Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1A.95/2002
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1A.95/2002/col

Arrêt du 16 juillet 2002
Ire Cour de droit public

Les juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et vice-président du
Tribunal fédéral,
Reeb, Catenazzi,
greffier Zimmermann.

C. ________,
recourant, représenté par Me Henri Baudraz, avocat, avenue Juste-Olivier 17,
case postale 3293, 1002 Lausanne,

contre

Juge d'instruction du canton de Vaud, rue du Valentin 34, 1014 Lausanne,
Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal vaudois, route du Signal 8, 1014
Lausanne.

entraide judiciaire à la Grande-Bretagne; séquestre; refus de consultation de
dossier,

recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal d'accusation du
Tribunal cantonal vaudois du 22 février 2002.

Faits:

A.
Le 19 mars 2001, le Ministère de l'Intérieur du Royaume-Uni de
Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord a adressé à l'Office fédéral de la
justice (ci-après: l'Office fédéral) une demande d'entraide fondée sur la
Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale, entrée en
vigueur le 20 mars 1967 pour la Suisse et le 27 novembre 1991 pour le
Royaume-Uni (CEEJ; RS 0.351.1). Cette demande était présentée pour les
besoins de l'enquête conduite par la Brigade criminelle nationale notamment
contre M.________ et C.________, ressortissants britanniques domiciliés
respectivement en Angleterre et à Gibraltar. Les prévenus sont soupçonnés de
trafic de drogue et de blanchiment d'argent. La demande tendait notamment à
la remise de la documentation relative aux comptes bancaires qui auraient pu
servir au transfert du produit du trafic.

Le Juge d'instruction du canton de Vaud - auquel l'Office fédéral avait
délégué l'exécution de la demande - a rendu une décision d'entrée en matière.
La procédure d'exécution y relative a été désignée sous la rubrique
PR01.010143-JTR. Dans le cadre de celle-ci, le Juge d'instruction a ordonné
notamment la saisie de la documentation relative au compte n°xxx ouvert
auprès de la Banque Dexia (ci-après: la Banque), dont C.________ est le
titulaire.

Parallèlement, le Juge d'instruction a ouvert une procédure pénale contre
M.________ et consorts, prévenus de blanchiment d'argent, en relation avec
les faits évoqués à l'appui de la demande d'entraide. Cette procédure a été
désignée sous la rubrique PE01.015752-JTR.

Le 23 mai 2001, le Juge d'instruction a, dans le cadre de cette procédure,
ordonné le séquestre du compte n°xxx. Cette décision, accompagnée de la
demande d'entraide, a été notifiée à la Banque.

Le 21 novembre 2001, le Juge d'instruction a rendu une décision de clôture
partielle de la procédure PR01.010143-JTR, ordonnant notamment la
transmission à l'Etat requérant de la documentation relative au compte n°xxx.
Cette décision, notifiée à la Banque, est entrée en force.

Le 28 janvier 2002, C.________ s'est adressé au Juge d'instruction, en lui
demandant à pouvoir consulter le dossier.

Le 30 janvier 2002, le Juge d'instruction a répondu à C.________ que la
décision de séquestre, rendue pour les besoins de la procédure pénale
cantonale, avait été notifiée à la Banque le 23 mai 2001. C.________ ne
pouvait accéder au dossier de cette procédure qui n'était pas dirigée contre
lui. Pour le surplus, la procédure d'entraide était terminée pour ce qui le
concernait.

Le 4 février 2002, C.________ est revenu à la charge. Il a expliqué que la
Banque avait refusé de lui notifier la décision de séquestre, en l'invitant à
s'adresser à l'autorité pénale. Il a réitéré sa demande de consultation du
dossier et demandé la notification de l'ordonnance de clôture du 21 novembre
2001.

Le 6 février 2002, le Juge d'instruction a rendu une décision formelle
refusant à C.________ l'accès au dossier de la procédure PE01.015752-JTR.
Contre cette décision, C.________ a recouru auprès du Tribunal d'accusation
du Tribunal cantonal du canton de Vaud, en demandant l'annulation de la
décision de séquestre du 23 mai 2001, faute de motivation, et le droit de
consulter l'intégralité des dossiers, qu'ils relèvent de l'entraide ou de la
procédure pénale.

Par arrêt du 22 février 2002, notifié le 24 avril suivant, le Tribunal
d'accusation a rejeté le recours et confirmé les décisions des 23 mai 2001 et
6 février 2002. Il a considéré, en bref, que la décision du 23 mai 2001
trouvait une motivation implicite à l'art. 223 al. 1 CPP/VD et que, faute
d'avoir démontré que les conditions du séquestre n'étaient pas réalisées,
C.________ ne pouvait se plaindre d'une violation de son droit d'être entendu
à cet égard. Quant au refus de laisser consulter le dossier de la procédure
PR01.010143-JTR, il était justifié par le besoin de protéger les enquêtes
ouvertes en Suisse et à l'étranger. De même, l'intérêt de la procédure pénale
commandait de ne pas donner à C.________ l'accès au dossier de la procédure
PE01.015752-JTR.

B.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, C.________ demande
principalement au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 22 février 2002,
subsidiairement de lui accorder le droit de consulter les dossiers des
procédures PR 01.010143-JTR et PE01.015772-JTR. Il invoque les art. 29 al. 2
Cst., 6 CEDH et 14 al. 3 du Pacte ONU II, ainsi que l'art. 80b de la loi
fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale, du 20 mars 1981
(EIMP; RS 351.1).

Le Tribunal d'accusation se réfère à son arrêt. Le Juge d'instruction a
renoncé à se déterminer. L'Office fédéral a produit des observations tendant
à ce que le recours soit rejeté dans la mesure de sa recevabilité.

Invité à se déterminer à ce sujet, le recourant n'a pas produit
d'observations.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et avec une pleine cognition la
recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 128 I 46 consid. 1a p. 48;
128 II 13 consid. 1a p. 16, 46 consid. 2a p. 47, 56 consid. 1 p. 58, 66
consid. 1 p. 67, et les arrêts cités).

1.1 Selon les art. 97 et 98 let. g OJ, mis en relation avec l'art. 5 PA, la
voie du recours de droit administratif est ouverte contre les décisions des
autorités cantonales de dernière instance et qui sont fondées sur le droit
fédéral - ou qui auraient dû l'être - pour autant qu'aucune des exceptions
prévues aux art. 99 à 102 OJ ou dans la législation spéciale ne soit réalisée
(ATF 128 I 46 consid. 1b/aa p. 49; 128 II 13 consid. 1b p. 16, 56 consid.
1a/aa p. 58; 127 II 1 consid. 2b/aa p. 3/4, 198 consid. 2a p. 201/202, et les
arrêts cités). Le recours de droit administratif est aussi recevable contre
les décisions cantonales fondées à la fois sur le droit fédéral et sur le
droit cantonal, dans la mesure où la violation de dispositions du droit
fédéral directement applicables est en jeu (cf. art. 104 let. a OJ; ATF 128 I
46 consid. 1b/aa p. 49; 128 II 56 consid. 1a/aa p. 58; 127 II 198 consid. 2a
p. 202, et les arrêts cités). En revanche, c'est la voie du recours de droit
public qui est ouverte contre des décisions fondées uniquement sur le droit
cantonal et qui ne présentent pas de lien de connexité suffisamment étroit
avec l'application du droit fédéral (ATF 128 I 46 consid. 1b/aa p. 49; 126 II
171 consid. 1a p. 173; 124 II 409 consid. 1d/dd p. 414, et les arrêts cités).
Ces principes s'appliquent également dans le domaine de l'entraide judiciaire
internationale en matière pénale (ATF 127 II 198 consid. 2a p. 201/202).

1.2 En l'état, la procédure d'entraide est close, pour ce qui concerne le
recourant, après le prononcé de la décision de clôture partielle du 21
novembre 2001. En tant que titulaire du compte n°xxx, le recourant avait en
principe le droit de se voir notifier cette décision. Le Juge d'instruction
pouvait toutefois se dispenser de toute notification, puisque le recourant
n'est pas domicilié en Suisse et n'y avait pas élu un domicile de
notification (art. 80m EIMP). En pareil cas, la notification se fait par le
truchement du détenteur des documents, soit, en l'occurrence, la Banque, à
moins que l'autorité d'exécution n'ait interdit cette communication (art. 80n
al. 1 EIMP). Or, tel n'était pas le cas en l'espèce. Le recourant objecte à
cela que la Banque aurait refusé de lui communiquer une copie de la demande
d'entraide et de la décision de séquestre. Cela ne change rien au fait qu'à
teneur de l'art. 80n EIMP, mis en relation avec l'art. 80m EIMP, la
notification est réputée être intervenue, sans qu'il soit nécessaire pour le
surplus d'examiner la manière avec laquelle la Banque a géré ses rapports
avec le recourant. Celui-ci serait donc forclos s'il entendait remettre en
discussion la décision de clôture de la procédure d'entraide, ainsi que les
décisions incidentes antérieures. La démarche du recourant ne va cependant
pas aussi loin: elle se limite, sous ce rapport, à la consultation du dossier
de la procédure PR01.010143-JTR.

1.3  Le refus de donner accès au dossier de cette procédure peut faire
l'objet d'un recours de droit administratif au sens de l'art. 25 al. 1 EIMP.
La question de savoir si le recourant était légitimé à consulter le dossier
relève du fond (cf. consid. 2 ci-dessous). Il convient, partant, d'entrer en
matière sur le recours de droit administratif, en tant qu'il est dirigé
contre le rejet de la demande de consultation du dossier PR01.010143-JTR.

1.4 Le séquestre du compte n°xxx, fondé sur l'art. 59 CP, mis en relation
avec l'art. 223 CPP/VD, a été ordonné pour les besoins de la procédure
PE01.015752-JTR. Dans l'arrêt Abacha, le Tribunal fédéral a admis que la
décision relative à la consultation du dossier d'une procédure pénale
cantonale puisse être entreprise par la voie du recours de droit
administratif, pour autant que cette décision influe directement sur le sort
d'une demande d'entraide pendante et étroitement connexe (ATF 127 II 198).
Or, tel n'est pas le cas en l'espèce. Le séquestre litigieux est indépendant
de la demande d'entraide, laquelle ne tend pas (du moins, en l'état) à la
remise en vue de restitution ou de confiscation des valeurs placées sur le
compte n°xxx. Sans doute les faits de blanchiment à l'origine de cette
procédure sont-ils les mêmes que ceux évoqués dans la demande d'entraide,
raison pour laquelle une copie de cette demande a été versée au dossier de la
procédure PE01.015752-JTR. En outre, le compte et les personnes impliquées
sont les mêmes. Cela étant, la procédure d'entraide et la procédure pénale ne
sont pas imbriquées au point que l'accès au dossier de la deuxième
équivaudrait à laisser consulter celui de la première, comme c'était le cas
dans l'affaire Abacha. En effet, la demande d'entraide a aussi porté sur
d'autres comptes et d'autres personnes, que le séquestre du compte n°xxx ne
touche pas. A défaut du lien de connexité exigé par la jurisprudence qui
vient d'être rappelée, l'arrêt attaqué, en tant qu'il concerne le séquestre
litigieux, repose exclusivement sur le droit cantonal; seule la voie du
recours de droit public est ouverte en l'occurrence. Le recours de droit
administratif est ainsi irrecevable dans la mesure où il a trait à la
procédure PE01.015752-JTR.

1.5 Irrecevable, le recours de droit administratif peut néanmoins être
converti en recours de droit public (ATF 117 Ia 107 consid. 2a p. 110/111),
la désignation erronée du recours ne nuisant pas au recourant pour autant que
les conditions de forme légales sont respectées (ATF 122 I 328 consid. 2d p.
333; 120 Ib 379 consid. 1a; 118 Ib 326 consid. 1b p. 330; 115 Ib 347 consid.
1b p. 352, et les arrêts cités). En l'occurrence, se prévalant de l'art. 29
al. 2 Cst., le recourant a réservé, pour le surplus, les "éléments du recours
de droit public contre l'ordonnance de séquestre". Il s'est plaint à cet
égard de ce que la simple référence aux art. 223 al. 1 CPP/VD et 80b EIMP ne
pourrait justifier la décision du 23 mai 2001. Ainsi formulé, le grief tiré
de la violation de l'art. 29 al. 2 Cst. répond, de manière juste suffisante,
aux exigences de l'art. 90 al. 1 let. b OJ (cf. ATF 128 II 50 consid. 1c p.
53/54; 127 I 38 consid. 4 p. 43; 126 III 534 consid. 1b p. 536, et les arrêts
cités). Le recours, traité comme recours de droit public, est ainsi recevable
en tant qu'il concerne la motivation de la décision du 23 mai 2001 rendue
dans le cadre de la procédure PE01.015752-JTR. Il ne l'est pas, en revanche,
faute de grief topique, contre le refus d'autoriser la consultation du
dossier de cette procédure.

2.
Le recourant reproche au Juge d'instruction, puis au Tribunal d'accusation,
de ne pas lui avoir donné accès au dossier de la procédure PR01.010143-JTR.

2.1 Le droit de consulter le dossier est un aspect du droit d'être entendu
garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. (cf. ATF 126 I 7 consid. 2b p. 10). Tels
qu'ils sont invoqués, les art. 6 CEDH et 14 par. 3 du Pacte ONU II n'ont pas
de portée propre à cet égard. Le droit de consulter le dossier peut être
exercé non seulement au cours d'une procédure, mais aussi de manière
indépendante, notamment pour consulter, comme en l'espèce, le dossier d'une
affaire liquidée. Dans ce cas, le requérant doit faire valoir un intérêt
digne de protection à l'exécution de cette mesure (ATF 127 I 145 consid. 4a
p. 151; 126 I 7 consid. 2b p. 10, 125 I 257 consid. 3b p. 260, et les arrêts
cités). Le droit de consulter le dossier archivé peut en outre être supprimé
ou limité dans la mesure où l'intérêt public ou l'intérêt prépondérant de
tiers exigent que tout ou partie des documents soient tenus secrets (ATF 127
I 145 consid. 4a p. 151; 125 I 257 consid. 3b p. 260; 122 I 153 consid. 6a p.
161, et les arrêts cités). Dans cette hypothèse, conformément au principe de
la proportionnalité, doit être autorisé l'accès aux pièces dont la
consultation ne compromet pas les intérêts en cause (ATF 125 I 257 consid. 3b
p. 260; 122 I 153 consid. 6a p. 161, et les arrêts cités).

2.2 Ces principes déduits des art. 29 al. 2 Cst. et 4 aCst. sont concrétisés,
dans le domaine de l'entraide judiciaire, par l'art. 80b EIMP, dont le
recourant se prévaut. A teneur de l'art. 80b al. 1 EIMP, les ayants droit
peuvent participer à la procédure et consulter le dossier si la sauvegarde de
leurs intérêts le commande. Ces droits peuvent, selon l'art. 80b al. 2 EIMP,
être limités si l'exige l'intérêt de la procédure à l'étranger (let. a); la
protection d'un intérêt juridique important, allégué par l'Etat requérant
(let. b); la nature ou l'urgence des mesures à prendre (let. c); la
protection d'intérêts privés importants (let. d) ou l'intérêt d'une procédure
conduite en Suisse (let. e). Le refus d'autoriser la consultation de pièces
ou la participation à la procédure ne peut s'étendre qu'aux actes qu'il y a
lieu de tenir secrets (art. 80b al. 3 EIMP).

Est un ayant droit au sens de l'art. 80b EIMP celui qui a qualité de partie à
la procédure et qui dispose, par conséquent, de la qualité pour agir au sens
de l'art. 80h let. b EIMP (cf. ATF 127 II 104 consid. 4 p. 110/111; arrêts
1A.303/2000 du 5 mars 2001, consid. 2; 1A.314/2000 du 5 mars 2001, consid.
3a; 1A.313/1997 du 27 février 1998, consid. 2c; pour ce qui concerne l'art. 9
LTEJUS, disposition analogue à l'art. 80b EIMP, cf. l'arrêt 1A.60/2000 du 22
juin 2000, consid. 2). En tant que titulaire du compte n°xxx, le recourant
aurait eu qualité pour agir contre la décision de clôture du 21 novembre
2001; partant, il aurait pu consulter les pièces du dossier de la procédure
d'entraide le concernant, soit la demande d'entraide et ses annexes, ainsi
que les pièces relatives aux mesures prises au sujet du compte n°xxx (cf.
arrêt 1A.109/2000 du 18 juillet 2000 consid. 2a). Il a perdu ce droit après
l'entrée en force de la décision de clôture, à la notification de laquelle il
ne peut plus prétendre (art. 80m al. 2 et 80n al. 2 EIMP; consid. 1.2
ci-dessus).

Dans la procédure d'entraide, la consultation du dossier a pour but essentiel
d'assurer l'exercice des droits garantis aux parties à la procédure, soit
notamment le droit d'être entendu et le droit de recours. Conséquemment, ce
droit s'éteint en principe lorsque l'entraide a été accordée et la demande
exécutée (arrêts 1A.60/2000, précité, consid. 4e et 1A.233/1997, du 10
octobre 1997). Le recourant - qui n'indique pas, hormis l'exigence de la
transparence de la procédure, quel intérêt commanderait de lui accorder ce
qu'il réclame - pourra consulter les pièces remises par la Suisse dans le
cadre de la procédure pénale ouverte dans l'Etat requérant. Pour le surplus,
la consultation des pièces du dossier terminé le concernant ne lui
permettrait pas d'entreprendre la décision de clôture, ainsi que les
décisions incidentes antérieures, qui sont entrées en force. La demande
devait être rejetée pour ces seuls motifs, sans qu'il eût été nécessaire de
rechercher, comme l'a fait le Tribunal d'accusation, si des intérêts opposés,
mentionnés à l'art. 80b EIMP, auraient de toute manière fait obstacle à la
requête présentée par le recourant.

3.
S'agissant de la procédure PE01.015752-JTR, le recourant se plaint de ce que
la décision du 23 mai 2001 ne serait pas motivée. C'est dans cette mesure
limitée que le recours, traité comme recours de droit public, est recevable
(cf. consid. 1.5 ci-dessus).

3.1 Il découle du droit d'être entendu, garanti par l'art. 29 al. 2 Cst.,
l'obligation pour l'autorité d'indiquer dans son prononcé les motifs qui la
conduisent à sa décision (cf. pour la jurisprudence relative à l'art. 4
aCst., ATF 123 I 31 consid 2c p. 34; 112 Ia 107 consid. 2b p. 109).
L'autorité n'est pas tenue de discuter de manière détaillée tous les
arguments soulevés par les parties; elle n'est pas davantage astreinte à
statuer séparément sur chacune des conclusions qui lui sont présentées. Elle
peut se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige; il
suffit que le justiciable puisse apprécier correctement la portée de la
décision et l'attaquer à bon escient (ATF 126 I 15 consid. 2a/aa p. 17; 125
II 369 consid. 2c p. 372; 124 II 146 consid. 2a p. 149; 124 V 180 consid. 1a
p. 181, et les arrêts cités). En tant que partie à la procédure cantonale de
recours, le recourant est habilité à soulever ce grief (ATF 123 I 25 consid.
1 p. 26/27).

3.2 La décision du 23 mai 2001 ne contient aucun exposé de ses motifs; elle
ne mentionne aucune disposition légale. Si les organes de la Banque à qui
elle a été notifiée ne s'en sont pas alarmés, c'est parce qu'il devait leur
sembler évident que cette mesure, ordonnée dans la procédure pénale, était
fondée sur les motifs à la base de la demande d'entraide. Répondant au
recourant qui lui avait demandé, le 28 janvier 2002, les motifs de ce
séquestre, le Juge d'instruction s'est borné à lui répondre, le 30 janvier
2002, que cette mesure avait été prise "dans le cadre d'une procédure locale
fondée sur l'art. 59 CP". Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal d'accusation a
considéré que la décision du 23 mai 2001 trouvait sa motivation à l'art. 223
al. 1 CPP/VD, à teneur duquel le juge a le droit de séquestrer tout ce qui
peut avoir servi ou avoir été destiné à commettre l'infraction, tout ce qui
paraît en avoir été le produit, ainsi que tout ce qui peut concourir à la
manifestation de la vérité; le juge peut également séquestrer les passeports
ou autres pièces d'identité du prévenu, s'il craint la fuite de ce dernier.
Il apparaissait ainsi, selon le Tribunal d'accusation, que le Juge
d'instruction avait admis l'existence d'indices suffisants pour étayer
l'hypothèse que les valeurs saisies aient pu servir à commettre une
infraction ou puissent en être le produit; le séquestre était dès lors
nécessaire pour assurer l'exécution d'une confiscation éventuelle. A défaut
d'avoir démontré que les conditions du séquestre n'étaient pas réunies, le
recourant ne pouvait se prévaloir, dans ce contexte, d'une violation de son
droit d'être entendu.

3.3 Cette solution n'est pas compatible avec les exigences de l'art. 29 al. 2
Cst. La personne privée de la libre disposition de ses biens a le droit de
savoir pour les besoins de quelle procédure cette mesure est ordonnée. Cela
exige de lui indiquer, de manière succincte, contre qui l'action pénale est
engagée, quels sont les faits poursuivis et surtout pour quelles raisons le
séquestre doit être prononcé (cf. les arrêts 1P.437/2000 du 27 septembre
2000, consid. 2b; 1P.510/1994 du 28 octobre 1994, consid. 1c; 1P.542/1993 du
15 décembre 1993, consid. 5a; cf. aussi, en relation avec un séquestre
ordonné en application de la PPF; ATF 120 IV 297 consid. 3e p. 299).
Contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal d'accusation, la seule référence à
la norme donnant la base légale à la restriction à la propriété qu'entraîne
le séquestre ne suffit pas. En lisant l'art. 223 al. 1 CPP/VD, au demeurant
non mentionné dans la décision du 23 mai 2001, le recourant n'aurait pas pu
discerner si le séquestre avait pour but de réunir des moyens de preuve ou
avait été ordonné en vue d'une remise ou d'une confiscation ultérieure. La
prise de position du Juge d'instruction du 30 janvier 2002 a sans doute
éclairé le recourant sur ce dernier point, puisque l'art. 59 CP, auquel le
Juge d'instruction s'est référé dans cette écriture, porte sur le séquestre
en vue de confiscation. Cela ne suffisait cependant pas pour admettre que le
recourant était, sur la base de cette seule indication, au fait de la
situation au point d'être en mesure d'attaquer la décision à bon escient.
N'ayant pas été informé par le Juge d'instruction, même de manière minimale,
des raisons pour lesquelles le séquestre avait été prononcé, le recourant
s'est trouvé dans l'impossibilité de le contester efficacement devant le
Tribunal d'accusation. En cela, son droit d'être entendu a été violé.

L'obligation de motiver, même succinctement, la décision de séquestre découle
en outre du système de la loi. L'art. 223 al. 3 CPP/VD parle d'une ordonnance
de séquestre qui est notifiée. Le terme d'ordonnance au sens du CPP équivaut
à celui de décision formelle, au sens usuel du terme, ce qui présuppose
qu'elle soit désignée comme telle, motivée, signée et notifiée avec
l'indication des voies de droit (cf. art. 300 CPP/VD). En outre, l'existence
d'une voie de recours auprès du Tribunal d'accusation contre la décision
relative au séquestre (art. 298 CPP/VD) implique que la décision attaquable
contienne un exposé minimal de ses motifs. A défaut, on ne voit pas comment
le recours pourrait lui-même être suffisamment motivé comme la loi l'exige,
ni sur quoi pourrait porter l'examen de l'autorité de recours.

3.4 Le recours doit être admis et l'arrêt attaqué annulé sur ce point précis,
indépendamment de son sort au fond (ATF 126 V 130 consid. 2b p. 132; 124 V
180 consid. 4a p. 183 et les arrêts cités). Les autorités cantonales n'ont
pas fourni, dans leurs réponses au recours, des indications de nature à
remédier aux défauts de la procédure cantonale; ceux-ci ne peuvent, partant,
être guéris dans le cadre de la présente procédure (cf. ATF 124 I 336 consid.
4d in fine p. 342; 107 Ia 1). Il appartiendra au Tribunal d'accusation de
statuer à nouveau sur le grief formel du recourant. L'admission du recours
sur ce point n'entraîne pas l'annulation de la décision du 23 mai 2001,
laquelle ne fait pas l'objet du recours (cf. art. 86 OJ).

4. Le recours doit être admis partiellement, en tant qu'il est traité comme
recours de droit public, et l'arrêt attaqué annulé au sens du considérant qui
précède. Le recours doit être rejeté pour le surplus, dans la mesure où il
est recevable. Le recourant n'emportant que partiellement gain de cause, il
se justifie de mettre les frais à sa charge (art. 156 OJ). L'Etat de Vaud
versera au recourant une indemnité réduite à titre de dépens (art. 159 al. 1
OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est partiellement admis, en tant qu'il est traité comme recours de
droit public, et l'arrêt attaqué est annulé au sens du considérant 3. Le
recours est rejeté pour le surplus, dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 3000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
L'Etat de Vaud versera au recourant une indemnité de 1000 fr. à titre de
dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Juge
d'instruction et au Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de
Vaud, ainsi qu'à l'Office fédéral de la justice (B 125 889).

Lausanne, le 16 juillet 2002

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier: