Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilabteilung 5C.248/2002
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5C.248/2002 /frs

Arrêt du 27 février 2003
IIe Cour civile

Les juges fédéraux Raselli, président,
Escher et Hohl,
greffière Bendani.

X. ________,
demandeur et recourant, représenté par Me Jörn-Albert Bostelmann, avocat,
avenue Ritz 31, case postale 2040, 1950 Sion 2,

contre

Y.________ SA,
défenderesse et intimée, représentée par Me Jean-Marc Gaist, avocat, rue
St-Guérin 30, case postale 425, 1951 Sion.

action en libération de dette selon l'art. 83 al. 2 LP/péremption,

recours en réforme contre le jugement de la Cour civile II du Tribunal
cantonal du canton du Valais, du 14 octobre 2002.

Faits:

A.
Donnant suite à une réquisition de la société Y.________ SA, l'office des
poursuites de Martigny a notifié à X.________ un commandement de payer dans
la poursuite n° xxxxx. Le débiteur a formé opposition.

Par décision du 20 mars 2001, expédiée aux parties le 2 avril suivant, le
juge I des districts de Martigny et de St-Maurice a prononcé la mainlevée
provisoire de l'opposition pour le montant de 293'000 francs. Le poursuivi a
reçu cette décision le 3 avril 2001. Il n'a déposé aucun recours contre le
prononcé de la mainlevée.

B.
Le 4 mai 2001, X.________ a déposé auprès du juge I des districts de Martigny
et de St-Maurice un exploit renfermant ses conclusions en libération de
dette, puis, le 18 mai 2001, un mémoire-demande confirmant les conclusions
prises dans son exploit introductif d'instance.

Par décision du 25 octobre 2001, le juge I des districts de Martigny et de
St-Maurice a déclaré l'action en libération de dette irrecevable pour cause
de tardiveté.

Le 28 novembre 2001, la Cour de cassation civile du Tribunal cantonal
valaisan a accordé l'effet suspensif au pourvoi en nullité interjeté par
X.________ contre la décision précitée. Le 25 juin 2002, elle a constaté la
nullité de cette décision au motif que le juge I des districts de Martigny et
de St-Maurice n'était pas compétent pour statuer sur l'exception de droit
matériel tirée de la péremption de l'action en libération de dette. Elle a
transmis d'office la cause à l'autorité compétente, soit la Cour civile II du
Tribunal cantonal.

C.
Par jugement du 14 octobre 2002, la Cour civile II du Tribunal cantonal
valaisan a rejeté l'action en libération de dette pour cause de tardiveté.

D.
X.________ a déposé un recours en réforme contre le jugement précité. Il
conclut à l'annulation de la décision attaquée et demande au Tribunal fédéral
de constater qu'il a introduit son action en libération de dette dans le
délai utile. En bref, il prétend avoir respecté l'art. 83 al. 2 LP et invoque
une violation des art. 48 et suivants OJ.

L'intimée n'a pas été invitée à se déterminer.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Interjeté en temps utile contre une décision finale prise dans une
contestation civile par le tribunal suprême du canton, le recours est
recevable selon les art. 48 al. 1 et 54 al. 1 OJ; il l'est également au
regard de l'art. 46 OJ, la valeur litigieuse étant à l'évidence atteinte.

2.
Le recourant soutient en bref avoir introduit son action en libération de
dette en temps utile.

2.1  Aux termes de l'art. 83 al. 2 LP, le débiteur peut, dans les 20 jours à
compter de la mainlevée, intenter au for de la poursuite une action en
libération de dette. Le calcul de ce délai relève du droit fédéral. Selon la
jurisprudence, si le droit cantonal de procédure prévoit un recours ordinaire
contre le prononcé de la mainlevée, le délai de l'art. 83 al. 2 LP court du
jour où le délai de recours est expiré sans avoir été utilisé, de celui du
retrait du recours ou de la notification de l'arrêt sur recours. Si le
recours contre le prononcé de la mainlevée n'emporte pas d'effet suspensif en
vertu du droit de procédure cantonal et que celui-ci n'a pas non plus été
accordé par décision judiciaire, le délai pour ouvrir action en libération de
dette part de la notification - conformément à la législation cantonale - du
prononcé de la mainlevée (ATF 127 III 569 consid. 4a p. 570 s. et les
références citées). En revanche, si le recours contre le prononcé de la
mainlevée n'emporte pas d'effet suspensif mais que celui-ci est accordé par
la juridiction de recours ou son président, le délai pour ouvrir action en
libération de dette court dès la communication de la décision sur recours de
la juridiction supérieure. Dans ce cas, en effet, l'octroi de l'effet
suspensif sort ses effets ex tunc, à savoir rétroagit à la date de la
décision attaquée. Ce résultat permet non seulement d'éviter d'avoir à
qualifier d'ordinaire ou d'extraordinaire le recours ouvert contre le
prononcé de la mainlevée, ce qui n'est pas toujours aisé et risque de créer
des disparités cantonales, mais permet aussi de faciliter le contrôle du
respect du délai pour ouvrir action. Le débiteur doit toutefois prendre les
dispositions nécessaires afin que sa demande ne soit pas déclarée tardive, le
risque subsistant que l'effet suspensif ne soit pas octroyé à son recours
(ATF 127 III 569 consid. 4b p. 571 s.).
2.2  La cour cantonale a relevé que le législateur valaisan a prévu une voie
de recours extraordinaire qui n'emporte pas d'effet suspensif, sauf décision
contraire du juge, contre la décision de mainlevée rendue par le juge de
district (art. 30 al. 1 let. b et al. 2 LALP/VS et 227 al. 1 et 231 al. 1
CPC/VS). Par conséquent, en l'absence de recours, le délai pour ouvrir action
en libération de dette part, non pas à l'échéance du délai de recours, mais
au jour de la notification de la décision de mainlevée. Elle a constaté que
le recourant a introduit son action en libération de dette du 4 mai 2001
tardivement, puisque la décision de mainlevée lui a été notifiée le 3 avril
2001 et que le délai de 20 jours de l'action précitée est arrivé à échéance
le 23 avril suivant.

2.3  Dans la mesure où le recourant soutient que, contrairement à ce qu'a
jugé la cour cantonale, le pourvoi en nullité prévu par le législateur
valaisan contre le prononcé de la mainlevée peut être considéré comme une
voie de recours ordinaire dotée de l'effet suspensif ex lege, son recours en
réforme est irrecevable. En effet, il conteste ainsi l'interprétation du
droit cantonal par les autorités cantonales, ce qui ne peut faire l'objet que
d'un recours de droit public (cf. art. 43 al. 1 et 55 al. 1 let. c in fine
OJ).

2.4  Lorsqu'il soutient que l'effet suspensif accordé au recours par la cour
de cassation civile du Tribunal cantonal valaisan le 28 novembre 2001 ferait
courir le délai de 20 jours dès le jugement du 14 octobre 2002, le recourant
perd de vue qu'il ne s'agit pas d'un effet suspensif accordé par le juge
saisi d'un recours contre la décision de mainlevée, mais de l'effet suspensif
octroyé par la cour de cassation civile saisie du pourvoi en nullité contre
la décision déclarant irrecevable l'action en libération de dette. Cet effet
suspensif ne peut pas exercer d'influence sur le calcul du délai pour ouvrir
cette action.

2.5  Le recourant prétend aussi que l'application que la cour cantonale a
faite de la procédure valaisanne violerait l'art. 48 OJ. Il affirme que,
lorsque la contestation relève des art. 49 et 50 OJ, alors soit le pourvoi en
nullité (art. 226 ss CPC/VS) devrait être doté de l'effet suspensif ex lege
et considéré comme une voie de recours ordinaire, soit l'appel (art. 214
CPC/VS) devrait être ouvert contre la décision de mainlevée, contrairement à
ce que prévoit l'art. 30 LALP/VS.

2.5.1  La question de savoir si la cour cantonale a correctement appliqué le
droit cantonal ne peut être revue dans le cadre d'un recours en réforme (art.
55 al. 1 let. c in fine OJ; ATF 125 III 305 consid. 2e p. 311), à moins que
la bonne application d'une norme fédérale ne soit en jeu. Si tel est le cas,
il convient uniquement de se demander si l'application qui a été faite par la
cour cantonale des règles cantonales de procédure aboutit à un résultat
respectant le principe de la force dérogatoire du droit fédéral (ATF 119 II
183 consid. 5a; Corboz, Le recours en réforme au Tribunal fédéral, SJ 2000 II
p. 36).

2.5.2  Les décisions sur la mainlevée rendues en procédure sommaire (art. 25
ch. 2 let. a LP) ne sont pas finales au sens de l'art. 48 OJ et ne tranchent
pas non plus une contestation civile au sens des art. 44 ss OJ. Elles ne
peuvent pas faire l'objet d'un recours en réforme (cf. ATF 98 Ia 348 consid.
1 p. 350; Walter A. Stoffel, Voies d'exécution Poursuite pour dettes,
exécution de jugement et faillite en droit suisse, Berne 2002, p. 104, n° 88;
Pierre-Robert Gilliéron, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour
dettes et la faillite, ad art. 82, p. 1289, n° 114). C'est donc à raison que
la cour cantonale a retenu que le pourvoi en nullité prévu par la procédure
valaisanne (art. 226 CPC/VS) contre la décision de mainlevée ne devait par
conséquent pas être assorti d'un effet suspensif ex lege. Contrairement à ce
qu'il soutient, le recourant n'est pas privé de son droit de recourir en
réforme, puisque le droit fédéral ne lui ouvre pas un tel recours. Le grief
de violation du droit fédéral est donc infondé.

3.
Sur le vu de ce qui précède, le recours en réforme doit être rejeté dans la
mesure où il est recevable.

Le recourant qui succombe est condamné aux frais de la procédure (art. 156
al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens à l'intimée qui n'a pas été
invitée à répondre (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 5'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la
Cour civile II du Tribunal cantonal du canton du Valais.

Lausanne, le 27 février 2003

Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière: