Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2A.597/2002
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2A.597/2002 /svc

Arrêt du 2 avril 2003
IIe Cour de droit public

MM. les Juges Wurzburger, Président,
Hungerbühler et Berthoud, Juge suppléant.
Greffière: Mme Revey.

Office fédéral des étrangers
(actuellement Office fédéral de l'immigration,
de l'intégration et de l'émigration), 3003 Berne,
recourant,

contre

A.________,
et ses enfants B.________ et C.________,
intimés,
tous trois représentés par Me Serge Rouvinet, avocat, case postale 3649, 1211
Genève 3,
Office cantonal de la population du canton de Genève, case postale 51, 1211
Genève 8,
Commission cantonale de recours de police des étrangers du canton de Genève,
boulevard Helvétique 27, 1207 Genève.

refus de regroupement familial,

recours de droit administratif contre la décision de la Commission cantonale
de recours de police des étrangers du canton de Genève du 29 octobre 2002.

Faits:

A.
A. ________, ressortissant de Yougoslavie, Province du Kosovo, né en 1965,
séjourne en Suisse en tout cas depuis le 26 février 1991. Le 26 février
(recte: mars) 1991, il a épousé une ressortissante suisse, dont il a divorcé
le 19 décembre suivant. Le 12 juillet 1994, l'intéressé s'est remarié avec
une autre ressortissante suisse et a obtenu de ce fait une autorisation de
séjour, régulièrement renouvelée. Le 17 janvier 2001, il a été naturalisé.

A. ________ est le père de deux enfants issus d'une union hors mariage avec
une compatriote, nommée D.________, soit B.________ né en 1985 et C.________
né en 1990.

B.
Le 5 mars 2002, l'intéressé a formé devant l'Office cantonal genevois de la
population une demande de regroupement familial en faveur de ses deux enfants
précités. A l'appui, il a produit une attestation du 9 janvier 2002 de
l'officier de l'état civil de Viti (Kosovo), selon laquelle la mère déclarait
ne plus pouvoir s'occuper de ses enfants, sa situation économique s'étant
gravement dégradée, et consentir à ce que les enfants aillent vivre avec leur
père.

Par décision du 30 mai 2002, l'Office cantonal a rejeté cette requête,
retenant que l'intéressé ne pouvait se prévaloir d'un lien familial
prépondérant avec ses enfants.

Le 25 juin 2002, A.________ a déféré ce prononcé devant la Commission
cantonale de recours de police des étrangers du canton de Genève, alléguant
qu'il avait toujours maintenu une relation très suivie avec ses enfants et
confirmant que ceux-ci ne pouvaient plus être pris en charge par leur mère,
qui les avait entre-temps confiés à leur grand-mère maternelle. Pour étayer
ses dires, A.________ a déposé une attestation du 29 avril 2002 émanant de la
Mission d'administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo.

Entendu le 29 octobre 2002 par la Commission cantonale de recours,
l'intéressé a déclaré que les enfants vivaient auprès de leur grand-mère
paternelle, âgée de nonante-deux ans, que leur mère avait refait sa vie, que
celle-ci ne s'était plus occupée d'eux depuis la naissance du cadet et
qu'elle ne les avait plus revus depuis près de cinq ans. Par décision du même
jour, la Commission cantonale de recours a admis le recours, considérant que
A.________ avait entretenu des liens étroits avec ses fils et que ces
relations avaient acquis un caractère prépondérant du fait du désintérêt
manifesté par la mère.

C.
Agissant le 6 décembre 2002 par la voie du recours de droit administratif,
l'Office fédéral des étrangers (actuellement l'Office fédéral de
l'immigration, de l'intégration et de l'émigration) demande au Tribunal
fédéral d'annuler la décision du 29 octobre 2002 de la Commission cantonale
de recours et de confirmer le prononcé du 30 mai 2002 de l'Office cantonal
refusant la délivrance des autorisations de séjour sollicitées en faveur de
B.________ et C.________. Dénonçant une violation de l'art. 17 al. 2 3ème
phrase de la loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement
des étrangers (LSEE; RS 142.20), il fait valoir en substance que
A.________n'a pas noué de relation prépondérante avec ses fils et que la
demande de regroupement familial repose principalement sur des motifs
économiques et matériels.

D.
La Commission cantonale de recours renonce à formuler des observations.
L'Office cantonal se réfère aux observations qu'il avait adressées à la
Commission cantonale de recours le 18 septembre 2002 et propose implicitement
l'admission du recours. A.________ conclut à son rejet.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours
qui lui sont soumis (ATF 128 I 46 consid. 1a; 128 II 56 consid. 1, 66 consid.
1 et la jurisprudence citée).

1.1
Selon l'art. 103 lettre b OJ, a qualité pour former un recours de droit
administratif le département compétent ou, lorsque le droit fédéral le
prévoit, la division compétente de l'administration fédérale. En vertu de
l'art. 14 al. 2 de l'ordonnance du 17 novembre 1999 sur l'organisation du
Département fédéral de justice et police (Org DFJP; RS 172.213.1), entrée en
vigueur le 1er janvier 2000, l'Office fédéral de l'immigration, de
l'intégration et de l'émigration est habilité à former des recours de droit
administratif, dans les domaines du droit des étrangers et de la nationalité,
contre des décisions cantonales de dernière instance.
Fondée sur le droit public fédéral (art. 97 al. 1 OJ en relation avec l'art.
5 PA), la décision attaquée a été rendue par une autorité judiciaire statuant
en dernière instance cantonale (art. 98 lettre g et 98a al. 1 OJ). Elle peut
donc faire l'objet d'un recours de droit administratif de la part de l'Office
fédéral de l'immigration, de l'intégration et de l'émigration.

Le droit de recours de l'autorité fédérale vise à assurer l'exécution
correcte du droit public fédéral. Ainsi, l'autorité fédérale recourante n'est
en principe pas tenue de démontrer un intérêt public particulier à
l'annulation de la décision attaquée. Il suffit que les questions soumises
soient concrètes et non pas simplement théoriques (ATF 129 II 11 consid. 1.1;
127 II 32 consid. 1b; 125 II 633 consid. 1a et les références citées).

1.2 Pour le surplus, déposé en temps utile et dans les formes requises, le
présent recours est recevable (cf. art. 106 ss OJ).

2.
Conformément à l'art. 104 lettre a OJ, le recours de droit administratif peut
être formé pour violation du droit fédéral, y compris l'excès et l'abus du
pouvoir d'appréciation. Le Tribunal fédéral revoit d'office l'application du
droit fédéral, qui englobe notamment les droits constitutionnels (ATF 128 II
56 consid. 2b; 126 V 252 consid. 1a; 125 II 508 consid. 3a). Comme il n'est
pas lié par les motifs que les parties invoquent, il peut admettre le recours
pour d'autres raisons que celles avancées par le recourant ou, au contraire,
confirmer la décision attaquée pour d'autres motifs que ceux retenus par
l'autorité intimée (art. 114 al. 1 in fine OJ; ATF 128 II 145 consid. 1.2.2;
127 II 264 consid. 1b et les arrêts cités).

En revanche, lorsque le recours est dirigé, comme en l'occurrence, contre la
décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits
constatés dans la décision, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou
incomplets ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de
procédure (art. 104 lettre b et 105 al. 2 OJ). En outre, le Tribunal fédéral
ne peut pas revoir l'opportunité de la décision entreprise, le droit fédéral
ne prévoyant pas un tel examen en la matière (art. 104 lettre c ch. 3 OJ).

3.
3.1 Aux termes de l'art. 17 al. 2 3ème phrase LSEE, les enfants célibataires
de moins de dix-huit ans ont le droit d'être inclus dans l'autorisation
d'établissement de leurs parents aussi longtemps qu'ils vivent auprès d'eux.
Selon la jurisprudence (ATF 118 Ib 153 consid. 1b), cette disposition
s'applique par analogie aux enfants de nationalité étrangère de parents
suisses. En l'espèce, l'intimé a obtenu la nationalité suisse et ses deux
enfants, célibataires, sont âgés de moins de dix-huit ans. Tous trois
bénéficient ainsi de cette disposition.

3.2
3.2.1Le but de ce que l'on appelle le regroupement familial est de permettre
aux enfants et aux parents de vivre les uns avec les autres. La jurisprudence
considère ainsi que l'art. 17 al. 2 3ème phrase LSEE est d'abord conçu pour
les familles où les parents font ménage commun, de sorte que cette
disposition doit être appliquée de manière plus restrictive lorsque les
parents sont séparés ou divorcés (ATF 129 II 11 consid. 3.1; 126 II 329
consid. 2a et les références citées).

Les restrictions dont fait l'objet l'art. 17 al. 2 3ème phrase LSEE lorsqu'il
concerne des parents séparés ou divorcés, s'appliquent également par analogie
à l'art. 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et
des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH; RS 0.101). En effet, si
cette disposition peut faire obstacle, dans certaines circonstances, à une
mesure d'éloignement qui empêche ou rend très difficile le maintien de la vie
familiale, elle n'octroie en revanche pas de droit absolu à l'entrée ou au
séjour en Suisse de membres de la famille (ATF 125 II 633 consid. 3a; 124 II
361 consid. 3a).

3.2.2 Lorsque les parents sont séparés ou divorcés, celui d'entre eux qui a
librement décidé de venir en Suisse ne peut se prévaloir du droit d'y faire
venir son enfant lorsqu'il entretient avec celui-ci des contacts moins
étroits que l'autre parent resté à l'étranger, ou que les membres de la
famille qui en prennent soin, et qu'il peut maintenir les relations
existantes. Dans un tel cas, où le regroupement familial ne peut être que
partiel, il n'existe en effet pas un droit inconditionnel de l'enfant vivant
à l'étranger de rejoindre le parent établi en Suisse, à moins qu'il
n'entretienne avec celui-ci une relation familiale prépondérante et que la
nécessité de sa venue soit établie. Pour en juger, il ne faut pas tenir
compte seulement des circonstances passées; les changements déjà intervenus,
voire les conditions futures, peuvent également être déterminants. En ce
sens, on ne peut se fonder dans tous les cas uniquement sur le fait que
l'enfant a vécu jusque-là dans un pays étranger où il a noué ses attaches
principales, sans quoi le regroupement familial ne serait pratiquement jamais
possible. Il faut examiner chez lequel de ses parents l'enfant a vécu
jusqu'alors ou, en cas de divorce, auquel de ceux-ci le droit de garde a été
attribué; si l'intérêt de l'enfant s'est modifié entre-temps, l'adaptation à
la nouvelle situation familiale devrait en principe être d'abord réglée par
les voies du droit civil. Toutefois, sont réservés les cas où les nouvelles
relations familiales sont clairement définies - par exemple lors du décès du
parent titulaire du droit de garde ou lors d'un changement marquant des
besoins d'entretien - et ceux où l'intensité de la relation est transférée
sur l'autre parent (ATF 124 II 361 consid. 3a et les références citées: ATF
122 II 385 consid. 4b; 119 Ib 81 consid. 4a et b; 118 Ib 153 consid. 2c et
d).

Le fait qu'un enfant vienne en Suisse peu avant sa majorité, alors qu'il a
longtemps vécu séparément de celui de ses parents établi en Suisse, constitue
généralement un indice d'abus du droit au regroupement familial. Il faut
cependant tenir compte de toutes les circonstances particulières du cas qui
sont de nature à justifier un regroupement familial tardif, comme par exemple
une modification importante de la situation familiale et des besoins de
l'enfant, telle qu'elle peut notamment se produire après le décès du parent
vivant à l'étranger (cf. ATF 126 II 329 consid. 2b; 125 II 585 consid. 2a;
119 Ib 81 consid. 3a; 118 Ib 153 consid. 2b). Le cas échéant, il y a lieu
d'examiner s'il existe dans le pays d'origine des alternatives, en ce qui
concerne la prise en charge de l'enfant, qui correspondent mieux à ses
besoins spécifiques; on songera notamment aux enfants proches ou entrés dans
l'adolescence qui ont toujours vécu dans leur pays d'origine, et pour
lesquels une émigration vers la Suisse pourrait être ressentie comme un
déracinement difficile à surmonter et devrait donc, autant que possible, être
évitée; toutefois, la jurisprudence rendue à propos des art. 17 al. 2 LSEE et
8 CEDH ne doit pas conduire à n'accepter le regroupement familial que dans
les cas où aucune alternative ne s'offre pour la prise en charge de l'enfant
dans son pays d'origine (cf. ATF 126 II 329 consid. 3a; 125 II 633 consid.
3a).

4.
4.1 En l'espèce, l'intimé a quitté volontairement la Yougoslavie pour la
Suisse en février 1991 au plus tard, alors que ses enfants étaient âgés de
cinq ans et demi, respectivement de quelques mois. En été 1994, il a obtenu
une autorisation de séjour en raison de son mariage avec une ressortissante
suisse, puis a été naturalisé le 17 janvier 2001. Le 5 mars 2002, il a déposé
une demande de regroupement familial en faveur de ses fils, alors âgés
respectivement de seize ans et demi et de onze ans et demi.

4.1.1 Il résulte de ce qui précède que l'intimé, qui aurait pu requérir la
venue de ses fils en vertu de l'art. 8 CEDH dès son mariage avec une
ressortissante suisse, puisqu'il bénéficiait de ce fait d'un droit certain à
l'obtention d'une autorisation de séjour (cf. ATF 126 II 377 consid. 2b; 122
II 385 consid. 1c; 119 Ib 91 consid. 1c; art. 17 al. 2 1ère phrase LSEE
applicable par analogie aux époux étrangers de ressortissants suisses), a
attendu sept ans et demi, soit après sa naturalisation, avant de déposer une
telle demande.

A cet égard, la Commission de recours a retenu en fait que ce retard n'était
pas imputable à l'intéressé, car les difficultés administratives liées aux
graves troubles ayant secoué son pays d'origine ne lui avaient pas permis
d'obtenir plus tôt des documents d'identité pour ses enfants.

Toutefois, comme le souligne le recourant, ces éléments ne reposent que sur
les seules déclarations de l'intéressé à la Commission cantonale de recours
le 29 octobre 2002, lesquelles ne sont en outre pas convaincantes. Dans une
lettre adressée à l'Office cantonal le 29 avril 2002, figurant au dossier,
l'intimé a affirmé avoir accompli de nombreuses démarches auprès des
autorités kosovares pour faire venir ses enfants en Suisse, mais n'a produit
aucune pièce à l'appui de ses dires, de sorte que l'on ne saurait retenir
qu'il ait agi en ce sens. Force est ainsi d'inférer que l'intéressé a
délibérément consenti à ce que ses enfants soient élevés et scolarisés dans
leur pays d'origine.

4.1.2 Au demeurant, les enfants de l'intimé ont toujours vécu avec leur mère,
voire leur grand-mère, dans leur pays d'origine où se trouvent leurs attaches
culturelles et sociales. Certes, la Commission cantonale de recours a
considéré que l'intéressé avait maintenu des relations étroites avec ses
fils, en leur rendant très régulièrement visite et en passant ses vacances
avec eux. Toutefois, le maintien de ces contacts ne saurait, à lui seul,
suffire à imprimer à cette relation familiale le caractère prépondérant exigé
par la jurisprudence. Pour qu'il en fût ainsi, il aurait fallu que l'intimé
ait, pendant toute la période de son absence, assumé la responsabilité
principale de l'éducation de ses enfants en intervenant, à distance, de
manière décisive pour régler l'existence de ceux-ci dans les grandes lignes,
au point de reléguer leur mère et leurs grands-parents au rôle de simples
exécutants. Du reste, il ressort du dossier que l'intimé n'a jamais accueilli
ses enfants en Suisse, montrant par là qu'il ne ressentait pas grand besoin
de leur faire découvrir son cadre de vie. Par ailleurs, les enfants étaient
âgés respectivement de dix-sept ans et de près de douze ans, lorsque la
décision attaquée a été prise, de sorte que leur venue en Suisse les
exposerait à des difficultés d'intégration, spécialement pour l'adolescent.
Par conséquent, les liens noués entre l'intimé et ses fils, que tous trois
pourront du reste maintenir à l'avenir, ne l'emportent pas sur les relations
que les enfants ont tissées avec leur mère et leur pays d'origine.

4.2 Il reste à examiner si des changements de circonstances rendent
nécessaire le regroupement familial.

4.2.1
La Commission cantonale de recours a considéré en fait que les enfants ne
vivaient plus avec leur mère, qui n'était plus en mesure de s'occuper d'eux,
mais avec leur grand-mère maternelle, que son âge de nonante-deux ans
empêchait également d'assumer leur éducation. L'autorité s'est fondée à ce
propos sur les déclarations susmentionnées de l'intimé du 29 octobre 2002,
ainsi que sur les deux attestations précitées des 9 janvier et 29 avril 2002,
émanant respectivement de l'officier de l'état civil de Viti et de la Mission
d'administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo.

4.2.2 A juste titre, le recourant soutient que les preuves indiquées ne
suffisent pas à établir que les enfants n'entretiendraient plus de relations
suivies avec leur mère.

D'une part, les déclarations précitées de l'intimé du 29 octobre 2002 sont
peu crédibles puisqu'il affirmait six mois auparavant dans sa demande de
regroupement familial du 5 mars 2002, figurant au dossier, que ses enfants
habitaient encore avec leur mère. A cela s'ajoute que l'intimé a indiqué
comme personne en charge de ses enfants d'abord la grand-mère maternelle,
dans son recours du 25 juin 2002, puis sa propre mère de nonante-deux ans,
dans ses déclarations du 29 octobre 2002, confusion du reste reprise par la
Commission cantonale de recours. Au demeurant, il résulte étonnamment des
dires de l'intimé que sa mère, née en 1910, aurait accouché à l'âge de
cinquante-cinq ans, puisqu'il est né en 1965.

D'autre part, il résulte de l'attestation de l'officier de l'état civil de
Viti que la mère justifie sa volonté de transférer ses enfants à leur père
par des difficultés économiques uniquement. Elle n'indique nullement qu'elle
ne vivrait plus avec eux, ni que d'autres motifs l'empêcheraient de leur
accorder les soins et l'attention nécessaires. Au demeurant, le fait que la
mère ait accepté de laisser les enfants à leur père pour qu'ils bénéficient
de meilleures conditions de vie ne signifie pas qu'elle ne s'en occupe plus.
De plus, il n'est pas établi qu'une aide financière du père, qui affirme
selon la décision attaquée pouvoir entretenir ses enfants en Suisse, ne
permettrait pas à la mère de continuer à élever ses enfants.

Enfin, l'attestation de la Mission d'administration intérimaire des Nations
Unies, figurant au dossier dans sa version originale en anglais, se borne à
indiquer ce qui suit: "Mme A.________, né(e) en 1965, est venue aujourd'hui à
notre bureau pour demander la délivrance d'un certificat attestant qu'elle
soutient financièrement les membres suivants de sa famille: E.________ (sic),
née en 1910, B.________, né en 1985 et C.________, né en 1990. Nous
comprenons que la famille vit dans le village de P.________, commune de
Viti." Ce document n'indique donc pas que les enfants vivraient désormais
seuls avec leur grand-mère, qu'elle soit paternelle ou maternelle.

4.3 Force est de retenir ainsi que la venue des enfants en Suisse répond
avant tout à des motifs de convenances personnelles et économiques qui, bien
qu'honorables, ne sauraient être pris en compte dans l'application de l'art.
17 al. 2 3ème phrase LSEE, dont le but est de permettre le regroupement
familial, et non pas d'assurer aux enfants un avenir plus favorable en
Suisse. Enfin, encore peut-on souligner que cette disposition ne tend pas
davantage à protéger l'étranger contre les conséquences de la guerre ou
contre des abus des autorités étatiques, les considérations de cet ordre
relevant de la procédure d'asile.

Dans ces conditions, l'arrêt attaqué heurte le droit fédéral en accordant aux
enfants de l'intimé une autorisation de séjour fondée sur l'art. 17 al. 2
3ème phrase LSEE.

5.
Vu ce qui précède, le recours doit être admis, la décision entreprise annulée
et la demande de regroupement familial présentée en faveur de B.________ et
C.________ rejetée. Succombant, l'intimé doit supporter les frais judiciaires
(art. 156 al. 1 OJ en relation avec les art. 153 et 153a OJ). Il n'y a pas
lieu d'allouer de dépens.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis, la décision de la Commission cantonale de recours de
police des étrangers du canton de Genève du 29 octobre 2002 est annulée et la
demande de regroupement familial présentée en faveur de B.________ et de
C.________ est rejetée.

2.
Un émolument judiciaire de 1'000 fr. est mis à la charge de A.________.

3.
La cause est renvoyée à la Commission cantonale de recours de police des
étrangers du canton de Genève pour nouvelle décision sur les frais de la
procédure cantonale.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie à l'Office fédéral de l'immigration,
de l'intégration et de l'émigration, au mandataire des intimés, ainsi qu'à
l'Office cantonal de la population et à la Commission cantonale de recours de
police des étrangers du canton de Genève.

Lausanne, le 2 avril 2003

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: