Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen U 18/2001
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U 18/01 Mh

                       IIIe Chambre

MM. les juges Schön, Président, Spira et Ursprung.
Greffier : M. Métral

                 Arrêt du 19 octobre 2001

                       dans la cause

A.________, recourant, représenté par Maître Jacques
Morier-Genoud, avocat, rue Centrale 5, 1002 Lausanne,

                          contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne, intimée,

                            et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

     A.- En 1997, A.________ travaillait comme régleur pour
la pose de revêtements bitumeux, au service de l'entreprise
X.________ SA. A ce titre, il était affilié à la Caisse
maladie-accident Philos et assuré contre les accidents par
la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents
(CNA).

     Le 21 août 1997, il s'est fait écraser le pied droit
par un rouleau compresseur et est tombé sur le goudron
chaud. Il a séjourné au Centre hospitalier Y.________
jusqu'au 26 août 1997, où le diagnostic de contusion par
écrasement du pied droit et de brûlures superficielles au
coude droit a été posé. L'assuré n'a pas repris son
travail, d'autant qu'un phlegmon au pied droit a été décelé
dans le courant du mois de septembre 1997. Cette infection,
traitée par antibiotiques, était guérie en janvier 1998.
     La CNA a pris en charge le cas et s'est régulièrement
enquise de l'état de santé de l'assuré auprès des médecins
de Y.________, en particulier des docteurs B.________ et
C.________. Le 23 décembre 1997, ces derniers l'ont infor-
mée que l'assuré ressentait encore des douleurs atypiques
diffuses au pied droit et qu'il ne marchait que très mal
sans cannes anglaises. Toutefois, le résultat des examens
pratiqués, notamment sur le plan neurovasculaire ou radio-
logique, n'expliquait pas la persistance des symptômes. Le
12 janvier 1998, le docteur C.________ constatait que la
situation ne s'était pas améliorée malgré la confection
d'une semelle plantaire.
     Au terme d'un examen médical pratiqué le 19 janvier
1998, le docteur D.________, médecin d'arrondissement de la
CNA, a exposé qu'il ne restait «pas grand chose» de
l'accident du 21 août 1997, hormis une large cicatrice
rétro-malléolaire interne. Néanmoins, l'assuré continuait à
boiter et à faire état d'importantes douleurs au pied; il
se plaignait en outre d'une tuméfaction douloureuse in-
guinale droite, que le docteur D.________ a attribuée à une
adénopathie. Par la suite, A.________ a été traité, du
25 février au 9 avril 1998, à la clinique de réhabilition
Z.________, où les docteurs E.________ et F.________ n'ont
pas pu expliquer les douleurs du patient; à la fin du
traitement, infructueux, ces praticiens proposèrent une
reprise du travail à 50 %. Ultérieurement, de nouveaux
examens médicaux et une opération chirurgicale pratiquée le

3 juillet 1998 révélèrent que l'adénopathie initialement
diagnostiquée par le docteur D.________ était en réalité un
schwannome appuyant sur l'artère fémorale. La tumeur fut
enlevée au cours de l'opération. Enfin, A.________ fut
adressé par son médecin traitant au docteur G.________,
spécialiste en chirurgie orthopédique, qui considéra que
les plaintes du patient étaient sans rapport avec son état
objectif et que de nouveaux examens médicaux n'étaient pas
nécessaires, sous réserve d'une expertise psychiatrique; le
docteur G.________ était en effet d'avis que l'assuré
développait une névrose d'assurance. Dans le même sens, le
docteur D.________ estima, dans un rapport médical daté du
5 octobre 1998, que le tableau clinique correspondait à une
sinistrose proche d'une simulation.
     Par décision du 8 octobre 1998, confirmée par décision
sur opposition le 19 mars 1999, la CNA mit fin à ses pres-
tations en faveur de A.________ dès le 12 octobre 1998.

     B.- L'assuré interjeta un recours devant le Tribunal
des assurances du canton de Vaud contre la décision sur
opposition de la CNA, produisant trois nouveaux rapports
médicaux (rapports des 15 juin et 24 août 1999 du docteur
H.________, chirurgien et rapport du 1er juillet 1999 du
docteur I.________, neurologue). Ceux-ci ont été soumis par
la CNA à sa division de médecine des accidents, dont la
détermination fut versée au dossier du tribunal (rapport du
14 décembre 1999 du docteur J.________). Par décision du
7 février 2000 et jugement incident du 16 mai 2000, le
Tribunal des assurances du canton de Vaud a rejeté une
demande d'expertise neurologique déposée par A.________,
avant de rejeter son recours, par jugement du 23 novembre
2000.

     C.- L'assuré interjette un recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement, dont il demande l'annulation. Il
conclut à ce que la CNA soit condamnée, sous suite de frais

et dépens, à lui allouer ses prestations au-delà du 11 oc-
tobre 1998, au besoin après la mise en oeuvre d'expertises
neurologique et psychiatrique par le Tribunal fédéral des
assurances. Il requiert par ailleurs l'assistance judi-
ciaire. La CNA conclut au rejet du recours, alors que la
Caisse maladie-accident Philos et l'Office fédéral des
assurances sociales ont renoncé à se déterminer.

                  Considérant en droit :

     1.- Est litigieux le point de savoir si le recourant
présente encore des atteintes à la santé, physique ou
psychique, consécutives à l'accident du 21 août 1997.

     2.- Le jugement entrepris expose correctement les
dispositions légales et les principes jurisprudentiels
applicables en l'espèce, notamment en ce qui concerne
l'exigence d'un rapport de causalité (naturelle et
adéquate) entre les atteintes à la santé et l'accident
assuré, de sorte qu'il suffit d'y renvoyer.

     3.- Le recourant, s'appuyant sur les rapports des
docteurs H.________ et I.________, soutient d'abord que les
investigations médicales n'ont pas été suffisamment appro-
fondies sur le plan neurologique. Il est vrai que le
docteur D.________ n'a pratiqué qu'un examen neurologique
sommaire avant de conclure à l'absence de cause organique
aux souffrances de l'assuré. Ce faisant, il n'a pas négligé
l'existence éventuelle de troubles neurologiques, mais a
plutôt estimé, sur la base de ses propres observations et
de l'abondante documentation médicale figurant au dossier,
qu'une expertise neurologique n'était pas susceptible
d'apporter de nouvel élément relatif aux séquelles de
l'accident subi par le recourant.

     Le docteur I.________ a fait état d'une possible
neuropathie ilio-ipogastrique ou ilio-inguinale pouvant
être à l'origine d'une partie des douleurs. Toutefois,
cette vague hypothèse ne constitue pas un réel diagnostic
et a été émise sans que le docteur I.________, dont le
rapport est sommaire, ait eu connaissance des pièces
médicales figurant au dossier. Elle ne suffit pas à mettre
en doute le caractère pertinent et complet du rapport
5 octobre 1997 du docteur D.________ - qui répond aux
exigences posées par la jurisprudence en la matière et
bénéficie d'une pleine valeur probante (cf. ATF 125 V 352
consid. 3a et les références) -, en ce qui concerne la
persistance d'atteintes à la santé physique du recourant,
consécutives à l'accident du 21 août 1997.
     Enfin, les rapports du docteur H.________ ne
permettent pas davantage de conclure à la nécessité d'une
expertise neurologique, dans la mesure où ils ne décrivent
pas, ou seulement laconiquement, les examens pratiqués par
leur auteur et se bornent pour l'essentiel à affirmer
péremptoirement le caractère insuffisant du dossier
constitué par la CNA.

     4.- a) Le recourant fait ensuite valoir que le
diagnostic de névrose d'assurance ne peut pas être retenu
alors qu'aucune expertise psychiatrique n'a été réalisée.
Sur ce point, on ne saurait lui donner tort. L'intimée ne
pouvait pas d'emblée admettre l'existence d'une névrose
d'assurance et nier celle de troubles psychiques d'une
autre nature sans requérir l'avis d'un psychiatre. De même,
la question du lien de causalité naturelle entre d'éven-
tuels troubles psychiques et l'accident du 21 août 2001 ne
peut elle être résolue sans recourir à une expertise
psychiatrique. Les premiers juges ne se sont du reste pas
prononcés sur ce point, mais ont exclu que d'éventuels
troubles psychiques puissent être en relation de causalité
adéquate avec l'accident subi par le recourant.

     b) aa) Selon la jurisprudence, l'existence d'un lien
de causalité adéquate entre un accident insignifiant ou de
peu de gravité et des troubles psychiques peut, en règle
générale, être d'emblée niée, tandis qu'en principe, elle
doit être admise en cas d'accident grave; pour admettre le
caractère adéquat du lien de causalité entre un accident de
gravité moyenne et des troubles psychiques, il faut que
soient réunis certains critères particuliers et objectifs.
Les plus importants à prendre en considération sont les
circonstances concomitantes particulièrement dramatiques ou
le caractère particulièrement impressionnant de l'accident,
la gravité des lésions subies, la durée anormalement longue
du traitement médical, les douleurs physiques persistantes,
la durée et le degré de l'incapacité de travail dues aux
seules atteintes à la santé physique, ainsi que les erreurs
dans le traitement médical entraînant une aggravation
notable des séquelles de l'accident (ATF 115 V 139 sv.
consid. 6, 408 consid. 5).
     Il n'est pas nécessaire que soient réunis dans chaque
cas tous ces critères. Suivant les circonstances, un seul
d'entre eux peut être suffisant pour faire admettre l'exis-
tence d'une relation de causalité adéquate. Il en est ainsi
lorsque l'accident considéré apparaît comme l'un des plus
graves de la catégorie intermédiaire, à la limite de la
catégorie des accidents graves, ou encore lorsque le
critère pris en considération s'est manifesté de manière
particulièrement importante (ATF 115 V 140 consid. 6 c/bb,
409 consid. 5 c/bb).

     bb) En l'espèce, en dépit de la masse imposante d'un
rouleau compresseur, l'accident doit être rangé dans la
zone médiane de la catégorie des accidents de gravité
moyenne, au vu notamment de ses conséquences (contusions
par écrasement du pied et brûlures superficielles).
     Bien que relativement impressionnant, l'accident n'a
pas revêtu un caractère particulièrement dramatique. Par
ailleurs, le recourant ne s'est pas trouvé dans l'incapa-

cité de travailler pendant une durée particulièrement
longue, en rapport avec les lésions subies, puisqu'il a
recouvré une capacité de travail de 50 % dès le mois
d'avril 1998 et de 100 % à partir du mois d'octobre 1998 au
plus tard. Il a pu regagner son domicile cinq jours après
l'accident, lequel n'a nécessité qu'une surveillance neuro-
vasculaire du membre inférieur droit, la confection d'une
attelle plâtrée, puis d'une semelle plantaire, et une phy-
siothérapie. Un phlegmon a certes retardé le rétablissement
du pied droit, mais cette infection était guérie en janvier
1998. Le traitement médical, qui s'est poursuivi sous forme
de physiothérapie à la clinique Z.________ jusqu'en avril
1998, n'a donc pas été spécialement lourd, ni d'une durée
anormale. Il est vrai qu'un schwannome a été diagnostiqué
par la suite, ce qui a pu expliquer, au moins partielle-
ment, les douleurs à la hanche dont a souffert le recourant
dès le mois de janvier 1998. A cet égard, on peut se deman-
der dans quelle mesure les complications liées à cette tu-
meur, sans lien avec l'accident, doivent être prises en
considération pour apprécier la relation de causalité adé-
quate ici en cause. Cette question peut toutefois être
laissée ouverte, car même si on y répondait par l'affir-
mative, la durée globale du traitement médical, jusqu'à
l'excision du schwannome en juillet 1998, resterait infé-
rieure à une année. Dans ces conditions, un lien de causa-
lité adéquate entre l'accident assuré et d'éventuels
troubles psychiques doit être exclu, ce qui entraîne le
rejet du recours.

     5.- Le litige concerne l'octroi ou le refus de pres-
tations d'assurances, de sorte que la procédure est
gratuite (art. 134 OJ).
     Le recourant, qui n'a pas les moyens d'assumer ses
frais de défense par un avocat sans porter atteinte à son
minimum vital sera mis au bénéfice de l'assistance judi-
ciaire. Son recours n'était en effet pas dénué de chances
de succès et l'assistance d'un mandataire professionnel

était indiquée (art. 152 OJ, en relation avec l'art. 135
OJ; cf. également ATF 125 V 202 consid. 4a, 372 consid. 5b
et les références). Le recourant est toutefois rendu
attentif au fait qu'il devra rembourser la caisse du
tribunal s'il devient ultérieurement en mesure de le faire
(art. 152 al. 3 OJ).

    Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

                     p r o n o n c e :

  I. Le recours est rejeté.

 II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. L'assistance judiciaire est accordée à l'intimé. Les
     honoraires (y compris la taxe à la valeur ajoutée) de
     Me Morier-Genoud, avocat d'office, sont fixés à
     2000 fr. pour la procédure fédérale et seront suppor-
     tés par la caisse du tribunal.

 IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
     Tribunal des assurances du canton de Vaud, à la Caisse
     maladie-accidents Philos et à l'Office fédéral des
     assurances sociales.

Lucerne, le 19 octobre 2001

                                     Au nom du
                           Tribunal fédéral des assurances
                          Le Président de la IIIe Chambre :

                                    Le Greffier :