Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen P 21/2002
Zurück zum Index Sozialrechtliche Abteilungen 2002
Retour à l'indice Sozialrechtliche Abteilungen 2002


P 21/02

Arrêt du 8 janvier 2003
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari.
Greffière : Mme von Zwehl

B.________, recourant,

contre

Caisse cantonale vaudoise de compensation AVS-AI-APG, Agence communale
d'assurances sociales, place Chauderon 7, 1000 Lausanne 9, intimée

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 28 septembre 2001)

Faits:

A.
B. ________ bénéficie de prestations complémentaires de l'AI. Depuis le 1er
décembre 1997, il est locataire d'un appartement à B.________ dont le loyer
annuel net s'élève à 14'400 fr. et dans lequel il vit avec sa seconde épouse,
ainsi que sa fille cadette, née en 1976, qui poursuit des études
universitaires à Genève.

Par décision du 25 juin 2001, la Caisse cantonale vaudoise de compensation
AVS (ci-après: la caisse) a avisé l'assuré qu'elle allait ramener à 1'939
fr., dès le 1er juillet 2001, le montant mensuel des prestations
complémentaires versées jusqu'alors. A partir cette date en effet, sa fille
avait atteint l'âge de 25 ans révolus et n'avait plus droit à une rente
complémentaire; elle n'était ainsi plus comprise dans le calcul des
prestations complémentaires de son père, de sorte que le montant du loyer
devait être réparti entre toutes les personnes occupant l'appartement et ne
pouvait plus être pris en compte - au titre des dépenses reconnues - dans sa
totalité, mais seulement à concurrence des 2/3 (soit 9'600 fr.).

B.
L'assuré a déféré cette décision au Tribunal des assurances, en contestant
que la présence de sa fille dans son appartement puisse constituer un motif
valable pour lui refuser la déduction maximale possible du loyer. En outre,
bénéficiaire d'une bourse d'études annuelle de 6'350 fr. seulement, cette
dernière n'était pas en mesure de lui verser une participation au loyer; en
contrepartie de la gratuité du logement, elle aidait à l'accomplissement des
tâches ménagères.

Par jugement du 28 septembre 2001, le tribunal a rejeté le recours.

C.
B.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont
il requiert l'annulation, en reprenant les arguments soulevés en procédure
cantonale.

La caisse conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
1.1 Pour les personnes qui ne vivent pas en permanence ou pour une longue
période dans un home ou dans un hôpital (personnes vivant à domicile), les
dépenses reconnues sont notamment le loyer d'un appartement et les frais
accessoires y relatifs (art. 3b al. 1 let. b LPC). Les cantons fixent le
montant des frais de loyer déductible jusqu'à concurrence de 13'800 fr. par
année pour les couples (art. 5 al. 1 let. b LPC).

1.2 L'article 16c OPC précise toutefois que lorsque des appartements ou des
maisons familiales sont aussi occupés par des personnes non comprises dans le
calcul des prestations complémentaires, le loyer doit être réparti entre
toutes les personnes; les parts de loyers des personnes non comprises dans le
calcul des prestations complémentaires ne sont pas prises en compte lors du
calcul de la prestation complémentaire annuelle (al. 1). En principe, le
montant du loyer est réparti à parts égales entre toutes les personnes (al.
2).

Dans un arrêt publié aux ATF 127 V 16, le Tribunal fédéral des assurances a
jugé cette disposition - entrée en vigueur le 1er janvier 1998 (RO 1997 2961)
- conforme à la loi dans la mesure où elle vise à empêcher le financement
indirect de personnes non comprises dans le calcul des prestations
complémentaires. Il a cependant également affirmé, dans un arrêt ultérieur
(VSI 2001 p. 234, spéc. p. 237 consid. 2b), que le nouvel article 16c OPC
laisse une place à une répartition différente du loyer et que des exceptions
- telles que la jurisprudence les avait déjà admises sous l'ancienne pratique
administrative - demeurent possibles dans le cadre du nouveau droit. Tel est
le cas lorsque le ménage commun, sans contrepartie financière, découle d'une
obligation d'entretien de droit civil (par exemple dans le cas d'une assurée
qui partage le logement avec son enfant mineur né hors mariage et non compris
dans le calcul des prestations complémentaires; cf. l'arrêt VSI précité).
Dans des circonstances particulières, une obligation d'ordre moral peut aussi
justifier de faire une exception à la règle (voir à ce sujet l'arrêt publié
aux ATF 105 V 271 dans lequel la Cour de céans a admis une dérogation à la
répartition à parts égales du loyer d'un logement loué en commun pour une
assurée qui, après un séjour en milieu psychiatrique, avait loué un
appartement où l'infirmier qui l'avait soignée était venu la rejoindre afin
de s'occuper d'elle, cette dernière ne pouvant pas vivre sans la surveillance
constante d'un tiers).

2.
En l'espèce, dès lors que la fille du recourant était âgée de 25 ans révolus
au 1er juillet 2001 - soit l'âge limite au-delà duquel le droit à une rente
pour enfant de l'AI s'éteint (art. 35 al. 1 LAI en relation avec l'art. 25
al. 5 LAVS) -, elle n'est plus incluse dans le calcul des prestations
complémentaires annuelles de son père (art. 3a al. 4 LPC a contrario). Selon
la règle prévue à l'art. 16c OPC, ce dernier doit donc se laisser imputer une
répartition du montant du loyer entre les personnes faisant ménage commun
avec lui, sous réserve de pouvoir se prévaloir de l'une ou l'autre des
exceptions admises par la jurisprudence citée ci-dessus.

3.
Si l'on examine la situation au regard du droit civil, le recourant n'est
plus tenu à une obligation d'entretien envers sa fille majeure. L'art. 277
al. 2 CC prévoit certes que les père et mère doivent subvenir à l'entretien
de leur enfant au-delà de sa majorité (dix-huit ans) si celui-ci n'a pas
encore acquis de formation appropriée, mais cette obligation ne subsiste
qu'aussi longtemps où les circonstances permettent de l'exiger d'eux. En ce
sens, elle est limitée par les conditions économiques et les ressources des
parents (Philippe Meier, Martin Stettler, Droit civil, vol. VI/2, Les effets
de la filiation, p. 319 et ss); selon la jurisprudence du Tribunal fédéral,
on ne peut même exiger un tel entretien que dans la mesure où, après prise en
compte de la contribution d'entretien à l'enfant majeur, le débiteur dispose
encore d'un revenu dépassant d'environ 20% le minimum vital au sens large
(Pra 2000 n° 123 p. 719). Or, cette condition ne se trouve justement pas
réalisée dans le cas d'un bénéficiaire de prestations complémentaires à l'AVS
ou à l'AI.

Il n'y a pas non plus lieu de reconnaître, dans le cas particulier,
l'existence d'une obligation d'ordre moral de B.________ envers sa fille.
Pour compréhensible et louable que soit l'attitude du prénommé de vouloir
loger sa fille majeure encore en formation, on n'est pas en présence d'une
situation assimilable à celle qui a donné lieu à l'arrêt ATF 105 V 271. Cela
est d'autant moins le cas que les dispositions civiles régissant l'obligation
d'entretien des parents (lesquelles visent en priorité l'intérêt de
l'enfant), n'imposent même plus, comme on l'a vu, à un père se trouvant dans
les circonstances économiques du recourant, d'assumer les besoins courants et
les frais engendrés par la formation de son enfant majeur.

Enfin, on ne saurait y voir, comme le laisse entendre le recourant, une
entorse à l'égalité des chances. Il existe en effet des aides spécifiques de
l'Etat destinés à permettre à des enfants majeurs d'entreprendre et de mener
à terme une formation supérieure dans les cas où ni le père ni la mère ne
peuvent assumer cette charge (cf. art. 66 al. 1 Cst; Regina Kiener, Bildung,
Forschung und Kultur, in: Droit constitutionnel suisse, Zurich 2001, p. 904
n. 2). Telle n'est pas la vocation des prestations complémentaires qui ont
pour seul but d'assurer aux bénéficiaires de rentes AVS ou AI des moyens
d'existence essentiels (art. 2 al. 1 LPC). On relèvera également que l'art.
25 de la Loi vaudoise du 11 septembre 1973 sur l'aide aux études et à la
formation professionnelle donne la possibilité aux étudiants de demander une
augmentation de la bourse allouée si un changement de situation est propre à
en rendre le montant insuffisant. Pour terminer, on peut encore
raisonnablement exiger d'une étudiante qu'elle participe à sa subsistance en
exerçant une activité lucrative durant son temps libre.
Compte tenu de ce qui précède, c'est à bon droit que tant la caisse que les
premiers juges ont considéré que le recourant ne pouvait se prévaloir d'aucun
motif permettant de déroger à la répartition du loyer prévue par l'art. 16c
OPC. En définitive, le partage du loyer à parts égales (art. 16c al. 2 OPC)
équivaut à faire supporter à la fille du recourant une charge locative d'un
montant mensuel de 400 fr. [(14'400 - 9'600) : 12], ce qui reste dans une
limite raisonnable.

Le recours se révèle ainsi mal fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du
canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 8 janvier 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la IVe Chambre:   La Greffière: