Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilabteilung 4C.383/2002
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4C.383/2002 /ech

Arrêt du 22 décembre 2003
Ire Cour civile

MM. et Mmes les Juge Corboz, Président, Walter, Klett, Rottenberg Liatowitsch
et Nyffeler.
Greffier: M. Ramelet.

X. ________ SA,
défenderesse et recourante, représentée par Me Jean-Christophe Diserens,

contre

A.________,
demanderesse et intimée, représentée par Me Odile Cavin,

contrat de travail; égalité  entre femmes et hommes,

recours en réforme contre le jugement de la Cour civile du Tribunal cantonal
vaudois du 22 novembre 2001.

Faits:

A.
A.a A.________ (la demanderesse), née le 1er octobre 1950 (art. 64 al. 2 OJ),
licenciée en sciences politiques et en droit, est titulaire du brevet
d'avocat genevois depuis 1982. Après avoir pratiqué le barreau dans deux
études d'affaires internationales réputées sur la place de Genève, elle a
travaillé, du 1er août 1989 au 28 février 1993, comme avocat-conseil au sein
d'un groupe spécialisé dans le négoce de produits agro-alimentaires, dénommé
"Y.________ SA". Ayant perdu son emploi en raison d'une restructuration du
groupe, elle s'est retrouvée quelques mois au chômage avant d'être engagée
dès le 23 août 1993 par X.________ SA (ci-après: X.________ ou la
défenderesse) en qualité de juriste/secrétaire générale. X.________ est une
société multinationale comportant de nombreuses filiales à l'étranger, qui a
pour but la prise de participations dans des affaires financières,
commerciales, industrielles, mobilières et immobilières; à cette époque,
l'actionnaire majoritaire de X.________ était la Banque Z.________, dont
l'actionnaire unique était la société française W.________ SA.

Jusqu'en 1994, B.________ était le président de X.________. C'est ensuite
C.________ qui a pris les rênes de la société; C.________ était en même temps
directeur général adjoint du groupe Banque Z.________/W.________, à Paris. En
1995, pour des raisons qui seront explicitées ci-dessous, C.________ a été
contraint de démissionner de la présidence de X.________.

A. ________ a succédé au sein de la défenderesse à D.________, né le 9
novembre 1941. B.________ avait précisé à l'intéressée qu'elle serait d'une
aide précieuse pour les opérations de "Trade Finance" (ingénierie financière
d'échanges commerciaux et internationaux), nouveau domaine d'activité de
X.________.

A son entrée en fonction, A.________ a perçu un salaire mensuel brut de 9320
fr., qui a été porté à 10 770 fr. brut dès le 1er janvier 1994 versé treize
fois, d'où une rémunération annuelle brute de 140 000 fr. pour l'année 1994.
Selon son contrat de travail, elle avait droit, "en dérogation à l'article 24
du Règlement général du personnel", à cinq semaines de vacances par année et
bénéficiait d'un délai de résiliation de trois mois après le temps d'essai.
Lors de la séance du conseil d'administration de X.________ du 23 septembre
1993, A.________ a été nommée secrétaire dudit conseil et sous-directrice. Il
est précisé dans le procès-verbal de la séance que, "dans un proche avenir",
la prénommée pourra être proposée au rang de directrice-adjointe. Il a été
constaté que D.________ avait été désigné directeur-adjoint de X.________ à
son entrée en fonction, en août 1986.

A partir d'octobre 1994, A.________ a été membre du conseil d'administration
de sept sociétés, filiales du groupe X.________. Elle a résilié l'ensemble de
ses mandats en décembre 1995 en raison des risques qu'ils comportaient, sans
aucun préjudice pour son salaire.

A.b A.________ occupait un poste à responsabilité au sein de la défenderesse.
Elle conseillait la direction générale et contribuait à l'élaboration de
décisions concernant la politique générale de X.________ en émettant des
suggestions. Son poste était comparable à celui occupé par son prédécesseur
D.________, même si, selon B.________, elle n'était pas aussi proche de la
direction générale et n'avait pas autant d'influence que D.________. Le
président B.________ a toutefois admis qu'il ignorait la nature des
responsabilités que C.________, devenu président de la société, avait
confiées à A.________. Cette dernière coordonnait encore les opérations
juridiques du groupe, singulièrement celles traitées par le bureau de
Lausanne, engageait et suivait les procédures judiciaires et arbitrales avec
l'aide des mandataires extérieurs, assistait les responsables de X.________
en matière de "Trade Finance", rédigeait des contrats, notamment ceux
relatifs aux acquisitions de sociétés, et participait à la rédaction de
certains textes publiés dans le rapport annuel de la société.

A la fin 1994, X.________ est entrée dans une zone de turbulences. C.________
a en effet incité X.________ à acquérir la société U.________, ex- filiale de
la Banque Z.________. Dans le cadre de cette opération, C.________ a accordé
des prêts par 15 millions de francs suisses à W.________ SA et des dépôts par
10 millions des mêmes francs à la Banque Z.________, alors que ces deux
sociétés étaient en difficulté financière. Il en est résulté une grave crise
structurelle au sein de la défenderesse, dont l'existence même a été mise en
péril, car les deux sociétés dont elle était créancière étaient tombées en
redressement judiciaire et ne pouvaient pas honorer leurs dettes. Cette
situation a conduit  C.________ à présenter sa démission en 1995.

A. ________ a alors été chargée d'organiser et de suivre toutes les
procédures destinées au recouvrement des avances consenties à W.________ SA
et à la Banque Z.________. Elle a ainsi  dirigé, tant en Suisse qu'en France,
les procédures de séquestre, les actions en contestation de revendication y
relatives, les procédures en reconnaissance de jugements étrangers, les
recours au Tribunal fédéral et a participé à des procédures arbitrales, tout
en suivant, avec l'appui de conseils français, les procédures françaises de
redressement judiciaire et les questions de droit international privé qui se
posaient.

Les qualités professionnelles de la demanderesse, en particulier sa
diligence, son professionnalisme et son sens aigu du droit, ont été
reconnues. L'un des avocats français mandatés par X.________ a relevé que
A.________ avait joué un rôle essentiel dans le succès des procédures
engagées.

A.c
A.c.aCe contexte a péjoré les relations déjà difficiles qu'entretenait
A.________ avec C.________. Des différends sont apparus à propos de la prise
de vacances et de rattrapage d'heures supplémentaires. Il a en outre été
reproché à l'avocate, qui avait conservé son domicile à Genève et se
déplaçait en train, d'être moins présente sur son lieu de travail que les
autres membres de la direction.

De plus, dès l'automne 1994, A.________ s'est trouvée à maintes reprises en
désaccord avec le président C.________, parce qu'elle s'efforçait de
sauvegarder les intérêts propres de X.________.

A partir de janvier 1995, elle a été privée de secrétaire personnelle.

A.c .bLe 3 octobre 1995, A.________ a écrit la lettre suivante à C.________:
"(...) lors d'un entretien que nous avons eu le 2 décembre 1994, je vous
avais demandé d'adapter mes conditions salariales à celles pratiquées dans la
Société à Lausanne pour des personnes portant des responsabilités
équivalentes. En guise de réponse, vous avez accepté d'augmenter mon salaire
de FS 10'000 par an dès janvier 1995, ce qui - après 16 mois de service -
faisait passer mes revenus de FS 140'000 à FS 150'000 par an, tandis que mes
frais de déplacement (FS 3'500 par an) n'étaient pas pris en charge:
(...)
A l'appui de ma requête, je vous avais indiqué que je venais d'apprendre que
mon prédécesseur, M. D.________, percevait un salaire supérieur au mien de FS
52'000 par an ...
(...)
Je demande donc une augmentation de salaire avec effet rétroactif au 1er
juillet, équivalant à un montant total de 208'000 francs par an. Cette somme
correspond en effet tant aux salaires pratiqués à l'intérieur de la Société
qu'à ceux pratiqués sur le marché des banques et sociétés financières pour un
avocat ayant eu dix ans de pratique de barreau dans deux études
internationales prestigieuses et maîtrisant parfaitement trois langues
étrangères (...)".
X. ________, sous la plume de C.________, a nié vertement les accusations de
discrimination proférées à l'encontre de la société. A.________ n'a
finalement obtenu pour l'année 1996 qu'une augmentation de salaire de 3% - ce
qui lui donnait un traitement annuel brut de 154 500 fr. - et l'extension à
six mois de son délai de congé.

Il a été retenu que le salaire de tous les cadres supérieurs masculins des
services administratifs du groupe étaient supérieurs à celui de la
demanderesse et que, hormis D.________, tous les cadres de la défenderesse
avaient reçu entre 1993 et 1995 des bonus annuels qui s'ajoutaient au salaire
nominal. En 1996, seuls certains d'entre eux ont bénéficié de cet avantage.

En ce qui la concerne, A.________ n'a reçu un bonus qu'en 1995, lequel se
montait à 7000 fr.

A.d En 1996, le groupe V.________, devenu détenteur majoritaire du capital de
X.________, a décidé de modifier, dès le 1er janvier 1997, l'organigramme de
la société et de mettre en place un certain nombre de personnes issues de son
organisation. Des employés ont été congédiés.

Par lettre du 5 février 1997, A.________ a été licenciée pour le 31 août
1997; libérée immédiatement de son obligation de travailler, il lui a été
toutefois demandé de rester disponible pour répondre à des demandes
d'informations relatives aux dossiers dont elle avait la charge (art. 64 al.
2 OJ).

Pour remplacer la demanderesse, X.________ a engagé en 1997 E.________, né en
1960, en lui octroyant une rémunération égale à celle qu'avait atteinte
l'intéressée en fin de contrat (cf. p. 64 in medio du jugement de la Cour
civile).

A.e S'agissant de la formation et/ou de l'expérience professionnelle
acquises, de la date de l'engagement, des responsabilités exercées et des
différentes rémunérations versées aux cadres de X.________, il a été constaté
ce qui suit:

- D.________ (précédent juriste/secrétaire général de X.________) est
titulaire d'une double licence en droit et en HEC. Avant d'être engagé par
X.________ le 1er juillet 1986, il avait travaillé dix ans dans les milieux
diplomatiques affectés aux questions économiques; de 1983 à 1986, il avait
ainsi été chef du Service économique et financier du Département fédéral des
affaires étrangères, avec titre de ministre. En 1986, le salaire annuel brut
de base de D.________ se montait à 130 000 fr. En 1992, il a touché 191 600
fr.50 (13 x 14 738, 50). Du 1er janvier au 3 septembre 1993, il a encaissé un
revenu brut de 134 000 fr., ce qui correspondait à un salaire annuel de 199
264 fr.;

- H.________, diplômé en "Public Accountancy" d'une université de Montréal
(Canada), est entré en juin 1984 comme contrôleur au service de la
défenderesse, dont il a été nommé directeur du département "Administration et
Finance" du groupe le 27 mars 1985. H.________ a été licencié à fin 1995
parce qu'il désapprouvait l'acquisition de U.________. Engagé avec un salaire
annuel initial de 130 000 fr., il a touché, en 1994, 287 610 fr. brut, bonus
compris (art. 64 al. 2 OJ). En 1995, H.________ a encaissé 243 880 fr.; s'il
n'a pas reçu de bonus, une indemnité de départ de 250 000 fr. lui a été
allouée;

- I.________, "Certified Public Accountant" en Californie, est entré au
service de la défenderesse en automne 1987 en qualité de chef de
l'administration de Lausanne avec le titre de sous-directeur. Son salaire
annuel brut, arrêté initialement à 130 000 fr., a passé, bonus compris, à 187
000 fr. en 1993, 192 350 fr. en 1994 et 232 500 fr. en 1995; hors supplément,
son salaire, cette dernière année, était de 195 000 fr. I.________ a
démissionné de son poste auprès de X.________ avec effet au 31 mai 1996;

- J.________, né en 1965, a débuté son activité chez X.________ en 1997 comme
"assistant finances". Il ne possède apparemment pas de diplôme universitaire.
Son salaire annuel brut initial a été fixé à plus de 130 000 fr. (art. 64 al.
2 OJ). J.________ a repris les attribution habituelles de I.________;

- L.________, née en 1968, dont la formation n'a pas fait l'objet de
constatations, est entrée au service de X.________ en 1996,  après le départ
de H.________, pour prendre la tête du département "Administration". Son
salaire initial brut ascendait à 127 500 fr. En 1997, son salaire a dépassé
170 000 fr. par an;
- F.________, dont on ignore la formation, a été engagé par la défenderesse
en 1968. En 1981, il a été nommé chef des services administratifs, qui
englobent le service du personnel, l'économat et les fondations de
prévoyance, puis directeur-adjoint en 1984. Ses certificats de salaire 1995
et 1996 indiquent un montant brut annuel  de respectivement 197 779 fr. et
204 153 fr. Le salaire de F.________ a diminué en 1997, sans qu'il ait été
possible de déterminer en valeur la baisse qui est intervenue;

- G.________, qui avait travaillé 13 ans pour une société informatique
française, dont 10 ans comme responsable du secteur Banque, à Paris, est
entré au service de X.________ en juin 1981 en qualité de chef du service
informatique avec un salaire initial de 130 000 fr. En 1995, sa rémunération
annuelle s'est élevée au moins à 249 000 fr., à laquelle s'est ajouté un
bonus de 11 000 fr. Celle-ci a subi en 1996 une correction à la baisse de
quelques milliers de francs  du fait de la diminution du bonus; il en a été
de même pour l'année 1997;

- M.________ a été engagé le 1er octobre 1989 comme adjoint du chef
comptable. Diplômé de "cours intercadres Vaud", son salaire annuel initial de
91 000 fr. a atteint 120 900 fr. en 1995;

-  N.________, ingénieur EPFL, qui est entré, à temps partiel, au service de
X.________ le 1er novembre 1983 en tant que chef adjoint du service EDP pour
un salaire annuel de 72 000 fr., a vu sa rémunération atteindre 126 100 fr.
en 1995 pour le même taux réduit d'activité;

- O.________, qui possède un diplôme algérien d'ingénieur analyste en
informatique et un certificat de 3e cycle en informatique de l'EPFL, a
commencé son activité d'analyste-programmeur auprès de la défenderesse le 1er
février 1985. Son salaire, arrêté initialement à 84 500 fr. par an, s'est
monté à 150 150 fr., bonus en sus, pour l'année 1995.

B.
B.aFaisant valoir qu'elle a été victime chez X.________ de discriminations
salariales en comparaison des cadres masculins de ladite société, A.________
a ouvert action contre celle-ci, par demande du 22 mai 1996, devant la Cour
civile du Tribunal cantonal vaudois. Elle a conclu à ce que (I) la
défenderesse lui doive paiement de 282 750 fr., plus intérêts à 5 % dès le 30
avril 1995, date moyenne, et (II) à ce qu'il soit dit que le salaire annuel
dû par X.________, dès et y compris le 1er janvier 1997, est fixé à 250 000
fr.

La défenderesse a conclu à libération.

B.b En cours de procès, une expertise a été confiée à P.________, du
T.________ SA, qui a déposé son rapport le 29 mai 1998. L'expert a relevé
qu'il n'existait certes pas d'organigramme officiel de la défenderesse, mais
qu'il a été possible d'établir l'organisation de X.________ sur la base des
indications du chef du personnel F.________. Ainsi, le poste "Juridique et
Fiscal"  est une fonction centrale de support directement rattachée au
président de la société. S'agissant plus particulièrement de la position de
la demanderesse par rapport aux personnes qui ont occupé son poste, l'expert
souligne que tant son prédécesseur D.________ que son successeur E.________
avaient travaillé étroitement avec le président et participé aux décisions
stratégiques du groupe, alors que A.________, qui s'entendait mal avec le
président C.________, n'a pas été intégrée dans les principaux processus
décisionnels. Il en déduit que la fonction de A.________ a été "plutôt
inférieure ou au mieux égale à celle de (D.________), et certainement
inférieure à celle de son successeur".

Selon les différents organigrammes dressés par cet expert, le poste
"Juridique et Fiscal" est placé hiérarchiquement à un niveau supérieur que
les postes "Assistant finances" qu'ont occupé successivement I.________ et
J.________, "Service comptable" de M.________, "Chef de projet" de O.________
et "Chef adjoint EDP" de N.________.

Soulignant que la défenderesse n'a pas de politique salariale explicitement
formulée, l'expert P.________, après avoir déclaré que les rémunérations
servies par X.________ en 1997 correspondaient à celles de la branche en
Suisse, a fait état de deux facteurs qui influaient sur leurs  montants entre
1992 et 1997. D'une part, chaque nouveau titulaire dans une fonction
supérieure a débuté pendant cette période avec une rémunération relativement
basse, mais a vu celle-ci progresser ensuite sensiblement dès que l'intéressé
avait fait ses preuves. D'autre part, durant la même période, X.________ a de
manière générale corrigé à la baisse les salaires des personnes en place, qui
correspondaient aux années de haute conjoncture des années 1980. L'expert
s'est notamment référé aux rétributions accordées à F.________ et G.________
Passant à l'appréciation du traitement de A.________, l'expert a concédé que
la demanderesse était nettement moins payée que son prédécesseur, mais que
cela était logique au vu de la politique de rémunération alors adoptée par
X.________. Le salaire de la demanderesse se situait dans la fourchette
correspondant au marché lausannois, bien qu'il soit en dessous de la ligne de
tendance de la branche. Pour l'expert, le brevet d'avocat n'était pas un
élément déterminant pour le poste de la demanderesse, au contraire de
l'expérience diplomatique de D.________ qui, elle, était "un atout
important". Pour finir, il estime que A.________ aurait pu prétendre à 10 000
fr. ou 15 000 fr. de plus par année en période plus favorable, mais que cette
différence "provient du contexte et non d'une discrimination".

B.c Une seconde expertise a été confiée à Q.________, Professeur à
l'Université de Genève, qui a déposé son rapport le 17 juin 1999 et un
rapport complémentaire le 11 février 2000. L'expert s'est proposé, dans un
premier temps, pour mettre en évidence la politique salariale appliquée par
la défenderesse, de comparer le comportement de X.________ à l'égard de son
personnel féminin avec la pratique prévalant dans le marché genevois et
vaudois de la finance. Partant des données de l'année 1993, l'expert a pris
en compte dans son analyse diverses variables rattachées à des coefficients,
soit le capital humain compris comme la dotation du travailleur qui accroît
sa productivité (niveau d'éducation, expérience sur le marché du travail,
niveau d'ancienneté), le sexe, l'état civil, la taille de l'entreprise, la
position hiérarchique, le niveau de formation requis pour le poste. Sur cette
base, il a établi une équation des salaires mensuels bruts octroyés aux
personnes oeuvrant dans le secteur considéré, ce qui lui a permis de
constater que A.________ aurait pu prétendre, sur ce marché, à une
rémunération annuelle de 180 756 fr. pour sa première année de service.
Ajoutant une prime de 1,6 % par année de travail supplémentaire découlant du
coefficient associé à la variable "expérience", il a arrêté le préjudice
salarial minimum subi par la demanderesse pour toute la durée de son activité
à 163 492 fr.

Afin de vérifier la pertinence de son analyse et de l'équation salariale
utilisée, l'expert a appliqué cette méthode pour le calcul du salaire
d'autres collaborateurs et déterminé que D.________, s'il était resté au
service de X.________, aurait dû toucher 194 531 fr. en 1993, 197 643 fr. en
1994, 200 806 fr. en 1995 et 204 019 fr. en 1996; quant à I.________ et
H.________, ils auraient dû en 1993 respectivement percevoir 172 106 fr. et
257 801 fr. L'expert en a déduit que la preuve était faite que la méthode
qu'il préconise est un outil précis et performant pour l'évaluation des
salaires auxquels peuvent aspirer les employés de X.________.

A la suite de la crise traversée par la défenderesse en 1994, le brevet
d'avocat, qui n'était pas nécessaire au départ à l'exercice des fonctions de
la demanderesse, est devenu apparemment indispensable, ce qui aurait dû
donner lieu à une revalorisation du traitement de A.________ les deux années
suivantes. L'expert, intégrant cette donnée, a admis que le préjudice
salarial de la demanderesse doit être augmenté de 10 798 fr. pour 1995 et de
10 971 fr. pour 1996.

En se fondant sur les résultats fournis par l'enquête biennale réalisée par
l'Office fédéral de la statistique et en les affinant pour prendre en compte
les réalités du marché vaudois, l'expert Q.________ a calculé que les
rémunérations annuelles de A.________ et de D.________ devaient se monter en
1993 à 189 645 fr. pour la première et à 203 436 fr. pour le second. Pour
l'expert, ces résultats confirment l'existence du comportement
discriminatoire de la défenderesse à l'encontre de la demanderesse.

L'expert Q.________ a procédé à une seconde analyse pour déterminer les
salaires des  cadres de la défenderesse. Se basant cette fois-ci sur les
données internes afférentes aux années 1994 à 1997 que X.________ lui avait
communiquées, il a estimé l'équation des salaires annuels bruts d'abord pour
l'ensemble du personnel de la recourante, puis pour son seul personnel
administratif.

Dans le premiers cas (95 observations), l'expert a arrêté le salaire non
discriminatoire dû à A.________ en 1993 au montant de 200 787 fr. Mais comme
le salaire de D.________, calculé sur cette même base, ascenderait à 211 204
fr., il a considéré que l'estimation devait être réduite de 6% pour mieux
cerner la réalité. Après corrections, il a ainsi fixé le préjudice salarial
de la demanderesse de 1993 à 1997 au montant total de 193 259 fr.

Dans le second cas (personnel administratif seul, 45 observations), l'expert
a calculé que le salaire non discriminatoire de la demanderesse s'élèverait à
195 243 fr. en 1993. Selon la même méthode, le salaire de I.________ se
monterait à 181 175 fr. et celui de H.________ à 244 575 fr. Après prise en
considération de la même correction à la baisse que ci-dessus, A.________, à
suivre l'expert, aurait subi pour les années 1993 à 1997 un dommage salarial
de 171 426 fr. La différence par rapport au résultat précédent proviendrait
du fait que l'expérience accumulée est plus valorisée pour l'ensemble du
personnel (+ 3,6 %) que pour les seuls employés administratifs (+ 3.3 %).

L'expert a encore expliqué que les différences relevées entre les deux sortes
d'analyses effectuées (sur la base de données externes pour l'une, de données
internes pour l'autre) seraient dues au fait que l'augmentation annuelle des
salaires accordée par X.________ est plus élevée que celle qui résulte des
données externes.
Et l'expert Q.________ de conclure que, dans tous les cas de figure
envisagés, le personnel féminin de X.________ serait discriminé au plan
salarial; et d'ajouter que "les femmes obtiennent un salaire inférieur de
21,3 % à celui des hommes si l'on considère l'ensemble du personnel de la
défenderesse et de 21,5 % s'agissant du seul personnel administratif".

B.d Le 23 juin 2000, la défenderesse a déposé une requête de réforme au sens
des art. 153 ss CPC vaud., afin d'être autorisée à compléter sa procédure par
l'introduction de nouveaux allégués. A l'appui de sa requête elle a exposé
qu'elle souhaitait mettre en évidence les traits caractéristiques de sa
politique salariale et démontrer, par l'évaluation du travail des intéressés,
que les activités exercées par ses cadres n'étaient ni égales ni de valeur
égale, d'où  la disparité de salaire entre ses collaborateurs. X.________ a
notamment voulu introduire l'allégué 364 dont la teneur est la suivante: "En
1996, X.________ a vendu son secteur Trade Finance, qui faisait partie des
activités de la demanderesse, allégeant d'autant le cahier des charges de
cette dernière".

Par jugement incident du 12 octobre 2000, le Juge instructeur de la Cour
civile a rejeté la requête, aux motifs que la réforme ne pouvait être
accordée pour introduire des allégués qui portaient sur des faits ressortant
déjà des pièces et rapports versés au dossier ou qui constituaient l'essence
même du litige, dont l'instruction avait déjà donné lieu à deux expertises.
Ce magistrat a rappelé que la procédure civile vaudoise ne permet pas qu'il
soit ordonné plus de deux expertises sur le même objet.

B.e Il résulte du préavis du 12 septembre 2001 rendu par le Bureau de
l'égalité entre les femmes et les hommes de l'Etat de Vaud que le niveau d'un
poste doit être examiné au regard des tâches concrètes effectuées plutôt
qu'en fonction du titre attribué à l'engagement. Selon le Bureau de
l'égalité, la dénomination du poste de la demanderesse ne correspondait pas
aux responsabilités effectives qu'elle assumait. Ledit Bureau a dénoncé la
faiblesse méthodologique de l'expertise réalisée par P.________, qui ne
reposerait sur aucune base scientifique reconnue pour une analyse de
salaires, et a  préconisé de suivre les conclusions de l'expert Q.________,
lesquelles sont solidement étayées par des arguments économétriques neutres.

B.f Par jugement du  22 novembre 2001, dont les considérants ont été
communiqués le 31 octobre 2002, la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois a
condamné la défenderesse à payer à la demanderesse la somme de 212 716 fr.
avec intérêts à 5 % l'an dès le 30 avril 1995, sous déduction des charges
sociales usuelles (I) et dit que le salaire annuel non discriminatoire de la
demanderesse depuis le 1er janvier 1997 est fixé à 199 814 fr.50, bonus
annuel par 7000 fr. compris (II).

Admettant que la réclamation de la demanderesse trouvait son fondement dans
la loi fédérale du 24 mars 1995 sur l'égalité entre femmes et hommes (Loi sur
l'égalité ou LEg; RS 151.1), entrée en vigueur le 1er juillet 1996, la cour
cantonale, eu égard à l'allégement du fardeau de la preuve ancré à l'art. 6
LEg, a préliminairement examiné si, sur la base des expertises judiciaires et
des autres éléments du dossier, A.________ avait rendu vraisemblable
l'existence d'une discrimination liée au sexe sur chacun des points qu'elle
avait allégués.

S'agissant tout d'abord du salaire fixe, l'autorité cantonale a retenu,  en
accord avec les deux experts, que le principe d'une comparaison avec
D.________ était justifié, étant donné qu'il est établi que le prédécesseur
de la demanderesse, à l'instar de celle-ci, n'avait pas de pouvoir
décisionnel chez X.________. Compte tenu que la rémunération de D.________
était nettement plus élevée que celle de la demanderesse, la cour cantonale a
jugé que la vraisemblance d'une discrimination sexiste était largement
acquise. A cela s'ajoutait que d'autres collaborateurs masculins de
X.________, qui, selon les organigrammes réalisés par l'expert P.________,
avaient des responsabilités inférieures à A.________, étaient mieux payés que
celle-ci. La Cour civile a considéré que ces constatations valaient mutatis
mutandis pour la question du bonus, auquel tous les cadres de la
défenderesse, à l'exception de D.________ (qui a quitté X.________ à fin
1993), avaient eu droit entre 1993 et 1995, alors que la demanderesse n'avait
obtenu cet avantage qu'en 1995, et encore après avoir élevé des réclamations.
Enfin, la non-nomination de la demanderesse au poste de directrice-adjointe
rendait également vraisemblable une discrimination sur ce point. En revanche,
la vraisemblance d'un comportement discriminatoire quant aux conditions de
travail,  au paiement des frais forfaitaires et à la participation à un plan
d'intéressement autorisant la souscription d'actions n'avait pas été
rapportée, ont poursuivi les magistrats vaudois.

La cour cantonale s'est ensuite attachée à vérifier si, sur chacun des trois
points où une discrimination avait été rendue vraisemblable, des motifs
objectifs pouvaient justifier une différence de traitement. A propos du
salaire fixe, l'autorité cantonale a considéré primo que la politique
salariale de la défenderesse évoquée par l'expert P.________ - soit le fait
d'engager les nouveaux employés à des salaires relativement bas en leur
octroyant au fil du temps des augmentations rapides - n'avait pas été
démontrée, dès l'instant où il n'est "pas possible de déterminer si les
collaborateurs de la même division occupent effectivement des postes
équivalents à ceux qu'ils sont censés remplacer" et que la politique des
salaires en question ne valait, semble-t-il, que pour A.________. Secundo, la
politique de correction générale, à la baisse, des salaires hérités des
années 1980, qui aurait été appliquée par X.________ à partir de 1992 ainsi
que l'a retenu l'expert P.________, n'aurait pas été établie par les données
de l'expertise; de toute manière, cette politique de correction, entreprise
en réalité seulement depuis 1996, n'expliquait pas la discrimination dont la
demanderesse a été la victime dès son engagement en 1993. Tertio, en ce qui
concernait la différence de fonctions par rapport au prédécesseur de la
demanderesse, relevée par l'expert P.________, elle avait été plus que
compensée par les lourdes responsabilités assumées par A.________ lors des
difficultés traversées par la défenderesse. Quarto, les juges cantonaux ont
admis qu'aucun des autres motifs objectifs invoqués en vrac par X.________
dans son mémoire de droit - soit le droit de l'avocate à un surplus de
vacances, l'octroi d'un délai de résiliation plus long du contrat, la
non-répercussion de diminutions salariales et une présence moindre sur le
lieu de travail - n'avait été prouvé. Au sujet du bonus, la défenderesse n'a
allégué aucun élément objectif expliquant la discrimination subie à cet égard
par A.________. L'autorité cantonale a enfin retenu qu'il en allait de même
pour la non-promotion de la demanderesse.
Passant à l'étude du préjudice salarial subi par A.________, la Cour civile a
retenu la méthode de calcul de l'expert Q.________, fondée sur les données
internes de la défenderesse et centrée sur le personnel administratif auquel
l'intéressée avait appartenu; cette analyse répondait en effet le mieux aux
exigences de la jurisprudence et de la doctrine et permettait une comparaison
particulièrement pointue. Il convenait toutefois de corriger les chiffres de
l'expert en valorisant le salaire de chacune des années 1995 et 1996 du
montant de 10 000 fr. - calculé par l'expert - pour tenir compte que ces
années-là le brevet d'avocat de la demanderesse s'était révélé un atout
indispensable. La prise en compte de cet élément permettait du reste
d'indemniser ex aequo et bono la discrimination liée à la non-nomination de
A.________ au poste de directrice-adjointe. Enfin, il y avait lieu d'ajouter
un bonus de 7000 fr. pour chaque année d'activité - sauf pour 1995 où la
demanderesse en a bénéficié -, calculé prorata temporis en 1993 et 1997.

En résumé, les magistrats vaudois ont jugé que A.________ avait droit aux
salaires suivants:
«Années   différence entre Bonus     Brevet
Total
d'activité    salaire dû et       d'avocat
salaire perçu

____________________________________________________
1993  24'072.-  2'624.-*  26'696.-
1994  46'584.-  7'000.-  53'584.-
1995  38'824.-       10'000.- 48'824.-
1996  36'403.-  7'000.-   10'000.- 53'403.-
1997  25'543.-  4'666.-*  30'209.-

________
Total
212'716.-
   calculé au prorata».

C.
C.aParallèlement à un recours de droit public qui a été déclaré irrecevable
par arrêt de ce jour, la défenderesse exerce un recours en réforme au
Tribunal fédéral contre le jugement précité. Elle conclut, principalement, à
ce que les chiffres I et II de cette décision soient réformés en ce sens que
la défenderesse n'est pas la débitrice de la demanderesse de la somme de 212
716 fr. avec intérêts à 5 % l'an dès le 30 avril 1995, sous déduction des
charges sociales usuelles, et en ce sens que le salaire annuel de la
demanderesse depuis le 1er janvier 1997 n'est pas fixé à 199 814 fr.50, bonus
annuel par 7000 fr. compris. Subsidiairement, la recourante requiert
l'annulation du jugement cantonal, l'affaire étant renvoyée à la Cour civile
pour rectifier l'état de fait et statuer à nouveau.

L'intimée propose le rejet du recours.

C.b La recourante ayant déposé un recours cantonal en nullité contre le
jugement de la Cour civile vaudoise, le Président de la Ie Cour civile, par
ordonnance du 7 janvier 2003, a suspendu l'instance de réforme jusqu'à droit
connu sur cette procédure.

Par arrêt du 20 août 2003, la Chambre des recours du Tribunal cantonal
vaudois a rejeté dans la mesure de sa recevabilité le recours cantonal en
nullité et maintenu le jugement du 22 novembre 2001.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions libératoires
et dirigé contre un jugement final rendu en dernière instance cantonale par
un tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ) sur une contestation civile dont la
valeur litigieuse atteint le seuil de 8000 fr. (art. 46 OJ), le recours en
réforme est en principe recevable, puisqu'il a été déposé en temps utile
(art. 54 al. 1 OJ) dans les formes requises (art. 55 OJ).

1.2 Le recours en réforme est ouvert pour violation du droit fédéral (art. 43
al. 1 OJ). Il ne permet en revanche pas d'invoquer la violation directe d'un
droit de rang constitutionnel (art. 43 al. 1 2e phrase OJ) ou la violation du
droit cantonal (ATF 127 III 248 consid. 2c et les arrêts cités).
Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire son
raisonnement sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à
moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été
violées, qu'il y ait lieu à rectification de constatations reposant sur une
inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter les
constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte
de faits pertinents et régulièrement allégués (art. 64 OJ; ATF 127 III 248
ibidem). Dans la mesure où une partie recourante présente un état de fait qui
s'écarte de celui contenu dans la décision attaquée, sans se prévaloir avec
précision de l'une des exceptions qui viennent d'être rappelées, il n'est pas
possible d'en tenir compte (ATF 127 III 248 consid. 2c). Il ne peut être
présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyens
de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). Le recours n'est pas ouvert
pour se plaindre de l'appréciation des preuves et des constatations de fait
qui en découlent (ATF 127 III 543 consid. 2c; 126 III 189 consid. 2a; 125 III
78 consid. 3a).
Le Tribunal fédéral ne saurait aller au-delà des conclusions des parties,
mais il n'est pas lié par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al. 1 OJ),
ni par l'argumentation juridique retenue par la cour cantonale (art. 63 al. 3
OJ; ATF 128 III 22 consid. 2e/cc in fine; 127 III 248 consid. 2c).

2.
La Loi sur l'égalité (LEg) est entrée en vigueur le 1er juillet 1996. Selon
l'art. 17 de cette loi fédérale, l'exercice d'une prétention en paiement du
salaire dû (art. 5 al. 1 let. d LEg) est régie par le nouveau droit lorsque
l'action de droit civil a été introduite après son entrée en vigueur, ou
lorsqu'au moment de l'entrée en vigueur, l'autorité compétente de première
instance n'a pas encore rendu sa décision.

En l'espèce, la demande a été déposée le 22 mai 1996, peu avant l'entrée en
force de la Loi sur l'égalité. Toutefois, la Cour civile s'est prononcée en
première instance par jugement du 22 novembre 2001, de sorte que la LEG est
applicable au présent différend (ATF 127 III 207 consid. 2 non publié).

3.
A l'appui de son premier moyen, la recourante se prévaut d'une violation des
art. 3 LEg et 343 al. 4 CO auquel renvoie l'art. 12 al. 2 LEg. Elle fait
valoir que la méthode dite interne utilisée par l'expert Q.________ ne
répondrait pas aux exigences posées par la Loi sur l'égalité et par la
jurisprudence. Elle souligne longuement les nombreux défauts qui
affecteraient cette expertise. Critiquant les résultats auxquels est parvenu
l'expert Q.________, la défenderesse prétend que les juges cantonaux auraient
dû apprécier les éléments qu'il a utilisés dans son équation salariale ainsi
que les coefficients qu'il a appliqués. Elle ajoute qu'étant donné que le
poste occupé par l'intimée était unique au sein de X.________, il aurait dû
être évalué par expertise.

La défenderesse reproche encore à la Cour civile de n'avoir pas reproduit la
formule de l'équation salariale utilisée par l'expert précité et d'avoir
considéré qu'était fiable l'analyse effectuée par ce dernier. A suivre la
recourante, l'application de la Leg devrait être quelque peu adoucie lorsque
la travailleuse, qui se plaint de discrimination salariale liée au sexe, a le
profil professionnel de la demanderesse, car une telle personne peut se
défendre et négocier sa rétribution.

3.1
3.1.1Le Tribunal fédéral a jugé, dans la cause connexe 4P.205/2003, que la
cour cantonale avait pu se rallier sans arbitraire au résultat de l'expertise
effectuée par Q.________, car celle-ci était absolument exempte des nombreux
défauts que lui prêtait la recourante. Ce point est désormais acquis.

3.1.2 En matière d'égalité salariale entre femmes et hommes, le Tribunal
fédéral a posé des exigences élevées en particulier quant à la constatation
des faits, la procédure probatoire et le devoir d'examen du juge (ATF 126 III
395 consid. 1a et les arrêts cités; sur l'ensemble de la question, cf.
Kathrin Klett, Richterliche Prüfungspflicht und Beweiserleichterung, AJP
2001, p. 1293 ss). En instance de réforme, le Tribunal fédéral vérifie
librement si les critères par lesquels l'employeur fixe les salaires sont
constitutifs d'une discrimination directe ou indirecte fondée sur le sexe. Il
peut également contrôler si l'autorité cantonale a respecté les exigences
spécifiques découlant du droit fédéral concernant la constatation des faits
ainsi que les dispositions fédérales en matière de preuve, singulièrement
celles prévues aux art. 6 LEg et 12 LEg  (ATF 127 III 207 consid. 3c in fine;
125 III 368 consid. 3 p. 372). Si le principe inquisitoire ancré à l'art. 12
al. 2 LEg, par renvoi à l'art. 343 al. 4 CO, prévoit notamment que le
tribunal apprécie librement les preuves - ce qui interdit au juge cantonal de
retenir des faits contre sa conviction ou de se considérer lié par des règles
de procédure cantonale qui attribuent une force probante spéciale à certains
moyens de preuve (système des preuves légales) -, cette disposition
n'autorise pas la remise en cause en instance fédérale de réforme des
constatations de fait de l'autorité cantonale (ATF 125 III 368 consid. 3).

Le principe de l'égalité salariale entre l'homme et la femme garanti par
l'art. 8 al. 3 Cst. repose sur la notion de travail de valeur égale. Si
l'équivalence entre les fonctions dans une entreprise n'est pas patente
(arrêt 1A.34/1999 du 5 octobre 1999, consid. 4b in fine, in: Pra 2000 57 333)
ou si elle n'est pas établie autrement, c'est à l'expert qu'il revient de
dire si lesdites fonctions se comparer les unes aux autres et de déterminer
les critères qui entrent alors en ligne de compte. L'expert doit aussi
définir les caractéristiques propres des activités prises isolément et
comparées entre elles (ATF 125 III 368 consid. 5c; Margrith
Bigler-Eggenberger. Et si la Justice ôtait son bandeau ?, La jurisprudence du
Tribunal fédéral sur l'égalité entre femmes et hommes, n. 651 et 652, p.
339/340).

La détermination de la valeur comparative des activités différentes doit  se
faire auprès d'un seul et même employeur, car il ne saurait être question,
sauf circonstances spéciales, de procéder à des comparaisons entre plusieurs
entreprises, communes ou cantons, qui ont des systèmes de rémunération
totalement indépendants les uns des autres (Elisabeth Freivogel, Commentaire
de la loi sur l'égalité, n. 104 et 105 ad art. 3 LEg; cf. également Kathrin
Klett, op. cit., ch. 2 p. 1296).

3.2 En l'occurrence, le Professeur Q.________, dans sa seconde analyse, a
estimé l'équation salariale régissant les salaires chez la recourante à
partir des données internes que celle-ci lui avait fournies. Du moment que
les magistrats de la Cour civile n'avaient pas de compétences spéciales en
sciences du travail et en économétrie, ils n'avaient évidemment pas à
discuter les variables et les coefficients que l'expert a intégrés dans sa
formule. On ne voit donc pas en quoi, à considérer les principes susrappelés,
la méthode d'évaluation en cause, effectuée par un professeur spécialiste en
la matière et fondée sur des éléments intrinsèques à la défenderesse
elle-même, ne serait pas conforme au droit fédéral.

A propos de l'évaluation comparative de la fonction occupée par l'intimée au
sein de la recourante, il a été établi, par d'autres modes de preuve que
l'expertise, que le poste de la première était comparable à celui occupé par
son prédécesseur D.________. Que l'expert P.________ ait formulé un avis
divergent - du reste contredit par le Bureau cantonal de l'égalité - n'y
change rien. Cette constatation relève en effet de l'appréciation des
preuves, de sorte qu'il est exclu de la revoir en instance de réforme.
La critique dirigée contre le fait que la cour cantonale n'a pas mentionné
dans son jugement l'équation salariale posée par l'expert a trait à
l'obligation du juge de motiver sa décision, déduite de l'art. 29 al. 2 Cst.
La voie spéciale qui permettait d'invoquer ce grief était le recours de droit
public - voie que la recourante a d'ailleurs suivie, sans succès - à
l'exclusion du recours en réforme (art. 43 al. 1, 2e phrase, OJ).
La question de la fiabilité de l'expertise Q.________ concerne l'appréciation
des preuves. Le grief à ce propos est donc irrecevable dans la présente
instance (ATF 127 III 543 consid. 2c).
Enfin, il n'est pas inutile de rappeler à la recourante que l'interdiction de
discriminer est absolue (ATF 127 III 207 consid. 4b; Rémy Wyler, Le droit du
travail, p. 536), ce qui signifie notamment qu'elle vaut dans tous les
domaines de la vie professionnelle (Claudia Kaufmann, Commentaire de la loi
sur l'égalité, n. 12 ad art. 1 LEg).  Une avocate salariée peut donc invoquer
la protection de la Loi sur l'égalité, à l'instar de n'importe quel
travailleur ou travailleuse.

4.
4.1 Selon la recourante, l'autorité cantonale a enfreint l'art. 6 Leg pour
avoir retenu, en procédant à une comparaison avec la rémunération versée à
D.________, que la demanderesse avait rendu vraisemblable l'existence d'une
discrimination de nature sexiste concernant le salaire fixe qu'elle avait
touché de 1993 à 1997. La défenderesse soutient que, contrairement à ce qu'a
retenu la Cour civile, des collaborateurs de X.________, qui avaient des
responsabilités inférieures à celles de l'intimée, n'étaient pas mieux payés
que cette dernière. La recourante se réfère à la rémunération des
collaborateurs N.________, J.________, O.________ et M.________.

Pour ce qui est des bonus, dont l'autorité cantonale a jugé que la
vraisemblance d'une discrimination dans son allocation a été établie par
l'intimée, la recourante prétend qu'il fallait confronter la situation de  la
demanderesse avec le seul D.________, mais pas avec d'autres cadres de
X.________. Comme D.________, qui a servi de référence pour le salaire fixe,
n'a jamais perçu de bonus au cours de son activité pour la défenderesse,
aucune vraisemblance d'une discrimination à l'endroit de la demanderesse
n'aurait été prouvée sur ce point.

4.2 L'art. 6 LEg, sous l'intitulé "Allégement du fardeau de la preuve", a la
teneur suivante:
"L'existence d'une discrimination est présumée pour autant que la personne
qui s'en prévaut la rende vraisemblable; la présente disposition s'applique à
l'attribution des tâches, à l'aménagement des conditions de travail, à la
rémunération, à la formation et au perfectionnement professionnels, à la
promotion et à la résiliation des rapports de travail".
Cette disposition, qui est une règle spéciale par rapport au principe général
de l'art. 8 CC selon lequel il incombe à la partie qui déduit un droit de
certains faits d'en apporter la preuve, institue un assouplissement du
fardeau de la preuve d'une discrimination à raison du sexe, en ce sens qu'il
suffit à la partie demanderesse de rendre vraisemblable l'existence d'une
telle discrimination (ATF 127 III 207 consid. 3b). La règle de l'art. 6 LEg
tend à corriger l'inégalité de fait résultant de la concentration des moyens
de preuve en mains de l'employeur. En effet, la maxime inquisitoire ne
déploie aucun effet si ce dernier omet de proposer des moyens de preuve, dont
ni le juge ni l'employé ne soupçonne l'existence. En revanche, si l'employeur
supporte le fardeau de la preuve et donc le risque de perdre le procès au cas
où il ne prouve pas l'absence de discrimination, il sera dans son intérêt
d'informer complètement le juge et de lui fournir toutes pièces utiles
(Sabine Steiger-Sackmann, Commentaire de la loi sur l'égalité, n. 28 et n. 42
ad art. 6 LEg).

Pour éviter que des actions ne soient introduites à la légère, il est exigé,
avant que le fardeau de la preuve soit mis à la charge de l'employeur, que la
personne qui invoque la LEg apporte des indices qui rendent vraisemblable
l'existence d'une discrimination. Le juge n'a pas à être convaincu du
bien-fondé des arguments du travailleur; il doit simplement disposer
d'indices objectifs suffisants pour que les faits allégués présentent une
certaine vraisemblance, sans devoir exclure qu'il puisse en aller
différemment (Kathrin Klett, op. cit., ch. 4 p. 1297; Sabine
Steiger-Sackmann, op. cit., n. 49 et n. 54 ad art. 6 LEg).

Une discrimination de nature sexiste peut résulter dans la fixation du
salaire d'une personne déterminée lorsqu'il est comparé à celui d'autres
personnes du sexe opposé ayant une position semblable dans l'entreprise (ATF
127 III  207 consid. 3b et 3c; 125 III 368 consid. 3 p. 371). Le Tribunal
fédéral a ainsi considéré qu'une discrimination salariale était vraisemblable
dans le cas d'une travailleuse dont le salaire était d'environ 15% à 25%
inférieur à celui d'un collègue masculin qui accomplissait le même travail
(ATF 126 III 395 consid. 3a; 125 III 368 consid. 4 p. 373). Et si une femme,
qui présente des qualifications équivalentes à son prédécesseur de sexe
masculin, est engagée à un salaire moins élevé que lui, il est vraisemblable
que cette différence de traitement constitue une discrimination à raison du
sexe, prohibée par l'art. 3 LEg (Monique Cossali-Sauvain, Egalité entre
femmes et hommes I, FJS no 544, ch. 5, II,  p. 8).

4.3
4.3.1Dans le cas présent, il a été retenu définitivement que la demanderesse,
en qualité de juriste/secrétaire générale de la défenderesse, occupait un
poste à responsabilité au sein de cette société, lequel était comparable à
celui occupé par son prédécesseur D.________. Si l'on considère que l'intimée
a encore dû assister les responsables de X.________ en matière de "Trade
Finance" - qui était une activité complètement nouvelle de la défenderesse -
et qu'elle a dû agir sur le plan judiciaire, tant en Suisse qu'en France,
pour recouvrer les avances consenties imprudemment à fin 1994 par l'ancien
président C.________ à deux sociétés tierces, il s'avère qu'elle a en réalité
assumé des responsabilités bien plus importantes que D.________. Il est sans
aucune pertinence à cet égard que ce dernier ait été plus écouté par la
direction d'alors que A.________, dès l'instant où les relations difficiles
que celle-ci a entretenues avec  C.________ sont principalement dues au fait
qu'elle s'est constamment efforcée de préserver les intérêts propres de
X.________, gravement mis à mal par les opérations hasardeuses effectuées par
cet ancien président. Ce dernier en a pris ombrage, apparemment en raison du
poste directorial qu'il occupait simultanément dans le groupe Banque
Z.________/W.________, impliqué dans l'opération.

Le salaire fixe d'engagement de D.________ en 1986 se montait à 130 000 fr.,
ce qui représentait, compte tenu du renchérissement survenu, plus de 166 000
fr. en 1993 [138,3 (IPC 1993) : 108,23 (IPC 1986) x 100 = 127,78 % de 130 000
fr.]. Il apparaît donc que la rémunération initiale de la demanderesse,
arrêtée à 121 160 fr. brut (9320 x 13) en 1993,  était de 27 % plus basse que
celle de son prédécesseur.

De plus, cette différence ne s'est pas réduite avec le temps. Entre 1986 et
son départ de la société en 1993, le salaire nominal de D.________ a passé de
130 000 fr. à 199 264 fr., d'où une progression annuelle de 6,1 % pendant 7
ans. Le dernier salaire annuel de l'intimée étant de 154 500 fr., la
progression annuelle de sa rémunération a été identique pendant quatre ans.
A cela s'ajoute que le successeur au poste de la demanderesse, E.________,
qui est son cadet de dix ans, a touché d'entrée de cause la rémunération que
celle-ci avait atteinte en fin de contrat.
On cherche vainement comment le fait que certains collaborateurs masculins de
la défenderesse - dont X.________ admet qu'ils avaient des responsabilités
moindres que la demanderesse, ce qui signifie ipso facto qu'ils
accomplissaient un travail n'ayant pas la même valeur que l'activité exercée
par l'avocate intimée - soient logiquement moins  rétribués que celle-ci joue
un quelconque rôle en l'état.

Il suit de là que la vraisemblance d'une discrimination de nature sexiste
quant au salaire fixe est patente.

4.3.2 D'après l'état de fait définitif, tous les cadres de la recourante,
hormis D.________, ont reçu entre 1993 et 1995 des bonus annuels qui
s'ajoutaient au salaire nominal. Pour sa part, la demanderesse n'a obtenu
cette gratification qu'en 1995, et encore après l'avoir réclamée avec
insistance auprès de la direction de X.________.

La recourante expose que D.________, à la rémunération duquel le salaire fixe
de l'intimée a été comparé, n'a jamais perçu de bonus.  Toutefois, même si le
prénommé - qui, on vient de le voir, a toujours été mieux rémunéré que
l'intimée - a été traité cette fois de la même façon que cette dernière, il
n'empêche que la comparaison concrète entre A.________ et tous les autres
cadres masculins de la recourante (cf. à ce propos Sabine Steiger-Sackmann,
op. cit., n. 46 ad art. 6 LEg), qui ont reçu chacun un bonus entre 1993 et
1995, rend hautement vraisemblable que l'intéressée a été victime d'une
discrimination fondée sur le sexe par rapport à l'octroi de cette
gratification. Il convient en effet de ne pas perdre de vue que la
gratification est destinée en particulier à remercier de manière individuelle
chaque employé pour les activités passées (Manfred Rehbinder, Commentaire
bernois, n. 1 ad art. 322d CO; Wyler, op. cit., p. 122 et p. 560). Or, la
demanderesse, qui a toujours fait preuve chez X.________ d'un grand
professionnalisme et de très bonnes connaissances juridiques, a accompli ses
tâches avec diligence et largement contribué au succès des procédures
judiciaires engagées par X.________ dont la survie était alors mise à mal.

4.3.3 La recourante ne conteste plus que l'intimée a derechef établi la
vraisemblance d'une discrimination en matière de promotion. A bon droit. En
effet, peu après son entrée en fonction, la défenderesse a déclaré que "dans
un proche avenir", la demanderesse, nommée sous-directrice le 23 septembre
1993, serait proposée au rang supérieur de directrice-adjointe. Cette
promotion n'a jamais eu lieu, alors que son prédécesseur D.________ avait,
pour sa part, obtenu ce titre dès son entrée en fonction, en août 1986.

5.
5.1 La recourante soutient que les différences de traitement que la
demanderesse a rendues vraisemblables seraient objectivement justifiées. Elle
fait valoir différents motifs justificatifs qui seront successivement
examinés ci-dessous.

5.2 Lorsque, comme en l'espèce, la vraisemblance d'une discrimination liée au
sexe a été rendue vraisemblable, il incombe à l'employeur de rapporter la
preuve complète que la différence de traitement repose sur des facteurs
objectifs (ATF 127 III 207 consid. 3b in fine; 125 III 368 consid. 4 p. 372;
125 II 541 consid. 6c p. 551; Sabine Steiger-Sackmann, op. cit., n. 59 s. ad
art. 6 LEg). Constituent des motifs objectifs ceux qui peuvent influencer la
valeur même du travail, comme la formation, l'ancienneté, la qualification,
l'expérience, le domaine concret d'activité, les prestations effectuées, les
risques encourus, le cahier des charges (ATF 127 III 207 consid. 3c; 125 III
368 consid. 5 p. 373). Des disparités salariales peuvent se justifier pour
des motifs qui ne se rapportent pas immédiatement à l'activité de la
travailleuse ou du travailleur, mais qui découlent de préoccupations
sociales, comme les charges familiales ou l'âge (ATF 127 III 207 ibidem; 125
III 368 consid. 5 p. 373; 118 Ia 35 consid. 2c p. 37 ss). La position de
force d'un travailleur dans la négociation salariale, à l'instar de la
situation conjoncturelle, peuvent aussi conduire à une différence de
rémunération pour le même travail; mais les disparités de salaire qui sont
dues à des occasions de négociation différentes ou qui résultent de
fluctuations conjoncturelles doivent être compensées dès qu'il est
raisonnablement possible de le faire pour l'employeur, le cas échéant dans le
délai d'une année (arrêt 4C. 57/2002 du 10 septembre 2002, consid. 4.2, qui
se réfère à Stephan Hegner, Salaire égal pour un travail de valeur égale,
Zurich 1981, p. 26; cf. aussi ATF 125 III 368 consid. 5c/ee).
Pour qu'une différence de traitement soit justifiée, il ne suffit pas que
l'employeur invoque n'importe quel motif: il doit au contraire démontrer
qu'il poursuit un but objectif qui répond à un véritable besoin de
l'entreprise et que les mesures discriminatoires adoptées sont propres à
atteindre le but recherché, sous l'angle du principe de la proportionnalité
(consid. 3b/ee non publié de l'ATF 126 III 395; Message du Conseil fédéral du
24 février 1993 concernant la loi sur l'égalité, FF 1993 I p. 1211; Monique
Cossali-Sauvain, op. cit., FJS 544, ch. 5, II, p. 6). Des motifs objectifs ne
peuvent généralement légitimer une différence de rémunération que dans la
mesure où ils influent sur la prestation de travail et sa rémunération par
l'employeur (ATF 127 III 207 consid. 3c; 125 III 368 consid. 5 p. 374).

5.3 Pour la recourante, une justification objective résiderait dans la
politique salariale qu'elle a appliquée, laquelle consisterait à fixer assez
bas les rémunérations initiales des nouveaux employés, puis de les augmenter
rapidement au fil des années.

Dans l'affaire 4P.205/2003 connexe, le Tribunal fédéral a jugé, au
considérant 2.3.1, que la cour cantonale avait pu retenir sans le moindre
arbitraire que la politique des salaires en question n'avait pas été établie.
Cette constatation clôt le débat sur ce point.

5.4 La recourante reproche aux magistrats vaudois de n'avoir pas admis que la
défenderesse avait procédé dans les années 1990 à une correction générale à
la baisse des salaires trop élevés hérités des années 1980, qui avaient été
caractérisées par une forte croissance économique.

Dans le dossier connexe susmentionné, le Tribunal fédéral, au considérant
2.3.2, a retenu que la Cour civile n'avait pas versé dans l'arbitraire en
admettant que l'existence de cette autre politique salariale n'avait pas été
prouvée. La défenderesse ne saurait donc se prévaloir d'un système de
rémunération non constaté.

5.5 A suivre la défenderesse, la différence de traitement reposerait sur des
avantages particuliers dont la demanderesse a bénéficié, à savoir une
cinquième semaine de vacances, un délai de résiliation de six mois de son
contrat, l'absence de diminution de salaire à la suite de sa démission des
conseils d'administration dont elle faisait partie et des horaires de travail
conditionnés par des horaires de train.

5.5.1 Une durée de vacances annuelles de cinq semaines, supérieure que d'une
semaine au minimum légal de l'art. 329a al. 1 CO, ne saurait bien évidemment
contrebalancer un salaire initial inférieur de 27 % comparé à celui de son
prédécesseur, accompagné du non-versement de gratifications et de l'absence
de toute promotion pendant la durée des rapports de travail.

5.5.2 L'extension à six mois du délai de congé de l'intimée, que celle-ci n'a
d'ailleurs obtenue qu'en 1996, ne joue aucun rôle quant à sa prestation de
travail. Il est exclu d'y voir un facteur objectif de discrimination.

5.5.3 La circonstance qu'en décembre 1995 la demanderesse a résilié
l'ensemble de ses mandats d'administrateurs auprès des filiales du groupe
X.________, sans préjudice pour son salaire, est dénuée de toute pertinence.
Cette démission est intervenue dans le contexte difficile traversé par la
défenderesse à la suite de l'acquisition de la société U.________, afin de
parer aux risques (actions en responsabilité) que comportait l'exercice de
ses mandats. L'allégement des tâches qui a pu en résulter pour l'intimée a
été plus que compensé par le surcroît de travail découlant des procédures
judiciaires que la demanderesse a coordonnées à cette époque.

5.5.4 Enfin, il n'a nullement été établi que l'intéressée, pressée de
regagner son domicile genevois, ne respectait pas les horaires de travail.
Bien au contraire, tant sa diligence que son professionnalisme ont été
reconnus. On cherche donc en vain le motif justificatif qui pourrait entrer
en ligne de compte

6.
6.1 La recourante prétend que les juges cantonaux ont violé l'art. 5 LEg en
ordonnant à la défenderesse de payer la différence entre le salaire dû et le
salaire perçu par la demanderesse pour les années 1993 à 1997. Elle s'indigne
tout particulièrement que l'autorité cantonale a accordé un bonus à l'intimée
pour les années 1996 et 1997. A l'en croire, ce serait à tort que la Cour
civile aurait de plus octroyé à cette dernière en 1995 et 1996 une prime en
raison du brevet d'avocat dont elle est titulaire.

6.2 L'art. 5 al. 1 LEg prescrit que quiconque subit ou risque de subir une
discrimination au sens des articles 3 et 4 peut requérir le tribunal ou
l'autorité administrative notamment d'ordonner le paiement du salaire dû
(let. d).
Dire s'il y a eu dommage et quelle en est la quotité est une question de fait
qui lie le Tribunal fédéral saisi d'un recours en réforme. C'est en revanche
une question de droit de dire si la notion juridique de dommage a été
méconnue (ATF 129 III 18 consid. 2.4; 128 III 22 consid. 2e, 180 consid. 2d;
127 III 73 consid. 3c, 543 consid. 2b).

6.3 En l'espèce, la demanderesse a établi qu'elle a subi une discrimination
salariale au sens de l'art. 3 al. 2 LEg. Elle avait donc droit à la
différence entre le salaire qu'elle a effectivement encaissé et celui qui
aurait dû lui être versé pendant toute la durée des rapports de travail (cf.
Margrith Bigler-Eggenberger, Commentaire de la loi sur l'égalité, n. 7 et n.
19 ad art. 5 LEg).

La méthode adoptée par la cour cantonale pour arrêter le salaire dû est
conforme à ce principe. Cette autorité a en particulier fixé le salaire non
discriminatoire en se ralliant, sans arbitraire comme on l'a vu dans la cause
4P.205/1993, aux calculs de l'expert Q.________, formulés à partir des
données internes de X.________ et centrés sur le personnel administratif. Et
c'est sans violer le droit fédéral qu'elle a complété ces chiffres en y
intégrant une valorisation du salaire - déterminée par l'expert - pour les
années de crise 1995 et 1996, où il s'est révélé nécessaire que la
juriste/secrétaire générale possédât un brevet d'avocat. La recourante ne
saurait critiquer en instance de réforme la manière dont les juges cantonaux
ont apprécié cette expertise.

En ce qui concerne le bonus, il résulte des considérants qui précèdent
que l'intimée, qui ne l'a touché qu'en 1995 après l'avoir réclamé, a été
discriminée dans son octroi par rapport à ses collègues masculins. L'égalité
de traitement entre femmes et hommes exigeait ainsi qu'il soit payé
rétroactivement à la demanderesse, dont les capacités professionnelles ont
été particulièrement louées. Elle avait aussi droit à cette gratification, au
prorata, en 1997, puisque c'est la défenderesse qui l'a libérée le 5 février
1997 de son obligation de travailler jusqu'à fin août 1997, non sans lui
demander du reste d'être disponible pour répondre à diverses demandes
d'informations.

Le grief est dénué de fondement.

7.
La recourante s'en prend pour finir au système mis en place par l'art. 6 LEg,
qui contraindrait l'employeur recherché à procéder à de la "schizophrénie
procédurale". Elle prétend qu'une juste application de cette norme devrait
conduire à la tenue de deux procès distincts.

L'art. 191 Cst. dispose que le Tribunal fédéral et les autres autorités sont
tenus d'appliquer les lois fédérales et le droit international.
Partant, le Tribunal fédéral doit appliquer, lorsqu'il est question d'égalité
entre femmes et hommes, l'allégement du fardeau de la preuve instauré par
l'art. 6 LEg dans le cadre du procès pour discrimination que le travailleur
intente à son employeur.

8.
Il suit de là que le recours doit être rejeté. La procédure est gratuite
(art. 12 al. 2 LEg et art. 343 al. 3 CO). Cela ne dispense pas la recourante,
qui succombe, de verser des dépens à l'intimée.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.

3.
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 10 000 fr. à titre de
dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la
Cour civile du Tribunal cantonal vaudois.

Lausanne, le 22 décembre 2003

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président:   Le greffier: