Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2A.55/2002
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2A.55/2002 /dxc

Arrêt du 30 octobre 2002
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Yersin et Merkli,
greffière Rochat.

A. ________,
recourant, représenté par Me Jocelyn Ostertag, Avocat,
avenue des Alpes 6, case postale 236, 3960 Sierre,

contre

Service cantonal des contributions du canton du Valais, bâtiment Planta 577,
avenue de la Gare 35, 1951 Sion,
Commission cantonale de recours en matière fiscale du canton du Valais,
bâtiment Planta 577, 1950 Sion.

impôt fédéral direct d'un bénéfice de liquidation pour 1999

(recours de droit administratif contre la décision de la Commission cantonale
de recours en matière fiscale du canton du Valais des 24 janvier et 21
février 2001)

Faits:

A.
A. ________ a exploité une carrosserie, en raison individuelle, sur la
commune de X.________, jusqu'en 1999.

Pour la période de taxation 1995/1996, la Commission d'impôt de district pour
la commune de X.________ (ci-après: la Commission d'impôt) a, sur la base de
la déclaration du contribuable, accompagnée des comptes de son activité
indépendante, admis une perte d'exploitation annuelle moyenne de 158'727 fr.
et fixé le revenu imposable à 155'357 fr. Cette taxation, qui n'a pas fait
l'objet d'une réclamation, est entrée en force.

Pour la période de taxation 1997/1998, A.________ n'a pas produit de comptes,
ni déposé de déclaration, de sorte que la Commission d'impôt l'a taxé
d'office, en fixant à 24'000 fr. le revenu annuel moyen provenant de
l'activité lucrative indépendante. Compte tenu d'autres revenus et des
déductions ordinaires, le revenu imposable a été arrêté à 27'330 fr. pour
l'impôt cantonal et communal et à 27'800 fr. pour l'impôt fédéral direct.
Cette taxation est également entrée en force, faute de réclamation.

Pour la période de taxation 1999/2000, le contribuable n'a pas non plus
déposé de déclaration d'impôt, de sorte qu'après sommation, la Commission
d'impôt a  aussi procédé à une taxation par estimation. Sur la base du même
revenu indépendant annuel moyen de 24'000 fr., le revenu imposable a été
arrêté à 27'320 fr. pour l'impôt cantonal et communal et à 24'600 fr. pour
l'impôt fédéral direct. Cette taxation a été notifiée par bordereaux du 8
mars 2000.

B.
Entre-temps, soit en 1999, A.________ a cessé son activité lucrative
indépendante et a vendu l'immeuble abritant son entreprise, ainsi qu'un
terrain de nature privée, pour le prix de 2'400'000 fr. Après enquête, la
Commission d'impôt a arrêté le bénéfice de liquidation imposable à 951'800
fr. par décision du 22 mars 2000.

Lors d'une séance qui s'est tenue le 4 avril 2000, le contribuable a contesté
oralement le montant arrêté à titre de bénéfice imposable sur divers points,
en faisant notamment valoir des frais pour un montant de 344'876 fr.

Le 5 avril 2000, la Commission d'impôt a également procédé à une taxation
intermédiaire avec effet au 1er juin 1999 (150 jours) pour cause de cessation
d'activité et de mise au bénéfice des rentes AVS. Pour la fin de 1999 (210
jours) et 2000, elle a fixé le revenu imposable à 68'270 fr. pour l'impôt
cantonal et communal et à 30'600 fr. pour l'impôt fédéral direct, la fortune
imposable étant arrêtée à 1'101'576 fr.

Par décision du 3 mai 2000, la taxation intermédiaire a cependant été
corrigée, le revenu imposable étant fixé à 47'270 fr. dès le 1er juin 1999
(210 jours) pour l'impôt cantonal et communal; pour l'impôt fédéral direct,
le revenu imposable a été arrêté à 9'600 fr. à partir du 1er juin 1999. Au
surplus, les taxations du 8 mars 2000 étaient confirmées pour la période du
1er janvier au 30 mai 1999. Quant à la fortune imposable, elle a été ramenée
à 401'576 fr.

Dans ses lettres des 10 et 19 mai 2000, A.________ a maintenu son opposition
à la "taxation du 22 mars 2000 pour cessation d'activité" puis, le 23 juin
2000, il a déposé plusieurs pièces justificatives. Par courrier du 7 août
2000, la Commission d'impôt a informé le contribuable qu'elle acceptait de
rectifier sa décision du 22 mars 2000, en ramenant le bénéfice de liquidation
imposable à 758'900 fr. brut, soit à 709'457 fr. après déduction des
cotisations sociales.

Le 25 octobre 2000, A.________ a transmis à l'Administration fiscale
cantonale les comptes d'exploitation de sa carrosserie, qui relevaient les
pertes suivantes:

93'810 fr. 65, en 1994,
165'387 fr. 35, en 1995,
140'174 fr. 85, en 1996,
181'971 fr. 60, en 1997, et
149'689 fr. 10, en 1998, soit, au total:
731'035 fr. 55

Il en concluait qu'après déduction des pertes d'exploitation, le bénéfice de
liquidation imposable était nul.

Par décision du 30 octobre 2000, la Commission d'impôt a rejeté la demande de
déduction des pertes et confirmé sa taxation.

C.
A.________ a recouru contre cette décision auprès de la Commission de recours
en matière fiscale du canton du Valais. Il alléguait notamment que la
situation difficile de son entreprise l'avait empêché de fournir des comptes
pour les années 1994 à 1998 et demandait à pouvoir bénéficier d'une révision
au sens de l'art. 154 de la loi fiscale cantonale du 10 mars 1976.

Dans sa décision des 24 janvier et 21 février 2001, la Commission de recours
a estimé que les pertes reconnues fiscalement des exercices 1993 et 1994
devaient être admises en déduction du bénéfice de liquidation, soit un
montant de 310'714 fr. pour les deux années. Partant, elle a admis
partiellement le recours et fixé le bénéfice de liquidation imposable à
398'743 fr. en matière d'impôts cantonaux et communaux et à 393'803 fr. en
matière d'impôt fédéral direct. En revanche, la Commission de recours a
rejeté la déduction des pertes pour des exercices ultérieurs (1995 à 1998),
dont les comptes n'avaient pas été soumis à l'autorité compétente. Elle a
considéré en bref que la taxation pour la période fiscale 1997/1998, de même
que celle courant du 1er janvier au 30 mai 1999, avaient retenu un bénéfice
annuel moyen, non contesté, de 24'000 fr. Quant à la demande de révision
présentée par le recourant contre ces taxations, elle devrait de toute façon
être rejetée, si elle était prise en compte. En effet, les difficultés
financières alléguées ne pouvaient être considérées comme un motif ayant
empêché le recourant de respecter les obligations qui lui incombaient dans
les procédures de taxation (art. 154 al. 2 LF).

D.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, A.________ conclut,
sous suite de frais et dépens, à l'annulation de la décision de la Commission
de recours en matière fiscale des 24 janvier et 21 février 2001. A titre
principal, il demande au Tribunal fédéral de porter en déduction du bénéfice
de liquidation imposable l'ensemble des pertes des exercices 1994 à 1998,
soit une somme de 731'033 fr. 55. Subsidiairement, il demande la déduction
des pertes des exercices 1997 et 1998, soit les montants respectifs de
181'971 fr. 60 et 149'689 fr. 10, en alléguant qu'il avait élevé une
réclamation, à tout le moins une demande de révision, contre la taxation
1999/2000 qui, selon lui, a retenu à tort un bénéfice annuel de 24'000 fr.

La Commission de recours en matière fiscale conclut au rejet du recours et le
Service cantonal des contributions se réfère à la décision attaquée.

L'Administration fédérale des contributions conclut au rejet du recours avec
suite de frais.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours
dont il est saisi (ATF 128 II 56 consid. 1 p. 58, 66 consid. 1 p. 67).

1.1 Déposé en temps utile et dans les formes prescrites par la loi contre une
décision rendue en dernière instance cantonale en tant qu'elle concerne
l'impôt fédéral direct, le présent recours est en principe recevable comme
recours de droit administratif au regard des art. 97 ss OJ et de la règle
particulière de l'art. 146 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt
fédéral direct (LIFD; RS 642.11). Il n'est en revanche pas recevable comme
recours de droit public en tant qu'il porte sur l'impôt cantonal et communal,
dans la mesure où la décision attaquée n'a pas été prise en dernière instance
cantonale (art. 86 OJ), mais pouvait encore faire l'objet d'un recours auprès
de la Cour de droit public du Tribunal cantonal.

1.2 Conformément à l'art. 104 lettre a OJ, le recours de droit administratif
peut être formé pour violation du droit fédéral, y compris l'excès et l'abus
du pouvoir d'appréciation. Le Tribunal fédéral revoit d'office l'application
du droit fédéral qui englobe notamment les droits constitutionnels du citoyen
(ATF 128 II 56 consid. 2b p. 60; 125 II 508 consid. 3a p. 509; 125 III 209
consid. 2 p. 211). Comme il n'est pas lié par les motifs que les parties
invoquent, il peut admettre le recours pour d'autres raisons que celles
avancées par le recourant ou, au contraire, confirmer l'arrêt attaqué pour
d'autres motifs que ceux retenus par l'autorité intimée (art. 114 al. 1 in
fine OJ; ATF 127 II 264 consid. 1b p. 268 et les arrêts cités). En matière de
contributions publiques, il peut en outre aller au-delà des conclusions des
parties, à l'avantage ou au détriment de celles-ci, lorsque le droit fédéral
est violé ou lorsque des faits ont été constatés de manière inexacte ou
incomplète (cf. art. 114 al. 1 OJ).

Par ailleurs, lorsque le recours est dirigé, comme en l'espèce, contre la
décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits
constatés dans la décision, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou
incomplets ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de la
procédure (art. 104 lettre b et 105 al. 2 OJ; ATF 126 II 196 consid. 1 p.
198). En outre, le Tribunal fédéral ne peut pas revoir l'opportunité de la
décision entreprise, le droit fédéral ne prévoyant pas un tel examen en la
matière (art. 104 lettre c ch. 3 OJ).

2.
2.1 Il n'est pas contesté que, le recourant ayant cessé son activité lucrative
à fin mai 1999, les conditions de l'art. 45 lettre b LIFD pour procéder à une
taxation intermédiaire avec effet au 1er juin 1999 étaient réunies. La
question litigieuse porte dès lors uniquement sur la possibilité de déduire
ou non du bénéfice de liquidation imposable (art. 47 LIFD) les pertes
d'exploitation, reconstituées après coup par le recourant.

2.2 Selon l'art. 31 LIFD, "les pertes subies durant les trois périodes de
calculs précédentes peuvent être déduites du revenu moyen de la période de
calcul, à condition qu'elles n'aient pas été prises en considération lors du
calcul du revenu imposable des années précédentes".

Le recourant reproche à la Commission de recours d'avoir donné une
interprétation erronée de l'art. 31 LIFD en admettant que seules les pertes
reconnues fiscalement étaient déductibles, alors que le texte de cette
disposition ne mentionne que les "pertes subies", par quoi il faut comprendre
toutes les pertes qui n'auraient pas été déduites des revenus antérieurs,
pour autant qu'elles soient attestées selon les règles comptables usuelles.

2.3 Le report des pertes prévu à l'art. 31 al. 1 LIFD correspond à celui de
l'ancien droit. Cela signifie que le report des pertes sur les bénéfices
d'années antérieures, qui aurait pour conséquence de devoir revenir sur des
taxations déjà entrées en force, est exclu (Peter Agner/Beat Jung/Gotthard
Steinmann, Commentaire de la loi sur l'impôt fédéral direct, Zurich 2001, n.
1 ad art. 31, p. 116). Seule est autorisée la déduction des pertes des trois
périodes de calcul précédentes du revenu moyen de la période de calcul,
c'est-à-dire du revenu soumis à l'impôt ordinaire. La pratique admet certes
que les pertes soient déduites du bénéfice de liquidation, mais il doit
s'agir des pertes résultant de taxations précédentes, qui ne pouvaient pas
être prises en compte (arrêt 2A.557/1996 du 4 février 2000, consid. 4b). Il
n'en résulte toutefois pas que les taxations précédentes entrées en force
puissent être remises en cause lors de l'imposition du bénéfice de
liquidation. Quand l'autorité fiscale a procédé à la taxation d'office du
contribuable en application de l'art. 130 al. 2 LIFD, les pertes ne peuvent
pas être déduites ultérieurement, si leur montant n'a pas pu être arrêté
définitivement lors de la taxation d'office.
En l'espèce, il est constant que le recourant n'a pas satisfait à ses
obligations en ne déposant pas sa déclaration d'impôt pour les périodes
fiscales 1997/1998 et 1999/2000, de sorte qu'il a été taxé d'office sur la
base d'un revenu d'exploitation positif. Par la suite, avant son recours au
Tribunal fédéral, il n'a jamais contesté la taxation du 8 mars 2000, ni la
taxation intermédiaire du 3 mai 2000 concernant la période du 1er janvier au
30 mai 1999 (150 jours) qui confirmait un revenu de 27'300 fr. pour l'impôt
cantonal et communal et de 24'600 fr. pour l'impôt fédéral direct sur la base
d'un résultat d'activité indépendante de 24'000 fr. En particulier, il n'a
jamais déposé de réclamation écrite et motivée répondant aux exigences
strictes de l'art. 132 LIFD, notamment celles découlant de l'alinéa 3 de
cette disposition. La Commission de recours en a donc déduit à juste titre
que la réclamation du 25 octobre 2000 portait uniquement sur le bénéfice de
liquidation imposable. Il s'ensuit que les taxations d'office pour les
périodes 1997/1998 et 1999/2000 portant sur les exercices 1995 à 1998 sont
définitives. Au demeurant, la comptabilité du recourant, reconstituée après
coup, paraît d'une force probante pour le moins douteuse.

Dans ces conditions, le recourant ne peut prétendre à la déduction des pertes
d'exploitation invoquées.

3.
Le recourant se plaint aussi d'une violation de l'art. 147 LIFD, prescrivant
qu'une décision ou un prononcé entré en force peut être révisé en faveur du
contribuable, à sa demande ou d'office, notamment lorsque des faits
importants ou des preuves concluantes sont découverts (al. 1 lettre a). La
révision est toutefois exclue "lorsque le requérant a invoqué des motifs
qu'il aurait déjà pu faire valoir au cours de la procédure ordinaire s'il
avait fait preuve de toute la diligence qui pouvait raisonnablement être
exigée de lui" (al. 2).

En raison du caractère subsidiaire de la révision, qui ne doit pas avoir pour
effet de vider de leur portée les délais de recours ordinaires (Peter
Agner/Beat Jung/ Gotthard Steinmann: op. cit., n. 3 ad art. 147, p. 441), la
règle contenue à l'art. 147 al. 2 LIFD doit être appliquée de manière stricte
(voir arrêt 2A.294/1998 du 2 novembre 1998, publié in RDAF 1999 p. 138 ss).
Or, il est établi qu'à partir de 1997 en tout cas, le recourant n'a pas
respecté ses obligations fiscales en ne produisant pas les comptes de son
entreprise. Il n'est pas davantage intervenu auprès de l'autorité de taxation
pour l'avertir de ses difficultés financières - qui ne constituent de toute
façon pas un motif valable pour ne pas remplir une déclaration - ou pour
obtenir un arrangement, voire une remise d'impôts. Vu son inactivité et ses
négligences à l'égard du fisc jusqu'à ce qu'il soit imposé sur le bénéfice de
liquidation de son entreprise, il ne saurait, après coup, demander la
révision de la taxation 1997/1998 qui est entrée en force, ni de celle des
taxations des 8 mars et 3 mai 2000 pour les 150 premiers jours de l'année
1999. Le présent recours doit dès lors être rejeté en tant qu'il porte sur la
révision de ces taxations.

4.
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est
recevable, avec suite de frais à la charge du recourant, qui succombe
entièrement (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer à des dépens aux
parties (art. 159 al. 1 et 2 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au
Service cantonal des contributions et à la Commission cantonale de recours en
matière fiscale du canton du Valais, ainsi qu'à l'Administration fédérale des
contributions, Division juridique impôt fédéral direct.

Lausanne, le 30 octobre 2002

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière: