Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen U 86/2001
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U 86/01 Mh

                       IIIe Chambre

MM. les juges Schön, Président, Spira et Ursprung.
Greffier : M. Wagner

                 Arrêt du 19 décembre 2001

                       dans la cause

A.________, recourant,

                          contre

X.________, intimée,

                            et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

     A.- a) A.________, titulaire d'un certificat fédéral
de capacité d'employé de commerce, a travaillé au service
de X.________ de 1970 à 1992, avant de diriger une agence
de Y.________ de 1992 à 1994. A partir du 18 octobre 1994,
il a exercé l'activité d'agent de voyages dans le cadre de
la société Z.________ qu'il a constituée avec un associé. A
ce titre, il était assuré par X.________ Assurances pour
les accidents professionnels et non professionnels.

     Dans une déclaration d'accident LAA du 8 juillet 1996,
Z.________ a annoncé à X.________ que A.________ avait été
victime de deux chutes, la première le 25 juin 1996 dans
l'escalier à son domicile où sa tête avait heurté un mur,
la seconde le 30 juin 1996 lors d'une course en montagne où
sa tête avait heurté le sol.
     Se plaignant de vertiges, d'un état nauséeux et d'un
tinnitus, A.________ a consulté dès le 5 juillet 1996 le
docteur B.________. Constatant un ralentissement idéo-
moteur, ce praticien a conclu à un traumatisme cranio-
cérébral avec syndrome post-commotionnel sévère (rapport
médical initial LAA, du 20 août 1996), diagnostic que le
docteur C.________, spécialiste FMH en neurologie, a posé
également dans un rapport du 18 septembre 1996. En août et
septembre 1996, l'intéressé a été examiné par les médecins
de l'Unité de Neuropsychologie de l'Hôpital W.________, qui
ont retenu une souffrance post-traumatique ainsi que
plusieurs signes de la lignée dépressive. Vu la persistance
des symptômes, il a séjourné du 3 au 6 décembre 1996 à la
Clinique de neurologie de l'hôpital W.________. Selon le
docteur D.________, médecin assistant, il présentait un
syndrome post-commotionnel atypique par son importance et
sa durée.
     X.________ a pris en charge le cas et versé les pres-
tations dues pour les suites des événements des 25 et
30 juin 1996 (traitement médical et indemnités journaliè-
res).
     A.________ a tenté de reprendre l'activité d'agent de
voyages, mais les difficultés rencontrées - il ne retrou-
vait pas les noms de brochures, ne réussissait pas à évo-
quer certains pays - ont transformé ses tentatives en
«véritables catastrophes». Selon un rapport d'examen neuro-
psychologique des médecins de l'hôpital W.________, du
22 juillet 1997, il présentait un ralentissement global et
une importante fatigabilité, des difficultés d'évocation et
des répétitions de phonèmes mimant un «pseudobégaiement»,
des perturbations dans les épreuves évaluant les fonctions

exécutives (difficulté de programmation et d'inhibition des
automatismes de lecture) et des troubles mnésiques avec
atteinte de la mémoire à court et à long terme, plus mar-
qués sur modalité verbale. De son côté, le docteur
B.________, dans un rapport médical intermédiaire du
28 juin 1997, a retenu un syndrome post-commotionnel et un
état dépressif réactionnel.
     X.________ a confié une expertise au docteur
E.________, spécialiste FMH en neurologie, lequel a solli-
cité l'avis du docteur F.________, spécialiste FMH en
psychiatrie-psychothérapie. Au cours des examens auxquels
il a procédé les 5 et 12 août 1997, le psychiatre a eu une
impression d'inauthenticité. L'existence d'un trouble
mental n'a pas pu être mise en évidence (rapport du
1er décembre 1997). De son côté, le docteur E.________,
dans une expertise du 18 décembre 1997, a posé le
diagnostic de traumatismes cranio-cérébraux mineurs sur-
venus les 25 et 30 juin 1996 et de syndrome psycho-organi-
que séquellaire. Il indiquait que l'incapacité de travail
était totale (rectification du 29 janvier 1998).
     Sur requête du docteur E.________, Dame G.________,
psychologue et neuropsychologue, a procédé à un examen
neuropsychologique. Elle a constaté que les éléments
présents évoquaient, sur ce plan-là, un trouble du langage
ne s'apparentant à aucune aphasie. A titre d'hypothèse,
elle évoquait la possibilité d'une décompensation d'ordre
psychologique (rapport du 13 novembre 1998).
     Procédant à la révision de l'expertise du 18 décembre
1997, le docteur E.________ a constaté que les suites
d'ordre psycho-organique évoquées précédemment ne parais-
saient pas actuellement devoir être retenues. Dans un
rapport du 22 janvier 1999, il a posé le diagnostic de
traumatismes cranio-cérébraux mineurs survenus les 25 et
30 juin 1996 à l'origine d'une décompensation avec troubles
de la personnalité.

     Le 5 février 1999, X.________ a informé A.________ que
le docteur E.________ avait remis au docteur B.________
copie de son rapport du 22 janvier 1999. Elle lui communi-
quait les conclusions du neurologue et l'avisait qu'elle
entendait mettre un terme au versement des prestations
légales et contractuelles avec effet au 31 janvier 1999.
     Le 22 février 1999, l'assuré a demandé X.________ de
revoir sa position, puisqu'il était en bonne santé avant la
survenance des traumatismes des 25 et 30 juin 1996, comme
pouvaient l'attester le docteur B.________ et ses anciens
collègues de travail.
     Par décision du 9 mars 1999, X.________ a cessé avec
effet au 31 janvier 1999 le versement des prestations dues
en sa qualité d'assureur-accidents LAA. Elle invitait
A.________ à prendre contact avec son assureur-maladie, la
SWICA.

     b) Le 19 mars 1999, la SWICA a formé opposition contre
cette décision, au motif qu'il n'était pas établi que la
décompensation d'ordre psychologique imputable aux événe-
ments des 25 et 30 juin 1996 fût seulement temporaire. En
l'occurrence, il s'agissait d'accidents de gravité moyenne
et les critères de la causalité adéquate que sont les dou-
leurs physiques persistantes et la durée de l'incapacité de
travail revêtaient une intensité particulière.
     De son côté, A.________ a également formé opposition
contre cette décision, en reprenant ses arguments du 22 fé-
vrier 1999.
     Le 8 novembre 1999, X.________ a informé l'assuré
qu'elle avait demandé l'avis de ses médecins-conseil, le
docteur H.________ et le docteur I.________, spécialiste
FMH en psychiatrie et psychothérapie. Il ressortait des
rapports de ces médecins qu'il était nécessaire de mettre
en oeuvre une expertise.
     Avec l'accord de A.________, le professeur
J.________, spécialiste FMH en neurologie, a

procédé à cette expertise. Dans un rapport du 11 janvier
2000, rédigé en allemand, ce spécialiste a constaté que les
résultats de l'examen neurologique étaient normaux, à
l'exception de quelques prestations déficitaires ne cor-
respondant pas à un défaut organique du système nerveux. Il
a posé le diagnostic de pseudo-démence à la suite de deux
traumatismes crâniens banals, le premier éventuellement
avec une légère commotion cérébrale. Selon lui, il n'exis-
tait pas de lien de causalité naturelle entre le tableau
clinique actuel et les traumatismes crâniens subis. Le
professeur J.________ a remis une copie de l'expertise à
A.________ et une autre au docteur B.________.
     Par décision du 9 février 2000, X.________ a rejeté
les oppositions. Elle joignait copies des rapports du
docteur H.________ du 25 août 1999 et du docteur I.________
du 29 septembre 1999, tous deux rédigés en allemand. Se
fondant sur l'expertise du professeur J.________ du
11 janvier 2000, elle retenait que l'assuré présentait une
pseudo-démence d'origine indéterminée, qui ne se trouvait
pas en relation de cause à effet avec les accidents incri-
minés. Pour cette raison, elle niait tout lien de causalité
naturelle entre ces événements et les troubles d'ordre
psychologique dont il était atteint.

     B.- A.________ a recouru contre cette décision devant
le Tribunal administratif de la République et canton de
Genève. Dans le délai qui lui a été imparti pour produire
un recours satisfaisant aux exigences légales, il a fait
valoir que tous les documents médicaux en français étaient
en possession de X.________.
     Sur requête du tribunal, X.________ a produit le
11 décembre 2000 la traduction en français des rapports du
docteur H.________ du 25 août 1999 et du docteur I.________
du 29 septembre 1999, ainsi que de l'expertise du pro-
fesseur J.________ du 11 janvier 2000. Cette traduction a
été adressée à A.________, qui a pu prendre position.
     Par jugement du 30 janvier 2001, le tribunal adminis-
tratif a rejeté le recours.

     C.- A.________ interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement. Se référant aux différents
rapports médicaux, il conteste qu'il n'y ait plus de lien
de causalité naturelle entre les accidents des 25 et
30 juin 1996 et l'atteinte à sa santé.
     X.________ conclut au rejet du recours. SWICA et
l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS) renoncent à
se déterminer.

                  Considérant en droit :

     1.- a) En instance fédérale, le recourant déclare
qu'il n'a jamais été en possession de tous les documents
nécessaires lui permettant de se défendre.

     b) A aucun moment, toutefois, le recourant n'a préten-
du qu'il ne comprenait pas les actes du dossier, spéciale-
ment l'expertise du professeur J.________. En effet, une
fois que celle-ci eut été traduite en français par l'inti-
mée, il n'a pas déclaré qu'il n'en avait pas saisi le sens
du fait qu'elle était rédigée en allemand. Dans sa détermi-
nation du 8 janvier 2001, il a remis en cause la valeur
probante de l'expertise uniquement parce que la consul-
tation auprès de ce professeur n'avait duré qu'une heure et
trente minutes.
     Peut, dès lors, demeurer indécis le point de savoir si
le fait que l'intimée, dans sa communication au recourant
du 8 novembre 1999, n'a pas traduit en français le ques-
tionnaire d'expertise rédigé en allemand constitue un
éventuel vice de procédure (cf. sur le droit de l'assuré à
la traduction d'un rapport d'expertise dans une langue
qu'il comprend : ATF 127 V 225 consid. 2).

     2.- a) Les premiers juges ont retenu que le lien de
causalité naturelle entre une pseudo-démence d'origine
indéterminée et les chutes dont le recourant a été victime

les 25 et 30 juin 1996 n'était pas établi et que l'intimée
était fondée à mettre un terme au 31 janvier 1999 au verse-
ment des prestations dues pour les suites de ces événe-
ments.
     Cela est contesté par le recourant, qui déclare qu'il
sera rassuré à partir du moment où les médecins mandatés
par l'intimée auront pu expliquer les dysfonctionnements du
cerveau devant un collège d'experts neutres. Selon lui,
«les réflexions et contradictions de certains médecins ne
proposent pas un verdict circonstanciel».

     b) Lorsqu'un état maladif préexistant est aggravé ou,
de manière générale, apparaît consécutivement à un acci-
dent, le devoir de l'assureur-accidents d'allouer des
prestations cesse si l'accident ne constitue plus la cause
naturelle et adéquate du dommage, soit lorsque ce dernier
résulte exclusivement de causes étrangères à l'accident.
Tel est le cas lorsque l'état de santé de l'intéressé est
similaire à celui qui existait immédiatement avant l'acci-
dent - question du statu quo ante - ou qu'il rejoint celui
qu'il serait devenu tôt ou tard indépendamment de tout
accident, selon l'évolution ordinaire - question du statu
quo sine - (RAMA 1992 n° U 142 p. 75 sv. consid. 4b;
Maurer, Schweizerisches Unfallversicherungsrecht, p. 469
n° 3 et 4; Debrunner/Ramseier, Die Begutachtung von Rücken-
schäden, Berne 1990, p. 52; Meyer-Blaser, Die Zusammen-
arbeit von Richter und Arzt in der Sozialversicherung,
Bulletin des médecins suisses 71/1990, p. 1093).
     Selon la jurisprudence, si le rapport de causalité
avec l'accident est établi avec la vraisemblance requise,
l'assureur n'est délié de son obligation d'octroyer des
prestations que si l'accident ne constitue plus la cause
naturelle et adéquate de l'atteinte à la santé. De même que
pour l'établissement du lien de causalité naturelle fondant
le droit à des prestations, la disparition du caractère
causal de l'accident eu égard à l'atteinte à la santé de
l'assuré doit être établie au degré habituel de la vraisem-

blance prépondérante requis en matière d'assurances so-
ciales. La simple possibilité que l'accident n'ait plus
d'effet causal ne suffit pas. Dès lors qu'il s'agit dans ce
contexte de la suppression du droit à des prestations, le
fardeau de la preuve ne pèse pas sur l'assuré mais sur
l'assureur (RAMA 2000 n° U 363 p. 46 consid. 2 et la réfé-
rence).

     c) De l'avis du professeur J.________, le recourant
présente une pseudo-démence à la suite de deux traumatismes
crâniens banals, le premier éventuellement avec une légère
commotion cérébrale. Il n'existe pas de lien de causalité
naturelle entre le tableau clinique actuel et les trauma-
tismes crâniens subis (rapport du 11 janvier 2000).
     Cette expertise, effectuée sur requête de l'intimée
dans le cadre de la procédure d'opposition, l'a été par un
spécialiste indépendant. Elle répond aux exigences permet-
tant de lui reconnaître pleine force probante (ATF
125 V 353 consid. 3b/bb et les références; VSI 2001 p. 109
consid. 3b/bb). En particulier, il n'existe aucune circons-
tance propre à faire naître un doute sur l'impartialité ou
l'objectivité de l'expert (RAMA 1999 n° U 332 p. 193 con-
sid. 2a/bb et les références).
     La disparition du caractère causal des chutes des
25 et 30 juin 1996 est ainsi établie au degré de la
vraisemblance prépondérante.

     d) L'intimée a cessé avec effet au 31 janvier 1999 le
versement des prestations dues en sa qualité d'assureur-
accidents LAA.
     Cette décision se fonde sur les conclusions du docteur
E.________ du 22 janvier 1999. Certes, il y a une divergen-
ce par rapport à l'avis de ce spécialiste du 18 décembre
1997, puisque les suites d'ordre psycho-organique évoquées
précédemment ne sont plus retenues. Cela n'est toutefois
pas déterminant. En effet, vu la disparition du caractère

causal des accidents incriminés, la suppression du droit
aux prestations avec effet au 31 janvier 1999 n'apparaît
pas critiquable. Mal fondé, le recours doit ainsi être
rejeté.

    Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

                     p r o n o n c e :

  I. Le recours est rejeté.

 II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
     Tribunal administratif de la République et canton de
     Genève, à SWICA et à l'Office fédéral des assurances
     sociales.

Lucerne, le 19 décembre 2001

                                     Au nom du
                           Tribunal fédéral des assurances
                          Le Président de la IIIe Chambre :

                                    Le Greffier :