Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilabteilung 5C.232/2002
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5C.232/2002 /frs

Arrêt du 23 décembre 2002
IIe Cour civile

Les juges fédéraux Bianchi, président,
Nordmann, Hohl,
greffier Braconi.

M.X.________,
représentée par Me Marie-Flore Dessimoz, avocate,
chemin du Grand-Puits 42, 1217 Meyrin,

contre

1. A. et J.B.________,

2. S.D.________,

3. C.E.________,

4. M.D.________,

5. O.D.________,
intimés, représentés par Me Philippe Schmidt, avocat,
place des Philosophes 8, 1205 Genève.

art. 674 al. 3 CC; droit d'empiétement,

recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice
du canton de Genève du 13 septembre 2002.

Faits:

A.
Les époux D.________, auxquels ont succédé les hoirs D.________, à savoir
S.D.________, C.E.________, M.D.________ et O.D.________, étaient
propriétaires depuis le 26 février 1971 de la parcelle n° DDDD, feuille XX,
de la commune de Z.________ (parcelle A), sur laquelle ont été construits en
1971-1972 une villa et un garage; ils ont vendu cette parcelle en cours de
procédure, le 20 avril 2000, aux époux A. et J.B.________. Le 20 avril 1972,
X.________ a acquis la propriété de la parcelle adjacente n° XXXX, feuille XX
(parcelle B). La parcelle  n° YYYY de la même commune (parcelle de desserte)
supporte, quant à elle, la voie d'accès aux parcelles A et B, et appartient
en copropriété aux propriétaires des parcelles A et B ainsi qu'à un tiers
propriétaire.

B.
Depuis le 30 mai 1997, une procédure judiciaire oppose les époux D.________,
auxquels ont succédé les hoirs D.________, puis les époux B.________, à
X.________. Les parties sont en litige au sujet du garage implanté en limite
de propriété sur la parcelle A, dont l'avant-toit et le chéneau empiètent en
surplomb de 50 cm environ sur la parcelle B, de la clôture, des plantations
et de la boîte aux lettres installées par X.________ sur la parcelle de
desserte, ainsi que de la distance aux limites et la hauteur de leurs
plantations respectives.

Par jugement du 13 septembre 2001, le Tribunal de première instance de Genève
a, notamment, attribué au profit de la parcelle des demandeurs A. et
J.B.________ une servitude d'empiétement sur celle de la défenderesse
X.________ et condamné celle-ci à enlever la clôture installée sur la
parcelle de desserte; il a rejeté les conclusions reconventionnelles de la
défenderesse tendant à ce que les demandeurs soient condamnés à supprimer
l'avant-toit et le chéneau de leur garage et à lui verser diverses sommes
pour le cas où elle devrait retirer la clôture et les arbustes de la parcelle
de desserte.

Statuant le 13 septembre 2002 sur appel de la défenderesse et appel incident
des demandeurs, la Cour de justice a confirmé cette décision.

C.
Agissant par la voie du recours en réforme au Tribunal fédéral contre cet
arrêt, X.________ conclut, avec suite de frais et dépens des instances
cantonales et fédérale, à ce que les demandeurs soient déboutés de leurs
conclusions visant à l'octroi d'une servitude d'empiétement au profit de leur
parcelle et à l'enlèvement des aménagements, en particulier de la clôture,
réalisés sur la parcelle de desserte et, «sur demande reconventionnelle», à
ce qu'ils soient condamnés à supprimer l'avant-toit et le chéneau de leur
garage et, pour le cas où elle-même devrait enlever sa clôture et/ou ses
plantations de la parcelle de desserte, à payer les frais de cette opération
ainsi qu'à lui rembourser le tiers de la valeur de sa clôture, à estimer par
expert. A titre subsidiaire, elle demande le renvoi de la cause à l'autorité
cantonale pour complément des constatations de fait et nouvelle décision.

Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité du recours
qui lui est soumis (ATF 128 II 311 consid. 1 p. 315 et les arrêts cités).

1.1 Partant de la prémisse erronée que le présent litige n'est «pas de nature
patrimoniale» (cf. ATF 78 II 131 consid. 1 p. 133; 108 II 35 consid. 1, non
publié; 127 III 10 consid. 1, non publié), la recourante s'abstient
d'indiquer que la valeur litigieuse est atteinte (art. 55 al. 1 let. c OJ);
l'arrêt attaqué est aussi lacunaire à cet égard (art. 51 al. 1 let. a OJ). Vu
le sort du recours, il n'y a toutefois pas lieu d'approfondir cet aspect de
la recevabilité.

1.2 Bien que l'acte de recours mentionne comme parties intimées S.D.________,
C.E.________, M.D.________ et O.D.________, dont la demande principale a fait
l'objet du jugement de première instance, confirmé par l'arrêt cantonal, il
ressort des conclusions du recours en réforme et de ses motifs que seuls les
époux A. et J.B.________, actuels propriétaires de la parcelle A, sont mis en
cause. Il s'ensuit que le recours est irrecevable en tant qu'il est dirigé
contre les hoirs D.________.

1.3 En vertu de l'art. 55 al. 1 let. b (1ère phrase) OJ, l'acte de recours
doit indiquer exactement les points attaqués de la décision et les
modifications demandées. La jurisprudence admet que cette exigence est
néanmoins réalisée lorsque le but et l'objet du recours ressortent d'emblée
de l'argumentation du recourant ou de la décision attaquée (ATF 110 II 74
consid. I/1 p. 78 et les arrêts cités).

En l'espèce, les deux chefs de conclusions du recours dits «sur intervention»
ne correspondent pas aux chiffres du dispositif du jugement, confirmé par
l'arrêt cantonal, et les chefs de conclusions dits «sur demande
reconventionnelle» ne précisent pas quel point du dispositif est entrepris.
En soi, une telle formulation ne satisfait pas à l'art. 55 al. 1 let. b OJ;
dans la mesure où l'on peut cependant déduire des motifs du recours quels
sont les points de la décision attaquée dont la défenderesse sollicite la
modification, le recours est recevable. Il s'agit, en l'occurrence, des
points suivants:

- En premier lieu, la défenderesse s'en prend au chiffre 1 du dispositif «sur
intervention», qui attribue au profit de la parcelle des demandeurs une
servitude d'empiétement sur la sienne (art. 674 al. 3 CC), à savoir pour leur
garage implanté en limite de propriété, dont l'avant-toit et le chéneau
empiètent en surplomb d'une cinquantaine de centimètres sur son fonds; la
défenderesse conclut au rejet de la demande et, reconventionnellement, à la
suppression de l'avant-toit et du chéneau (infra, consid. 2).

- En deuxième lieu, la défenderesse critique le chiffre 2 du dispositif «sur
intervention», qui la condamne à enlever, dans le délai d'un mois à compter
de l'entrée en force du jugement, la clôture installée sur la parcelle de
desserte; bien que son chef de conclusions n° 2 «sur intervention» vise la
«suppression des aménagements, en particulier la clôture», il ne résulte pas
des motifs du recours qu'elle remette en discussion son obligation de
respecter les distances et la hauteur des plantations; elle déclare, au
contraire, que l'autorité cantonale a admis à juste titre que les plantations
d'agrément ne créent aucune difficulté et n'entravent pas l'accès à la
parcelle (infra, consid. 3).

- En troisième lieu, la défenderesse conclut à la condamnation des demandeurs
à prendre en charge solidairement les frais d'enlèvement de la clôture et/ou
des plantations, ainsi qu'à lui rembourser un tiers de la valeur des
plantations si, par impossible, leur enlèvement devait être ordonné (infra,
consid. 4).

1.4 Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral fonde son arrêt sur
les faits tels qu'ils ont été constatés par la dernière autorité cantonale, à
moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été
violées, qu'il y ait lieu de rectifier des constatations reposant sur une
inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter les
constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte
de faits pertinents, régulièrement allégués et prouvés (art. 64 OJ; ATF 127
III 248 consid. 2c p. 252). Hormis ces exceptions, il ne peut être présenté
de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyens de
preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ).

Il y a inadvertance manifeste lorsque l'autorité cantonale a omis de tenir
compte d'une pièce déterminée, versée au dossier, ou l'a mal lue, s'écartant
par mégarde de sa teneur exacte, en particulier de son vrai sens littéral
(ATF 109 II 159 consid. 2b p. 162; 104 II 68 consid. 3b p. 74). Il ne suffit
pas qu'elle ait mal apprécié les preuves, un tel grief n'étant recevable que
dans un recours de droit public pour violation de l'art. 9 Cst. (sur cette
distinction: Poudret, Commentaire de la loi fédérale d'organisation
judiciaire, vol. II, n. 1.6.3 ad art. 55 et n. 5.4 ad art. 63 OJ). Enfin,
l'inadvertance doit être causale, c'est-à-dire porter sur une constatation
qui peut influer sur le sort du recours (Poudret, op. cit., n. 1.6.2 ad art.
55 OJ).

2.
S'agissant de l'octroi de la servitude d'empiétement, la défenderesse soulève
deux inadvertances manifestes, l'omission d'un fait déterminant et la
violation des art. 8 et 674 al. 3 CC.

2.1 Aux termes de l'art. 674 al. 3 CC, lorsque le propriétaire lésé, après
avoir eu connaissance de l'empiétement, ne s'y est pas opposé en temps utile,
l'auteur des constructions et autres ouvrages peut demander, s'il est de
bonne foi et si les circonstances le permettent, que l'empiétement à titre de
droit réel ou la surface usurpée lui soient attribués contre paiement d'une
indemnité équitable. Pour décider si l'attribution est justifiée par les
circonstances, le juge doit peser les intérêts en présence, notamment tenir
compte de la facilité ou de la difficulté de supprimer l'empiétement, de sa
durée, de l'intensité de la dépréciation subie par le fonds objet de
l'empiétement et de l'utilisation faite de la construction (Steinauer, Les
droits réels, t. II, 3e éd., n. 1655 et les références citées).

2.2 Il ressort de la décision attaquée que, par acte notarié du 9 novembre
1971, le propriétaire de la parcelle B avait cédé gratuitement aux
propriétaires de la parcelle A, à savoir les époux D.________, une bande de
terrain de 4 m2 longeant la façade nord du garage; le tableau de mutation n°
XXXXX, établi en vue de cette rectification de limite de propriété avec
changement de surface, n'a toutefois pas été inscrit au registre foncier.
Lorsqu'elle a acquis la parcelle B en 1972, la défenderesse n'a pas eu
connaissance de cet accord; en tant qu'acquéreur de bonne foi, elle doit donc
être maintenue dans son droit de propriété sur l'intégra-lité de sa parcelle,
même si, croyant que la convention lui était opposable, elle a entamé des
démarches en 1973 en vue de la restitution de la surface dont son immeuble
avait été amputé. Le tableau de mutation n° XXXXX n'a ainsi introduit aucune
modification à cet égard, les époux D.________ ayant finalement renoncé à en
contester la validité. La défenderesse a en outre admis dans ses écritures
«avoir toléré pendant plusieurs années» la saillie d'environ 50 cm formée par
l'avant-toit et le chéneau et conteste avoir expressément accepté en 1973
d'inscrire une servitude d'empiétement au profit de la parcelle des
demandeurs; le comportement qu'elle a adopté n'en constitue pas moins «un
indice solide de ce qu'elle n'avait aucune objection à formuler à l'encontre
de cet empiétement». Enfin, la cour cantonale a considéré que, vu leurs
explications concernant la construction du garage, les époux D.________
étaient de bonne foi. Il s'ensuit que les conditions posées par l'art. 674
al. 3 CC sont remplies.

2.3
2.3.1La défenderesse reproche à l'autorité cantonale d'avoir retenu qu'elle
ne s'était pas opposée à l'empiétement en temps utile.

Lorsqu'elle affirme que, après avoir obtenu la rectification de limite en
1973, elle a simplement toléré le débordement sur son fonds de l'avant-toit
du garage, sans prendre aucun engagement à ce sujet, notamment pas celui de
conférer un droit d'empiétement, la défenderesse s'en prend, en réalité, à
l'appréciation des preuves par la cour cantonale, ce qui est irrecevable en
instance de réforme (ATF 119 II 84 consid. 3 p. 85 et la jurisprudence
citée). En tant qu'elle prétend que sa tolérance ne peut être assimilée à une
absence d'opposition au sens de l'art. 674 al. 3 CC, sa critique est
dépourvue de motivation, en sorte qu'elle est irrecevable (art. 55 al. 1 let.
c OJ; ATF 116 II 745 consid. 3 p. 749).

Autant qu'on le comprend, l'argument tiré de la cession à titre gratuit des 4
m2 par le précédent propriétaire, attribution «qui ne saurait être
interprétée comme une absence d'opposition du propriétaire lésé», est ainsi
dénuée d'incidence sur le sort de cette condition.

2.3.2 La défenderesse conteste ensuite que les auteurs de l'empiétement
soient de bonne foi. Elle fait valoir que, au moment de l'édification de la
parcelle des demandeurs, les «constructeurs ont délibérément choisi de ne pas
respecter les plans et les conditions de l'autorisation de construire», qui
imposaient pour le garage une distance d'un mètre à la limite de propriété,
raison pour laquelle une cession de 4 m2 de terrain supplémentaire avait été
négociée avec le vendeur.

Cette argumentation se heurte cependant aux constatations de fait de
l'autorité cantonale relatives à ce que savaient et ignoraient les intéressés
(ATF 126 III 505 consid. 5 p. 511; 123 III 129 consid. 3c p. 136); elle est,
par conséquent, irrecevable dans un recours en réforme (art. 55 al. 1 let. c
OJ).

2.3.3 Enfin, la défenderesse soutient que la cour cantonale n'a pas examiné
si l'attribution était justifiée par les circonstances; niant que tel soit le
cas, elle conclut, à titre subsidiaire, au renvoi de la cause à la
juridiction précédente pour complètement de l'état de fait et nouveau
jugement.

Il est vrai que, dans sa subsomption, l'autorité cantonale n'a pas repris
cette condition, qu'elle avait pourtant citée dans son exposé théorique, se
limitant à préciser que les demandeurs devront faire en sorte d'éviter, lors
des travaux de rénovation de l'avant-toit et du chéneau du garage, que
l'écoulement de l'eau pluviale s'effectue sur la parcelle de la défenderesse.
Il résulte toutefois des faits constatés par l'arrêt entrepris que l'intérêt
des demandeurs à l'empiétement consiste à pouvoir maintenir l'implantation au
sol de leur garage - qui existe depuis 30 ans - en limite de propriété, ainsi
que l'avant-toit et le chéneau en surplomb, alors que, de son côté, la
défenderesse allègue seulement, mais sans le prouver, qu'une telle situation
a pour conséquence que l'eau pluviale déborde régulièrement du chéneau et
transforme en «marécage» la partie de sa parcelle longeant le garage. Le
jugement de première instance a retenu à ce sujet que la destruction du
garage serait totalement disproportionnée, qu'une quelconque dépréciation de
la parcelle B en raison de l'empiétement n'est pas établie et que, partant,
les circonstances de l'espèce justifient pleinement l'octroi de la servitude.
La cour cantonale en fait état lorsqu'elle expose que, de l'avis du Tribunal
de première instance, la destruction d'une partie du garage serait totalement
disproportionnée. Dans ces conditions, force est d'admettre qu'elle a  fait
sien l'avis du premier juge sur ce point.

A l'encontre de cette opinion, la défenderesse fait valoir que, après 30 ans,
le garage se trouve dans un «état de délabrement» qui nécessite une réfection
complète, que, dans le cadre de sa remise en état (partiellement effectuée),
la suppression de l'empiétement actuel peut s'effectuer sans aucune
difficulté et sans dépense exagérée, tandis que son maintien est
incontestablement source de désagréments pour elle en raison de l'écoulement
des eaux pluviales depuis la toiture du garage sur son terrain. Dirigée
contre les constatations de fait, cette critique est irrecevable dans un
recours en réforme (art. 55 al. 1 let. c OJ).

2.4 La défenderesse invoque enfin deux inadvertances manifestes et l'omission
d'un fait déterminant.

Vu le sort du grief relatif à l'absence d'opposition en temps utile (supra,
2.3.1), l'inadvertance manifeste en relation avec la restitution des 4 m2 de
terrain qui aurait, d'après l'autorité cantonale, été acceptée par
l'intéressée en échange de la constitution d'une «servitude d'empiétement et
de distance et vue droite» est sans pertinence.

Vu le sort des griefs sur le fond (supra, 2.3), la précision que la
défenderesse entend faire apporter, à savoir que, outre l'avant-toit et le
chéneau, la colonne d'eaux pluviales empiète aussi sur sa parcelle, se révèle
pareillement dénuée de pertinence. Il en va de même de l'omission d'un fait
déterminant, c'est-à-dire les travaux qu'auraient entrepris les demandeurs
«au niveau de l'avant-toit, du chéneau et de la descente d'eaux pluviales».

3.
Concernant l'enlèvement de la clôture installée sur la parcelle de desserte,
la défenderesse se plaint de deux inadvertances manifestes et d'une violation
des art. 647, 648 et 679 CC.

3.1 Selon l'arrêt attaqué, il est établi que les copropriétaires ont donné
autrefois leur accord à ce que la défenderesse puisse avoir la jouissance de
cette partie de terrain, pour autant qu'elle ne plante pas d'arbres et
n'entrave pas l'accès aux canalisations qui s'y trouvent, encore que les
témoignages ne soient pas sans équivoque quant à la portée de ce droit
(autorisation de planter des arbres ou des arbustes). Cet accord vaut
règlement d'utilisation de la parcelle au sens de l'art. 647 CC. Or, la
défenderesse ne l'a pas respecté intégralement, car elle a rendu l'accès aux
canalisations plus difficile par la mise en place de sa clôture, dont
l'utilité est d'ailleurs difficile à saisir; aussi est-ce à juste titre que
le premier juge en a ordonné l'enlèvement. Pour le surplus, il n'a pas été
démontré que les arbres et végétaux d'agrément entravent l'accès à la
parcelle des demandeurs; lesdites plantations, tolérées jusqu'ici, doivent
cependant respecter les critères de hauteur et de distance fixés par la loi.

3.2 Se fondant sur le témoignage des époux S.________, tel qu'il ressort du
procès-verbal d'enquêtes du 17 mai 1999, et sur la lettre qu'elle a adressée
à son notaire le 5 septembre 1973 au sujet de la convention passée entre les
copropriétaires, la défenderesse reproche d'abord à la cour cantonale d'avoir
attribué à cet accord une nature et une teneur en contradiction avec le texte
de ces pièces; en effet, il ne s'agirait pas seulement d'une jouissance à
bien plaire, mais d'un «droit d'usage particulier», sous la réserve de ne pas
planter d'arbres entravant l'accès aux canalisations ou menaçant celles-ci.
Sous le couvert d'inadvertance manifeste, la défenderesse s'en prend, en
réalité, à l'appréciation des preuves par l'autorité cantonale, grief qui ne
peut être soulevé qu'à l'appui d'un recours de droit public pour arbitraire
(supra, 1.4).

Ensuite, la défenderesse demande que l'état de fait soit précisé en ce sens
que les conduites situées sous la parcelle de desserte «sont les
alimentations en eau, en électricité et en téléphone», et non les
«canalisations d'eaux pluviales et d'eaux usées de la parcelle A». On ne voit
toutefois pas en quoi cette précision aurait une influence sur l'issue du
recours, et la défenderesse ne l'indique pas davantage (supra, 1.4). Le moyen
est dès lors irrecevable.

3.3 D'après la défenderesse, l'accord entre les copropriétaires vaut
«règlement d'utilisation» au sens de l'art. 647 CC, et non seulement
«jouissance accordée à bien plaire»; aux termes de ce règlement, elle peut
profiter de cette bande de terrain et en user dans la mesure où elle
n'entrave pas l'accès aux canalisations situées sous le terrain, ni ne risque
de les endommager.

L'autorité cantonale, à la suite du Tribunal de première instance, ayant
retenu que l'accès aux canalisations est rendu plus difficile par la mise en
place de la clôture, les critiques de la défenderesse s'avèrent irrecevables.
Ainsi, lorsqu'elle soutient que sa clôture n'empêche ni ne restreint l'accès
des copropriétaires aux conduites, elle remet en cause les constatations de
fait de la cour cantonale, ce qui est exclu dans un recours en réforme (art.
55 al. 1 let. c OJ). De même, en affirmant que la pose d'une clôture n'a
jamais été exclue, mais que, au contraire,  les copropriétaires l'ont
expressément autorisée, elle s'en prend également aux constatations relatives
à la volonté des parties, lesquelles ressortissent au fait (supra, 2.3.2).
Enfin, le moyen pris de l'art. 679 CC est irrecevable, faute de lésion: en
effet, aucune responsabilité du chef de cette disposition n'a jamais été
imputée à la défenderesse en rapport avec l'édification de la clôture.

4.
Quant au remboursement des frais d'enlèvement de la clôture et du tiers de la
valeur des plantations, l'autorité cantonale a rejeté ces prétentions par le
motif que la défenderesse n'a produit qu'un ensemble disparate de factures et
de quittances inaptes à démontrer la réalité des frais qu'elle allègue, et
dont on ne sait dans quelle mesure elles concernent spécifiquement la bande
de terrain annexée ou, plus vraisemblablement, la parcelle B dans son
ensemble.

La défenderesse se borne à objecter que l'enlèvement de la clôture litigieuse
lui occasionnera de nouveaux frais pour clore sa parcelle, «en vue d'en
préserver la sécurité, la propreté et la tranquillité», et que les frais en
résultant devraient logiquement être mis à la charge des demandeurs. Faute de
comporter une réfutation des motifs de l'autorité cantonale, ce grief est
irrecevable (art. 55 al. 1 let. c OJ).

5.
Le sort des frais et dépens de la procédure cantonale ne peut être critiqué
par la voie du recours en réforme, cette question étant exclusivement régie
par le droit cantonal (Messmer/Imboden, Die eidgenössischen Rechtsmittel in
Zivilsachen, Zurich 1992, n° 30 et les références). Le chef de conclusions,
par ailleurs non motivé, tendant à ce qu'ils soient supportés par les intimés
est, en conséquence, irrecevable (art. 43 al. 1 et 55 al. 1 let. c in fine
OJ).

6.
Vu l'issue du présent recours, l'émolument judiciaire doit être mis à la
charge de la recourante (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer de
dépens aux intimés, qui n'ont pas été invités à répondre.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est irrecevable.

2.
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge de la recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 23 décembre 2002

Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier: