Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen K 110/2001
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K 110/01 Tn

                        IIe Chambre

MM. et Mme les juges Schön, Président, Widmer et Frésard.
Greffière : Mme Berset

                 Arrêt du 17 janvier 2002

                       dans la cause

ASSURA, Assurance maladie et accident, Avenue C.-F.
Ramuz 70, 1009 Pully, recourante,

                          contre

H.________, intimée,

                            et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

     A.- H.________ est assurée pour les soins médicaux et
pharmaceutiques en cas de maladie auprès de la caisse-
maladie ASSURA. Au mois de juin 2000, elle a transmis à
cette caisse une facture de la pharmacie X.________ d'un
montant de 4703 fr. 55. ASSURA a accepté de prendre en
charge le montant facturé après déduction de la franchise
annuelle de 400 fr. et d'une participation aux coûts
(quote-part) de 430 fr. 30. Le montant en faveur de l'as-
surée s'élevait ainsi à 3873 fr. 25.

     Le 26 juin 2000, au cours d'un entretien téléphonique,
H.________ a informé la caisse qu'elle avait obtenu de la
pharmacie X.________, sur présentation du décompte de pres-
tations établi par son assureur, le remboursement de la
participation aux coûts de 10 pour cent.
     Par lettre du 30 juin 2000, ASSURA a informé son assu-
rée qu'elle renonçait exceptionnellement à lui demander la
restitution de la somme remboursée par la pharmacie
X.________. Cependant, à l'avenir, elle déduirait 10 pour
cent des frais pharmaceutiques facturés par cette pharma-
cie. Après un échange de correspondance avec son assurée,
la caisse a rendu une décision, le 2 octobre 2000, par
laquelle elle a confirmé sa position.
      Saisie d'une opposition, elle l'a rejetée, par une
nouvelle décision, du 3 janvier 2001. Cette décision pré-
cisait que dans le système mis en place par le groupe des
«Pharmaciens solidaires» (auquel semble appartenir la phar-
macie X.________), l'assuré ne supportait plus la quote-
part de 10 pour cent, ce qui était de nature à contourner
la volonté du législateur de mettre à la charge de l'assuré
cette participation aux coûts. Par conséquent, il se justi-
fiait d'opérer une réduction de 10 pour cent sur les futurs
remboursements de médicaments facturés à l'assurée par la
pharmacie en question.

     B.- H.________ a recouru contre cette décision. Sta-
tuant le 12 juillet 2001, le Tribunal des assurances du
canton de Vaud a admis le recours et a annulé les décisions
précédentes. Il a considéré que le procédé mis en place par
les «Pharmaciens solidaires» était contraire à la loi dans
la mesure où il éludait les dispositions légales relatives
à la participation aux coûts à la charge des assurés. Ce-
pendant, aucune disposition légale n'autorisait la caisse à
déduire 10 pour cent des frais facturés par les «Pharma-
ciens solidaires» avant de calculer le montant de ses pres-
tations.

     C.- ASSURA interjette un recours de droit administra-
tif dans lequel elle conclut à l'annulation du jugement
cantonal et demande au Tribunal fédéral des assurances de
constater que c'est à juste titre «que l'assureur déclare
déduire, à l'avenir, de ses prestations, le montant de la
quote-part de 10 % lorsqu'il est établi que l'assurée en
obtient le remboursement sur présentation du décompte par
la pharmacie X.________».
     H.________ ne s'est pas déterminée sur le recours.
Quant à l'Office fédéral des assurances sociales, il pro-
pose de l'admettre.

                  Considérant en droit :

     1.- Le Tribunal fédéral des assurances examine d'offi-
ce les conditions de recevabilité du recours, sans égard
aux conclusions ou aux arguments des parties. Son examen
porte également sur les conditions formelles de validité et
de régularité de la procédure administrative (voir par ex.
ATF 125 V 23 consid. 1a et la jurisprudence citée).

     2.- Dans sa décision sur opposition, la caisse recou-
rante n'a pas exigé de l'intimée le remboursement du mon-
tant versé à celle-ci par la pharmacie X.________. Cette
décision constitue en fait une déclaration d'intention
relative à d'éventuels remboursements futurs par cette
pharmacie et, plus généralement, par une pharmacie du grou-
pe «Pharmaciens solidaires».
     La question se pose donc de savoir si la recourante
était en droit de rendre une telle décision en constata-
tion, susceptible de recours, sur d'éventuels droits futurs
de l'intimée. Le premier juge, qui a examiné cette ques-
tion, l'a résolue par l'affirmative en se référant à l'ar-
rêt ATF 114 Ib 190. Il ressort en bref de cet arrêt que la
décision de principe définissant l'attitude de l'autorité à

l'avenir peut, sous certaines conditions, faire l'objet
d'un recours de droit administratif au Tribunal fédéral.

     a) La recevabilité d'une demande en constatation sup-
pose un intérêt digne de protection, qui n'existe que lors-
que le requérant a un intérêt actuel, de droit ou de fait,
à la constatation immédiate de son droit, sans que s'y op-
posent de notables intérêts publics ou privés, et à con-
dition que cet intérêt digne de protection ne puisse pas
être préservé au moyen d'une décision formatrice, c'est-à-
dire constitutive de droits ou d'obligations (ATF 121 V 317
sv. consid. 4a et les références; Alfred Kölz/Isabelle
Häner, Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des
Bundes, 2ème éd., 1998, p. 75 ch. 201). Les décisions en
constatation ne peuvent avoir pour objet de trancher des
questions de droit de manière théorique et dans l'abstrait.
Elles ont un caractère subsidiaire, c'est-à-dire qu'en
principe elles ne sont prises qu'en cas d'impossibilité
d'obtenir une décision formatrice (ATF 126 II 303 con-
sid. 2c et les références, 119 V 13 consid. 2a).
     En matière de prestations futures, l'existence d'un
intérêt digne de protection est toutefois admise lorsque le
justiciable serait enclin, en raison de l'ignorance de ses
droits ou obligations, à prendre des dispositions ou au
contraire à y renoncer avec le risque de subir un préjudice
de ce fait (ATF 118 V 102 consid. 1). Dans le domaine de
l'assurance-maladie plus précisément, l'intérêt digne de
protection à la constatation immédiate de l'étendue de
prestations assurées fait généralement défaut s'agissant
d'une demande d'un requérant formée dans l'abstrait, indé-
pendamment de la nécessité, plus ou moins imminente, d'un
traitement médical ou d'un séjour hospitalier (ATF 125 V 24
consid. 1b).

     b) Dans le cas particulier, on ne voit pas que l'inti-
mée ait eu un intérêt actuel à obtenir une décision en
constatation, dans la mesure où la caisse renonçait à exi-

ger de sa part un quelconque remboursement. D'autant qu'il
n'est pas certain que le problème se posera à nouveau dans
le futur entre les parties et que, s'il se pose, ce sera en
des termes identiques. C'est ainsi que le Parlement a adop-
té le 24 mars 2000 l'art. 64 al. 8 LAMal, entré en vigueur
le 1er janvier 2001. Selon cette disposition, la participa-
tion aux coûts ne peut être assurée ni par une caisse-mala-
die, ni par une institution d'assurance privée; il est
également interdit aux associations, aux fondations ou à
d'autres institutions de prévoir la prise en charge des
coûts. Par l'adoption de cette norme, le législateur, pré-
cisément, a voulu interdire aux personnes morales et aux
autres institutions visées des pratiques  semblables à la
pratique ici en cause (message du Conseil fédéral concer-
nant l'arrêté fédéral sur les subsides fédéraux dans l'as-
surance-maladie et la révision partielle de la loi fédérale
sur l'assurance-maladie, FF 1999 I 774). La recourante, par
ailleurs, ne prétend pas que des factures de pharmacie en
suspens concernant l'intimée (établies avant ou après le
1er janvier 2001) devraient encore faire l'objet d'un rem-
boursement. Du reste, dans sa réponse au recours de droit
cantonal, la recourante, après avoir exposé qu'elle avait
renoncé à exiger de l'assurée le remboursement de la parti-
cipation prise en charge par la pharmacie Victoria, a émis
- à juste titre - des doutes sur l'intérêt de l'intimée à
recourir, attendu qu'«à ce jour (23 mars 2001) aucune (nou-
velle) facture émanant de la pharmacie X.________ n'a été
remise à l'assureur».
      Enfin, les circonstances de l'espèce sont différentes
de celles qui sont à la base de l'arrêt ATF 114 Ib 190.
Dans cette affaire, l'autorité avait informé une société
importatrice qu'elle ne lui délivrerait plus d'autorisa-
tions spéciales pour des convois routiers dont le poids et
les dimensions excéderaient certaines limites. Cette déci-
sion touchait immédiatement et concrètement la société en
question dans la mesure où elle se plaignait de ne plus
pouvoir importer des baraquements préfabriqués de grandes

dimensions. La décision pouvait donc faire l'objet d'un
recours immédiat, sans que l'administré dût attendre le
refus d'une autorisation particulière. En l'occurrence, la
situation est tout à fait différente. La survenance de nou-
veaux litiges entre les mêmes parties n'est que virtuelle
et le recours de droit administratif ne saurait donc être
utilisé à la seule fin d'obtenir une solution à des pro-
blèmes juridiques abstraits.

     3.- Dans ces conditions, la déclaration d'intention de
la caisse ne pouvait pas faire l'objet d'une décision en
constatation. Il convient donc d'annuler aussi bien le
jugement attaqué que la décision sur opposition du 3 jan-
vier 2001 (cf. ATF 126 II 520 consid. 3f in fine).

    Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances,

                     p r o n o n c e :

  I. Le recours est admis en ce sens que le jugement du
     Tribunal du 12 juillet 2001 et la décision sur
     opposition de la caisse-maladie ASSURA du 3 janvier
     2001 sont annulés.

 II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
     Tribunal des assurances du canton de Vaud et à
     l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 17 janvier 2002

                                 Au nom du
                          Tribunal fédéral des assurances
                          Le Président de
                          la IIe Chambre :   La Greffière :