Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen B 57/2002
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B 57/02

Arrêt du 19 août 2003
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Meyer et Kernen. Greffier: M. Wagner

Fondation collective LPP de la Rentenanstalt, General-Guisan-Quai 40, 8022
Zürich, recourante,

contre

V.________, intimé, représenté par les Syndicats Chrétiens
Interprofessionnels, rue des Finettes 22, 1920 Martigny

Tribunal cantonal des assurances, Sion

(Jugement du 29 mai 2002)

Faits:

A.
A.a V.________ a travaillé jusqu'au 30 novembre 1992 pour le compte de
X.________ SA. La société avait confié à la Fondation commune de l'UBS, selon
convention d'affiliation et plan de prévoyance 4179.001 et 4179.002, la
réalisation de la prévoyance professionnelle en faveur de ses employés. Dès
le 1er octobre 1998, les obligations découlant de la convention et du plan de
prévoyance ont été reprises par la fondation collective LPP de la
Rentenanstalt (la fondation).

V. ________ a présenté une incapacité de travail totale à partir du 23
décembre 1991, puis de 50 % dès le 29 juin 1992. Par décision du 7 janvier
1994, les organes d'exécutions de l'AI lui ont accordé une demi-rente simple
d'invalidité à dater du 1er août 1992 sur la base d'une incapacité de gain de
50 %. Cette prestation a été remplacée à partir du 1er septembre 1996 par une
moitié de rente ordinaire d'invalidité pour couple (invalidité de 40 % de
l'assuré et de 100 % de son épouse), selon décision du 6 septembre 1996.

Sur la base de la perte de gains de 50 %, l'institution de prévoyance a
accordé à V.________ à partir du 23 décembre 1993 une rente d'invalidité de
6'920 fr. 40 par an; la rente a été portée à 7'188 fr. 60 à partir du 1er
janvier 1996 au titre de l'adaptation au coût de la vie.  Compte tenu de la
réduction du taux d'invalidité à 40 %, le montant de la rente a été ramené à
5'751 fr. à dater du 1er septembre 1996, puis fixé à 5'773 fr. 20 dès le 1er
janvier 1997 au titre de l'adaptation au coût de la vie. Ces prestations
étaient calculées sur la base d'une rente entière d'invalidité correspondant
à 25 % du salaire annuel AVS - en l'occurrence 55'360 fr. - et d'une
invalidité supérieure ou égale aux deux tiers donnant droit à une rente
entière.

A.b Dans le cadre de la révision d'office du droit à la rente, l'Office AI du
canton du Valais a constaté que l'état de santé de V.________ s'était aggravé
et a reconnu qu'il présentait une invalidité de 100 % dès le mois de décembre
1998, par décision du 3 avril 2000.

V. ________ a requis la fondation d'adapter ses prestations au taux
d'invalidité reconnu par l'AI, avec effet au 1er décembre 1998, et de lui
verser les arriérés de rentes. La fondation a informé V.________ que
l'aggravation de l'invalidité au taux de 100 %, dont elle avait à répondre,
lui donnait droit à une rente d'invalidité de 8'335 fr. par an du 1er au 31
décembre 1998, de 8'367 fr. du 1er janvier au 31 décembre 2000 et de 8'588
fr. à partir du 1er janvier 2001; elle déterminait le montant de ces
prestations sur la base du règlement, s'agissant des 40 % initiaux
d'invalidité, et sur la base de la LPP, pour les 60 % d'invalidité
supplémentaires présentés à partir du 1er décembre 1998.

B.
V.________ a ouvert action devant le Tribunal cantonal des assurances du
canton du Valais et conclu implicitement à l'octroi d'une rente d'invalidité
d'un montant supérieur, à partir du 1er décembre 1998.

Par jugement du 29 mai 2002, le tribunal a condamné la fondation à verser à
V.________, dès le 1er décembre 1998, une rente d'invalidité mensuelle de
1'173 fr., l'indexation périodique au renchérissement du coût de la vie
demeurant réservée.

C.
La fondation interjette recours de droit administratif contre ce jugement,
dont elle demande l'annulation.

V. ________ conclut au versement d'une rente d'un montant supérieur et à
l'octroi de dépens pour la procédure cantonale. De son côté, l'Office fédéral
des assurances sociales propose que le recours soit rejeté.

Considérant en droit:

1.
La contestation ici en cause relève des autorités juridictionnelles
mentionnées à l'art. 73 LPP, tant du point de vue de la compétence ratione
temporis que de celui de la compétence ratione materiae (ATF 128 II 389
consid. 2.1.1, 128 V 258 consid. 2a, 120 V 18 consid. 1a et les références),
et le recours de droit administratif est recevable de ce chef.

2.
Dans ses déterminations, l'intimé conclut à ce que la fondation soit
condamnée à lui allouer une rente d'invalidité d'un montant supérieur et des
dépens pour la procédure cantonale.

De telles conclusions constituent une demande reconventionnelle, assimilable
à un recours joint. Or, l'institution du recours joint au recours de droit
administratif est inconnue. La partie qui, comme en l'espèce, n'a pas
interjeté recours de droit administratif dans le délai légal, ne peut que
proposer l'irrecevabilité ou le rejet du recours formé par la partie adverse.
Elle n'a plus la faculté de prendre des conclusions indépendantes (ATF 124 V
155 consid. 1, 114 V 245 consid. 4 et les références). Toutefois, lorsque le
litige concerne l'octroi ou le refus de prestations d'assurance, comme c'est
le cas ici, le Tribunal fédéral des assurances peut s'écarter des conclusions
des parties, à l'avantage ou au détriment de celles-ci (art. 132 let. c OJ).
Rien n'empêche par conséquent la partie intimée de développer dans sa réponse
au recours une argumentation qui conduira éventuellement le juge à réformer à
son avantage la décision entreprise. Mais ces suggestions n'ont pas la valeur
de conclusions formelles.

3.
Est litigieux, en l'espèce, le montant de la rente d'invalidité due par la
fondation à V.________ à partir du 1er décembre 1998.

3.1 Il est constant, et les parties ne le contestent pas, qu'il existe une
relation d'étroite connexité temporelle et matérielle entre l'invalidité
totale présentée par l'intimé, à partir du 1er décembre 1998, et l'incapacité
de travail dont la cause est à l'origine de celle ayant donné droit aux
prestations réglementaires initiales.
Les premiers juges ont retenu que la recourante devait répondre de
l'aggravation de l'invalidité présentée par l'intimé à partir du 1er décembre
1998 selon les dispositions réglementaires et le plan de prévoyance 4179.001
et 4179.002.
La fondation reconnaît qu'elle doit répondre de l'aggravation de l'invalidité
présentée à partir du 1er décembre 1998, mais entend limiter ses prestations,
pour ce pourcentage supplémentaire, aux montants minima prévu par la LPP.
L'intimé est d'avis que les prestations réglementaires devraient être
supérieures à celles fixées par les premiers juges.

3.2 En tant qu'exigence minimale (art. 6 LPP) de la prévoyance obligatoire
des salariés et des chômeurs au sens des art. 2 s. LPP, l'art. 23 LPP fonde
le droit à une rente d'invalidité des personnes invalides qui étaient
assurées lors de la survenance de l'incapacité de travail dont la cause est à
l'origine de l'invalidité (art. 23 deuxième partie de la phrase LPP). Selon
l'art. 10 LPP, l'assurance obligatoire commence pour les personnes salariées
en même temps que les rapports de travail et cesse, entre autres, lors de
leur dissolution; durant un mois après la fin des rapports avec l'institution
de prévoyance, le salarié demeure assuré auprès de celle-ci pour les risques
de décès et d'invalidité (art. 10 al. 3 première phrase LPP;  ATF 120 V 19
consid. 2a).

Selon l'art. 24 al. 1 LPP, l'assuré a droit à une rente entière d'invalidité
s'il est invalide à raison des deux tiers au moins, au sens de l'AI, et à une
demi-rente s'il est invalide à raison de 50 pour cent au moins. Conformément
à l'art. 26 LPP, les dispositions de la loi fédérale sur
l'assurance-invalidité s'appliquent par analogie à la naissance du droit aux
prestations d'invalidité (art. 29 LAI). Les prestations d'invalidité selon la
LPP sont dues par l'institution de prévoyance à laquelle l'assuré était
affilié lors de la survenance de l'événement assuré. Selon la jurisprudence,
l'événement assuré au sens de l'art. 23 LPP est uniquement la survenance
d'une incapacité de travail d'une certaine importance, indépendamment du
point de savoir à partir de quel moment et dans quelle mesure un droit à une
prestation d'invalidité est né. La qualité d'assuré doit exister au moment de
la survenance de l'incapacité de travail, mais pas nécessairement lors de
l'apparition ou de l'aggravation de l'invalidité. Cette interprétation
littérale est conforme au sens et au but de la disposition légale en cause,
laquelle vise à faire bénéficier de l'assurance le salarié qui, après une
maladie d'une certaine durée, devient invalide alors qu'il n'est plus partie
à un contrat de travail. Lorsqu'il existe un droit à une prestation
d'invalidité fondée sur une incapacité de travail survenue durant la période
d'assurance, l'institution de prévoyance concernée est tenue de prendre en
charge le cas, même si le degré d'invalidité se modifie après la fin des
rapports de prévoyance. Dans ce sens, la perte de la qualité d'assuré ne
constitue pas un motif d'extinction du droit aux prestations au sens de
l'art. 26 al. 3 LPP (ATF 123 V 263 consid. 1a, 118 V 45 consid. 5).

3.3 Les principes qui viennent d'être rappelés ne valent cependant que pour
la prévoyance obligatoire. Dans le domaine de la prévoyance plus étendue, les
institutions de prévoyance sont libres, dans le cadre de l'art. 49 al. 2 LPP,
de retenir une définition de l'événement assuré qui diffère de celle de
l'art. 23 LPP (RSAS 1998 p. 77 consid. 4). Toutefois, même dans leur sphère
de compétences propres, les institutions de prévoyance ne jouissent pas d'un
pouvoir discrétionnaire. Si elles définissent, dans leurs statuts ou leurs
règlements, l'événement assuré ou l'invalidité de manière autonome, elle
doivent, dans l'interprétation de ces notions, prendre en compte le sens
retenu dans les autres branches du droit des assurances sociales ou selon les
principes généraux du droit. Les institutions de prévoyance sont ainsi libres
dans le choix de la notion de l'invalidité (ATF 120 V 108 consid. 3c) et de
l'événement assuré (RSAS 1997 p. 560 consid. 4a), mais elles doivent les
appliquer de manière uniforme.

3.3.1 Selon les Dispositions générales accompagnant la convention
d'affiliation et le plan de prévoyance 4179.001.et 4179.002, en vigueur dès
le 1er juillet 1990, ont droit à des prestations les assurés atteints d'une
incapacité de gain de 25 % au moins au sens de l'art. 34 et qui étaient
assurés lorsqu'est survenue l'incapacité de travail dont la cause est à
l'origine de l'incapacité de gain. Les prestations versées correspondent au
degré de l'incapacité de gain (art. 35 al. 1 première et deuxième phrases).
L'assuré a droit aux prestations intégrales en cas d'incapacité de gain s'il
a une incapacité de gain de deux tiers au moins au sens de l'art. 34 (art. 35
al. 2). Il y a incapacité de gain lorsque l'assuré ne peut plus exercer, en
tout ou en partie, sa profession ou une autre activité lucrative conforme à
sa situation antérieure, ses connaissances et ses aptitudes par suite d'une
maladie ou d'un accident (y compris le déclin des facultés intellectuelles ou
des forces physiques), attestés par un rapport médical, ou s'il est invalide
au sens de l'AI (art. 34 al. 1). Le degré de l'incapacité de gain selon le
règlement correspond au minimum à celui constaté par l'AI (art. 34 al. 3). La
rente d'invalidité totale annuelle est fixée sur la base du plan de
prévoyance (art. 36 al. 1); en l'espèce 25 pour cent du salaire AVS (C.1 du
plan de prévoyance). En outre, l'assurance expire à la fin des rapports de
travail pour autant et dans la mesure où n'existe ou ne prend pas naissance
un droit à une rente d'invalidité ou une rente de vieillesse (art. 14).

3.3.2 A l'examen de ces dispositions, il ressort que la fondation ne s'est
pas écartée de la LPP dans la définition de l'événement assuré. La notion est
similaire à celle de l'art. 23 LPP (survenance de l'incapacité de travail) et
ne se recoupe pas avec celles dont le Tribunal fédéral des assurances a eu à
connaître dans des affaires où la responsabilité de l'institution de
prévoyance a été niée pour l'aggravation de l'invalidité (invalidité en tant
que telle comme événement assuré; RSAS 1997 p. 560 consid. 4b). D'autre part,
la fondation a défini la notion d'invalidité de manière plus large que l'AI
et celle de la fin des rapports d'assurance différemment de la LPP. Au vu de
ces éléments, les premiers juges ont retenu à juste titre que la fondation
devait répondre de l'aggravation de l'invalidité présentée par l'intimé à
partir du 1er décembre 1998 selon le plan de prévoyance et non sur la base
des seuls minima LPP. En retenant une notion de l'événement assuré similaire
à celle de l'art. 23 LPP l'application des principes dégagés par la
jurisprudence sous l'angle de cette disposition en cas d'aggravation
subséquente de l'invalidité (ATF 118 V 35) apparaissent justifiés en
l'absence de disposition réglementaire contraire (ATF 120 V 116 consid. 2b);
ainsi, ni la convention d'affiliation, ni le plan de prévoyance, ni les
dispositions générales accompagnant ces documents ne contiennent une
réglementation excluant ou limitant la responsabilité de la recourante en cas
d'augmentation du taux d'incapacité de gain initiale.

La fondation veut voir une telle clause dans l'art. 14 al. 4 de ses
dispositions, qui limite à 30 jours la couverture des risques décès et
invalidité en cas de résiliation des rapports de travail avant la survenance
d'un cas d'assurance. La recourante oublie cependant que, selon sa propre
réglementation, l'assurance ne prend pas fin en cas d'existence ou de
naissance du droit à une rente d'invalidité (art. 14 al. 1) et que, à la
lumière de sa définition de l'événement assuré, le cas d'assurance était
survenu. Partant, les principes dégagés par la jurisprudence sous l'angle de
l'art 23 LPP doivent s'appliquer dans le cas d'espèce et l'intimé peut
prétendre aux prestations réglementaires pour l'aggravation de l'invalidité
présentée dès le mois de décembre 1998.

3.3.3 Les premiers juges ont fixé la quotité des prestations réglementaires,
à servir dès cette date, à 1'173 fr. par mois ou 14'077 fr. par an. Ils ont
retenu que la fondation versait à l'intimé, sur la base d'une rente entière
correspondant au 25 pour cent du salaire AVS assuré, une rente d'invalidité
annuelle de 5'773 fr. pour une incapacité de gain de 40 % ([25 % x 55'360 fr.
] x 40 % + coût de la vie). L'intimé présentant dès le 1er décembre 1998 une
invalidité ouvrant droit à une rente entière, ils ont arrêté à 8'304 fr.,
selon les mêmes bases, le montant supplémentaire dû au titre de l'aggravation
de l'invalidité ([25 % x 55'360 fr.] x 60 %). Ces calculs, conformes au plan
de prévoyance, ne sont pas critiquables. Ainsi, l'intimé ne saurait prétendre
à ce que l'augmentation de la rente soit calculée sur un montant revalorisé
selon les augmentions de salaires intervenues dans la branche entre 1993 et
1998, un tel montant n'ayant jamais été réalisé par l'intimé, ni assuré par
la fondation.

Dans cette mesure, la conformité du montant de la rente et des calculs
effectués par la recourante, sous l'angle de la LPP, peut rester ouverte.

4.
La procédure se rapporte à des prestations d'assurance, de sorte qu'il n'y a
pas lieu de percevoir de frais de justice (art. 134 OJ a contrario).

L'intimé a droit à des dépens pour la procédure fédérale (art. 159 al. 1 en
corrélation avec l'art. 135 OJ). Bien qu'il ne soit pas représenté par un
avocat, il est assisté par les syndicats chrétiens professionnels, soit une
représentation qualifiée, qui selon la pratique donne droit à des dépens (DTA
2000 n° 25 p. 124 consid. 4; cf., par analogie, ATF 122 V 278).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
La recourante versera à l'intimé la somme de 1'000 fr. (y compris la taxe sur
la valeur ajoutée) à titre de dépens pour l'instance fédérale.

4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 19 août 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIIe Chambre:   Le Greffier: