Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen U 124/2001
Zurück zum Index Sozialrechtliche Abteilungen 2001
Retour à l'indice Sozialrechtliche Abteilungen 2001


U 124/01 Tn

                        IIe Chambre

MM. les juges Lustenberger, Président, Meyer et Ferrari.
Greffier : M. Beauverd

                 Arrêt du 22 novembre 2001

                       dans la cause

D.________, recourant, représenté par Maître François
Berger, avocat, rue de l'Hôpital 7, 2001 Neuchâtel,

                          contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne, intimée,

                            et

Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, Neuchâtel

     A.- D.________, a travaillé en qualité de manoeuvre au
service de l'entreprise forestière X.________, à Enges. A
ce titre, il était obligatoirement assuré contre le risque
d'accident auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance
en cas d'accidents (CNA).
     Le 2 juin 1994, il a été victime d'un accident alors
qu'il construisait un mur en pierres sèches : il a fait un
brusque mouvement à gauche en tentant de retenir une pierre

d'un poids de 50 kg environ. Il a aussitôt ressenti une
violente douleur à l'épaule gauche. Les médecins consultés
ont fait état d'une scapula alata gauche, sur parésie du
muscle grand dentelé. La CNA a pris en charge le cas.
     Par décision du 9 décembre 1997, elle a alloué à l'as-
suré, à partir du 1er juillet 1997, une rente d'invalidité
fondée sur une incapacité de gain de 30 %, ainsi qu'une
indemnité pour atteinte à l'intégrité fixée en fonction
d'un taux d'atteinte de 15 %. L'opposition formée par l'as-
suré contre cette décision le 9 janvier 1998 a été retirée
le 7 avril suivant.

     B.- Le 26 novembre 1999, D.________ a requis la
révision de la rente et de l'indemnité pour atteinte à
l'intégrité dont il bénéficiait. A l'appui de sa requête,
il alléguait une aggravation de l'atteinte à la santé, en
se référant à un rapport du Centre d'observation médicale
de l'assurance-invalidité (COMAI), à Lausanne, du 7 sep-
tembre 1999.
     Par décision du 4 avril 2000, la CNA a rejeté la de-
mande de l'assuré. Saisie d'une opposition, elle l'a reje-
tée par décision du 30 juin 2000.

     C.- Par jugement du 5 mars 2001, le Tribunal adminis-
tratif du canton de Neuchâtel a rejeté le recours de l'as-
suré contre cette décision.

     D.- D.________ interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement, dont il demande l'annulation, en
concluant, sous suite de dépens, à l'octroi, dès le
1er janvier 1998, d'une rente d'invalidité fondée sur un
taux d'incapacité de gain de 60 % «ou ce que justice con-
naîtra», ainsi que d'une indemnité pour atteinte à l'inté-
grité fixée en fonction d'un taux de 50 % «ou ce que justi-
ce connaîtra».
     La CNA conclut implicitement au rejet du recours.

     L'Office fédéral des assurances sociales n'a pas pré-
senté de détermination.

                  Considérant en droit :

     1.- La décision du 9 décembre 1997, par laquelle l'in-
timée a alloué à l'assuré une rente d'invalidité de 30 %,
ainsi qu'une indemnité pour atteinte à l'intégrité fondée
sur un taux de 15 %, est entrée en force.

     a) Selon l'art. 22 al. 1, première phrase LAA, si le
degré d'invalidité du bénéficiaire de la rente subit une
modification déterminante, la rente est, pour l'avenir,
augmentée ou réduite proportionnellement, ou supprimée.
     Un changement important de l'état de santé peut donner
lieu à révision de la rente, s'il est de nature à modifier
le degré d'invalidité et les conditions du droit à la ren-
te. Pour déterminer si l'on est en présence d'une telle
modification de circonstances, il faut comparer l'état de
fait tel qu'il existait à l'époque où la décision de rente
a été rendue, dans l'hypothèse où celle-ci n'avait pas été
attaquée, ou en cas d'opposition formée par l'assuré, au
jour où l'assureur LAA a statué sur celle-ci, avec celui
qui se présentait lorsque la décision sur opposition liti-
gieuse concernant la révision a été rendue (RAMA 1989
n° U 65 p. 70). Lors de cette comparaison, seules sont
prises en compte les affections physiques et psychiques
découlant de l'événement assuré, ce qui suppose l'existence
non seulement d'un lien de causalité naturelle (ATF
119 V 337 consid. 1, 118 V 289 consid. 1b et les référen-
ces), mais également d'une relation de causalité adéquate
(ATF 123 III 112 consid. 3a, 123 V 103 consid. 3d, 139
consid. 3c, 122 V 416 consid. 2a et les références).

     b) Aux termes de l'art. 36 al. 4 OLAA, dans sa teneur
- applicable en l'occurrence - en vigueur depuis le

1er janvier 1998 (RO 1998 I 164), il sera équitablement
tenu compte des aggravations prévisibles de l'atteinte à
l'intégrité. Une révision (du droit à l'indemnité) n'est
possible qu'en cas exceptionnel, si l'aggravation est
importante et n'était pas prévisible.

     2.- Dans un rapport d'examen médical final (du 31 jan-
vier 1997), auquel l'intimée s'est référée pour allouer une
rente d'invalidité fondée sur un taux de 30 %, le docteur
A.________, médecin d'arrondissement, a fait état d'une
instabilité grave de l'omoplate gauche qui se décolle dès
que l'assuré bouge l'épaule. Du point de vue médico-thé-
orique, il a attesté une capacité de travail entière dans
une activité légère exercée à hauteur d'établi ou dans une
activité de contrôle ou de surveillance.
     De leur côté, les médecins du COMAI ont fait état,
dans leur rapport du 7 septembre 1999, des mêmes limita-
tions fonctionnelles de l'épaule gauche. En ce qui concerne
la capacité de travail dans une activité adaptée, ils se
sont référés explicitement à l'appréciation du médecin de
la CNA.
     Cela étant, force est de considérer qu'au cours de la
période déterminante, les lésions organiques dues à l'acci-
dent ne se sont pas modifiées au point de justifier la ré-
vision du droit à la rente ou celle du droit à l'indemnité
pour atteinte à l'intégrité. Au demeurant, sur ce point, le
jugement entrepris n'est pas sérieusement remis en cause
par le recourant.

     3.- En revanche, celui-ci allègue une péjoration de
son état de santé en raison de l'apparition de troubles de
nature psychique.

     a) Dans leur rapport précité, les médecins du COMAI
ont diagnostiqué des troubles cognitifs moyens après un
traumatisme cranio-cérébral (survenu plus de dix ans avant
l'accident assuré), des troubles affectifs bipolaires, un

état dépressif, un syndrome douloureux chronique et une
personnalité émotionnellement labile. Selon ces praticiens,
l'accident assuré a agi sur la personnalité de l'assuré
comme un facteur gravissime de stress émotionnel.
     Sur le vu de ce rapport d'expertise, il n'est pas pos-
sible de suivre le point de vue des premiers juges, selon
lequel il n'existe pas de relation de causalité naturelle
entre les troubles psychiques constatés - en particulier
l'état dépressif - et l'accident du 2 juin 1994. Certes, il
est incontestable que d'autres facteurs ont joué un rôle
dans l'apparition de ces troubles, comme le traumatisme
cranio-cérébral subi vers l'âge de 18 ans et les circons-
tances difficiles vécues durant l'enfance. Toutefois, selon
la jurisprudence, il n'est pas nécessaire que l'accident
soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé;
il faut et il suffit que l'événement dommageable, associé
éventuellement à d'autres facteurs, ait provoqué l'atteinte
à la santé physique ou psychique de l'assuré, c'est-à-dire
qu'il se présente comme la condition sine qua non de celle-
ci (ATF 119 V 337 consid. 1, 118 V 289 consid. 1b et les
références).

     b) Dans sa décision sur opposition litigieuse, la CNA
a classé l'accident - qualifié au demeurant d'événement
objectivement banal - dans la catégorie des accidents de
gravité moyenne en raison de l'atteinte organique relative-
ment grave dont il a été à l'origine.
     C'est oublier que, d'après la jurisprudence, c'est la
manière dont l'accident s'est déroulé qui détermine le
classement en trois catégories : les accidents insigni-
fiants ou de peu de gravité, les accidents graves et les
accidents de gravité moyenne (ATF 115 V 139 consid. 6, 408
consid. 5). Ce n'est que lorsque l'existence d'un accident
de gravité moyenne est avérée, qu'intervient la gravité des
lésions physiques en tant que critère objectif pour juger
du caractère adéquat du lien de causalité entre un tel

accident et l'incapacité de travail ou de gain d'origine
psychique (ATF 115 V 140 consid. 6c/aa, 409 consid. 5c/aa).

     c) Etant donné la manière dont il s'est déroulé, l'é-
vénement du 2 juin 1994 doit être classé dans la catégorie
des accidents de gravité moyenne, à la limite de la catégo-
rie des accidents peu graves. Dans ces conditions, les
critères à prendre en considération doivent se cumuler ou
revêtir une intensité particulière pour que le caractère
adéquat du lien de causalité puisse être admis (ATF
115 V 141 consid. 6c/bb, 410 consid. 5c/bb).
     Tel n'est toutefois pas le cas en l'espèce. En parti-
culier, les circonstances dans lesquelles s'est déroulé
l'accident apparaissent dénuées du caractère particulière-
ment dramatique ou impressionnant requis par la jurispru-
dence. Par ailleurs, force est de nier l'existence de dif-
ficultés apparues au cours de la guérison et d'une longue
période d'incapacité de travail due aux lésions physiques,
dès lors que les troubles psychiques ont eu assez tôt (cf.
rapports des docteurs B.________ du 23 janvier 1995 et
C.________ du 1er avril 1996) une influence déterminante
sur les plaintes de l'intéressé. Quant aux douleurs phy-
siques persistantes, si elles s'expliquent en partie par
une surcharge mécanique et une sollicitation non physio-
logique d'autres muscles, elles doivent être replacées dans
le cadre de la symptomatologie douloureuse qui a pris un
caractère central dans l'existence de l'assuré au point de
justifier le diagnostic de syndrome douloureux chronique
(cf. rapport du COMAI du 7 septembre 1999). Au demeurant,
ce seul critère ne permet pas de conclure à l'existence
d'une relation de causalité adéquate entre les troubles
psychiques constatés et un accident de gravité moyenne, à
la limite de la catégorie des accidents peu graves. Il
apparaît bien plutôt qu'au regard de l'ensemble des fac-
teurs de nature à entraîner les troubles psychiques, l'évé-
nement accidentel n'a pas eu une importance déterminante
dans le déclenchement de ces troubles.

     d) Vu ce qui précède, les troubles psychiques consta-
tés ne justifient pas la révision du droit à la rente ni
celle du droit à l'indemnité pour atteinte à l'intégrité.

     4.- Cela étant, le jugement entrepris n'est pas criti-
quable dans son résultat et le recours se révèle mal fondé.

    Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

                     p r o n o n c e :

  I. Le recours est rejeté.

 II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
     bunal administratif du canton de Neuchâtel et à l'Of-
     fice fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 22 novembre 2001

                                 Au nom du
                          Tribunal fédéral des assurances
                          Le Président de la IIe Chambre :

                               Le Greffier :