Aux termes de l'art. 136 let. d OJ, il y a lieu à révision "lorsque, par
inadvertance, le tribunal n'a pas apprécié des faits importants qui
ressortent du dossier". Le verbe "apprécier", utilisé dans le texte français,
est ambigu et doit être compris - conformément au texte allemand - dans le
sens de "prendre en considération"; l'inadvertance, au sens de l'art. 136
let. d OJ, suppose que le juge ait omis de prendre en considération une pièce
déterminée, versée au dossier, ou l'ait mal lue, s'écartant par mégarde de sa
teneur exacte; elle se distingue de la fausse appréciation soit des preuves
administrées devant le Tribunal fédéral, soit de la portée juridique des
faits établis. L'inadvertance doit se rapporter au contenu même du fait, à sa
perception par le tribunal, mais non à son appréciation juridique; elle
consiste soit à méconnaître, soit à déformer un fait ou une pièce. La
révision n'entre donc pas en considération lorsque c'est sciemment que le
juge a refusé de tenir compte d'un certain fait, parce qu'il le tenait pour
non décisif, car un tel refus relève de l'appréciation en droit. Enfin, le
motif de révision de l'art. 136 let. d OJ ne peut être invoqué que si les
faits qui n'ont pas été pris en considération sont "importants"; il doit
s'agir de faits pertinents, susceptibles d'entraîner une décision différente
de celle qui a été prise et dans un sens favorable au requérant (ATF 122 II
17 consid. 3 et les références citées).

2.2 En vertu de l'art. 137 let. b OJ, la demande de révision est recevable
lorsque le requérant a connaissance subséquemment de faits nouveaux
importants ou trouve des preuves concluantes qu'il n'avait pas pu invoquer
dans la procédure précédente. Sont "nouveaux", au sens de l'art. 137 let. b
OJ, les faits qui, quoique existants au moment où ils pouvaient encore être
allégués dans la procédure principale, n'étaient cependant pas connus du
requérant malgré toute sa diligence. Ces faits nouveaux doivent en outre être
importants, c'est-à-dire être de nature à modifier l'état de fait qui est à
la base de la décision entreprise et conduire à un jugement différent en
fonction d'une appréciation juridique exacte (ATF 118 II 199 consid. 5; 110 V
138 consid. 2). Les preuves, quant à elles, doivent servir à établir soit des
faits nouveaux importants qui motivent la révision, soit des faits qui certes
étaient connus lors de la précédente procédure, mais n'ont pas pu être
prouvés, au détriment du requérant. Si les moyens nouveaux sont destinés à
prouver des faits déjà allégués, le requérant doit démontrer également qu'il
était dans l'impossibilité de les faire valoir dans la procédure précédente.
Une preuve est considérée comme concluante lorsqu'on doit admettre qu'elle
aurait conduit le juge à statuer différemment s'il en avait eu connaissance
dans la procédure principale. Ce qui est décisif, c'est que le moyen de
preuve serve non pas simplement à apprécier, mais à établir les faits. Ainsi,
il n'y a pas motif à révision du seul fait que le tribunal paraît avoir mal
interprété des faits connus déjà lors de la procédure principale.
L'appréciation inexacte doit être, bien plutôt, la conséquence de l'ignorance
ou de l'absence de preuve se rapportant à des faits essentiels pour le
jugement (ATF 127 V 358 consid. 5b; 118 II 199 consid. 5; 110 V 138 consid.
2).

3.
3.1 Dans l'arrêt dont la révision est demandée, le Tribunal fédéral a
considéré notamment que l'on pouvait exclure que l'augmentation des prix
journaliers par établissement figurant à l'annexe I de la convention
socio-hôtelière 2001 comprenne un report du coût des prestations de soins
relevant de la LAMal. Cela ressortait en premier lieu du fait que la méthode
"SOHO" (méthode d'évaluation des charges financières de l'hébergement
médico-social), introduite dès 1998, avait conduit à l'abandon du système dit
des "vases communicants" (soit une enveloppe budgétaire globale dont était
déduit le financement des assureurs-maladie et les subventions de l'Etat, le
solde représentant la part facturée aux résidents au titre de frais
socio-hôteliers). Cette appréciation était également confortée par le fait
que, dans sa décision du 20 décembre 2000, le Conseil fédéral avait déjà
admis que la liste des prestations de soins établie par le canton
correspondait à celles qui devaient être prises en charge par
l'assurance-maladie obligatoire ainsi que par l'adoption, le 19 juin 2001,
par le Grand Conseil vaudois d'un décret qui, en instaurant une subvention
cantonale pour couvrir la part du coût des soins qui ne pouvait être mise à
la charge des résidents, en assurait le financement par le canton
indépendamment du tarif socio-hôtelier. Le Tribunal fédéral a également
considéré qu'un juste équilibre entre le niveau des prestations et leur coût
pouvait véritablement être garanti lorsque le tarif reposait - comme dans le
cas d'espèce - sur une base consensuelle. Par ailleurs, le fait que le cercle
des parties concernées ne se recoupait pas exactement dans l'une et l'autre
convention (soins/socio-hôtelier) offrait des garanties supplémentaires sur
l'objectivité et la rigueur du tarif socio-hôtelier. A cet égard, le Tribunal
fédéral a relevé que l'Etat - qui assumait les frais socio-hôteliers de 80
pour cent des résidents - avait avantage à maintenir ces coûts dans des
limites strictes. Enfin, après avoir comparé les tarifs soins et
socio-hôteliers 2001 à ceux de l'année 1996, il a constaté que l'augmentation
des prix socio-hôteliers était faible, si ce n'est insignifiante. Sur la base
de tous ces éléments, l'autorité de céans a constaté que l'on pouvait exclure
avec une grande vraisemblance que le tarif socio-hôtelier 2001 comprenne un
report du coût des prestations de soins relevant de la LAMal.
Pour l'année 2002 - vu l'identité du contenu des conventions ainsi que celle
des critiques soulevées -, le Tribunal fédéral a renvoyé aux considérants
développés au sujet de la convention 2001.

3.2 La requérante reproche au Tribunal fédéral d'avoir méconnu le fait que la
convention socio-hôtelière 1996 comportait déjà de manière inadmissible une
part de frais de soins, ce que prouveraient les divers documents allégués
dans la présente cause. Elle soutient que ladite convention n'était pas, lors
de la précédente procédure, objet du litige: elle n'avait donc aucune raison
de faire valoir ou de documenter à l'époque le fait que le tarif
socio-hôtelier 1996 comprenait déjà une part de frais de soins. Elle affirme
ensuite que, dans ses précédents recours, son but était de démontrer que
l'augmentation du tarif journalier moyen des prestations socio-hôtelières
2001, par rapport à celui en vigueur pour 2000, ne pouvait pas être justifiée
par des augmentations salariales, mais bien par un report du coût des
prestations de soins. Cette allégation serait confirmée par les chiffres
relatifs auxdites augmentations salariales et publiés dans l'annuaire des
statistiques sanitaires du canton de Vaud 2002 du 8 mai 2003. En ignorant
l'existence même de cette augmentation, pourtant significative et
incontestée, le Tribunal fédéral n'aurait donc pas, par inadvertance,
apprécié un fait important qui ressortait du dossier.
Dans son arrêt du 24 juin 2003, l'autorité de céans s'est prononcée sur le
bien-fondé des barèmes socio-hôteliers 2001 et 2002 et non sur la
justification d'une éventuelle augmentation. Cette dernière ne constituait,
par ailleurs, qu'un des éléments d'appréciation. En effet, pour parvenir à la
conclusion que l'on pouvait exclure avec une grande vraisemblance que le
tarif socio-hôtelier contesté comprenne un report du coût des prestations de
soins, le Tribunal fédéral s'est fondé sur divers éléments. Il a tenu compte
notamment de l'introduction en 1998 de la méthode SOHO, méthode considérée
comme fiable, ainsi que de l'adoption d'un décret cantonal instaurant une
subvention pour couvrir la part du coût des soins qui ne pouvait être mise à
la charge des résidents. Il a aussi pris en considération le fait que dans sa
décision du 20 décembre 2000, le Conseil fédéral avait déjà admis que la
liste des prestations de soins établie par le canton correspondait à celles
qui devaient être prises en charge par l'assurance-maladie obligatoire. Il a
également relevé que le tarif reposait dorénavant sur une base consensuelle,
ce qui offrait des garanties supplémentaires sur son objectivité et sa
rigueur. Enfin, en comparant les tarifs 1996 et 2001, considérés comme
proches parce qu'adoptés tous les deux par voie conventionnelle (des arrêtés
ayant été promulgués pour les années 1997 à 2000), le Tribunal fédéral a
estimé que le tarif 2001 ne pouvait être considéré comme excessif, vu
l'augmentation du coût de la vie survenue dans l'intervalle. Même si l'on
peut discuter de cette motivation, le fait qu'elle ne soit pas partagée par
la requérante ne saurait entraîner la révision de l'arrêt contesté. En effet,
la voie de la révision n'est pas ouverte pour contester l'appréciation
juridique contenue dans un arrêt du Tribunal fédéral. En réalité, la
requérante se contente de critiquer l'arrêt contesté. Elle n'établit
nullement que le Tribunal fédéral aurait approuvé, en méconnaissant par
inadvertance des faits importants résultant du dossier, un tarif
socio-hôtelier comprenant non seulement des prestations de soins, mais en
plus de soins tombant sous le coup de la LAMal et jouissant de la protection
tarifaire; or, seuls ces derniers doivent être exclus du tarif
socio-hôtelier. De même, elle n'établit pas que la subvention cantonale ne
couvrirait pas l'ancien report annulé par le Conseil fédéral. En ce qui
concerne l'annuaire des statistiques sanitaires, ce document, daté du 8 mai
2003, s'il était vraiment déterminant, aurait pu être produit avant que ne
soit rendu l'arrêt en cause du 24 juin 2003. La requérante ne soutient pas
avoir été dans l'impossibilité de le fournir dans la procédure précédente.
Enfin, il y a lieu de relever que la question des augmentations de salaires
avait déjà été évoquée dans les précédents recours. A ce sujet, la requérante
ne prétend pas, au surplus, que les chiffres retenus dans l'arrêt du 24 juin
2003 soient contraires à une pièce du dossier, voire même à ceux contenus
dans l'annuaire susmentionné.

4.
Vu ce qui précède, la demande de révision, manifestement mal fondée, doit
être rejetée, sans délibération publique (art. 143 al. 1 OJ) et sous suite de
frais à la charge de la requérante (art. 156 al. 1 OJ).

Par ces motifs, vu l'art. 143 al. 1 OJ,

le Tribunal fédéral prononce:

1.
La demande de révision est rejetée.

2.
Un émolument judiciaire de 1'000 fr. est mis à la charge de la requérante.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie à la requérante et au Conseil d'Etat
du canton de Vaud ainsi que, pour information, à l'Office fédéral de la
justice.

Lausanne, le 25 novembre 2003

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: