Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Kassationshof in Strafsachen 6S.298/2002
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6S.298/2002 /rod

Arrêt du 10 janvier 2003
Cour de cassation pénale

Les juges fédéraux Schneider, président,
Schubarth, Kolly,
greffière Paquier-Boinay.

X. ________,
recourante, représentée par Me Olivier Wasmer, avocat, Grand-Rue 8, 1204
Genève,

contre

Procureur général du canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, case postale
3565, 1211 Genève 3.

Ordonnance de classement (homicide),

pourvoi en nullité contre l'ordonnance de la Cour de justice du canton de
Genève, Chambre d'accusation, du 5 juin 2002.

Faits:

A.
Y. ________, né le 17 février 1952, fut admis au service des urgences de
l'hôpital cantonal de Genève le 29 juillet 2001 à 2 h. 38 du matin dans un
état de choc caractérisé. La liste des problèmes présentés par le patient,
établie à la suite d'examens paracliniques, comprenait un choc septique
réfractaire, une pancytopénie, un état hautement fébrile, une insuffisance
rénale aiguë, des diarrhées et une baisse de l'état général avec perte de
poids de 10 kg en 6 mois.

Il fut pris en charge par différents médecins du service des urgences puis
des soins intensifs où on lui a notamment posé un introducteur de cathéter de
Swan-Ganz. Il décéda le 31 juillet 2001 à 20 h.45.
L'autopsie pratiquée sur le corps de Y.________ révéla que le décès de
celui-ci était dû à une encéphalopathie post-anoxique consécutive à une
importante hémorragie, sans qu'il soit possible, sur la seule base de
l'autopsie, de mettre en évidence une relation entre la pose d'un cathéter et
le décès.

B.
Le 14 mars 2002, le juge d'instruction a communiqué la procédure au Procureur
général sans inculpation; par décision du 19 mars 2002, le Ministère public a
ordonné le classement de la procédure.

C.
Par ordonnance du 5 juin 2002, la Chambre d'accusation de la Cour de justice
genevoise rejette le recours formé par X.________, épouse de Y.________
contre cette décision. La Chambre d'accusation considère que la procédure ne
révèle en l'état pas d'indices suffisants de prévention d'homicide par
négligence, de sorte que c'est à bon droit que la procédure a été classée.

D.
X.________ se pourvoit en nullité contre cette ordonnance. Invoquant une
violation de l'art. 117 CP, elle conclut à l'annulation de l'ordonnance
attaquée et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour qu'elle statue
à nouveau.

La recourante soutient que les médecins qui ont traité son mari n'ont pas
satisfait à leur devoir de diligence en omettant d'effectuer une radiographie
du thorax immédiatement après la pose du cathéter afin de déterminer si la
position de celui-ci était correcte.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Conformément à l'art. 270 let. e ch. 1 PPF, la victime d'une infraction peut
se pourvoir en nullité au Tribunal fédéral si elle était déjà partie à la
procédure et dans la mesure où la sentence touche ses prétentions civiles ou
peut avoir des incidences sur le jugement de celles-ci. Cette faculté est
réservée à la victime telle qu'elle est définie par l'art. 2 al. 1 LAVI,
savoir la personne qui a subi, du fait d'une infraction, une atteinte directe
à son intégrité corporelle, sexuelle ou psychique (ATF 127 IV 236 consid.
2b/bb) ou encore, en application de l'art. 2 al. 2 let. b LAVI, aux proches
d'une telle personne.

En l'espèce, les actes dénoncés par la recourante ont conduit au décès de son
époux, de sorte qu'elle revêt la qualité de victime; comme elle a provoqué
par son recours la décision attaquée, il n'est en outre pas douteux qu'elle a
participé à la procédure cantonale (ATF 124 IV 262 consid. 1a, 123 IV 184
consid. 1b p. 187 et les arrêts cités).

Les actes que la recourante cherche à faire imputer aux médecins qui sont
intervenus auprès de son mari ont été commis par ceux-ci dans l'exercice de
leur activité au sein des hôpitaux universitaires de Genève, qui constituent
un établissement public (art. 1 let. a de la loi genevoise sur les
établissements publics médicaux) doté de la personnalité juridique et
responsable des actes commis par ses employés dans l'exercice de leur
activité, en application de la loi genevoise sur la responsabilité de l'Etat
et des communes (art. 5 al. 1 et 2 de la loi genevoise sur les établissements
publics médicaux). Dès lors, conformément à l'art. 2 de la loi genevoise sur
la responsabilité de l'Etat et des communes, c'est l'Etat de Genève qui
répond d'un éventuel dommage, le lésé ne disposant d'aucune action directe
contre le personnel médical.

Or, selon une jurisprudence qui vient d'être confirmée, lorsque le canton
répond seul du dommage causé par ses fonctionnaires ou agents dans l'exercice
de leur fonction et que la victime ne dispose par conséquent que d'une
créance fondée sur le droit public cantonal à l'exclusion de toute prétention
civile découlant du droit privé contre l'agent réputé fautif, ladite victime
n'a pas qualité pour former un pourvoi en nullité (ATF 128 IV 188 consid. 2).

Il appert que tel est bien le cas en l'espèce et la recourante elle-même ne
montre pas quelles prétentions découlant du droit privé elle pourrait faire
valoir directement à l'encontre du personnel médical qui est intervenu auprès
de son mari. Le pourvoi doit dès lors être déclaré irrecevable.

2.
Vu l'issue de la procédure, les frais de la cause doivent être mis à la
charge de la recourante qui succombe (art. 278 al. 1 PPF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le pourvoi est irrecevable.

2.
Un émolument judiciaire de 1000 fr. est mis à la charge de la recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la recourante, au
Procureur général du canton de Genève et à la Chambre d'accusation de la Cour
de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 10 janvier 2003

Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière: