Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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Kassationshof in Strafsachen 6A.104/2002
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6A.104/2002 /svc

Arrêt du 24 janvier 2003
Cour de cassation pénale

Les juges fédéraux Schneider, président,
Wiprächtiger et Kolly,
greffière Kistler.

R. ________, recourant, représenté par Me Jacopo Rivara, avocat, rue
Robert-Céard 13, 1204 Genève,

contre

Tribunal administratif de la République et Canton de Genève, rue des
Chaudronniers 3, 1204 Genève.

retrait du permis de conduire

(recours de droit administratif contre l'arrêt du 5 novembre 2002 du Tribunal
administratif de la République et Canton de Genève)

Faits:

A.
Le 15 avril 2002, à 12h15, R.________, circulait en voiture sur le chemin du
E.________ en direction de la route de C.________, lorsqu'il a quitté le
"stop" à la hauteur du chemin du L.________ sans s'entourer de toutes les
précautions nécessaires. Ce faisant, il est entré en collision avec un
motocycliste qui roulait en direction du chemin des M.________.

Il a été retenu que R.________ jouissait d'une excellente visibilité,
d'environ 100 mètres sur sa droite, grâce au miroir placé en face du "stop"
et que la vitesse du motocycliste, soit environ 35 km/h, était inférieure à
la limite maximale autorisée sur le chemin du L.________.

Titulaire d'un permis de conduire depuis le 26 septembre 2001, R.________ a
reçu un avertissement le 8 avril 2002 en raison d'un excès de vitesse.

B.
Le 24 juin 2002, le Service des automobiles et de la navigation du canton de
Genève a retiré le permis de conduire de R.________ pendant deux mois, pour
violation des art. 26 et 27 LCR.

Par arrêt du 5 novembre 2002, le Tribunal administratif de la République et
Canton de Genève a confirmé cette décision.

C.
Dans son recours de droit administratif, R.________ demande l'annulation de
l'arrêt attaqué. Il conclut à ce que son permis de conduire lui soit retiré
pour une durée d'un mois. En outre, il demande l'effet suspensif.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le recours de droit administratif au Tribunal fédéral est ouvert contre une
décision cantonale de dernière instance en matière de retrait du permis de
conduire (art. 24 al. 2 LCR).

Il peut être formé pour violation du droit fédéral, y compris l'excès ou
l'abus du pouvoir d'appréciation (art. 104 let. a OJ). Lorsque le recours
est, comme en l'espèce, dirigé contre la décision d'une autorité judiciaire,
le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés dans l'arrêt attaqué,
sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis
au mépris des règles essentielles de la procédure (art. 105 al. 2 OJ). Cette
disposition interdit donc d'alléguer de nouvelles constatations de fait et
d'invoquer de nouveaux moyens de preuve. Il n'est notamment en principe pas
possible de prendre en considération des changements de circonstances
intervenus ultérieurement; on ne saurait en effet reprocher à une autorité
d'avoir mal constaté les faits au sens de l'art. 105 al. 2 OJ, si ceux-ci se
sont modifiés après sa décision (ATF 126 II 202 consid. 1b p. 205; 125 II 217
consid. 3a p. 221).

2.
Selon l'art. 16 al. 2 LCR, le permis de conduire peut être retiré au
conducteur qui, par des infractions aux règles de la circulation, a compromis
la sécurité de la route ou incommodé le public (1ère phrase); dans les cas de
peu de gravité, un simple avertissement peut être prononcé (2e phrase).
D'après l'alinéa 3 de cette disposition, le permis de conduire doit être
retiré si le conducteur a compromis gravement la sécurité de la route (art.
16 al. 3 let. a LCR). Ainsi, la loi distingue le cas de peu de gravité (art.
16 al. 2 2e phrase LCR), le cas de gravité moyenne (art. 16 al. 2 1ère phrase
LCR) et le cas grave (art. 16 al. 3 let. a LCR).

Aux termes de l'art. 17 al. 1 LCR, l'autorité qui retire un permis de
conduire fixera la durée de ce retrait selon les circonstances; elle sera
cependant d'un mois au minimum (let. a). L'art. 33 al. 2 de l'ordonnance du
27 octobre 1976 du Conseil fédéral réglant l'admission des personnes et des
véhicules à la circulation routière (OAC; RS 741.51) précise que la durée du
retrait d'admonestation doit être fixée surtout en fonction de la gravité de
la faute, de la réputation de l'intéressé en tant que conducteur et de la
nécessité professionnelle de conduire.

3.
Le recourant ne conteste pas le principe du retrait de son permis, mais
demande que la durée de celui-ci soit réduite de deux mois à un mois. Il
estime que sa faute doit être qualifiée de négligence légère, le Tribunal
administratif genevois ayant omis de prendre en considération la mauvaise
configuration du carrefour, le fait que le miroir était sale ainsi que son
inexpérience en tant que conducteur. Il fait en outre valoir son besoin
professionnel du permis; engagé comme chauffeur-livreur et aide magasiner
depuis le 9 décembre 2002, il affirme avoir besoin de son permis de conduire
sur le plan professionnel.

3.1 Selon le recourant, le carrefour offrait aux usagers quittant le "stop"
une mauvaise visibilité en raison, d'une part, de la saleté du miroir et,
d'autre part, de la mauvaise configuration des lieux; il relève à cet égard
que le carrefour a été nouvellement aménagé et que le signal a été avancé. Se
fondant sur le rapport des gendarmes, le Tribunal administratif genevois a
retenu, pour sa part, que la visibilité était bonne, relevant toutefois que,
même si le miroir avait été sale, cela ne diminuait pas la gravité de la
faute du recourant, car le manque de visibilité devait l'inciter à la plus
extrême prudence.

L'autorité cantonale est une autorité judiciaire. Le Tribunal fédéral est
donc lié par les faits constatés dans l'arrêt attaqué, sauf s'ils sont
manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis au mépris des
règles essentielles de la procédure (art. 105 al. 2 OJ; voir consid. 1
ci-dessus). Le recourant ne se prévaut pas de ces deux exceptions et
celles-ci n'apparaissent pas fondées au vu du dossier. Il ressort en effet de
la lettre du 22 juillet 2002 de l'Office genevois des transports et de la
circulation et du plan modifié du carrefour produit par le recourant qu' «
effectivement, le carrefour a été relevé dans son ensemble ». Cela ne
signifie cependant pas pour autant que le carrefour était alors dangereux et
que la visibilité était défectueuse. Il n'est dès lors pas manifestement
inexact de retenir que la visibilité, notamment grâce au miroir placé en face
du "stop", était bonne et que le recourant a manqué d'attention en quittant
le "stop".

3.2 Le recourant invoque en outre le besoin professionnel de son permis.
Selon la jurisprudence, lorsqu'il s'agit d'apprécier le besoin professionnel
de conduire un véhicule à moteur, il convient de respecter le principe de la
proportionnalité. Le conducteur qui ressent plus durement le retrait du
permis de conduire, en raison de ses besoins professionnels, est en règle
générale admonesté de manière efficace et dissuadé de commettre de nouvelles
infractions avec des retraits plus courts. Un tel conducteur doit donc être
privé de son permis moins longtemps que celui qui se limite à un usage
commun, même si les fautes commises sont identiques. La réduction s'opère
ainsi proportionnellement au degré de sensibilité accrue. Il n'existe pas,
d'un côté, des conducteurs qui n'ont aucunement besoin de leur permis et, de
l'autre, des conducteurs qui en ont un besoin impératif, tels que les
chauffeurs professionnels; la gradation est au contraire continue. Cela
étant, la détermination du degré de sensibilité accrue ne permet pas, à elle
seule, de décider si et dans quelle mesure une réduction se justifie. Une
telle question doit être tranchée au regard de toutes les circonstances du
cas (ATF 123 II 572 consid. 2c p. 574 s.).

Il faut tenir compte du besoin professionnel de conduire de l'intéressé au
moment du prononcé du retrait et non de l'infraction. La situation
professionnelle déterminante est celle qui existe au moment où des faits
nouveaux concernant la situation professionnelle peuvent encore être pris en
considération (ATF 128 II 285 consid. 2.4 p. 290; voir ci-dessus consid. 1).
Le Tribunal fédéral étant lié par les faits constatés dans l'arrêt attaqué,
on ne saurait dès lors tenir compte du nouveau poste du recourant, mais il
faut se fonder sur son activité professionnelle au moment du prononcé du
Tribunal administratif genevois, à savoir celle d'agent de sécurité auprès de
T.________. Le Tribunal administratif genevois a retenu à cet égard que le
retrait du permis de conduire n'interdisait pas au recourant l'exercice de
toute son activité lucrative ni n'entraînait une perte de gain importante ou
des frais considérables, dès lors que l'entreprise pouvait le cas échéant lui
déléguer des tâches pour lesquelles il n'avait pas besoin de son permis de
conduire. Le recourant n'a pas contesté cette affirmation. C'est donc à juste
titre que le Tribunal administratif genevois a retenu que le recourant
n'avait pas besoin de son permis sur le plan professionnel.

4.
En conclusion, il faut admettre que le Tribunal administratif genevois n'a
pas excédé sa marge d'appréciation en fixant à deux mois le retrait du permis
de conduire du recourant. Selon la jurisprudence, l'inobservation d'un "stop"
crée en effet un sérieux danger pour la circulation et compromet gravement la
sécurité de la route (Bussy/Rusconi, Commentaire du Code suisse de la
circulation routière, 3e éd., Lausanne 1996, n. 1.5 p. 260, n. 4.4 p. 686;
art. 27 al. 1 LCR et 36 OSR). En quittant un signal "stop" sans prendre les
mesures de prudence nécessaires et en heurtant un motocycliste qui circulait
normalement sur une artère prioritaire, le recourant a donc commis une
infraction qui doit être considérée comme grave ou - à tout le moins - comme
moyennement grave. Par ailleurs, ses antécédents en tant qu'automobiliste ne
sauraient être qualifiés de bons. Titulaire d'un permis de conduire depuis le
26 septembre 2001 seulement, il s'est vu notifier un avertissement pour excès
de vitesse le 8 avril 2002, soit à peine sept mois après l'obtention de son
permis et quelques jours seulement avant les faits de la présente cause.
Enfin, il ne saurait prétendre avoir besoin de son permis de conduire sur le
plan professionnel.

5.
Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté. Le recourant qui succombe
doit supporter les frais judiciaires (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu
d'allouer des dépens à l'autorité qui obtient gain de cause (art. 159 al. 2
OJ). Vu le sort de la cause, la demande d'effet suspensif est devenue sans
objet.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 francs est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant et au
Tribunal administratif de la République et Canton de Genève ainsi qu'au
Service des automobiles du canton de Genève et à l'Office fédéral des routes,
Division circulation routière.

Lausanne, le 24 janvier 2003

Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière: