Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen B 14/2002
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B 14/02 Tn

                        IVe Chambre

Mme et MM. les juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et
Ferrari. Greffier : M. Beauverd

                   Arrêt du 18 juin 2002

                       dans la cause

Fondation institution supplétive LPP, avenue de
Montchoisi 35, 1006 Lausanne, recourante,

                          contre

A.________, intimé, représenté par Me André Fidanza,
avocat, boulevard de Pérolles 22, 1705 Fribourg,

                            et

Tribunal administratif du canton de Fribourg, Givisiez

     A.- Par mémoire du 10 octobre 2001, la Fondation ins-
titution supplétive LPP (ci-après : la Fondation) a ouvert
action en paiement de 11 865 fr. 10 en capital avec inté-
rêts et frais contre A.________ devant le Tribunal adminis-
tratif du canton de Fribourg. A l'appui de sa demande, elle
exposait qu'à la suite d'un rapport de la Caisse de compen-
sation du canton de Fribourg, l'autorité cantonale de sur-
veillance avait sommé l'intéressé de s'affilier dans les

six mois à une institution de prévoyance. Celui-ci n'ayant
pas donné suite, le dossier lui avait été transmis en vue
d'une affiliation d'office. Après vaine sommation, l'inté-
ressé avait été affilié par décision du 28 juillet 1999.
Sur la base des indications fournies par la caisse de
compensation au sujet des salaires versés, la Fondation
avait calculé les montants dus à titre de cotisations dont
elle réclamait présentement le paiement.
     A.________ a conclu, sous suite de frais et dépens, au
rejet de la demande, par mémoire du 14 novembre 2001.
     Par lettre du 11 décembre 2001, la Fondation a déclaré
retirer purement et simplement son action.
     Prenant acte de cette déclaration de retrait, le pré-
sident du tribunal a, par décision du 24 janvier 2002, rayé
sans frais l'affaire du rôle et alloué une indemnité de dé-
pens de 1076 fr. au défendeur à charge de la demanderesse.

     B.- La Fondation interjette recours de droit adminis-
tratif contre cette décision dont elle demande la modifi-
cation en ce qui concerne l'allocation de dépens.
     A.________ a conclu au rejet du recours avec suite de
dépens, alors que l'Office fédéral des assurances sociales
en propose l'admission.

                  Considérant en droit :

     1.- a) Aux termes de l'art. 128 OJ, le Tribunal fédé-
ral des assurances connaît en dernière instance des recours
de droit administratif contre des décisions au sens des
art. 97, 98 let. b à h et 98a OJ en matière d'assurances
sociales. Selon la jurisprudence, les jugements incidents
et finaux rendus par des tribunaux cantonaux dans des li-
tiges ressortissant au droit fédéral des assurances socia-
les et tranchant une question de droit de procédure canto-
nale peuvent aussi être déférés au Tribunal fédéral des
assurances par la voie du recours de droit administratif,

indépendamment du point de savoir si un recours est inter-
jeté sur la question de fond (ATF 126 V 145 ss consid. 1 et
2).
     Le recours de droit administratif limité, comme en
l'espèce, à la question des dépens en matière de prévoyance
professionnelle, alloués en vertu du droit de procédure
cantonal (ATF 124 V 286 consid. 2 et les références), est
ainsi recevable (ATF 126 V 143).

     b) La décision litigieuse n'ayant pas pour objet l'oc-
troi ou le refus de prestations d'assurance, le Tribunal
fédéral des assurances doit se borner à examiner si les
premiers juges ont violé le droit fédéral, y compris par
l'excès ou par l'abus de leur pouvoir d'appréciation, ou si
les faits pertinents ont été constatés d'une manière mani-
festement inexacte ou incomplète, ou s'ils ont été établis
au mépris de règles essentielles de procédure (art. 132 en
corrélation avec les art. 104 let. a et b et 105 al. 2 OJ).
     Par ailleurs, saisi d'un recours ayant trait à l'oc-
troi de dépens en procédure cantonale, le Tribunal fédéral
des assurances doit se limiter à examiner si l'application
des dispositions cantonales déterminantes ou - à défaut de
réglementation cantonale - l'exercice du pouvoir d'appré-
ciation par la juridiction cantonale conduit à une viola-
tion du droit fédéral (art. 104 let. a OJ), en particulier
une violation de l'interdiction de l'arbitraire ou du
formalisme excessif (ATF 120 V 416 consid. 4a, 114 V 205
consid. 1a et les références).

     2.- Prenant en considération le fait que le défendeur
avait recouru aux services nécessaires d'un mandataire
professionnel, le président du tribunal administratif a
décidé, au vu du retrait pur et simple de la demande, d'al-
louer une indemnité équitable à titre de dépens de 1000 fr.
(à laquelle s'ajoute la taxe sur la valeur ajoutée), en se
fondant sur les articles 137 sv. du code cantonal fribour-
geois de procédure et de juridiction administrative (CPJA).

     La recourante conteste le bien-fondé de cette déci-
sion, soutenant que l'action a dû être introduite en raison
du comportement négligent de l'intimé. Il n'était ainsi pas
justifié de lui allouer des dépens, ce que ce dernier con-
teste en se référant pour l'essentiel à la décision entre-
prise.
     En critiquant la mise à sa charge de dépens, la recou-
rante se plaint en définitive d'une application arbitraire,
ou contraire à l'art. 9 Cst., des art. 137 sv. CPJA. Selon
les principes exposés plus haut, le Tribunal fédéral des
assurances n'annulera la décision attaquée que si elle mé-
connaît gravement une norme ou un principe juridique clair
et indiscuté ou si elle heurte de manière choquante le sen-
timent de la justice ou de l'équité. En d'autres termes, il
ne s'écarte de la solution retenue en dernière instance
cantonale que si elle est insoutenable, en contradiction
manifeste avec la situation effective, si elle a été adop-
tée sans motif objectif ou en violation d'un droit certain.
Il ne suffit pas que la motivation de la décision soit in-
soutenable; encore faut-il qu'elle soit arbitraire dans son
résultat (ATF 127 I 56 consid. 2b, 126 III 440 consid. 3,
125 I 168 consid. 2a, 125 II 15 consid. 3a, 134 consid. 5b
et les arrêts cités).

     3.- a) Les dépens constituent une indemnisation, sou-
mise à des règles particulières, du préjudice causé à une
partie en raison des frais que lui occasionne la procédure.
Si les conditions sont remplies, l'allocation de cette
indemnité est un droit de la partie et non une simple fa-
culté de l'autorité.
     C'est en principe la partie qui succombe qui supporte
le paiement des dépens à la partie adverse. Des dépens, cas
échéant réduits, peuvent être alloués à la partie qui n'ob-
tient que partiellement gain de cause. En cas de retrait du
recours, la partie adverse qui s'opposait aux conclusions
du recourant est considérée comme obtenant gain de cause.
En cas d'acquiescement ou lorsque l'autorité intimée ré-

voque la décision attaquée après le dépôt du recours, c'est
le recourant qui est considéré comme ayant obtenu gain de
cause. En revanche, lorsque le procès devient sans objet
pour d'autres raisons, la détermination de la partie qui
obtient gain de cause dépend généralement des chances de
succès de chaque partie au moment où intervient le fait qui
met fin à la procédure (Benoît Bovay, Procédure administra-
tive, Berne 2000, p. 461 sv.; Martin Bernet, Die Partei-
entschädigung in der schweizerischen Verwaltungsrechts-
pflege, thèse Zurich 1986, p. 143 sv.).

     b) Le droit de procédure fribourgeois a repris en
substance ces principes généraux aux articles 137 sv. CPJA
(cf. aussi Christian Pfammatter, L'indemnité de partie
devant le tribunal administratif fribourgeois, RFJ 1993,
p. 123 sv.).
     Selon l'art. 137 al. 1 CPJA, en cas de recours, de
révision ou d'interprétation devant une autorité statuant
en dernière instance cantonale et en cas d'action, l'auto-
rité de la juridiction administrative alloue, sur requête,
à la partie qui obtient gain de cause une indemnité pour
les frais nécessaires qu'elle a engagés pour la défense de
ses intérêts. La partie qui, par sa faute, n'a pas obtenu
satisfaction dans la procédure antérieure n'a pas droit à
une indemnité de partie (art. 138 al. 1 CPJA). Lorsqu'une
partie n'obtient que partiellement gain de cause, l'indem-
nité est réduite en proportion (al. 2). Enfin l'art. 141
al. 1 CPJA précise que l'indemnité est mise à la charge de
la ou des parties qui succombent.

     4.- Dans le cas d'espèce, la Fondation recourante a
retiré purement et simplement la demande déposée devant le
tribunal administratif, si bien que l'intimé qui s'opposait
à ses conclusions doit être considéré comme obtenant gain
de cause et peut prétendre à une indemnité de partie à
charge de la partie adverse (art. 137 et 141 CPJA). La
décision attaquée se réfère explicitement à ces disposi-

tions. Par ailleurs, comme le procès n'est pas devenu sans
objet, la Fondation renonçant à réclamer plus avant le
paiement de primes, cotisations et frais, il n'y avait pas
lieu pour le juge cantonal d'examiner encore les chances de
succès de chaque partie en vue de statuer, cas échéant, de
manière différente au sujet des dépens.
     Comme on l'a vu, le droit fribourgeois de procédure
est fondé - pour ce qui concerne l'indemnité de partie -
sur le principe fondamental que la partie qui l'emporte a
droit à des dépens de la part de celle qui succombe. Sauf
dans le cas particulier visé à l'art. 138 al. 1 CPJA qui
concerne manifestement une situation différente du cas
d'espèce (cf. dans ce sens Pfammatter, op. cit. p. 131), ce
système cantonal ne prévoit pas la prise en compte, concur-
remment, de la causalité pour justifier une répartition
éventuellement différente ou une réduction des dépens. A
tout le moins cela n'est-il ni allégué ni soutenu en cause.
     En définitive, l'appréciation au cas particulier de
motifs justifiant, par exception, de s'écarter de la règle
légale et de statuer en tenant compte du comportement cau-
sal de la partie adverse relève tout au plus du pouvoir
d'appréciation du juge. A cet égard, on aurait pu certes
envisager, comme le soutient la recourante, une solution
différente voire meilleure qui tienne compte de la res-
ponsabilité de l'intimé à l'origine de la procédure. Mais
il n'en demeure pas moins qu'en s'en tenant strictement au
système de la loi, la décision du juge qui se fonde sur le
principe fondamental repris aux art. 137 et 141 CPJA n'est
ni insoutenable ni par conséquent rendue en violation du
droit.
     Au demeurant rien n'empêchait la Fondation, dans les
circonstances du cas particulier, de poursuivre en justice
l'intimé en vue d'obtenir le paiement de ses frais (frais
administratifs, frais extraordinaires et frais de conten-
tieux), ce qu'elle a renoncé à faire en retirant purement
et simplement sa demande dans sa totalité.

     Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

                     p r o n o n c e :

  I. Le recours est rejeté.

 II. Les frais de justice, d'un montant de 500 fr., sont
     mis à la charge de la Fondation institution supplétive
     LPP.

III. La recourante versera à l'intimé la somme de 500 fr.
     (y compris la taxe sur la valeur ajoutée) à titre de
     dépens pour l'instance fédérale.

 IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
     bunal administratif du canton de Fribourg, Cour des
     assurances sociales, et à l'Office fédéral des assu-
     rances sociales.

Lucerne, le 18 juin 2002

                                      Au nom du
                           Tribunal fédéral des assurances
                          La Présidente de la IVe Chambre :

                                    Le Greffier :