Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen U 83/2001
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U 83/01 Mh

                        IIe Chambre

MM. les juges Lustenberger, Président, Meyer et Ferrari.
Greffière : Mme Berset

                 Arrêt du 12 octobre 2001

                       dans la cause

ELVIA Société Suisse d'Assurances Zurich, Badener-
strasse 694, 8048 Zurich, recourante,

                          contre

HOTELA, Caisse-maladie et accidents de la Société suisse
des hôteliers, rue de la Gare 18, 1820 Montreux, intimée,

                            et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

     A.- A.________ a travaillé en qualité d'aide femme de
chambre à l'Hôtel X.________. A ce titre, elle était
assurée contre les accidents professionnels et non
professionnels par l'Elvia Société Suisse d'Assurances
Zurich (ci-après : l'Elvia). Le 31 mai 1994, elle s'est
tordu le genou gauche sur son lieu de travail.

     Par deux décisions séparées du 10 mars 1997, notifiées
à l'assurée et à HOTELA, Caisse-maladie/accidents de la
Société suisse des hôteliers (ci-après : HOTELA) - se
fondant sur un rapport du 6 mars 1997 du docteur
B.________, spécialiste en chirurgie - l'Elvia a alloué à
l'assurée une indemnité pour atteinte à l'intégrité de
17,5 % et mis fin aux autres prestations (indemnités jour-
nalières et frais médicaux) au 30 avril 1997.
     A la suite de l'opposition formée séparément par
l'assurée et HOTELA, l'Elvia a nié le droit de la première
à une rente de l'assurance-accidents, par décision sur
opposition du 12 mai 1998.

     B.- Par acte du 28 juillet 1998, HOTELA a recouru
contre cette décision devant le Tribunal des assurances du
canton de Vaud.
     Dans le cadre de l'instruction, les premiers juges ont
désigné le docteur C.________, spécialiste en chirurgie
orthopédique, comme expert judiciaire. Dans un rapport du
27 mai 2000, ce dernier a indiqué que l'assurée souffrait
de douleurs du genou gauche, après patellectomie et d'un
état dépressif chronique avec adymie et anxiété. Attri-
buables à l'accident, ces troubles étaient, selon lui,
amplifiés par une importante surcharge psychogène.
L'assurée présentait, une année au plus tard après sa
patellectomie, une capacité de travail de 50 à 75 % dans
une activité d'auxiliaire dans une lingerie, selon la
manière dont étaient réparties les tâches assises et
debout; dans une activité assise, sa capacité de travail
serait comprise entre 75 % et 100 %. Dans un rapport
complémentaire du 8 juillet 2000, le docteur C.________ a
précisé, en ce qui concerne l'activité assise, que la
fourchette de 25 % tenait compte des phénomènes d'adapta-
tion qui permettaient d'augmenter la capacité de travail
dans de telles situations.

     Considérant que l'Elvia était tenue d'allouer ses
prestations à raison d'une incapacité de gain de 25 % (dès
le 1er mai 1997), la cour cantonale a admis le recours
d'HOTELA et renvoyé la cause à l'assureur-accidents pour
qu'il rende une nouvelle décision au sens des considérants.

     C.- L'Elvia interjette recours de droit administratif
contre ce jugement dont elle demande l'annulation, sous
suite de frais et dépens. Principalement, elle conclut à ce
que le recours de droit cantonal soit déclaré irrecevable,
faute de qualité pour recourir de la part d'HOTELA. Subsi-
diairement, elle requiert la confirmation de la décision
sur opposition du 12 mai 1998.
     HOTELA conclut au rejet du recours.
     L'Office fédéral des assurances sociales ne s'est pas
déterminé.

                  Considérant en droit :

     1.- Même si elle ne met pas fin à la procédure, une
décision de renvoi par laquelle le juge invite l'adminis-
tration à statuer à nouveau selon des instructions impé-
ratives, est une décision autonome, susceptible en tant que
telle d'être attaquée par la voie du recours de droit
administratif, et non une simple décision incidente (ATF
117 V 241 consid. 1, 113 V 159).

     2.- a) Sur le plan procédural, la recourante soutient
que l'intimée n'était pas légitimée à recourir contre sa
décision sur opposition, pour le (premier) motif qu'elle
n'est pas un assureur social au sens de l'art. 129 OLAA et
que la décision litigieuse ne concerne pas son obligation
de fournir des prestations.

     b) Aux termes de l'art. 129 al. 1 OLAA, lorsqu'un
assureur-maladie ou une autre assurance sociale prend une
décision touchant à l'obligation de l'autre assureur
d'allouer des prestations, cette décision doit également
être notifiée à cet autre assureur. Ce dernier dispose des
mêmes voies de droit que l'assuré.
     Par cette disposition, le législateur s'est efforcé,
d'une manière générale, de coordonner les assurances
sociales pour éviter, notamment, la surindemnisation et
faciliter les règlements de comptes lorsque deux institu-
tions intéressées ne parviennent pas à se mettre d'accord
(ATF 125 V 340 consid. 2; Frésard, L'assurance-accidents
obligatoire in : Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht
[SBVR], ch. 259 note 368). En revanche, l'assureur privé
n'a pas qualité pour recourir contre la décision d'un
assureur-accidents en application de l'art. 129 OLAA ou de
l'art. 103 let. a OJ (125 V 341 consid. 2 et 342 con-
sid. 3b).

     c) En l'espèce, c'est à juste titre que les premiers
juges ont admis, sans autre examen, que la légitimation
active de l'intimée à recourir était donnée. En effet,
celle-ci déclare qu'elle est assureur pour les indemnités
journalières maladie au sens de la LAMal, que l'assurée a
conclu une telle assurance au sens des art. 67 ss LAMal et
qu'elle ne pratique pas l'assurance complémentaire au sens
de la LCA. Il n'y a aucun motif de mettre en doute ces
affirmations. Le Tribunal fédéral des assurances a d'ail-
leurs déjà eu l'occasion de juger que les prestations de
l'intimée relèvent de l'assurance facultative d'indemnités
journalières selon les art. 67 ss LAMal et non de la LCA
(RAMA 2000 no KV 137 p. 353 consid. 1). Par ailleurs, con-
trairement à ce que soutient la recourante, l'intimée a un
intérêt à l'issue de la procédure, dans la mesure où
l'étendue de ses prestations dépend du taux d'incapacité de
travail reconnu à l'assurée. En conséquence, l'intimée est

un assureur social légitimé à recourir contre la décision
d'un autre assureur social au sens de l'art. 129 OLAA et le
premier moyen de la recourante doit être écarté.

     3.- a) Sur le fond, la recourante reproche aux juges
cantonaux d'avoir confondu degré d'incapacité de travail et
degré d'invalidité, en retenant que l'intéressée présentait
une incapacité de gain de 25 %. Sans remettre véritablement
en question le taux d'incapacité de travail de l'assurée de
25 % (maximum) fixé par l'expert judiciaire C.________,
dans une activité adaptée en position assise, elle allègue,
en particulier, que même dans une activité à 75 %,
l'assurée est en mesure de réaliser un revenu excluant une
rente.

     b) Il découle du rapport de l'expert judiciaire
C.________ - auquel il convient d'accorder entière valeur
probante (ATF 125 V 352 consid. 3a et les références) - que
la capacité de travail de l'assurée dans son ancienne
profession d'aide femme de chambre/auxiliaire de lingerie
est de 50 à 75 %, alors qu'elle serait de 75 à 100 % dans
une activité adaptée en position assise. Compte tenu de la
capacité de travail supplémentaire de 25 % que l'assurée
présente dans une activité assise, on peut exiger de
celle-ci - en vertu de son obligation de diminuer le
dommage (ATF 123 V 96 et ss consid. 4c ; SVR 1995 UV no 35
p. 106 consid. 5b; comp. 123 V 233 consid. 3c), - qu'elle
mette à profit sa capacité de travail résiduelle de 75 %
(minimum) dans une occupation adaptée, à dire d'expert,
soit dans une activité en position assise.

     4.- a) Selon l'art. 18 LAA, si l'assuré devient in-
valide à la suite d'un accident, il a droit à une rente
d'invalidité (al. 1). Est réputé invalide celui dont la
capacité de gain subit vraisemblablement une atteinte
permanente ou de longue durée. Pour l'évaluation de

l'invalidité, le revenu du travail que l'assuré devenu
invalide par suite d'un accident pourrait obtenir en
exerçant l'activité qu'on peut raisonnablement attendre de
lui, après exécution éventuelle de mesures de réadaptation
et compte tenu d'une situation équilibrée du marché du
travail, est comparé au revenu qu'il aurait pu obtenir s'il
n'était pas invalide (al. 2).
     La comparaison des revenus s'effectue, en règle ordi-
naire, en chiffrant aussi exactement que possible les
montants de ces deux revenus et en les confrontant l'un
avec l'autre, la différence permettant de calculer le taux
d'invalidité (méthode générale de comparaison des revenus;
ATF 119 V 481 ss consid. 2b, 114 V 313 consid. 3a; VSI 2001
p. 81 consid. 1).

     b) En l'espèce, ni l'administration, ni la juridiction
cantonale n'ont procédé à la comparaison des revenus
prescrite par l'art. 18 LAA. C'est ainsi que pour parvenir
à la conclusion que l'assurée avait droit à une rente
d'invalidité de 25 %, les premiers juges ont considéré que
le taux d'incapacité de gain de l'intéressée se confondait
avec le taux d'incapacité de travail de 25 % déterminé par
l'expert C.________. Tronqué, ce raisonnement se heurte aux
principes mêmes découlant de l'art. 18 LAA et n'est pas
conforme à la jurisprudence constante de la Cour de céans
sur ce point.

     c) Dans ces circonstances, il appartiendra à la recou-
rante de reprendre l'instruction du cas et de procéder en
outre à une comparaison des revenus tenant compte des
principes découlant de la jurisprudence (not. ATF 126 V 75
ss et VSI 2001 p. 79 ss).

     5.- Il suit de là que le recours est partiellement
bien fondé. L'intimée succombe pour l'essentiel dans un
litige ayant pour objet l'octroi ou le refus de prestations

d'assurance. Or, selon la jurisprudence, le législateur a
édicté l'art. 134 OJ avant tout dans l'intérêt des assurés
en litige avec un assureur social. Aussi, lorsqu'un assu-
reur-accidents et un assureur-maladie sont en litige à
propos de la prise en charge des frais consécutifs à un
accident subi par l'un de leurs assurés communs, la procé-
dure devant le Tribunal fédéral des assurances n'est pas
gratuite (ATF 127 V 107 consid. 6). Il n'y a aucune raison
en l'espèce de mettre l'intimée au bénéfice de la règle de
faveur prévue à l'art. 134 OJ en ce qui concerne la dis-
pense des frais.
     La recourante, qui a conclu à l'octroi de dépens, ne
saurait toutefois en prétendre, aucune indemnité pour les
frais de procès n'étant allouée, en règle générale, aux
organismes chargés de tâches de droit public (art. 159
al. 2 in fine OJ; ATF 126 V 150 consid. 4a).

    Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

                     p r o n o n c e :

  I. Le recours est partiellement admis en ce sens que le
     jugement du Tribunal des assurances du canton de Vaud
     du 17 novembre 2000, et la décision sur opposition de
     l'Elvia du 12 mai 1998 sont annulés, la cause étant
     renvoyée à la recourante pour instruction complémen-
     taire au sens des considérants et nouvelle décision.

 II. Les frais de justice, d'un montant de 3000 fr., sont
     mis à la charge d'HOTELA.

III. L'avance de frais versée par la recourante, d'un
     montant de 3000 fr., lui est restituée.

 IV. Il n'est pas alloué de dépens.

  V. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
     Tribunal des assurances du canton de Vaud, à l'Office
     fédéral des assurances sociales et à A.________.

Lucerne, le 12 octobre 2001

                                     Au nom du
                           Tribunal fédéral des assurances
                          Le Président de la IIe Chambre :

                                  p. la Greffière :