Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilabteilung 4C.265/2002
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4C.265/2002 /ech

Arrêt du 26 novembre 2002
Ire Cour civile

Les juges fédéraux Walter, président de la Cour,
Corboz et Favre,
greffier Ramelet.

Société Anonyme X.________ en liquidation, sous gérance légale de l'Office
des poursuites et faillites Arve-Lac, 1200 Genève,
demanderesse et recourante, représentée par Me Olivier Wehrli, avocat, case
postale 5715, 1211 Genève 11,

contre

A.________,
défendeur et intimé, représenté par Me Jean-Marie Faivre, avocat, case
postale 3809, 1211 Genève 3.

action en revendication

(recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice
du canton de Genève du 14 juin 2002)

Faits:

A.
A.a En 1975, A.________ a remis environ 37'000 fr. aux architectes B.________
et C.________, pour compléter leurs fonds propres aux fins d'acquérir le
capital social de Société Anonyme X.________ (ci-après: X.________),
propriétaire de l'immeuble X.________, à Genève, qui est un bâtiment
construit par Z.________, classé et de renommée internationale. Selon un reçu
du 23 juin 1975 signé par B.________, "la somme de 20'000 fr. versée par
A.________ (...) compte comme participation à cette acquisition."

En contrepartie, A.________ a reçu la jouissance d'un appartement de trois
pièces au huitième étage, dont la surface est de 64 m2 avec un balcon de 17
m2, représentant 11/1000èmes de l'immeuble. De 1975 à juin 2002, les charges
de cet appartement ont été payées successivement par B.________, puis
C.________.

A.b Le 21 décembre 1984, le but social de X.________ a été modifié, en ce
sens qu'il consistait désormais à posséder pour le compte de ses
actionnaires, soit B.________, C.________ et la soeur de B.________,
l'ensemble des locaux des immeubles à Genève.

Le 18 septembre 1986, X.________ a été transformée en SIAL PPE (société
immobilière d'actionnaires-locataires en propriété par étages). L'appartement
occupé par A.________ a fait l'objet du lot PPE N° 62, certificat d'actions
N° 78; le prénommé n'a jamais réclamé les actions de X.________ relatives à
son logement.

L'art. 3 des statuts de cette société prévoyait notamment comme but social :
"2. Conférer à ses actionnaires sur lesdites parts de copropriété, un droit
exclusif d'aménagement et d'utilisation conformément aux dispositions des
art. 712 a) et suivants  du Code Civil Suisse et au règlement
d'administration et d'utilisation qui a été annoté au Registre Foncier et
moyennant le respect des obligations découlant d'un bail à loyer et d'une
convention de sociétariat.

(...)

5. Conclure à titre fiduciaire pour certains actionnaires des baux à loyer
avec des locataires qui ne sont pas eux-mêmes actionnaires. Les produits de
la location encaissée par la société pour le compte des actionnaires ne sont
pas à la disposition de l'assemblée générale et n'entrent pas dans les
comptes de la société".
Selon l'art. 6 desdits statuts, "les actions sont nominatives et inscrites
dans un registre des actions. (... ...). Seuls les actionnaires inscrits (au
registre des actionnaires) sont légitimés à l'égard de la société pour
exercer leurs droits de membres tant sociaux que patrimoniaux, ceux-ci étant
inséparables. La propriété d'un nombre déterminé d'actions confère au
titulaire de ces actions, conformément à la répartition statutaire et
moyennant le respect des obligations découlant de la convention de
sociétariat et du bail à loyer, le droit d'utiliser et d'aménager les locaux
sis dans l'immeuble social. L'actionnaire conclut avec la société un bail
ad'hoc comportant certaines clauses particulières et conformes, pour le
reste, aux prescriptions légales et aux usages locaux (...). Si pour quelque
raison que ce soit, l'actionnaire ne peut ou ne veut pas utiliser pour son
usage personnel, les locaux qui lui sont attribués, il peut les sous-louer
avec l'accord du conseil d'administration de la société".
Le 30 juin 1987, B.________ a remis à C.________ une partie des lots dont il
était propriétaire.

En avril 1997, l'immeuble a été placé sous gérance légale, confiée à la régie
Y.________ SA, qui a en vain réclamé le paiement d'un loyer à A.________.

Le 23 février 1998, B.________ a écrit à A.________ que, par son apport
d'environ 37'000 fr. en 1975, il était alors devenu "ipso facto
copropriétaire du capital-action de X.________ SA", C.________ et lui-même
ayant agi à titre fiduciaire en ce qui concernait sa part. B.________
ajoutait que "vu la crise de l'immobilier", il y avait lieu "de défaire
(C.________) de son rôle de fiduciaire" et de le libérer du paiement des
frais, effectif depuis 1975, mais assumé par C.________ seul depuis 1987.

B.
B.aLe 26 mars 1998, X.________, sous gérance légale, a déposé une requête en
évacuation de A.________ devant les juridictions en matière de baux et
loyers, dont l'incompétence matérielle a été définitivement constatée en
appel par la juridiction spécialisée le 8 novembre 1999.

Le 17 décembre 1999, X.________  a déclaré mettre fin à l'usage que
A.________ faisait de l'appartement correspondant au lot PPE N° 62, en
l'invitant à le restituer d'ici au 31 janvier 2000.

B.b Le 3 février 2000, X.________ en liquidation a introduit devant le
Tribunal de première instance de Genève une action en revendication à l'égard
de A.________, laquelle a été admise par jugement du 22 novembre 2001,
A.________ étant condamné à évacuer l'appartement litigieux. Entendu devant
le tribunal comme représentant de X.________ en liquidation, C.________ a
rapporté les faits susmentionnés et indiqué qu'il avait payé dès 1984 les
intérêts du prêt bancaire et les charges relatives à l'appartement
revendiqué. En sa qualité de témoin, B.________ a exposé que A.________ avait
acquis dès 1975 les droits de devenir propriétaire d'un logement par
l'entremise de la société, mais que ce dernier ne les avait jamais fait
valoir. Depuis 1976, C.________ jouait le rôle de fiduciaire pour cet
appartement, dont il était propriétaire pour le compte de A.________. Ce
dernier n'a jamais payé ni charges ni loyers.

Sur appel de A.________, la Chambre civile de la Cour de justice de Genève,
par arrêt du 14 juin 2002, a annulé le jugement du tribunal et débouté
X.________, en liquidation et sous gérance légale, de toutes ses conclusions.

C.
Parallèlement à un recours de droit public, que le Tribunal a examiné d'abord
(art. 57 al. 5 OJ) et rejeté dans la mesure de sa recevabilité, la
demanderesse exerce un recours en réforme contre l'arrêt précité. Elle
conclut, principalement, à ce que le défendeur soit condamné à évacuer
immédiatement de ses biens et de sa personne l'appartement représentant le
lot PPE N° 62 de l'immeuble X.________, en le laissant en bon état;
subsidiairement, elle requiert le renvoi de la cause à l'autorité cantonale
pour qu'elle statue dans le sens des considérants de l'arrêt de la
juridiction fédérale. La recourante reproche à la Cour de justice d'avoir
retenu que la qualité d'actionnaire suffisait à conférer à C.________ un
droit exclusif d'utilisation sur  l'appartement  litigieux.  Elle invoque la
violation de l'art. 8 CC et des art. 394, 530 et 531 CO, en ce qu'une
convention de fiducie ou de société simple ne permettrait pas de conférer un
droit d'usage sur l'immeuble propriété d'un tiers. Enfin, la cour cantonale
aurait méconnu la relation de prêt à usage existant entre les parties,
laquelle a été expressément dénoncée.

Mettant en doute la recevabilité du recours, le défendeur conclut à son rejet
et à la confirmation de l'arrêt déféré.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 L'arrêt attaqué constitue une décision finale au sens de l'art. 48 al. 1
OJ, dès lors qu'il statue définitivement sur l'action en revendication
intentée par la recourante (ATF 127 III 474 consid. 1a in fine, p. 475/476 et
les arrêts cités). Compte tenu de la valeur vénale de l'appartement, à dire
d'expert, soit
292'000 fr., voire de celle de son usage par le défendeur à dater de la mise
en demeure de le restituer, notifiée le 17 décembre 1999, jusqu'aux dernières
conclusions de la demanderesse devant la Cour de justice, du 11 mars 2002, le
seuil de 8'000 fr. pour la détermination de la valeur litigieuse au sens de
l'art. 46 OJ est manifestement dépassé. Formé en temps utile (art. 34 al. 1
let. b et 54 al. 1 OJ), et dans les formes requises (art. 55 OJ), le recours
en réforme est recevable.

1.2 Le recours en réforme est ouvert pour violation du droit fédéral (art. 43
al. 1 OJ). Il ne permet en revanche pas d'invoquer la violation directe d'un
droit de rang constitutionnel (art. 43 al. 1 2e phrase OJ) ou la violation du
droit cantonal (ATF 127 III 248 consid. 2c et les arrêts cités).

Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire son
raisonnement sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à
moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été
violées, qu'il y ait lieu à rectification de constatations reposant sur une
inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter les
constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte
de faits pertinents et régulièrement allégués (art. 64 OJ; ATF 127 III 248
ibidem). Dans la mesure où une partie recourante présente un état de fait qui
s'écarte de celui contenu dans la décision attaquée, sans se prévaloir avec
précision de l'une des exceptions qui viennent d'être rappelées, il n'est pas
possible d'en tenir compte (ATF 127 III 248 consid. 2c). Il ne peut être
présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyens
de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). Le recours n'est pas ouvert
pour se plaindre de l'appréciation des preuves et des constatations de fait
qui en découlent (ATF 127 III 543 consid. 2c; 126 III 189 consid. 2a; 125 III
78 consid. 3a).
Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties (qui ne
peuvent en prendre de nouvelles: art. 55 al. 1 let. b OJ), mais il n'est pas
lié par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al. 1 OJ), ni par
l'argumentation juridique retenue par la cour cantonale (art. 63 al. 3 OJ;
ATF 128 III 22 consid. 2e/cc in fine; 127 III 248 consid. 2c; 126 III 59
consid. 2a).

2.
La demanderesse reproche aux magistrats genevois d'avoir retenu, en violation
de l'art. 8 CC,  l'existence d'un bail la liant à  C.________.

2.1 Le défendeur à l'action en revendication doit apporter la preuve du droit
préférable de nature réelle ou personnelle qu'il peut opposer à celui qui
prétend à la propriété sur la chose (Paul-Henri Steinauer, Les droits réels,
tome premier, n. 1022 s. p. 284; Arthur Meier-Hayoz, Commentaire bernois
1981, n. 63 ss ad art. 641 CC). Dans le cas présent, le défendeur devait
prouver que C.________ était autorisé à lui conférer un tel droit. Or, sur la
base du témoignage de B.________, ainsi que de l'examen du comportement de ce
dernier, de C.________ et de la demanderesse, de 1975 à sa mise sous gérance
légale en 1997, la Cour de justice a été convaincue que les droits initiaux
du défendeur avaient été maintenus jusqu'en février 1998, indépendamment de
la transformation de la société en SIAL PPE le 18 septembre 1986. Dans ces
conditions, la question de la répartition du fardeau de la preuve ne se pose
plus, et le grief de violation de l'art. 8 CC devient sans objet (ATF 122 III
219 consid. 3c p. 223). Est apparu déterminant pour la cour cantonale le fait
que la société anonyme X.________, aussi bien avant qu'après le 18 septembre
1986, n'a jamais remis en question la jouissance de l'appartement litigieux
par l'intimé, ni invité son actionnaire - et administrateur - C.________ à le
faire, par application des art. 3, ch. 5, et  6 des statuts modifiés à la
date susrappelée.

2.2 Au demeurant, même si le reproche de violation de l'art. 8 CC n'était pas
devenu sans objet, il aurait dû être rejeté dans la mesure où le défendeur
avait prouvé par d'autres moyens que par la production d'un bail écrit entre
la recourante et C.________ la maîtrise de ce dernier sur les locaux
correspondant au certificat d'actions N° 78. En relevant, dans la partie "en
fait" de sa décision, au considérant D/c in fine, que la demanderesse n'avait
produit "ni le bail ad'hoc la liant au détenteur des actions ( ... ) ni
l'autorisation de sous-location", la Cour de justice constate un fait et ne
soutient pas qu'il appartenait à  la recourante d'établir que ses
actionnaires et son administrateur n'avaient pas le droit d'autoriser
l'intimé à occuper sans frais l'appartement N° 62 détenu par C.________. Le
fardeau de la preuve n'a pas été renversé par la juridiction cantonale. De
plus, à supposer que la production d'un bail écrit eût été nécessaire pour
démontrer le droit exclusif de ce dernier quant à l'utilisation de
l'appartement  litigieux, la demanderesse se serait trouvée dans une
situation où elle était obligée de collaborer à la preuve de l'autre partie,
s'agissant d'un document interne concernant ses rapports avec ses
actionnaires, auquel le défendeur n'a en principe pas accès.

Dans la mesure où la question de la répartition du fardeau de la preuve n'a
pas perdu son objet, aucune violation du droit fédéral n'est susceptible
d'entrer en ligne de compte.

3.
3.1 La société d'actionnaires-locataires est une forme de société immobilière
qui repose sur une combinaison du droit des sociétés et du droit du bail à
loyer. C'est ainsi qu'elle implique la constitution d'une société anonyme
pour construire ou acquérir un immeuble et l'attribution de la jouissance des
parties déterminées du bâtiment. Cette attribution se réalise par un contrat
de bail que seuls les actionnaires peuvent conclure avec la société. Le droit
de jouir d'une fraction de l'immeuble doit être attaché à la qualité
d'actionnaire. Les charges courantes de l'immeuble, le service des intérêts
et l'amortissement du prêt hypothécaire sur l'immeuble sont généralement
assurés au moyen de prélèvements sur les loyers (ATF 126 V 83 consid. 2c p.
86/87 et les références).

La situation des actionnaires-locataires est plus proche de celle des
locataires que de celle des propriétaires (ATF 126 V 83 consid. 2d). En règle
générale, les statuts de telles sociétés prévoient que les actions ne
confèrent pas à leurs titulaires un droit réel d'usage et de jouissance, mais
seulement un droit personnel de conclure un contrat de bail avec la société
propriétaire de l'immeuble, le droit d'usage du logement relevant du bail à
loyer. Dans le cas particulier, les statuts de la société demanderesse se
distinguent du modèle général des SIAL PPE en ce que l'art. 3 ch. 2, tel
qu'il est rappelé ci-dessus sous let. B, prévoit que la société confère à ses
actionnaires, sur lesdites parts de copropriété par étage, un droit exclusif
d'aménagement et d'utilisation conformément aux dispositions des art. 712a ss
CC, moyennant le respect des obligations découlant d'un bail à loyer et d'une
convention de sociétariat. La même notion se retrouve à l'art. 6, où il est
rappelé que la propriété d'un nombre déterminé d'actions confère au titulaire
le droit d'utiliser et d'aménager les locaux sis dans l'immeuble social,
moyennant le respect d'un bail à loyer que l'actionnaire doit conclure avec
la société. Une certaine priorité est reconnue aux actionnaires, notamment à
l'art. 3 ch. 5 des statuts in fine, stipulant que la société ne poursuit
aucun but économique et précisant qu'en cas de location à des locataires non
actionnaires, les produits de celle-ci ne sont pas à disposition de la
société et n'entrent pas dans ses comptes.

3.2 En l'espèce, C.________ possède, en sa qualité d'actionnaire détenteur du
lot d'actions correspondant à l'appartement occupé par le défendeur, un droit
exclusif d'utiliser et d'aménager intérieurement ce local, au sens de l'art.
712a CC. Dans ce sens, la juridiction cantonale était fondée à retenir qu'il
était le seul à pouvoir décider de l'occupation de ses propres locaux, par
lui-même ou par un tiers. Même si le "bail ad'hoc" mentionné à l'art. 6 des
statuts n'a pas été produit, ou n'existe pas en la forme écrite (laquelle n'a
pas été spécifiquement réservée), la Cour de justice a retenu à juste titre
le droit de copropriété du prénommé, notamment sur l'appartement objet du
litige. A aucun moment la demanderesse n'a reproché à son actionnaire et
administrateur une éventuelle violation des art. 3, ch. 5, et 6 des statuts,
la question du "bail ad'hoc" n'ayant été soulevée qu'en rapport avec le grief
pris d'une prétendue transgression de l'art. 8 CC, dont il a été fait justice
au considérant précédent.

En conséquence, C.________ pouvait seul décider de la destination de
l'appartement du huitième étage, en l'affectant à ses besoins propres ou à
ceux d'un tiers, et cela librement dans les limites des art. 712a ss CC, sauf
dans l'hypothèse de la sous-location, où l'accord du conseil d'administration
de la recourante était requis. Comme tel n'est pas le cas en l'espèce, cette
exigence importe peu et eût été au demeurant une formalité, puisque
l'actionnaire concerné était simultanément l'administrateur de la
demanderesse.

4.
Dès lors que le défendeur occupe l'appartement en question avec l'accord de
l'actionnaire copropriétaire de ce local, la demanderesse, dont le but est de
posséder pour le compte de ses actionnaires l'ensemble des parts de
copropriétés afférent à l'immeuble X.________, ne peut entrer en possession
de l'appartement revendiqué. Le motif pour lequel C.________ a remis la
jouissance de celui-ci sans frais jusqu'en 1998, soit après la mise sous
gérance légale de la recourante, n'est en définitive pas déterminant.

En l'absence de sous-location, soumise à l'autorisation du bailleur (qui ne
peut d'ailleurs la refuser qu'à des conditions étroites, cf. ATF 125 III 62
consid. 2a), ou au contraire au pouvoir discrétionnaire du conseil
d'administration de la recourante (art. 6 des statuts), la Cour de justice a
vu dans la relation entre l'actionnaire et l'occupant soit un contrat de
fiducie, soit un contrat de société simple. En réalité, le défendeur a
constitué, en 1975, avec B.________ et C.________ une société simple tacite
pour augmenter des fonds propres destinés à acquérir le capital-actions de la
société X.________; le but de cette société simple était uniquement de
consolider la situation des deux actionnaires vis-à-vis des tiers, et
singulièrement des bailleurs de fonds (Ueli Sommer, Die stille Gesellschaft,
thèse Zurich 1999, p. 12, 20 et 21). En fait, l'intimé est intervenu dans
cette acquisition au titre d'une participation occulte, qui était précisément
l'objet de la société simple tacite (Olivier Flattet, La société en
participation du droit français au regard de la société simple du droit
suisse, thèse Lausanne 1980, p. 82 et 83).

Par la suite, les deux actionnaires, puis C.________ seul dès 1987, ont agi à
titre fiduciaire pour le compte du défendeur, ce dernier ayant la jouissance
de l'appartement litigieux, sans frais de 1975 à 1998, année à partir de
laquelle il a été invité à payer les charges. Ces circonstances expliquent
les motifs pour lesquels C.________ a maintenu l'intimé dans sa situation de
fait, même après la transformation de la demanderesse en une SIAL PPE.

5.
Enfin, en l'absence de relation juridique directe entre les parties, il n'y a
pas lieu de considérer un éventuel prêt à usage portant sur l'appartement en
cause.

6.
Le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité, l'arrêt
attaqué étant confirmé. Vu l'issue du litige, la demanderesse paiera
l'émolument de justice et versera des dépens à son adverse partie.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable et l'arrêt attaqué
est confirmé.

2.
Un émolument judiciaire de 4'000 fr. est mis à la charge de la recourante.

3.
La recourante versera à l'intimé une indemnité de 5'000 fr. à titre de
dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 26 novembre 2002

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président:   Le greffier: