Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Kassationshof in Strafsachen 6A.95/2002
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6A.95/2002 /svc

Arrêt du 21 mars 2003
Cour de cassation pénale

MM. les Juges Schneider, Président,
Wiprächtiger et Kolly.
Greffière: Mme Paquier-Boinay.

A. ________,
recourant, représenté par Me Stefan Disch, avocat,
ch. des Trois-Rois 5bis, case postale 2608,
1002 Lausanne,

contre

Commission de libération du canton de Vaud,
p.a. Service pénitentiaire, rue Cité-Devant 14,
1014 Lausanne,
Tribunal cantonal vaudois, Cour de cassation pénale, 1014 Lausanne.

refus de la libération conditionnelle,

recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal cantonal vaudois,
Cour de cassation pénale, du
25 octobre 2002.

Faits:

A.
Par jugement du Tribunal criminel du district d'Echallens du 26 août 1998,
réformé partiellement par arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal
cantonal vaudois du 21 décembre 1998, A.________ a été reconnu coupable de
lésions corporelles simples qualifiées, brigandage qualifié ainsi que de
contravention, infraction et infraction grave à la LStup. et condamné à la
peine de 8 ans de réclusion, sous déduction de 492 jours de détention
préventive.

A. ________ est détenu depuis le 14 septembre 1998. Le terme de sa peine est
fixé au 23 avril 2005 et les deux tiers ont été atteints le 23 août 2002.

B.
Par décision du 13 août 2002, la Commission de libération du Département de
la sécurité et de l'environnement du canton de Vaud a refusé de mettre
A.________ au bénéfice de la libération conditionnelle.

C.
Par arrêt du 25 octobre 2002, la Cour de cassation pénale du Tribunal
cantonal vaudois a rejeté le recours formé par A.________ contre cette
décision, qu'elle a confirmée.

L'autorité cantonale note que tant la direction de l'établissement
pénitentiaire, où A.________ exécute sa peine, que le Service pénitentiaire
et le membre visiteur suppléant de la Commission de libération ont émis un
préavis défavorable à l'élargissement de A.________. A été relevé le fait que
l'intéressé s'était montré récalcitrant à l'autorité et au système; il avait
notamment interrompu un apprentissage ensuite d'une dénonciation pour
insubordination. L'arrêt attaqué remarque toutefois une timide évolution du
comportement de A.________, qui fournit des efforts pour tenter de
s'améliorer, le risque de récidive demeurant toutefois trop important pour
lui permettre de bénéficier de la libération conditionnelle.

L'autorité cantonale fait sienne l'opinion de la Commission de libération
selon laquelle la poursuite de la détention en régime progressif serait plus
favorable à la réinsertion de A.________ à long terme qu'une libération
conditionnelle, même assortie d'un patronage ou d'autres conditions
spéciales. Elle relève en outre que la Commission de libération a tenu compte
dans une juste mesure de divers éléments pertinents, savoir le comportement
de A.________ en milieu carcéral, la psychothérapie qu'il a entreprise puis
interrompue de sa propre initiative ainsi que du risque de récidive, qui
demeure important.

D.
A.________ forme un recours de droit administratif contre cet arrêt. Il
conclut, avec suite de dépens, principalement, à sa réforme en ce sens que la
libération immédiate est ordonnée, libération assortie, le cas échéant, d'un
patronage durant le délai d'épreuve, voire de règles de conduite fixées à
dire de justice; subsidiairement, il conclut à l'annulation de l'arrêt
attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour qu'elle statue à
nouveau.

A l'appui de ses conclusions, le recourant reproche à l'autorité cantonale
d'avoir méconnu les critères essentiels pour l'examen de la libération
conditionnelle.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 S'agissant d'une décision en matière d'exécution de la peine que le Code
pénal ne réserve pas au juge (art. 38 ch. 1 al. 1 CP), la décision attaquée
est susceptible d'un recours de droit administratif au Tribunal fédéral (art.
97 al. 1, 98 let. g OJ et 5 PA; ATF 124 I 231 consid. 1 a/aa p. 233).

1.2 Le recours de droit administratif au Tribunal fédéral peut être formé
pour violation du droit fédéral, y compris l'excès ou l'abus du pouvoir
d'appréciation (art. 104 let. a OJ). Le Tribunal n'est pas lié par les motifs
invoqués, mais il ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art. 114
al. 1 OJ). En revanche, lorsque le recours est, comme en l'espèce, dirigé
contre la décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par
les faits constatés dans l'arrêt attaqué, sauf s'ils sont manifestement
inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis au mépris de règles
essentielles de la procédure (art. 105 al. 2 OJ).

2.
2.1 Conformément à l'art. 38 ch. 1 CP, lorsqu'un condamné à la réclusion ou à
l'emprisonnement aura subi les 2/3 de sa peine, ou 15 ans de sa peine s'il a
été condamné à vie, l'autorité compétente pourra le libérer
conditionnellement si son comportement pendant l'exécution de la peine ne
s'oppose pas à son élargissement et s'il est à prévoir qu'il se comportera
bien en liberté.

La jurisprudence a relevé que la libération conditionnelle constitue la
quatrième et dernière étape de l'exécution de la peine, de sorte qu'elle doit
être considérée comme la règle, de laquelle il convient de ne s'écarter que
s'il y a de bonnes raisons de penser qu'elle sera inefficace (ATF 124 IV 193
consid. 3, p. 194 et consid. 4d, p. 198).

Comme celle portant sur l'octroi ou le refus du sursis, la décision relative
à la libération conditionnelle repose sur une appréciation globale prenant en
considération les antécédents de l'auteur, sa personnalité, le degré de son
éventuel amendement, les conditions dans lesquelles il vivra après sa
libération ainsi que son comportement en général d'une part et dans le cadre
de la commission des délits qui sont à l'origine de sa condamnation d'autre
part (ATF 124 IV 193 consid. 3). Dans le même arrêt, le Tribunal fédéral
s'est posé la question de savoir si le comportement du condamné pendant
l'exécution doit encore être considéré comme un critère distinct ou s'il ne
constitue pas plutôt l'un des éléments à prendre en considération pour
établir le pronostic quant à la conduite future de l'intéressé en liberté
(ATF 124 IV 193 consid. 3 p. 195 et l'arrêt cité).

La nature des délits commis par l'intéressé n'est, en tant que telle, pas à
prendre en compte, en ce sens que la libération conditionnelle ne doit pas
être exclue ou rendue plus difficile pour certains types d'infractions.
Toutefois, les circonstances dans lesquelles l'auteur a encouru la sanction
pénale sont pertinentes dans la mesure où elles sont révélatrices de sa
personnalité et donnent ainsi certaines indications sur son comportement
probable en liberté (ATF 124 IV 193 consid. 3 p. 195 et les arrêts cités). Au
demeurant, pour déterminer si l'on peut courir le risque de récidive,
inhérent à toute libération qu'elle soit conditionnelle ou définitive (ATF
119 IV 5 consid. 1b, p. 7), il faut non seulement prendre en considération le
degré de probabilité qu'une nouvelle infraction soit commise mais également
l'importance du bien qui serait alors menacé. Ainsi, le risque de récidive
que l'on peut admettre est moindre si l'auteur s'en est pris à la vie ou à
l'intégrité corporelle de ses victimes que s'il a commis par exemple des
infractions contre le patrimoine (ATF 124 IV 193 consid. 3, p. 195 et les
arrêts cités).

2.2 En l'espèce, l'autorité cantonale prend en compte le comportement de
l'intéressé en détention, relevant qu'il y a fait l'objet à trois reprises de
sanctions disciplinaires. Elle note également qu'il a fourni des efforts pour
s'améliorer, mais que ceux-ci n'ont pas conduit à une évolution décisive;
elle relève ainsi le fait que le recourant a entrepris une thérapie auprès
d'un psychologue, qu'il a toutefois interrompue de son propre chef, ce qui
dénote une petite introspection et une évolution favorable, qu'elle qualifie
toutefois de ténue. En outre, l'arrêt attaqué fait état de l'absence de
projet sérieux concernant l'avenir professionnel du recourant, qui indique
simplement vouloir rentrer en Italie. Enfin, la cour cantonale souligne que
les avis des différentes autorités sont unanimement réservés quant au
pronostic à émettre au sujet du comportement de l'intéressé en liberté.

Il ressort de l'arrêt attaqué que le recourant présente, à dire d'experts,
des troubles du comportement avec délinquance chez une personnalité labile
sur le plan émotionnel, ce qui se traduit par un comportement impulsif et une
intolérance à la frustration. Il a fourni en détention certains efforts, qui
ont permis une légère évolution; celle-ci n'apparaît toutefois pas suffisante
pour que l'on puisse y voir une véritable prise de conscience et une volonté
sérieuse de modifier son comportement.

S'agissant des conditions dans lesquelles il  vivra après sa libération, on
constate en effet que le recourant se contente de faire état de son projet de
repartir en Italie, sans toutefois donner la moindre indication relative à
d'éventuels projets professionnels, même vagues, ou à l'entourage dont il
pourrait bénéficier et qui serait susceptible d'accroître ses chances de
réinsertion. S'il est vrai que l'on peut difficilement exiger d'une personne
que la détention a coupée du monde professionnel qu'elle donne des assurances
quant à son activité à sa sortie de détention, on peut néanmoins attendre
d'elle qu'elle fournisse quelques indications sur la manière dont elle
envisage sa réinsertion sur ce plan. C'est donc à juste titre que l'autorité
cantonale a pris en considération l'absence totale de projets du recourant.

Compte tenu de l'ensemble de ces circonstances et eu égard à la gravité des
actes commis par le recourant, à propos desquels l'autorité  relève qu'il a
fait preuve d'une froide détermination et montré une inquiétante absence de
limites en brutalisant sans aucune raison une victime sans défense,
bâillonnée et ligotée, il y a lieu d'admettre que l'autorité cantonale n'a
pas abusé de son pouvoir d'appréciation en considérant qu'une libération
conditionnelle n'était pas envisageable tant que subsiste un risque de
récidive trop important et concret.

2.3 Le recourant soutient que l'autorité cantonale a subordonné la libération
conditionnelle à la conviction qu'un risque de récidive puisse
raisonnablement être écarté. Ce reproche n'est pas fondé, l'argumentation du
recourant consistant à faire apparaître le risque de récidive comme beaucoup
moins important qu'il ne l'est en réalité.

2.4 Enfin, le grief principal que le recourant fait à l'autorité cantonale
est de n'avoir pas comparé les avantages de la libération conditionnelle,
éventuellement assortie de règles de conduite strictes, avec ceux de la
prolongation de la détention. Le recourant se prévaut à ce propos d'un arrêt
publié aux ATF 124 IV 193 ss, selon lequel le juge amené à se prononcer sur
la libération conditionnelle doit se poser la question de savoir si celle-ci,
éventuellement assortie de règles de conduite et d'un patronage, ne
favoriserait pas mieux la resocialisation de l'auteur que l'exécution
complète de la peine, en raison notamment de l'intérêt à bien se comporter en
liberté de manière à éviter de devoir subir le solde de sa peine. Le sens de
cette jurisprudence est d'amener le juge à tenir compte, pour établir son
pronostic, des avantages offerts par la libération conditionnelle sur le plan
de la prévention spéciale et non de permettre la mise en liberté de détenus
pour lesquels le pronostic est défavorable et qui ne satisfont par conséquent
pas aux conditions de l'art. 38 ch. 1 CP.

En l'espèce, l'autorité cantonale a constaté qu'un important risque de
récidive subsiste. On voit mal quelles règles de conduite seraient
susceptibles de réduire suffisamment ce risque et pourraient être mises en
œuvre en Italie, pays dans lequel le recourant souhaite se rendre après sa
libération; au demeurant, le recourant lui-même ne propose rien de concret.
Par ailleurs, le recourant fait état d'une évolution positive au cours de sa
détention, évolution admise par l'autorité cantonale même si elle la qualifie
de ténue; on peut donc penser qu'elle se poursuivra, accroissant ainsi ses
perspectives de resocialisation à l'issue de sa détention.

Compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, il y a lieu d'admettre que
l'autorité cantonale n'a pas violé le droit fédéral en refusant de mettre le
recourant au bénéfice de la libération conditionnelle. Le recours doit dès
lors être rejeté.

3.
Vu l'issue de la procédure, les frais de la cause doivent être mis à la
charge du recourant qui succombe (art. 156 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 2000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, à la
Commission de libération du canton de Vaud et à la Cour de cassation pénale
du Tribunal cantonal vaudois, ainsi qu'au Département fédéral de justice et
police.

Lausanne, le 21 mars 2003

Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière: