Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen B 47/2002
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B 47/02
B 48/02

Arrêt du 25 août 2003
IVe Chambre

MM. les Juges Rüedi, Meyer et Ferrari.
Greffière : Mme Berset

B 47/02
X.________, recourant, représenté par Me Antonella Schiavon Nossent, avocate,
24, rue de Candolle, 1205 Genève,

et

B 48/02
Caisse de prévoyance du personnel enseignant de l'instruction publique et des
fonctionnaires de l'administration de GE, boulevard Saint-Georges 38, 1205
Genève, recourante, représentée par Me Jacques-André Schneider, avocat, rue
du Rhône 100, 1204 Genève,

contre

C.________, intimé,

Tribunal administratif de la République et canton de Genève, Genève

(Jugement du 9 avril 2002)

Faits:

A.
X. ________ a adopté un nouveau statut du personnel qui est entré en vigueur
le 1er janvier 1996. C.________ qui y travaille depuis 1973 comme adjoint au
chef de la division technique a adhéré au statut du personnel de X.________.
Le 27 janvier 2000, X.________ a adressé à C.________ un avis de situation
qui fixait précisément les éléments de sa rémunération pour l'année 2000.

C. ________ a recouru contre cet avis de situation devant la commission de
recours du personnel de X.________ qui, par décision du 2 octobre 2000, a
admis partiellement le recours et accordé l'indexation rétroactive entière
sur la rémunération pour l'année 2000.

B.
Par écriture du 11 octobre 2000, C.________ a recouru contre cette décision
auprès du Tribunal administratif du canton de Genève. Il se plaignait, d'une
part, de l'intégration de la prime de fidélité au revenu global et, d'autre
part, du plafonnement de son salaire assuré.

X. ________ a conclu au rejet du recours. Après un nouvel échange
d'écritures, des explications complémentaires ont été demandées aux parties.
En outre, par lettre du 23 novembre 2001, le juge chargé de l'instruction
s'est adressé à la direction de la Caisse de prévoyance du personnel
enseignant de l'instruction publique et des fonctionnaires de
l'administration du canton de Genève (ci-après CIA) dans les termes suivants:

"Le Tribunal administratif est saisi d'une demande de M. Bernard Corthay,
employé de X.________, à l'encontre de cet établissement. Le litige porte
notamment sur l'arrangement que la CIA a pris avec X.________ au sujet des
salaires assurés (lettre de la CIA du 9 février 1999). Il se pourrait par
conséquent que l'issue du litige affecte la situation juridique de la CIA,
laquelle sera au besoin appelée en cause.

Nous vous saurions donc gré de bien vouloir nous apporter quelques
éclaircissements au sujet de l'arrangement sus-mentionné, ainsi que de faire
toute autre observation utile à propos du dossier cité en titre, lequel est à
votre disposition auprès du greffe du tribunal."

Dans sa lettre du 21 janvier 2002, la CIA a répondu brièvement, d'une part,
que les prescriptions minimales prévues par la loi fédérale sur la prévoyance
professionnelle étaient respectées et d'autre part, que X.________ appliquait
l'art. 5 des statuts de la caisse de prévoyance en ce qui concerne la
prévoyance surobligatoire. A cette lettre étaient joints les statuts de la
CIA.

Par jugement du 9 avril 2002, le Tribunal administratif a rejeté le recours
de C.________ à l'encontre de X.________. En revanche, le tribunal a admis la
demande en tant qu'elle porte sur la prévoyance professionnelle et statué
comme suit:

"admet la demande;

invite la Caisse de prévoyance du personnel enseignant de l'instruction
publique et des fonctionnaires de l'administration du canton de Genève à
établir et à faire parvenir à X.________ et à M. C.________ un décompte des
cotisations de prévoyance professionnelle dues au sens des considérants;

condamne X.________ à payer à la Caisse de prévoyance du personnel enseignant
de l'instruction publique et des fonctionnaires de l'administration du canton
de Genève sa part de cotisation ainsi définie;

condamne Monsieur C.________ à payer à la Caisse de prévoyance du personnel
enseignant de l'instruction publique et des fonctionnaires de
l'administration du canton de Genève sa part de cotisation ainsi définie;

condamne X.________ à payer à la Caisse de prévoyance du personnel enseignant
de l'instruction publique et des fonctionnaires de l'administration du canton
de Genève un intérêt de 5 % calculé sur l'ensemble des cotisations arriérées
au sens des considérants, dès le 1er janvier 2001;

met à la charge de Monsieur C.________ un émolument de CHF 1000.-".

C.
Par actes séparés, la CIA et X.________ interjettent recours de droit
administratif contre ce jugement dont ils demandent principalement
l'annulation, dans la mesure où il porte sur la prévoyance professionnelle.

C. ________ conclut au rejet des recours dans la mesure où ils sont
recevables.

L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à formuler des
observations au motif que le litige porte exclusivement sur la prévoyance
plus étendue.

Considérant en droit:

1.
Les recours de droit administratif concernent des faits de même nature,
portent sur des questions juridiques communes et sont dirigés contre le même
jugement, de sorte qu'il se justifie de les réunir et de les liquider dans un
seul arrêt (ATF 128 V 126 consid. 1 et les références; cf. aussi ATF 128 V
194 consid. 1).

2.
Les recourants ne contestent que partiellement le jugement attaqué, soit en
tant qu'il porte sur la prévoyance professionnelle. Dans le même jugement, la
juridiction cantonale a tranché le recours de l'intimé qui avait trait à
certaines conditions de sa rémunération. Ces questions ne sont pas comprises
dans l'objet du litige soumis au Tribunal fédéral des assurances, au premier
motif qu'elles ne ressortissent pas à sa compétence (art. 128 OJ). Au
demeurant, et dans la mesure où aucun recours n'a été déposé à ce sujet, le
jugement entrepris est  partiellement entré en force (ATF 122 V 356 consid.
4b et 119 V consid. 1b).

3.
Les recourants reprochent tout d'abord à la juridiction cantonale d'avoir
violé le droit d'être entendu au motif que le jugement a été rendu à
l'encontre de la CIA sans que celle-ci ait été appelée en cause et, partant,
sans que X.________ ait eu la faculté de s'exprimer dans le cadre de la
procédure d'appel en cause. Ce grief, relatif au droit d'être entendu et,
partant, susceptible d'amener la Cour de céans à accueillir le recours sur ce
point et à renvoyer la cause à l'autorité de décision sans examen du litige
sur le fond, doit être examiné en premier lieu (ATF 127 V 437 consid. 3d/aa,
126 V 132 consid. 2b, 124 V 92 consid. 2 et les arrêts cités).

3.1 La jurisprudence, rendue sous l'empire de l'art. 4 aCst. et qui
s'applique également à l'art. 29 al. 2 Cst. (ATF 127 I 56 consid. 2b, 127 III
578 consid. 2c, 126 V 130 consid. 2a), a déduit du droit d'être entendu, en
particulier, le droit pour le justiciable de s'expliquer avant qu'une
décision ne soit prise à son détriment, celui de fournir des preuves quant
aux faits de nature à influer sur le sort de la décision, celui d'avoir accès
au dossier, celui de participer à l'administration des preuves, d'en prendre
connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 126 I 16 consid. 2a/aa,
124 V 181 consid. 1a, 375 consid. 3b et les références).

Le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de caractère
formel, dont la violation doit entraîner l'annulation de la décision
attaquée, indépendamment des chances de succès du recourant sur le fond (ATF
127 V 437 consid. 3d/aa, 126 V 132 consid. 2b et les arrêts cités). Selon la
jurisprudence, la violation du droit d'être entendu - pour autant qu'elle ne
soit pas d'une gravité particulière - est réparée lorsque la partie lésée a
la possibilité de s'exprimer devant une autorité de recours jouissant d'un
plein pouvoir d'examen. Au demeurant, la réparation d'un vice éventuel ne
doit avoir lieu qu'exceptionnellement (ATF 127 V 437 consid. 3d/aa, 126 I 72,
126 V 132 consid. 2b et les références).

3.2
3.2.1D'une manière générale, dans les cantons qui comme celui de Genève
connaissent cette institution de procédure, l'appel en cause permet de
contraindre des tiers qui ne possèdent pas la qualité de partie faute d'en
satisfaire les conditions à participer à la procédure afin de leur rendre
opposable la décision, respectivement le jugement qui doit être rendu à son
issue (cf. art. 110 al. 1 OJ et ATF 125 V 94 consid. 8b). L'appel en cause
n'est pas destiné à faire intervenir ou à étendre la procédure à des
personnes qui bénéficient déjà de la qualité de partie et qui ne participent
pas pour une raison quelconque à la procédure. Il vise bien plutôt à préjuger
un rapport de droit entre l'appelé en cause et une partie principale dans une
procédure pendante entre les parties principales. Dans la mesure où il a pour
fonction d'éviter le déroulement d'une autre procédure sur les mêmes
questions litigieuses, l'appel en cause est dicté par un souci d'économie de
procédure. Il permet également de prévenir le prononcé de décisions ou
jugements contradictoires. Le tiers appelé en cause doit naturellement
posséder la capacité d'être partie et la capacité d'ester (Benoît Bovay,
Procédure administrative, Berne 2000, p. 154 ss; Isabelle Häner, Die
Beteiligten im Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess, Zurich 2000, p.
165 ss, nos 298  ss, not. 299, et 312 ss; Alfred Kölz /Isabelle Häner,
Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes, 2ème éd., p.
191, no 528).

3.2.2 La doctrine est divisée sur la question de la qualité de partie de
l'appelé en cause. Certains auteurs considèrent que l'appel en cause a pour
effet de lui conférer, en principe, la qualité de partie principale,  alors
que d'autres commentateurs ne le voient que comme partie intervenante
(«Nebenpartei» par opposition à «Hauptpartei»; sur ce point cf. Isabelle
Häner, op. cit., p. 170 no 312). Dans le premier cas, on peut aussi parler
d'appel en cause au sens étroit et dans le second, d'appel en cause au sens
large (ibidem p. 172 no 317). L'appelé en cause doit présenter un intérêt
suffisant à l'issue d'une procédure pendante entre deux parties principales,
ce que les lois cantonales énoncent de manière différente (Benoît Bovay, op.
cit., p. 155). La qualité de partie (principale ou intervenante) dépend dans
une certaine mesure de l'intérêt de l'appel en cause («Beiladungsinteresse»),
lui même tributaire de la définition de l'intérêt juridiquement protégé qui
détermine la légitimation active. Plus cette notion est étroite, plus
l'intérêt de l'appel en cause sera grand et vice versa (Isabelle Häner, op.
cit., p. 172 no 317). Quoi qu'il en soit, même si l'appelé en cause n'est
considéré que comme partie intervenante («Nebenpartei»), il bénéficie de tous
les droits de partie, étant admis à faire valoir tous ses moyens d'attaque et
de défense, sous réserve du pouvoir de disposition sur l'objet du litige
(Isabelle Häner, op. cit., p. 171 no 313; Gygi,
Bundesverwaltungsrechtspflege, 2ème éd., p. 184; comp.Benoît Bovay, op. cit.,
p. 156 sv).

3.2.3 Selon la loi sur la procédure administrative du canton de Genève du 12
septembre 1985 (RS GE: E 5 10), l'autorité peut ordonner, d'office ou sur
requête, l'appel en cause de tiers dont la situation juridique est
susceptible d'être affectée par l'issue de la procédure; la décision leur
devient dans ce cas opposable. L'appelé en cause peut exercer les droits qui
sont conférés aux parties (art. 71 LPA).

3.3 Dans le cas particulier, la juridiction cantonale s'est, par lettre du 23
novembre 2001, simplement réservé la faculté d'appeler en cause la CIA. Un
tel appel en cause n'a toutefois pas eu lieu avant le prononcé du jugement du
9 avril 2002, ainsi que cela ressort d'ailleurs sans équivoque possible du
dispositif du jugement. Or, non seulement le jugement a été rendu à l'égard
de la CIA, partie appelée en cause,  mais il entraîne aussi des conséquences
pour elle, tout particulièrement par le fait que son plan de prévoyance est
fondé sur la primauté des prestations. Devenue partie à la procédure, la CIA
devait se voir reconnaître et accorder les mêmes droits qui sont conférés aux
parties, conformément à l'art. 71 LPA - dont le contenu rejoint les opinions
doctrinales évoquées au consid. 3.2.2 supra -, ce qui n'a pas été le cas. Dès
lors, on doit considérer que la juridiction cantonale a violé son droit
d'être entendu, faute d'avoir respecté ces règles. Comme la gravité de cette
violation en empêche la réparation, le jugement doit être annulé dans la
mesure où il a été entrepris.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Les causes B 47/02 et B 48/02 sont jointes.

2.
Les recours sont admis et le jugement du 9 avril 2002 du Tribunal
administratif du canton de Genève est annulé dans la mesure où il concerne la
prévoyance professionnelle de l'intimé.

3.
La cause est renvoyée au Tribunal cantonal genevois des assurances sociales
pour qu'il statue à nouveau en procédant conformément aux considérants.

4.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

5.
L'avance de frais versée par les recourants, d'un montant de 500 fr. chacun,
leur est restituée.

6.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à Caisse de prévoyance du
personnel enseignant de l'instruction publique et des fonctionnaires de l
'administration de GE, Genève, au Tribunal cantonal genevois des assurances
sociales et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 25 août 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le juge présidant la IVe Chambre:   La Greffière: