Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen U 126/2001
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U 126/01 Kt

                        IVe Chambre

MM. les juges Borella, Président, Rüedi et Kernen.
Greffier : M. Beauverd

                 Arrêt du 17 décembre 2001

                       dans la cause

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne, recourante,

                          contre

I.________, intimé, représenté par Me Pierre Vuille,
avocat, rue Bellot 9, 1206 Genève,

                            et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

     A.- I.________, né en 1937, a travaillé en qualité de
monteur de pneumatiques au service de la société
P.________ SA. A ce titre, il était obligatoirement assuré
contre le risque d'accident auprès de la Caisse nationale
suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA).
     Le 16 novembre 1997, il a été victime d'un accident de
la circulation, au cours duquel il a subi un arrachement
traumatique du tendon rotulien droit, blessure qui a néces-

sité une hospitalisation du 16 au 22 novembre 1997. La CNA
a pris en charge le cas.
     Par décision du 3 décembre 1999, confirmée par déci-
sion sur opposition du 15 juin 2000, elle a accordé à l'as-
suré, à partir du 1er juillet 1999, une rente d'invalidité
fondée sur un taux d'incapacité de gain de 33,33 %. En
outre, elle lui a alloué une indemnité pour atteinte à
l'intégrité fondée sur une diminution de l'intégrité de
10 %.

     B.- Saisi d'un recours, le Tribunal administratif du
canton de Genève a annulé la décision sur opposition, dans
la mesure où elle concerne le droit à la rente d'invalidi-
té. Il a renvoyé la cause à la CNA pour qu'elle fixe à
nouveau le taux d'incapacité de gain, après avoir complété
l'instruction au sujet du gain d'invalide.

     C.- La CNA interjette recours de droit administratif
contre ce jugement, en concluant à son annulation dans la
mesure où il admet partiellement le recours de l'assuré.
     I.________ conclut, sous suite de dépens, au rejet du
recours, ce que propose implicitement la juridiction
cantonale.
     L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à
se déterminer.

                  Considérant en droit :

     1.- Le litige porte sur le taux d'invalidité de l'in-
timé découlant des suites de l'accident du 16 novembre
1997.

     a) Le jugement entrepris expose de manière exacte et
complète les dispositions légales et les principes juris-
prudentiels relatifs à l'objet de l'assurance, à la causa-

lité naturelle et adéquate, ainsi qu'à la notion d'invali-
dité. Il suffit donc d'y renvoyer.

     b) En ce qui concerne le gain d'invalide, la jurispru-
dence considère qu'il doit être évalué avant tout en fonc-
tion de la situation professionnelle concrète de l'assuré.
Si l'activité exercée après la survenance de l'atteinte à
la santé repose sur des rapports de travail particulière-
ment stables, qu'elle met pleinement en valeur la capacité
de travail résiduelle exigible et que le gain obtenu, qui
correspond au travail effectivement fourni, ne contient pas
d'élément de salaire social, c'est le revenu effectivement
réalisé qui doit être pris en compte pour fixer le revenu
d'invalide (ATF 126 V 76 consid. 3b/aa, 117 V 18 con-
sid. 2c/aa, et les références).
     En l'absence d'un revenu effectivement réalisé - soit
lorsque l'assuré, après la survenance de l'atteinte à la
santé, n'a pas repris d'activité ou alors aucune activité
adaptée, normalement exigible -, le revenu d'invalide peut
être évalué sur la base des statistiques sur les salaires
moyens (ATF 126 V 76 consid. 3b/bb; RCC 1991 p. 332 s.
consid. 3c; Omlin, Die Invalidität in der obligatorischen
Unfallversicherung, thèse Fribourg 1995, p. 215). Dans ce
cas, certains empêchements propres à la personne de l'inva-
lide (limitations liées au handicap, âge, années de servi-
ce, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux
d'occupation) exigent que l'on réduise le montant des sa-
laires ressortant des statistiques (ATF 126 V 79 s. con-
sid. 5b/aa).
     Toutefois, de telles réductions ne doivent pas être
effectuées de manière schématique, mais doivent tenir
compte de l'ensemble des circonstances du cas particulier,
et cela dans le but de déterminer, à partir de données
statistiques, un revenu d'invalide qui représente au mieux
la mise en valeur économique exigible des activités compa-

tibles avec la capacité de travail résiduelle de l'inté-
ressé (ATF 126 V 80 consid. 5b/bb).
     Une déduction globale maximum de 25 % sur le salaire
statistique permet de tenir compte des différents éléments
qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative
(ATF 126 V 80 consid. 5b/cc).

     2.- a) Dans sa décision du 3 décembre 1999, confirmée
sur opposition le 15 juin 2000, la CNA a fixé à 3500 fr.
par mois (y compris la part au treizième salaire) le revenu
d'invalide que l'intimé pourrait réaliser dans une activité
adaptée faisant alterner les positions assise et debout,
avec déplacements en terrains plats, sans nécessité d'age-
nouillements ou d'accroupissements répétitifs ou surcharge
du membre inférieur droit. Elle s'est fondée pour cela sur
le rapport d'examen médical final (du 19 avril 1999) du
docteur M.________, médecin d'arrondissement.
     Dans le jugement entrepris, la juridiction cantonale a
considéré à juste titre que les séquelles de l'accident
assuré n'empêchent pas l'intimé d'exercer, en faisant l'ef-
fort que l'on est en droit d'attendre de lui, une activité
adaptée telle que décrite par le docteur M.________.
     En revanche, considérant que les activités proposées
par la recourante étaient inadéquates, elle a annulé la
décision litigieuse et renvoyé la cause pour nouvelle en-
quête économique et fixation du revenu d'invalide sur la
base de descriptions de postes de travail (DPT) compatibles
avec le handicap de l'intimé.

     b) S'il est vrai que deux des activités indiquées,
comme semble le concéder la recourante, n'apparaissent pas
tout à fait compatibles avec le handicap de l'intimé, il
n'en va pas de même pour les trois autres. En effet, comme
l'expose la recourante, même si l'alternance des positions
assise et debout apparaît possible - bien qu'à intervalles
espacés - dans une activité donnée, il faut considérer que

le poste décrit permet l'alternance des positions, cela
d'autant que l'entreprise en question autorise des pauses.
Par ailleurs, trois des activités proposées dans la déci-
sion litigieuse (DPT 1601, 1138 et 793), ainsi que trois
autres exemples indiqués à l'appui du recours, permettent
effectivement d'alterner les positions et d'effectuer des
pauses. Cela étant, les activités proposées par la recou-
rante apparaissent adaptées au handicap de l'intimé.
     Ainsi, c'est à tort que la juridiction cantonale a
annulé la décision administrative litigieuse et renvoyé la
cause à la recourante pour reprendre une instruction, qui
est en elle-même complète. Si elle ne s'estimait pas suffi-
samment renseignée sur les revenus susceptibles d'être
obtenus dans de telles activités, elle avait la possibilité
de se référer aux données statistiques, telles qu'elles
ressortent des enquêtes sur la structure des salaires de
l'Office fédéral de la statistique (ATF 126 V 77 con-
sid. 3b/bb).

     c) Le recours aux salaires statistiques est d'autant
plus approprié, lorsque l'assuré n'a pas - comme en l'espè-
ce - repris d'activité professionnelle. On se réfère alors
à la statistique des salaires bruts standardisés, en se
fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF
126 V 77 consid. 3b/bb, 124 V 323 consid. 3b/aa).
     En l'occurrence, le salaire de référence est celui
auquel peuvent prétendre les hommes effectuant des activi-
tés simples et répétitives dans le secteur privé, à savoir
4268 fr. par mois (Enquête 1998, tableau 1; niveau de qua-
lification 4). Ce salaire mensuel hypothétique représente,
compte tenu du fait que les salaires bruts standardisés
reposent sur un horaire de travail de quarante heures, soit
une durée hebdomadaire inférieure à la moyenne usuelle dans
les entreprises en 1999 (41,9 heures; La Vie économique
1999/8 annexe p. 27, tableau B 9.2), un revenu d'invalide
de 4470 fr. par mois (4268 X 41,9 : 40). Adapté à l'évolu-

tion des salaires de l'année 1999 (0,3 %, die Volkswirt-
schaft 3/2001 p. 101, tableau 10.2), il s'élève à 4484 fr.
par mois (4470 X 1,003).
     En l'espèce, les critères qui justifieraient une dé-
duction au sens de l'arrêt ATF 126 V 79 s. consid. 5b/aa-cc
ne sont pas véritablement remplis. Si l'on procédait néan-
moins à une déduction généreuse de 20 %, pour tenir compte
de certains empêchements propres à l'intimé, il en résulte-
rait un revenu d'invalide de 3587 fr. (4484 X 80 %), mon-
tant presque identique à celui du gain résiduel fixé par la
recourante.

     3.- Vu ce qui précède, celle-ci était fondée, par sa
décision sur opposition du 15 juin 2000, à fixer à 33,33 %
le taux d'incapacité de gain déterminant pour le calcul de
la rente allouée à l'intimé. Le recours se révèle ainsi
bien fondé.

    Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

                    p r o n o n c e  :

  I. Le recours est admis et le jugement du Tribunal admi-
     nistratif du canton de Genève du 6 mars 2001 est annu-
     lé.

 II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
     bunal administratif du canton de Genève et à l'Office
     fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 17 décembre 2001

                                      Au nom du
                           Tribunal fédéral des assurances
                          Le Président de la IVe Chambre :

                                    Le Greffier :