Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilabteilung 5P.123/2002
Zurück zum Index II. Zivilabteilung 2002
Retour à l'indice II. Zivilabteilung 2002


5P.123/2002/sch

Arrêt du 29 juillet 2002
IIe Cour civile

Les juges fédéraux Bianchi, président,
Nordmann, Hohl,
greffière Mairot.

A. X.________,
recourant, représenté par Me Elie Elkaim, avocat,
avenue Juste-Olivier 11, case postale 1299, 1001 Lausanne,

contre

B.X.________,
intimée, représentée par Me Alain Thévenaz, avocat, rue du Grand-Chêne 5,
case postale 3633, 1002 Lausanne,

art. 9 Cst. (annulation d'un séquestre)

(recours de droit public contre l'arrêt de la Cour des poursuites et
faillites du Tribunal cantonal vaudois du 14 mars 2002)

Faits:

A.
Le divorce des époux A.X.________ et B.X.________ a été prononcé aux USA le
15 mars 1989. Le jugement prévoyait notamment que des biens immobiliers sis
en France et aux USA seraient mis en vente, à condition que les parties se
partagent par moitié le produit de celle-ci. Il ordonnait en outre au mari de
payer à l'épouse la somme de 300'000 USD, représentant une part équitable de
la propriété maritale, ainsi que le 50 % de ses fonds de retraite, payable au
moment où les prestations lui seraient versées, selon un calcul indiqué dans
le jugement.

Le 5 février 1997, B.X.________ fait notifier à A.X.________, par
l'intermédiaire de l'Office des poursuites de Nyon, une poursuite n° 288'922
en paiement de la somme de 297'784 fr.35, créance fondée sur le jugement de
divorce. L'opposition faite par le poursuivi a été définitivement levée à
hauteur de 256'472 fr.55.

Le 5 avril 2000, celui-ci a requis le séquestre, à concurrence de 356'190
fr., plus intérêt, de la créance de la poursuivante à son encontre. Ordonnée
le 6 avril 2000, la mesure a été levée par le Président du Tribunal du
district de Nyon le 12 mai 2000, ensuite de l'opposition de la séquestrée.
Statuant le 23 novembre suivant sur le recours du requérant, la Cour des
poursuites et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud a confirmé
cette décision. Par arrêt du 7 août 2001, le Tribunal fédéral a rejeté le
recours de droit public formé par le requérant.

B.
Donnant suite, le 14 août 2001, à une nouvelle réquisition du poursuivi, le
Président du Tribunal d'arrondissement de La Côte a autorisé, en vertu de
l'art. 271 al. 1 ch. 4 LP, le séquestre de la créance de la poursuivante à
son encontre, d'un montant de 256'472 fr.55, avec intérêt à 10 % dès le 9
juillet 1993, ainsi que de toutes sommes versées à l'Office des poursuites et
faillites de Nyon en faveur de celle-ci.

Par prononcé du 12 septembre 2001, le Président du Tribunal d'arrondissement
de La Côte a admis l'opposition de la débitrice et annulé le séquestre. Cette
décision a été confirmée le 14 mars 2002 par la Cour des poursuites et
faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

C.
Agissant par la voie du recours de droit public pour arbitraire, le requérant
conclut à l'annulation de l'arrêt du 14 mars 2002 et au renvoi de la cause à
l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il
a également sollicité l'octroi de l'effet suspensif.

Invitée à produire des déterminations sur la requête d'effet suspensif,
l'intimée a conclu au rejet de celle-ci.
Des observations sur le fond n'ont pas été requises. L'intimée s'est
toutefois déterminée spontanément à ce sujet.

D.
Par ordonnance du 17 avril 2002, le président de la cour de céans a admis la
demande d'effet suspensif.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Interjeté en temps utile contre un arrêt sur opposition au séquestre rendu en
dernière instance cantonale (SJ 1998 p. 146 consid. 2, non publié aux ATF 123
III 494), le présent recours est recevable au regard des art. 86 al. 1 et 89
al. 1 OJ.

2.
2.1 Dans le cadre du recours contre la décision sur opposition, l'autorité
cantonale supérieure, comme  le premier juge, statue uniquement sous l'angle
de la vraisemblance de la réalisation des conditions du séquestre (Bertrand
Reeb, Les mesures provisoires dans la procédure de poursuite, in RDS 116/1997
II p. 482). Savoir si le degré de vraisemblance exigé par le droit fédéral
est atteint dans le cas particulier est une question relevant de
l'appréciation des preuves (arrêt 5P.150/1996 du 21 mai 1996, consid. 1
publié in SJ 1996 p. 687/688). Dans ce domaine, le Tribunal fédéral se montre
réservé, vu le large pouvoir qu'il reconnaît aux autorités cantonales; la
décision attaquée ne doit, par conséquent, être annulée que si cette
appréciation se révèle arbitraire, c'est-à-dire manifestement insoutenable ou
en contradiction flagrante avec les pièces du dossier (ATF 120 Ia 31 consid.
4b p. 40; 118 Ia 28 consid. 1b p. 30 et les arrêts cités).

2.2 Selon la Cour des poursuites et faillites, le juge de première instance a
retenu que le requérant invoquait, d'une part, une créance de 68'001 fr.13,
représentant la moitié des frais d'entretien de la villa des époux, frais
qu'il aurait assumés seul depuis 1989; d'autre part, une créance de 41'654
fr.20, représentant l'équivalent en francs suisses de deux sommes en dollars
(à savoir 9'070.61 USD et 14'800 USD) mises à la charge de l'épouse par deux
jugements américains des 2 avril 1992 et 21 septembre 1993. En ce qui
concerne ces montants en dollars, le magistrat a considéré qu'ils étaient
certes dus, mais qu'ils avaient déjà fait l'objet de procédés de poursuite,
dans lesquels la débitrice avait valablement opposé en compensation sa propre
créance, qui était supérieure. Quant à la créance en remboursement des
dépenses faites pour la villa propriété des époux, le juge de première
instance a laissé ouverte la question du lien suffisant avec la Suisse, la
créance en question n'étant de toute façon pas rendue assez vraisemblable
pour fonder un séquestre. En effet, la simple copropriété ne faisait pas
présumer la naissance d'une créance pour des dépenses commandées par l'autre
copropriétaire, et l'on ignorait si la débitrice avait la jouissance de
l'immeuble en cause. Toujours selon le juge de première instance, le
séquestre paraissait doublement abusif, d'une part en raison de la
disproportion évidente entre la valeur des biens séquestrés et la valeur de
la créance invoquée contre la débitrice, et d'autre part parce que le
requérant multipliait les procédures similaires alors que l'opposante avait
déjà vu ses droits, notamment à la compensation, maintes fois reconnus.

L'autorité cantonale a considéré que ce prononcé était justifié et devait
être confirmé par adoption des motifs retenus par le premier juge, les moyens
invoqués par le recourant n'étant pas propres à renverser cette décision, en
particulier sur la question de l'abus de droit.

3.
Le recourant reproche à l'autorité cantonale d'avoir fait preuve d'arbitraire
en considérant, d'une part, qu'il aurait abusivement invoqué à l'appui de sa
requête de séquestre deux créances de 15'828 fr.20, respectivement 25'826
fr., fondées sur des jugements américains des 2 avril 1992 et 21 septembre
1993; d'autre part, en retenant que la créance de 68'001 fr.15 portant sur
les frais de la maison sise en France n'avait pas de lien suffisant avec la
Suisse et n'était pas vraisemblable.

3.1 Selon l'art. 90 al. 1 let. b OJ, l'acte de recours doit contenir les
faits essentiels et un exposé succinct des droits constitutionnels ou des
principes juridiques violés et préciser en quoi consiste la violation. Saisi
d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'a donc pas à vérifier
lui-même si la décision attaquée est en tous points conforme au droit et à
l'équité; il n'examine que les moyens invoqués de manière claire et
détaillée. Il n'entre pas en matière sur des griefs insuffisamment motivés ou
sur une critique purement appellatoire de l'arrêt attaqué (ATF 127 I 38
consid. 3c p. 43; 127 III 279 consid. 1c p. 282; 126 III 534 consid. 1b p.
536; 125 I 71 consid. 1c p. 76, 492 consid. 1b p. 495).

3.2 En l'occurrence, le recourant se contente de répéter, de manière
littérale, les griefs soulevés devant la Cour des poursuites et faillites,
sans indiquer en quoi cette autorité aurait nié à tort que les moyens
soulevés devant elle n'étaient pas propres à renverser la décision de
première instance. Son argumentation ne paraît dès lors pas conforme aux
exigences de motivation déduites de l'art. 90 al. 1 let. b OJ. De toute
manière, il ne démontre pas que l'arrêt attaqué serait manifestement
insoutenable dans son résultat. Il est en effet sans pertinence d'affirmer
que la créance fondée sur le remboursement des frais d'entretien de la villa
des époux a bien un lien suffisant avec la Suisse, cette question ayant été
laissée ouverte. Quant à la vraisemblance de cette créance, le recourant ne
s'en prend pas à la motivation du juge de première instance, adoptée par la
cour cantonale, consistant à dire que la simple copropriété ne faisait pas
présumer la naissance d'une créance pour des dépenses commandées par l'autre
copropriétaire et qu'en l'occurrence, on ignorait si la débitrice avait la
jouissance de l'immeuble en cause. En ce qui concerne les montants fondés sur
les jugements américains, le recourant se contente de soutenir, sans rien
démontrer, que l'autorité cantonale a arbitrairement retenu qu'il existait
une disproportion évidente entre la valeur des biens à séquestrer et celle de
la créance invoquée, de sorte que sa requête ne serait pas abusive; pour le
surplus, son grief est purement appellatoire. Le recours apparaît dès lors
mal fondé et doit être rejeté, en tant qu'il est recevable.

4.
Vu l'issue de la procédure, les frais judiciaires seront supportés par le
recourant (art. 156 al. 1 OJ). L'intimée, qui s'est déterminée sur l'effet
suspensif, a droit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ). Il n'y a en revanche pas
lieu de lui en allouer du chef de ses observations sur le fond, dès lors
qu'elle les a déposées sans y avoir été invitée.

Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 6'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le recourant versera une indemnité de 500 fr. à l'intimée à titre de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la
Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois.

Lausanne, le 29 juillet 2002

Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière: