Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen K 7/2001
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K 7/01 Kt

                       Ière Chambre

MM. et Mme les juges Schön, Président, Borella, Widmer,
Ursprung et Frésard; Greffière : Mme Moser-Szeless

                 Arrêt du 25 janvier 2002

                       dans la cause

R.________, recourante,

                          contre

Mutuelle Valaisanne, rue du Nord 5, 1920 Martigny, intimée,

                            et

Tribunal cantonal des assurances, Sion

     A.- a) R.________, née en 1974, est affiliée à la
Mutuelle Valaisanne, notamment pour l'assurance obligatoire
des soins.
     Le 13 août 1998, son médecin-dentiste traitant, le
docteur V.________, a informé la caisse-maladie que sa
patiente présentait une atteinte bucco-dentaire de type
parodontite juvénile agressive atteignant une grande partie
de son système masticatoire et compromettant à très court
terme sa fonction manducatrice par la perte inéluctable
d'une partie de ses dents naturelles. Il demandait implici-

tement la prise en charge du traitement proposé : d'une
part, pour la réhabilitation maxillaire (secteur supé-
rieur), une "greffe de sinus par apport osseux à partir des
hanches ou du menton, pose de six implants maxillaires,
réalisation de pont vissé sur implants"; d'autre part, pour
la réhabilitation mandibulaire (secteur inférieur), une
"greffe osseuse d'apport mentonnier, pose d'un implant,
réalisation d'une couronne céramo-métallique scellée sur
implant". Selon l'estimation établie par le praticien à
l'intention de la caisse-maladie, les honoraires pour les
soins prévus s'élevaient à un total de 28 808 fr. 20, à
savoir 6228 fr. pour le secteur inférieur et 22 580 fr. 20
pour le secteur supérieur, sans compter ici les frais liés
à l'intervention d'un spécialiste ORL en milieu hospitalier
afin de réaliser la greffe de sinus et un prélèvement os-
seux à partir de la hanche pour assurer la greffe (lettre
reçue par la Mutuelle Valaisanne le 26 octobre 1998).

     b) Après avoir, dans un premier temps, le 22 décembre
1998, refusé la prise en charge du traitement dentaire
envisagé, la Mutuelle Valaisanne a procédé à une instruc-
tion complémentaire, notamment auprès de son dentiste-con-
seil, le docteur D.________. Ce praticien a estimé que le
traitement proposé par le docteur V.________ "est un trai-
tement à risque chez une jeune patiente souffrant de graves
problèmes parodontaux" et a proposé, en cas de succès du
traitement parodontal (débridement parodontal conventionnel
systématique [curetage, curetage profond et polissage radi-
culaire]), la confection de deux prothèses amovibles à
châssis coulés (rapport du 20 octobre 1999). Se fondant sur
cet avis, la Mutuelle Valaisanne a, le 22 mars 2000, signi-
fié à l'assurée son refus, qu'elle a confirmé par décision
sur opposition du 7 juillet 2000, de prendre en charge le
traitement préconisé par le docteur V.________, motif pris
qu'il n'est ni approprié, ni économique. En revanche, elle
acceptait de prendre en charge le traitement proposé par le

docteur D.________ dont les coûts s'élevaient à 7988 fr. 25
selon un devis détaillé du 6 juillet 2000.

     B.- Le recours formé par R.________ devant le Tribunal
administratif du canton du Valais a été rejeté par jugement
du 5 décembre 2000.

     C.- R.________ interjette recours de droit admi-
nistratif contre ce jugement et conclut à son annulation
ainsi qu'à la mise en oeuvre d'une expertise.
     La Mutuelle Valaisanne conclut au rejet du recours,
alors que l'Office fédéral des assurances sociales a renon-
cé à se déterminer.

                  Considérant en droit :

     1.- a) Aux termes de l'art. 31 al. 1 LAMal, l'assuran-
ce obligatoire des soins prend en charge les coûts des
soins dentaires s'ils sont occasionnés par une maladie
grave et non évitable du système de la mastication
(let. a), ou s'ils sont occasionnés par une autre maladie
grave ou ses séquelles (let. b), ou s'ils sont nécessaires
pour traiter une maladie grave ou ses séquelles (let. c).
     Selon l'art. 17 OPAS, qui a été édicté en application
de l'art. 31 al. 1 let. a LAMal, l'assurance prend en char-
ge, à condition que l'affection puisse être qualifiée de
maladie et dans la mesure où le traitement de l'affection
l'exige, les soins dentaires occasionnés par les maladies
graves et non évitables suivantes du système de la mastica-
tion :

     a. ...;
     b. maladies de l'appareil de soutien de la dent
        (parodonthopaties):

         1. parodontite pré pubertaire,
         2. parodontite juvénile progressive,
         3. effets secondaires irréversibles de médica-
             ments;
     c. ...;
     d. ...;
     e. ...;
     f. ...;

     b) En l'espèce, il n'est pas contesté que la recouran-
te souffre d'une parodontite juvénile progressive, affec-
tion figurant sur la liste de l'art. 17 OPAS, sous let. b,
ch. 2. Les premiers juges semblent certes mettre en doute
le caractère inévitable de l'affection dont elle est at-
teinte. Toutefois, selon la jurisprudence, les maladies du
système de la mastication mentionnées à l'art. 17 OPAS sont
à considérer, en vertu de cette ordonnance, comme maladies
non évitables (SVR 1999 no KV 11 p. 25 consid. 1b/aa). Dès
lors, il n'y a pas lieu d'examiner dans le cas particulier
si une maladie du système de mastication, énumérée à
l'art. 17 OPAS, aurait peut-être pu être évitée en tout ou
partie (SVR 1999 no KV 11 p. 25 consid. 1b/aa et la doctri-
ne citée).
      On peut donc retenir que la recourante souffre d'une
maladie grave et non évitable du système de la mastication
qui justifie, au regard de l'art. 31 al. 1 let. a LAMal, la
prise en charge par l'assurance-maladie du traitement de
l'affection. D'autre part, le rétablissement de la capacité
de mastication, à l'aide de moyens prothétiques, fait par-
tie du traitement complet de la maladie grave et non évita-
ble au sens des art. 31 al. 1 let. a LAMal et 17 OPAS,
raison pour laquelle on ne saurait lui contester le carac-
tère de prestation obligatoire (ATF 125 V 20 consid. 3a).
L'obligation d'une prise en charge par les assureurs-mala-
die implique cependant que toutes les exigences légales

requises soient remplies (art. 32 al. 1 LAMal; ATF
124 V 200 consid. 3).

     2.- Aux termes de l'art. 32 al. 1 LAMal, les presta-
tions mentionnées aux articles 25 à 31 doivent être effica-
ces, appropriées et économiques. L'efficacité doit être
démontrée selon des méthodes scientifiques. L'économie du
traitement peut prêter à discussion en matière de traite-
ments prothétiques, étant donné l'éventail des prestations
- plus ou moins onéreuses - qu'offre en ce domaine la méde-
cine dentaire (Gebhard Eugster, Aspects des soins dentaires
selon l'art. 31 al. 1 LAMal à la lumière du droit de l'as-
surance-maladie [traduction française de Beat Raemy] in :
Revue mensuelle suisse d'odontostomatologie, vol. 107
[1997], p. 122; étude également publiée dans LAMal-KVG,
Recueil de travaux en l'honneur de la Société suisse de
droit des assurances, Lausanne 1997, p. 227 ss, p. 248). Si plu-
sieurs traitements sont donc envisageables, il y a lieu de
procéder à une balance entre coûts et bénéfices du traite-
ment. Si l'un d'entre eux permet d'arriver au but recherché
(en l'occurrence le rétablissement de la fonction mastica-
toire) en étant sensiblement meilleur marché que les au-
tres, l'assuré n'a pas droit au remboursement des frais du
traitement le plus onéreux (ATF 124 V 200 consid. 3 et
références citées; voir aussi arrêt M. du 19.09.2001,
K 73/98, publié in Plädoyer 2001 no 6 p. 71, destiné à la
publication au Recueil officiel, consid. 7b).

     3.- Le litige porte sur le point de savoir si la re-
courante peut prétendre au remboursement du traitement
préconisé par le docteur V.________, étant précisé que les
frais d'assainissement parodontal sont à la charge de l'in-
timée, ce que celle-ci admet au demeurant.

     a) En l'espèce, le médecin-dentiste traitant de la
recourante considère comme nécessaire la pose d'implants et
de couronnes céramo-métalliques, à la suite d'une greffe
osseuse. Il exclut, pour la partie supérieure de la mâchoi-
re, une réhabilitation prothétique fixe traditionnelle, en
raison de la perte des dents des secteurs postérieurs en
arrière des canines (lettre du 13 août 1998 à l'intimée).
Par ailleurs, il constate que la pose d'un implant est la
seule possibilité, à moyen terme, d'éviter à sa patiente
une prothèse amovible au maxillaire supérieur (lettre du
4 mai 1998 à la recourante).
     En revanche, le dentiste-conseil de la caisse-maladie
estime que le traitement préconisé par son confrère présen-
te des risques chez une jeune patiente souffrant de graves
problèmes parodontaux et propose, conformément aux recom-
mandations de la Société suisse d'odontostomatologie (ci-
après : SSO), la confection de deux prothèses amovibles à
châssis coulés en cas de succès du traitement parodontal
(rapport du 20 octobre 1999). Dans sa prise de position, le
dentiste-conseil se contente toutefois d'émettre des réser-
ves quant au traitement en cause, sans en expliquer les
raisons. Le simple renvoi à l'Atlas de la SSO (version
1996) ne permet pas d'étayer son avis, puisque la référence
citée ne contient aucune indication quant aux risques éven-
tuels d'un traitement par implants pour un jeune patient.
     Se prononçant sur les mesures préconisées par le doc-
teur D.________, le médecin-dentiste traitant est d'avis
que le système prothétique constitue une solution inadé-
quate et inconvenable pour une personne de l'âge de la
recourante, sans motiver davantage sa position (lettre du
6 janvier 2000 à la recourante). Il relève en outre que ce
type de prothèse comporte un risque de sollicitation exa-
gérée des dents antérieures supérieures de sa patiente, ce
qui pourrait, à long terme, entraîner de nouvelles inter-
ventions. Il suggère à tout le moins, pour la maxillaire
inférieure, la pose d'une prothèse fixée ou collée.

     b) Sur la base de ces appréciations, il n'est pas
possible d'affirmer que le traitement envisagé par le doc-
teur V.________ est inadéquat. En effet, on ne saurait,
sans autres motifs, écarter l'avis du médecin-dentiste
traitant au profit de celui du dentiste-conseil de la
caisse, qui n'a pas étayé plus avant ses affirmations. D'un
autre côté, le traitement envisagé par le dentiste-conseil,
soit un système de prothèses amovibles, n'apparaît pas non
plus inapproprié dans ce cas, d'autant que le docteur
V.________ reconnaît que la prothèse amovible constituerait
la seule alternative à la pose d'un implant pour le traite-
ment de la maxillaire supérieure de sa patiente. Dans ces
circonstances, on peut donc admettre que les deux types de
mesures préconisées sont appropriés et efficaces au regard
du but recherché par le traitement, à savoir le rétablisse-
ment de la fonction masticatoire de la recourante. L'exper-
tise requise par la recourante se révèle dès lors inutile.

     c) Sous l'angle de la condition de l'économicité
(supra consid. 2), on constate que le traitement par im-
plants est nettement plus coûteux que celui par prothèses
amovibles. En effet, selon les devis versés au dossier, les
frais en sont près de quatre fois supérieurs à ceux des
mesures envisagées par le dentiste-conseil de l'intimée,
sans compter les coûts de l'intervention en milieu hospita-
lier, liée à la greffe osseuse.
     Il est vrai que, par rapport au traitement par prothè-
ses amovibles, le traitement par implants présente des
avantages sur les plans de l'esthétique et du confort, tout
en assurant éventuellement aussi un meilleur résultat en ce
qui concerne la fonction masticatoire. Toutefois, sous
l'angle des désagréments pour la patiente, la différence
entre les deux types de traitement n'est pas si sensible en
l'occurrence qu'elle justifierait d'admettre la prise en
charge du traitement le moins économique (cf. François-X.
Deschenaux, Le précepte de l'économie de traitement dans

l'assurance-maladie sociale, en particulier en ce qui con-
cerne le médecin, in : Mélanges pour le 75ème anniversaire
du Tribunal fédéral des assurances, Berne 1992, p. 536;
voir aussi Gebhard Eugster, Das Wirtschaftlichkeitsgebot
nach Art. 56 Abs. 1 KVG, in : Wirtschaftlichkeitskontrolle
in der Krankenversicherung, St-Gall 2001, p. 40 sv.).
     Par conséquent, le traitement au moyen d'implants ne
peut en l'occurrence pas être considéré comme économique au
sens de l'art. 32 al. 1 LAMal, si bien que la recourante
n'a pas droit à sa prise en charge.

     4.- Dans ces circonstances, le recours de droit admi-
nistratif est mal fondé. Il n'appartient cependant pas au
Tribunal fédéral des assurances de se prononcer sur le
montant des frais de traitement que l'intimée devra assu-
mer. Celle-ci devra fixer, sur la base des coûts occasion-
nés par un traitement au moyen de prothèses amovibles, les
prestations qu'elle est tenue de rembourser. A cette occa-
sion, elle examinera aussi, sous l'angle du principe de
l'économicité, la prise en charge, comme alternative, d'une
prothèse fixe ou collée pour le secteur inférieur de la
mâchoire de la recourante, telle que suggérée par son méde-
cin-dentiste traitant (supra consid. 3a in fine).

    Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances,

                     p r o n o n c e :

  I. Le recours est rejeté.

 II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
     bunal cantonal des assurances du canton du Valais et à
     l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 25 janvier 2002

                                      Au nom du
                           Tribunal fédéral des assurances
                          Le Président de la Ière Chambre :

                                   La Greffière :